Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 610

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (545782) datée du 24 octobre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Raelene R. Thomas
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 10 février 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 16 février 2023
Numéro de dossier : GE-22-3808

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Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’était pas employé par AG.

[3] Par conséquent, il n’est pas exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[4] L’appelant travaillait chez MR lorsqu’il a été mis à pied. Avant sa mise à pied de chez MR, un autre employeur, AG, avait eu un entretien avec lui au sujet de la possibilité d’aller travailler pour eux. Il a communiqué avec AG après avoir été mis à pied par MR et on lui a dit qu’il pouvait se joindre à l’équipe d’AG pour essayer l’emploi. Il a passé deux jours en formation chez AG, a établi qu’il ne pourrait pas gagner le montant qu’on lui avait annoncé et n’est pas retourné pour une troisième journée. Il affirme qu’il n’a pas accepté un emploi chez AG et qu’il n’a pas travaillé pour eux à titre professionnel.

[5] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a considéré les deux journées de formation comme un emploi. Elle a examiné les raisons pour lesquelles l’appelant a quitté l’emploi. Elle a décidé qu’il l’avait quitté volontairement (c’est-à-dire qu’il avait choisi de quitter son emploi) sans justification. La Commission a conclu qu’elle ne pouvait pas lui verser de prestations.

[6] Je dois décider si l’appelant était employé. Si j’établis qu’il l’était, je dois alors examiner s’il a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

Question que j’ai examinée en premier

L’employeur n’est pas mis en cause

[7] Parfois, le Tribunal envoie une lettre à l’employeur de la partie appelante pour lui demander s’il veut être mis en cause dans l’appel. Dans le cas présent, le Tribunal a envoyé une lettre à l’employeur. Celui-ci n’y a pas répondu.

[8] Pour être mis en cause, l’employeur doit avoir un intérêt direct dans l’appel. J’ai décidé de ne pas mettre l’employeur en cause dans cet appel, car rien dans le dossier n’indique que ma décision pourrait lui imposer des obligations juridiques.

Question en litige

[9] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[10] Pour répondre à cette question, je dois d’abord vérifier si l’appelant était employé. Dans l’affirmative, je dois décider s’il a quitté volontairement son emploi. Je dois ensuite examiner si l’appelant était fondé à quitter son emploi.

Analyse

L’appelant n’était pas employé

[11] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi si elle quitte son emploi sans justificationNote de bas de page 1.

[12] La Commission doit prouver que l’appelant a quitté volontairement son emploi.Note de bas de page 2 Cette exigence repose sur la nécessité de prouver que l’appelant avait effectivement un emploi.

[13] L’appelant a déclaré qu’il n’avait pas d’emploi chez AG. Il explique qu’avant d’être mis à pied par MR, un gérant d’AG avait communiqué avec lui à plusieurs reprises. Le gérant a continué de demander à l’appelant de venir travailler chez AG.

[14] L’appelant a déclaré qu’environ une semaine avant sa mise à pied, il s’est rendu à une entrevue chez AG, à laquelle assistaient trois personnes de cette entreprise. Pendant l’entretien, on lui a dit qu’il recevrait un taux de salaire fixe de 350 $ pour chaque nouvelle voiture vendue et de 300 $ pour chaque voiture d’occasion vendue. Les taux fixes augmenteraient s’il vendait plus de voitures et il y aurait une prime s’il était l’un des trois meilleurs vendeurs pour le mois. L’appelant a déclaré qu’on lui avait dit lors de l’entrevue que les ventes de voitures étaient bonnes, qu’il pouvait s’attendre à en vendre de 18 à 20 par mois et qu’il gagnerait bien sa vie. Il recevrait le montant fixe une fois que la cliente ou le client aurait pris livraison de la voiture.

[15] L’appelant a déclaré qu’après l’entrevue chez AG, il en avait parlé à son patron chez MR. Il a dit que son patron avait essayé de le convaincre que ce n’était pas un bon travail pour lui. Quelques jours après cette discussion, il a été congédié sans motif de son emploi chez MR. L’appelant a affirmé avoir été sous le choc pendant quelques jours après sa mise à pied. Il a dit qu’il n’a rien fait pendant cette période.

[16] L’appelant a déclaré avoir reçu un appel d’un gérant d’AG lui disant qu’il pouvait venir travailler trois ou quatre jours chez eux pour voir si l’emploi lui plaisait. L’appelant a déclaré qu’il est allé deux jours chez AG. Le premier jour, lui et deux autres personnes ont reçu une formation sur la connaissance des produits. Le deuxième jour, il s’est rendu chez AG et il y a eu une rencontre avec la gestion. Il a été question des objectifs de vente.

