Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MV c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 867

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Parties appelante : M. V.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (447710) datée du 2 octobre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 8 mars 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 24 mars 2023
Numéro de dossier : GE-22-3580

Sur cette page

Décision

[1] M. V. est l’appelant dans cette affaire. Je rejette son appel.

[2] La Commission de l’assurance-emploi a démontré qu’il a reçu 2 000 $ en trop dans le cadre de la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[3] La loi prévoit que toute personne doit rembourser un trop-payé de prestation d’assurance-emploi d’urgence. Par conséquent, je ne vais pas réduire ni annuler le trop-payé.

Aperçu

[4] Le 30 mars 2020, l’appelant a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi. La Commission a accepté de lui verser la prestation d’assurance-emploi d’urgence à partir du 29 mars 2020Note de bas de page 1.

[5] Le 6 avril 2020, l’appelant a reçu un paiement anticipé de 2 000 $. Le gouvernement du Canada versait 2 000 $ à l’avance pour que les prestataires canadiens reçoivent de l’argent le plus vite possible pendant la pandémie mondiale de COVID-19Note de bas de page 2. Ce paiement équivaut à 4 semaines de prestation (4 × 500 $ = 2 000 $).

[6] L’appelant a aussi reçu 500 $ par semaine pendant les 10 semaines du 29 mars au 6 juin 2020 (10 × 500 $ = 5 000 $). Il a ensuite arrêté de présenter des déclarations après son retour au travail à temps plein le 7 juin 2020.

[7] La Commission a fait un examen et a établi que l’appelant avait reçu un total de 7 000 $, soit 14 semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence (14 × 500 $ = 7 000 $). Cependant, l’appelant a prouvé qu’il avait droit à 10 semaines seulement, du 29 mars au 6 juin 2020 (10 × 500 $ = 5 000 $). La Commission a donc conclu qu’il avait reçu 2 000 $ de trop.

[8] La Commission explique que, comme l’appelant n’a pas fait de demande après le 7 juin 2020, elle n’a pas été en mesure de récupérer le paiement anticipé sur les semaines de prestations subséquentes qui auraient pu être payables. Par conséquent, l’appelant a un trop-payé de 2 000 $ à rembourser.

[9] L’appelant a demandé à la Commission de réviser sa décision. Il a confirmé avoir reçu 7 000 $ de la prestation d’assurance-emploi d’urgence. La Commission a maintenu sa décision, à savoir qu’il avait un trop-payé de 2 000 $ à rembourser.

[10] L’appelant n’est pas d’accord avec la Commission. Il fait appel au Tribunal de la sécurité sociale.

Questions que je dois examiner en premier

Ajournement

[11] L’audience devait commencer le 21 décembre 2022. Elle a été ajournée au 7 mars 2023 pour permettre à l’appelant de mieux se préparer.

[12] L’appelant a fait appel le 24 octobre 2022 et a demandé une audience en personne. L’audience devait avoir lieu 2 mois plus tard, soit le 21 décembre 2022. Le 12 décembre 2022, l’appelant a envoyé un courriel pour demander que l’audience soit reportée de 9 à 12 mois.

[13] J’ai accepté de reporter l’audience au 7 mars 2023. Mais j’ai aussi remplacé l’audience en personne du 21 décembre 2022 par une conférence préparatoire par téléconférence. Ce jour-là, nous avons discuté entre autres du processus d’audience, de sa demande d’ajournement pour une longue période, de son horaire, des efforts qu’il avait faits jusqu’à maintenant pour préparer sa preuve et ses observations, et des prochaines étapesNote de bas de page 3.

[14] J’ai tenu une deuxième conférence préparatoire le 25 janvier 2023. L’appelant a ainsi pu me faire part de ce qu’il avait fait pour se préparer à l’audience et me dire s’il avait trouvé de l’aide ou une personne pour le représenter. Nous avons aussi parlé du déroulement de l’audience en personne, pendant les heures normales de travail, le 7 mars 2023.

[15] Le 27 février 2023, l’appelant a écrit au Tribunal. Il a demandé que l’audience en personne du 7 mars 2023 se déroule par téléconférence à la même date, mais après 16 h 30. J’ai accueilli sa demande et reporté l’audience à 17 h le 7 mars 2023. Elle aurait lieu par téléconférence.

[16] À l’audience du 7 mars 2023, l’appelant a expliqué qu’il ne ressentait plus le besoin d’être représenté. Après quelques précisions, l’appelant a dit qu’il comprenait qu’il n’y avait aucune contestation juridique dans le cadre des questions en litige. Il souhaitait donc procéder à l’audience du 7 mars 2023 sans être représenté. Il a ajouté qu’il pourrait être représenté si son appel passe à la troisième étape, devant la cour.

