Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : NP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 639

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : N. P.
Représentant : R. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (544046) datée du 15 septembre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 1er février 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelante
Date de la décision : Le 17 février 2023
Numéro de dossier : GE-22-3456

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande de prestations. Par conséquent, sa demande ne peut pas commencer à la date antérieure qu’elle demande.

Aperçu

[3] L’appelante affirme qu’elle a été mise à pied le 15 août 2021, mais qu’elle n’a jamais reçu son relevé d’emploi (RE). Elle n’a donc pas présenté de demande de prestations d’assurance-emploi à ce moment-là.

[4] L’appelante dit avoir été informée par certaines personnes, et par une personne de l’assurance-emploi, qu’elle avait 52 semaines pour présenter une demande après sa mise à pied, alors elle n’était pas trop inquiète.

[5] Elle a continué d’essayer d’obtenir son relevé d’emploi, mais elle n’a jamais pu l’obtenir de son employeur. Le 28 juin 2022, elle a donc présenté une demande sans son relevé d’emploi. Elle a demandé que sa demande soit antidatée et qu’elle commence le 15 août 2021.

[6] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’elle ne pouvait pas antidater la demande de l’appelante parce qu’elle n’avait pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande d’assurance-emploi.

[7] La Commission affirme que l’appelante n’a pas agi comme une personne raisonnable, comme elle lui a téléphoné une fois, en octobre 2021, mais elle n’a jamais demandé ce qu’on pouvait faire pour obtenir son relevé d’emploi de son employeur ni si elle pouvait présenter sa demande d’assurance-emploi sans relevé d’emploi.

[8] Je dois décider si la période de prestations de l’appelante peut commencer plus tôt.

Question que je dois examiner en premier

La Commission a envoyé des documentsNote de bas de page 1 après l’audience que j’ai acceptés et pris en considération pour rendre ma décision, car il s’agissait de renseignements que j’avais explicitement demandés à la Commission.

Question en litige

[9] La date de début de la période de prestations de l’appelante.

Analyse

La date de début de la période de prestations de l’appelante.

La loi

[10] Pour que sa demande de prestations commence plus tôt, l’appelante doit prouver deux chosesNote de bas de page 2 :

  1. 1. Elle avait un motif valable justifiant son retard pendant toute la période écoulée. Autrement dit, elle a une explication que la loi accepte.
  2. 2. Elle remplissait les conditions requises à la date antérieure (c’est-à-dire, la date à laquelle elle voulait que sa demande soit antidatée).

[11] Pour démontrer l’existence d’un motif valable, l’appelante doit prouver qu’elle a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 3. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle a agi de façon raisonnable et prudente, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait dans une situation semblable.

[12] L’appelante doit démontrer qu’elle a agi de cette façon pendant toute la période du retardNote de bas de page 4. Cette période s’étend du jour où elle veut que sa demande commence (le 15 août 2021Note de bas de page 5) au jour où elle a présenté sa demande (le 28 juin 2022Note de bas de page 6).

[13] L’appelante doit aussi démontrer qu’elle a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et les obligations que lui impose la loiNote de bas de page 7. Cela signifie que l’appelante doit démontrer qu’elle a essayé de s’informer de ses droits et de ses responsabilités le plus tôt possible et du mieux qu’elle pouvait. Si l’appelante n’a pas fait ces démarches, elle doit démontrer qu’il y avait des circonstances exceptionnelles qui l’ont empêchée de le faireNote de bas de page 8.

[14] L’appelante doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle avait un motif valable justifiant son retard.

Arguments de l’appelante et de la Commission

[15] L’appelante affirme qu’elle a été mise à pied et qu’elle s’attendait à ce que son employeur lui envoie rapidement le relevé d’emploi, mais il ne l’a pas fait.

[16] Elle a téléphoné à son employeur à maintes reprises, mais il ne cessait de lui dire qu’il n’avait aucune idée de la façon de remplir un relevé d’emploi et qu’il ne pouvait donc pas en produire un pour elle.

[17] En octobre 2021, l’appelante a téléphoné à la Commission pour lui demander si son relevé d’emploi figurait au dossier et si elle avait besoin d’un relevé d’emploi pour toucher des prestations d’assurance-emploi. Elle affirme que la personne à qui elle a parlé lui a dit que son relevé d’emploi ne figurait pas au dossier, et qu’elle devait avoir un relevé d’emploi pour recevoir des prestations d’assurance-emploi. Elle lui a aussi dit d’insister pour que son employeur lui en fournisse un. L’appelante a donc continué de téléphoner à son employeur pour essayer d’obtenir un relevé d’emploi.

[18] L’appelante affirme qu’elle n’était pas trop inquiète puisqu’elle avait été informée par beaucoup de personnes, et lors de son appel téléphonique d’octobre 2021 avec la Commission, qu’elle avait 52 semaines pour demander des prestations d’assurance-emploi, ce qui voulait dire qu’elle pouvait faire une demande jusqu’en août 2022 étant donné qu’elle avait été mise à pied en août 2021.

[19] L’appelante affirme qu’au cours d’un voyage de camping en juin 2022, une des personnes qu’elle a rencontrées en camping lui a dit qu’il n’était pas nécessaire d’avoir un relevé d’emploi pour demander des prestations d’assurance-emploi. Ainsi, lorsque l’appelante est revenue du camping, elle a présenté sa demande d’assurance-emploi le 28 juin 2022.