[17] L’appelant a dit avoir parlé à d’autres membres du personnel des ventes chez AG. Il a utilisé l’ordinateur de l’entreprise pour faire une recherche en ligne et il a constaté qu’il y avait très peu de véhicules en réserve. Il pouvait s'écouler entre cinq et dix mois avant qu'une voiture arrive chez le concessionnaire après avoir été commandée pour une cliente ou un client. Certains vendeurs d’AG lui ont dit que l’entreprise avait de la difficulté à vendre des voitures pour cette raison.

[18] Le dossier d’appel contient une [traduction] « offre d’emploi » datée du 16 mai 2022, dont la date de début est le 30 mai 2022. L’appelant a déclaré avoir vu cette offre pour la première fois lorsqu’il a reçu le dossier de révision (qui porte le numéro GD3) du Tribunal. Il a dit que le premier jour, il avait signé certains documents, mais qu’il ne les avait pas lus. Il pensait que les documents avaient trait à la paie.

[19] L’appelant a déclaré ne pas avoir signé l’offre d’emploi. Au bas de la deuxième page, sur le côté gauche, il y a une case au-dessus de son nom qui porte la mention [traduction] « signé électroniquement avec DocuSign par : » suivie par des lignes verticales. Il y a un code alphanumérique au-dessous de ces lignes. Le nom et le titre de l’appelant [traduction] « vendeur », sont inscrits sous cette case, suivis de [traduction] « en date du 5/17/2022 ». Une autre signature se trouve au bas à droite de la même page, sous l’inscription [traduction] « signé électroniquement avec DocuSign par : ». Il y a aussi un code alphanumérique sous la signature. Le nom « DH » et le titre de directeur général des ventes sont inscrits sous cette case. La date du 16/05/2022 est inscrite sous cette case.

[20] L’appelant a déclaré que la signature qui se trouve au-dessus de son nom en caractères d’imprimerie ressemble à la sienne, mais que ce n’est pas exactement le cas. Il a dit qu’AG ne lui avait pas envoyé de documents par voie électronique et qu’il n’en avait signé aucun de cette façon. L’appelant a déclaré qu’il n’était pas logique qu’il ait [traduction] « signé » ce document le 17 mai 2022, car il a perdu son emploi chez MR le 16 mai 2022 et qu’il n’a rien fait pendant les quelques jours qui ont suivi parce qu’il était en état de choc.

[21] Le dossier d’appel comprend un relevé d’emploi produit par AG le 17 juin 2022. Le document montre la raison pour laquelle l’appelant a démissionné. Le relevé d’emploi indique que son premier jour de travail et son dernier jour payé étaient tous les deux le 25 mai 2022. Il avait accumulé huit heures d’emploi assurable en tout.

[22] L’appelant a déclaré qu’il ne savait pas qu’il était payé pour suivre la formation. Il a souligné qu’il a été chez AG pendant deux jours. Pourtant, le relevé d’emploi montre qu’il a été payé pour une journée seulement.

[23] Le 20 octobre 2022, une représentante de l’employeur a parlé à un agent de Service Canada. Selon la représentante, l’appelant obtiendrait surtout des commissions sur la vente de véhicules. Si une vendeuse ou un vendeur ne vendait pas assez de voitures pour que sa commission soit égale ou supérieure au salaire minimum, l'employeur majorerait son salaire au salaire minimum comme traitement de base. La représentante a dit que les employés doivent travailler 40 heures par semaine et qu’ils ne peuvent pas le faire pour rien parce que ce serait illégal. Elle a dit que l’appelant aurait été informé de la structure de la commission dans la lettre d’offre qu’il a signée le 17 mai 2022.

[24] L’appelant a déclaré qu’on ne lui avait pas dit qu’il recevrait le salaire minimum s’il ne vendait pas assez de voitures. Il a fait remarquer que l’offre d’emploi n’indique pas que son salaire serait majoré au salaire minimum si c’était le cas.

[25] L’appelant a affirmé qu’il n’était pas retourné chez AG le troisième jour. Il a reçu un appel du directeur général lui demandant pourquoi il n’était pas présent ce jour-là. L’appelant a dit au directeur général que l’emploi ne lui plaisait pas et qu’AG ne l’avait pas bien formé.

[26] La Commission affirme que l’appelant a accepté une offre d’emploi de la part d’AG. Selon elle, il y a des preuves à cet égard parce que l’appelant a signé et accepté l’offre d’emploi. La Commission affirme que ces éléments de preuve montrent que l’appelant travaillait chez AG et qu’il a donc quitté volontairement son lieu de travail le 25 mai 2022, lorsqu’il a décidé de ne pas y retourner.