[17] De plus, l’appelant a déclaré que le dossier était complet. Selon lui, le Tribunal avait tous les documents requis, alors il souhaitait procéder à la téléconférence du 7 mars 2023 comme prévu. L’audience a donc eu lieu. Je vais maintenant rendre une décision sur le fond.

Questions en litige

[18] L’appelant aurait-il pu recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi pour sa demande du 30 mars 2020?

[19] La Commission a-t-elle le pouvoir d’établir un trop-payé de prestation d’assurance-emploi d’urgence?

[20] La Commission a-t-elle fait son examen dans le délai prescrit?

[21] L’appelant est-il obligé de rembourser le trop-payé?

Analyse

L’appelant aurait-il pu recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi pour sa demande du 30 mars 2020?

[22] Non. L’appelant ne pouvait pas recevoir de prestations régulières d’assurance-emploi. La Commission devait lui verser la prestation d’assurance-emploi d’urgence à raison de 500 $ par semaine. Voici ce dont j’ai tenu compte.

[23] L’appelant affirme qu’il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi et que c’est ce qu’il aurait dû recevoir, à un taux plus élevé. Il dit qu’il n’a pas demandé la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Il a fait valoir qu’il a été licencié et qu’il devrait donc avoir droit aux prestations régulières.

[24] La loi prévoit que toute demande de prestations régulières d’assurance-emploi établie entre le 15 mars et le 26 septembre 2020 était traitée comme une demande de prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 4. Par conséquent, ce type de prestation était obligatoire pour toute demande qui commençait pendant cette période.

[25] La loi prévoit aussi que la prestation d’assurance-emploi d’urgence est de 500 $ par semaineNote de bas de page 5. L’appelant ne peut donc pas demander un taux de prestations hebdomadaires plus élevé.

[26] La loi ne permettait pas à l’appelant de choisir entre les prestations régulières d’assurance-emploi et la prestation d’assurance-emploi d’urgence. La loi ne donnait pas non plus à la Commission le pouvoir discrétionnaire de verser des prestations régulières d’assurance-emploi au lieu de la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[27] L’appelant a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 30 mars 2020. Il ne fait aucun doute que sa demande a été établie dans la période de la prestation d’assurance-emploi d’urgence du 15 mars au 26 septembre 2020. Il devait donc recevoir la prestation d’assurance-emploi d’urgence de 500 $ par semaine.

[28] Après avoir examiné les faits que j’ai mentionnés ci-dessus, je conclus que l’appelant n’était pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi selon sa demande présentée le 30 mars 2020. La Commission a établi à juste titre qu’il allait recevoir la prestation d’assurance-emploi d’urgence de 500 $ par semaine.

Pouvoir d’établir un trop-payé de prestation d’assurance-emploi d’urgence

[29] J’estime que la Commission avait le pouvoir de décider si l’appelant avait un trop-payé. Pour tirer cette conclusion, j’ai tenu compte de ce qui suit.

[30] La loi prévoit que si une personne reçoit des versements de prestation d’assurance-emploi d’urgence auxquels elle n’était pas admissible, la Commission calcule la somme payée en trop et en avertit la personne viséeNote de bas de page 6.

[31] La Loi sur l’assurance-emploi établit que la prestation d’assurance-emploi d’urgence est versée à une personne qui en fait la demande et qui y est admissibleNote de bas de page 7.

[32] Il y a des délais précis pour présenter des demandes. La loi prévoit qu’une demande de prestation d’assurance-emploi d’urgence doit être présentée avant le 2 décembre 2020Note de bas de page 8.

[33] Les prestataires qui étaient admissibles à la prestation d’assurance-emploi d’urgence et qui présentaient leurs déclarations en temps requis avaient droit à 500 $ pour chaque semaine de chômage viséeNote de bas de page 9.

[34] L’appelant ne conteste pas que le 20 novembre 2021, la Commission lui a envoyé un avis de dette l’informant d’un trop-payé de 2 000 $. Il ne conteste pas non plus avoir reçu le paiement anticipé de 2 000 $, ce qui porte à 7 000 $ la somme totale de prestation d’assurance-emploi d’urgence reçue.

[35] La preuve montre que l’appelant était admissible et qu’il a fait des demandes pour 10 semaines de chômage entre le 29 mars et le 6 juin 2020. Il avait donc droit à 5 000 $ de prestation d’assurance-emploi d’urgence pour ces 10 semaines (10 × 500 $ = 5 000 $).

[36] Je considère que l’appelant n’avait plus droit à la prestation d’assurance-emploi d’urgence après son retour au travail à temps plein le 7 juin 2020. Même s’il y était peut-être admissible, il n’a présenté aucune déclaration après le 7 juin 2020. Par conséquent, il n’avait droit à aucune semaine de plus de prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[37] Je reconnais que l’appelant croit avoir été sous-payé parce qu’il aurait dû recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi. Cela ne change rien au fait qu’il avait seulement droit à 5 000 $ de prestation d’assurance-emploi d’urgence (10 semaines à 500 $ par semaine). Cependant, il a reçu un total de 7 000 $ pour 14 semaines (14 × 500 $ = 7 000 $). J’en conclus qu’il a reçu 2 000 $ de trop.

