Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 632

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : A. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (494142) datée du 9 juin 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Jillian Evans
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 29 novembre 2022

Personnes présentes à l’audience :

A. B.
A. U.
S. B.

Date de la décision : Le 15 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-22-2340

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante, A. B., a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Par conséquent, elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] En septembre 2021, l’appelante a été informée par son employeur d’une nouvelle politique de vaccination contre la COVID-19. La politique de l’employeur exigeait premièrement que tous les membres du personnel communiquent leur statut vaccinal dans un certain délai. Elle exigeait deuxièmement que chaque personne soit entièrement vaccinée contre la COVID-19 dans un certain délai, à moins d’obtenir une exemption.

[4] L’appelante ne s’est pas conformée à la politique dans les délais prescrits. Elle a donc été mise en congé sans solde le 2 novembre 2021, puis congédiée le 2 janvier 2022.

[5] Le 8 janvier 2022, l’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi.

[6] La Commission a décidé qu’A. B. était exclue du bénéfice des prestations parce qu’elle avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. La Commission soutient que l’appelante était au courant des exigences de la politique, mais qu’elle a choisi de ne pas les respecter.

[7] L’appelante n’est pas d’accord avec cette décision. Elle dit avoir tenté de se conformer à la politique, mais avoir été empêchée de le faire de diverses façons. Elle affirme aussi que la politique elle-même était illégale et déraisonnable. Elle fait valoir qu’il s’agissait d’une modification injuste de son contrat de travail et d’une violation de sa convention collective.

[8] Mon rôle est de décider si les actions et les comportements de l’appelante correspondent bel et bien à ce qu’est une inconduite selon la Loi sur l’assurance-emploi.

Question en litige : l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[9] La loi prévoit qu’une personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cette règle s’applique que la personne ait été congédiée ou suspendueNote de bas de page 2.

[10] Pour décider si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois évaluer deux choses. D’abord, je dois établir pour quelle raison A. B. a perdu son emploi. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[11] Le dossier que l’appelante a déposé est volumineux et détaillé. Il contient de nombreuses communications, conversations et interactions entre elle et son employeur qui ont eu lieu du 2 septembre 2021 (date de l’annonce de la politique vaccinale) au 3 janvier 2022 (date de réception de l’avis de cessation d’emploi).

[12] Je vais fournir une chronologie des grandes lignes du dossier.

  • Le 2 septembre 2021, l’employeur a mis en œuvre une politique de vaccination contre la COVID-19 et l’a communiquée à tout le personnelNote de bas de page 3.
  • La politique exigeait ce qui suit :
  • [traduction]