[27] J’estime que l’appelant n’était pas employé par AG parce qu’il n’a pas réellement commencé l’emploi pour lequel on l’a embauché. Il a déclaré qu’il avait eu une entrevue avec trois personnes d’AG. Il a discuté de l’entrevue avec son patron de MR la semaine précédant son congédiement de cette entreprise. Pendant l’entrevue chez AG, on lui a dit qu’il recevrait un taux fixe de 350 $ pour chaque nouvelle voiture vendue et qu’il pouvait s’attendre à vendre de 18 à 20 voitures par mois. On lui a dit qu’il pouvait venir chez AG pour essayer le poste pendant quelques jours afin de voir s'il lui plaisait.

[28] L’appelant a dit qu’il n’avait pas été informé qu’il serait payé pour les jours où il avait été chez AG les 25 et 26 mai 2022. Il a ajouté qu’il ne savait pas qu’AG lui verserait le salaire minimum s’il ne vendait pas assez de voitures en un mois. J’accepte le témoignage de l’appelant à cet égard parce qu’il l’a fait après une déclaration solennelle. J’ai pu lui poser des questions à ce sujet et son témoignage concorde avec les déclarations qu’il a faites aux agents de Service Canada.

[29] La Commission se fonde sur l’offre d’emploi pour établir que l’appelant était employé chez AG. Je ne pense pas que l’offre d’emploi soit suffisante pour prouver que l’appelant travaillait chez AG alors qu’il a passé du temps là-bas les 25 et 26 mai 2022.

[30] Je remarque que l’offre d’emploi a été signée par le directeur général des ventes d’AG le 16 mai 2022, soit le jour même où l’appelant a été congédié par MR.

[31] L’appelant a dit qu’il n’avait reçu aucun document de la part de AG par voie électronique. Il a déclaré avoir vu l’offre d’emploi pour la première fois lorsqu’il a reçu le dossier de révision (qui porte le numéro GD3) du Tribunal. Il s’est demandé s’il avait vraiment signé le document parce que, selon lui, la signature n’est pas exactement comme la sienne et le document indique que la date de signature est le 17 mai 2022, soit le lendemain de la perte de son emploi chez MR, alors qu’il était sous le choc et n’a rien fait pendant quelques jours.

[32] Je souligne que l’offre d’emploi indique que le poste de l’appelant est celui de vendeur et que la date de début est le 30 mai 2022. L’offre d’emploi ne fait aucune référence à de la formation avant cette date. Il n’est pas question d’avoir un horaire prévu de 40 heures par semaine comme l’a décrit la représentante de l’employeur. Quant à la rémunération, l’offre d’emploi prévoit des taux de commission de 50 $ de plus par véhicule que ce que l’appelant recevrait selon son témoignage. Il n’y a aucune référence à la majoration par AG de la rémunération de l’appelant au niveau du salaire minimum si ses ventes étaient inférieures à cette somme, comme l’a indiqué la représentante de l’employeur.

[33] L’employeur a dit à l’appelant qu’il pouvait essayer l’emploi pendant quelques jours pour voir s’il lui plaisait. Le temps que l’appelant a passé chez AG a précédé le début de son emploi de vendeur. Il n’a travaillé à aucun moment comme vendeur, poste pour lequel il avait fait une entrevue et qui figure dans l’offre d’emploi. Au cours des deux jours qu’il a passés chez AG, il est devenu évident pour l’appelant que l’emploi qui lui était offert n’était pas celui qu’il croyait. Il ne pourrait pas vendre de 18 à 20 voitures par mois, comme promis pendant l’entretien, car AG n’avait tout simplement pas l’inventaire requis pour maintenir ce niveau de ventes. Le manque d’inventaire et le délai de livraison des voitures au concessionnaire, alors qu’une commission lui serait versée seulement après la livraison à la cliente ou au client, faisaient en sorte qu'il n'aurait aucun revenu pendant plusieurs mois.

[34] La preuve m’indique que l’appelant a reçu une offre d’emploi initiale lors d’une entrevue chez AG. Lorsqu’il s’est rendu chez AG les 25 et 26 mai 2022, il a découvert que l’emploi n’était pas celui qu’il croyait. Le 27 mai 2022, il a dit au directeur général que l’emploi ne lui plaisait pas. À mon avis, cela signifie que l’appelant a refusé l’offre d’emploi le 27 mai 2022. Par conséquent, je suis d’avis qu’il n’a pas commencé l’emploi offert par AG le 30 mai 2022, qui était la d’entrée en fonction indiquée dans l’offre d’emploi. C’est pourquoi je conclus que l’appelant n’a jamais travaillé pour AG.

[35] Comme j’ai conclu que l’appelant n’était pas employé, je n’ai pas à décider s’il a quitté volontairement son emploi sans justification.

Conclusion

[36] L’appelant n’a jamais travaillé pour AG, et donc il ne peut pas être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour avoir quitté volontairement un emploi qu’il n’a jamais occupé.

[37] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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