Délai accordé à la Commission pour faire un examen

[38] J’estime que la Commission a effectué son examen dans le délai prescrit, comme je l’explique ci-dessous.

[39] La loi prévoit que la Commission a 36 mois après le versement des prestations pour réexaminer la demandeNote de bas de page 10. Ce délai est porté à 72 mois lorsque la Commission estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faiteNote de bas de page 11.

[40] La Cour d’appel fédérale reconnaît que la Commission ne peut pas examiner les modifications d’une demande au moment même où elles surviennent. C’est précisément pour cette raison que la Loi sur l’assurance-emploi donne à la Commission le temps nécessaire pour annuler ou modifier toute décision rendue à l’égard d’une demande particulière de prestationsNote de bas de page 12.

[41] Dans la présente affaire, la Commission a examiné les prestations versées à l’appelant pour les semaines du 29 mars au 6 juin 2020. Le 20 novembre 2021, la Commission a envoyé un avis de dette à l’appelant, l’informant du trop-payé de 2 000 $. C’était 20 mois et 14 jours après la date où les prestations sont devenues payables. Par conséquent, je conclus que la Commission a fait son examen dans le délai prescrit.

Autres arguments

[42] L’appelant a affirmé qu’il a déjà payé de l’impôt sur les versements de prestation d’assurance-emploi d’urgence. Il a aussi fait valoir qu’il a cotisé des milliers de dollars au fonds d’assurance-emploi et qu’il devrait alors pouvoir recevoir des prestations dans ce genre de situation.

[43] Même si l’appelant a payé de l’impôt sur ses prestations, il n’en demeure pas moins qu’il a reçu 4 semaines de prestation d’assurance-emploi d’urgence auxquelles il n’avait pas droit. Il a donc un trop-payé. Une fois ce trop-payé remboursé, la Commission produira un feuillet T4E pour l’appelant, afin de corriger l’impôt sur le revenu lors de sa déclaration de revenus pour l’année de remboursement du trop-payé.

[44] Je reconnais que l’appelant affirme qu’il devrait avoir droit à des prestations parce qu’il a cotisé des milliers de dollars au fonds d’assurance-emploi. Mais le programme d’assurance-emploi est un régime d’assurance. Il ne s’agit pas d’un fonds de pension ou d’un programme fondé sur les besoins duquel une personne peut retirer de l’argent quand elle le souhaite ou quand elle en a besoin. Pour avoir droit aux prestations, les prestataires doivent remplir les conditions énoncées dans la Loi sur l’assurance-emploi.

L’appelant est-il obligé de rembourser le trop-payé?

[45] La loi prévoit que les prestataires sont tenus de rembourser tout paiement de prestation d’assurance-emploi d’urgence auquel ils n’ont pas droitNote de bas de page 13.

[46] Je n’ai pas le pouvoir d’annuler le trop-payéNote de bas de page 14. Ce pouvoir appartient à la Commission. Je n’ai pas non plus le pouvoir d’ordonner à la Commission d’annuler un trop-payé.

[47] La Cour fédérale du Canada a compétence pour juger les appels qui portent sur des questions d’annulationNote de bas de page 15. Si l’appelant souhaite faire appel à la suite du refus de la Commission d’annuler la dette, il est libre de le faire devant la Cour fédérale du Canada.

[48] Si l’appelant souhaite négocier un plan de remboursement, il peut s’adresser à Service Canada ou à l’Agence du revenu du Canada pour discuter des options de remboursement.

[49] La situation est vraiment malheureuse. J’admets que le remboursement d’un trop-payé peut entraîner du stress ou des difficultés financières. Toujours est-il que la Commission a fait son examen conformément à la loi, alors le trop-payé est valide.

[50] Je reconnais que ce n’était sûrement pas le résultat que l’appelant voulait. Ma décision n’est pas fondée sur l’empathie ou les difficultés financières. Elle est plutôt fondée sur les faits portés à ma connaissance et sur l’application de la loi. Il n’y a aucune exception et aucune marge de manœuvre. Je ne peux pas interpréter ou réécrire la Loi sur l’assurance-emploi d’une manière qui est contraire à son sens ordinaire, même par compassionNote de bas de page 16.

Conclusion

[51] L’appelant a reçu 7 000 $ de prestation d’assurance-emploi d’urgence. Cependant, il avait seulement droit à 5 000 $. Il doit donc rembourser un trop-payé de 2 000 $.

[52] L’appel est rejeté.

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