[20] L’appelante affirme avoir seulement reçu son relevé d’emploi de son employeur en août 2022.

[21] La Commission affirme que l’appelante n’a pas agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans sa situation, et qu’elle aurait dû vérifier ses droits et ses obligations aux termes de la loi. La Commission affirme que, par sa propre déclaration, l’appelante ne s’est pas renseignée auprès d’elle après octobre 2021 sur ce qu’elle pouvait faire au sujet du défaut de son employeur de lui fourni un relevé d’emploi, ou pour savoir s’il y avait des dispositions qui lui permettraient de faire une demande de prestations sans relevé d’emploi.

[22] La Commission affirme que l’appelante semble s’être fiée à des renseignements fournis par des amis sur les exigences de l’assurance-emploi, au lieu de s’informer directement auprès de l’assurance-emploi.

Mes conclusions sur un motif valable

[23] Je conclus que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable pour toute la période du retard pour les raisons qui suivent.

[24] Je peux comprendre que l’appelante a attendu patiemment d’obtenir son relevé d’emploi, et qu’elle a ensuite appelé son employeur lorsqu’elle ne l’a pas reçu.

[25] En ce qui concerne l’appel téléphonique d’octobre 2021, même si la Commission affirme qu’elle n’en a pas la trace, donc qu’elle ne peut pas dire s’il a eu lieu ou quels renseignements ont pu être donnés à l’appelanteNote de bas de page 9, elle ne conteste pas directement ce qui s’est passéNote de bas de page 10, alors j’accepte le fait que l’appelante a téléphoné à la Commission en octobre 2021.

[26] J’accepte le témoignage de l’appelante selon lequel, lors de cet appel téléphonique, on lui a dit que son relevé d’emploi ne figurait pas au dossier et qu’étant donné qu’elle en avait besoin pour recevoir des prestations, elle devait continuer d’essayer de l’obtenir de son employeur.

[27] Je conclus que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable pour la période suivant l’appel téléphonique d’octobre 2021.

[28] Je peux comprendre que l’appelante a accepté les renseignements fournis par la Commission, qu’elle croyait qu’un relevé d’emploi était nécessaire pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, et qu’elle a donc continué d’essayer d’obtenir ce document auprès de son employeur.

[29] Cependant, j’estime qu’elle n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblables. Je juge qu’une personne raisonnable et prudente n’aurait pas passé près de huit mois à faire la même chose sans succès (c’est-à-dire, communiquer avec l’employeur et se faire répondre qu’il ne peut pas produire de relevé d’emploi) sans jamais communiquer avec la Commission pour savoir quoi faire.

[30] J’estime qu’une personne raisonnable et prudente aurait de nouveau communiqué avec la Commission pour voir s’il y avait quelque chose qui pouvait être fait dans une situation où un employeur refusait de fournir un relevé d’emploi, et qui lui permettrait de toucher des prestations d’assurance-emploi.

[31] Je comprends que l’appelante avait déjà communiqué avec la Commission une fois, et il est raisonnable de se fier à l’information fournie par la Commission, car on ne s’attend pas nécessairement à ce qu’une personne communique avec la Commission à répétition pour vérifier l’information qui lui a été donnée. Cependant, à mon avis, une personne prudente l’aurait fait.

[32] Ce que je veux dire est qu’une personne raisonnable et prudente aurait téléphoné pour obtenir de l’information sur la façon de gérer la situation dans laquelle elle se trouvait.

[33] Je note que l’appelante n’a pas hésité à demander, ou à suivre, des conseils à ce sujet. Elle a parlé de sa situation avec d’autres personnes, et elle était prête à suivre les conseils qu’elle a reçus (par exemple, de la personne qu’elle a rencontrée au camping qui lui a dit qu’elle pouvait faire une demande sans relevé d’emploi).

[34] Je juge également que l’appelante n’a présenté aucune circonstance exceptionnelle qui l’aurait empêchée de prendre des mesures raisonnablement rapides pour s’informer auprès de la Commission de ce qui pourrait être fait dans une situation où son employeur refuse de lui fournir un relevé (c’est-à-dire, pour s’informer de ses droits et obligations aux termes de la loi).

Résumé

[35] Bref, l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant son retard pendant toute la période du retard (du 15 août 2021 au 28 juin 2022) parce qu’elle n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans sa situation et qu’elle n’a pas vérifié assez rapidement ses droits et ses obligations aux termes de la loi.

[36] Une personne raisonnable et prudente dans la situation de l’appelante, qui aurait été avisée qu’aucun relevé d’emploi ne figurait au dossier, qu’elle avait besoin d’un relevé d’emploi, et dont l’employeur continuait de refuser de lui en fournir un, aurait communiqué avec la Commission pour voir s’il y avait quelque chose à faire dans une telle situation, plutôt que de passer huit mois sans reparler à la Commission.

[37] L’appelante n’a pas non plus mentionné de circonstances exceptionnelles qui l’exempteraient de l’obligation de vérifier assez rapidement ses droits et ses obligations aux termes de la loi.

[38] Comme l’appelante n’a pas de motif valable pour toute la période du retard, sa demande ne peut pas commencer à la date antérieure qu’elle demande.

Conclusion

[39] L’appel est rejeté.

[40] Je conclus que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande de prestations pendant toute la période écoulée. Par conséquent, sa demande ne peut pas commencer à la date antérieure qu’elle demande.

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