    1. 1. Les membres du personnel doivent communiquer leur statut vaccinal à [l’employeur] conformément au processus établi au plus tard le 20 septembre 2021. [L’employeur] conserve tout renseignement sur la vaccination comme le prévoit la loi sur la protection des renseignements personnels.
    2. 2. Les membres du personnel doivent être entièrement vaccinés contre la COVID-19 au plus tard le 30 octobre 2021.
    3. 3. Les membres du personnel qui ne sont pas en mesure d’obtenir un vaccin contre la COVID-19, pour une raison liée à un motif protégé par la politique de l’employeur sur les droits de la personne et la lutte contre le harcèlement et la discrimination, peuvent demander une mesure d’adaptation aux ressources humaines.
    4. 4. Les membres du personnel qui ne se conforment pas à la politique s’exposent à des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement.
  • Du 10 au 14 septembre 2021, A. B. a envoyé des courriels à diverses personnes chargées de supervision et de gestion pour les interroger sur la sûreté et l’efficacité du vaccin et sur le fondement juridique de la politiqueNote de bas de page 4.
  • L’appelante a reçu plusieurs réponses à ses courriels dans les semaines qui ont suivi, mais n’a pas reçu de réponses à toutes ses questions.
  • Le 30 septembre 2021, l’appelante a reçu un appel téléphonique d’une gestionnaire. Comme elle n’avait toujours pas communiqué son statut vaccinal en date du 20 septembre 2021, cette gestionnaire voulait s’assurer qu’elle était bien au courant des exigences de la politiqueNote de bas de page 5.
  • Le 2 octobre 2021, le directeur des ressources humaines a écrit à l’appelante pour lui rappeler que la politique [traduction] « exigeait que les membres du personnel communiquent leur statut vaccinal au plus tard le 20 septembre 2021 » et pour confirmer qu’elle ne l’avait toujours pas faitNote de bas de page 6.
  • Le 15 octobre 2021, A. B. a reçu un autre courriel du directeur des ressources humaines qui reprenait certains segments de la politique : [traduction] « Conformément à la politique, les membres du personnel devaient communiquer leur statut vaccinal et fournir une preuve de vaccination au plus tard le 20 septembre 2021. Il est obligatoire d’avoir reçu deux doses d’un vaccin contre la COVID-19 au plus tard le 30 octobre 2021 [...] Nos dossiers indiquent que vous n’avez pas fourni de preuve de vaccination comme l’exige la politique. Si cette information est incorrecte, veuillez nous en aviser le plus tôt possibleNote de bas de page 7. »
  • Ce courriel disait que le respect de la politique était une [traduction] « condition au maintien de l’emploi à [l’employeur]Note de bas de page 8 ».
  • Le 25 octobre 2021, l’appelante a reçu une lettre de son employeur datée du 22 octobre 2021, qui disait ce qui suit : [traduction] « Les membres du personnel devaient communiquer leur statut vaccinal et en fournir une preuve au plus tard le 20 septembre 2021. Vous ne vous êtes pas conformée à la politique établieNote de bas de page 9. »
  • La lettre précisait que [traduction] « si [l’appelante] n’arriv[ait] pas à fournir à [l’employeur] une justification appropriée pour [son] manquement à cette importante politique, [elle serait] suspendue sans solde à compter du lendemain et jusqu’à la première des deux dates suivantes : » 1) la date où elle se conformerait à la politique; 2) le 12 décembre 2021, où elle serait congédiée avec motif valableNote de bas de page 10.
  • L’appelante admet qu’elle n’avait pas communiqué son statut vaccinal à ce moment-là.
  • Le 1er novembre 2021, l’appelante a reçu une correspondance de son employeur l’informant qu’elle serait suspendue sans solde à compter du 2 novembre 2021. [traduction] « Les membres du personnel devaient communiquer leur statut vaccinal et en fournir une preuve au plus tard le 20 septembre 2021. Vous ne vous êtes pas conformée à la politique établie. Vous êtes par la présente suspendue sans soldeNote de bas de page 11. »
  • L’appelante admet qu’elle n’avait pas communiqué son statut vaccinal à ce moment-là.
  • Dans une lettre datée du 30 novembre 2021, l’appelante a été avisée pendant son congé que son employeur avait reporté au 2 janvier 2022 la date limite pour fournir une preuve de vaccination, qui était initialement le 13 décembre 2021.
  • La lettre confirmait qu’A. B. serait congédiée si elle ne respectait pas parfaitement la politique à 23 h 59 le 1er janvier 2022Note de bas de page 12.
  • Le 21 décembre 2021, l’appelante a envoyé à son employeur une déclaration spirituelle ainsi qu’une déclaration de conscience et de croyance religieuse, afin de demander une mesure d’adaptation pour exemption de la politique en raison de sa foiNote de bas de page 13.
  • Elle a envoyé cette demande par courrier recommandé. Postes Canada confirme qu’elle a été remise à l’employeur en date du 23 décembre 2021Note de bas de page 14.
  • Le 30 décembre 2021, l’appelante a renvoyé par courriel sa déclaration spirituelle ainsi que sa déclaration de conscience et de croyance religieuse à des membres de la direction et de la gestion.
  • Elle n’a reçu aucune réponse ni décision de son employeur concernant sa demande de mesure d’adaptation.
  • Le 3 janvier 2022, l’appelante a reçu une lettre datée du 2 janvier 2022 qui disait ce qui suit : [traduction] « En date du 2 janvier 2022, vous ne respectez toujours pas la politique de [l’employeur] sur la vaccination contre la COVID-19 et n’avez pas remédié à votre insubordination et désobéissance volontaire. Suivant la lettre du 30 novembre 2021, la présente vise à confirmer que votre congédiement avec motif valable a lieu en ce jour, le 2 janvier 2022Note de bas de page 15. »
  • Les 3 et 4 janvier 2022, l’appelante a envoyé des courriels de suivi à son employeur pour lui demander ce qui était advenu de sa demande de mesure d’adaptationNote de bas de page 16. Elle n’a reçu aucune décision sur le sujet.

[13] Selon les documents au dossier (qui ont tous été fournis par l’appelante), je considère que la politique comportait clairement deux parties à respecter.

[14] En premier lieu, tous les membres du personnel devaient communiquer leur statut vaccinal au plus tard le 20 septembre 2021.

[15] En deuxième lieu, après le 20 septembre 2021, chaque personne devait satisfaire à l’une ou l’autre des exigences suivantes :

  • fournir une preuve de vaccination au plus tard le 30 octobre 2021;
  • obtenir une exemption de la vaccination contre la COVID-19.

[16] À quelques reprises dans ses observations écrites à la Commission et au Tribunal de la sécurité sociale, l’appelante nie avoir enfreint la politique. Elle soutient qu’elle a demandé une exemption comme l’exigeait la politique, mais qu’elle n’a jamais reçu de réponse.

[17] L’appelante admet toutefois qu’elle n’a pas communiqué son statut vaccinal. [traduction] « Mon employeur a supposé que je n’étais pas vaccinée parce que je n’ai pas communiqué mon statut vaccinal, et il m’a congédiée en s’appuyant sur cette suppositionNote de bas de page 17. »

[18] Il n’était pas nécessaire que l’appelante ait enfreint toutes les parties de la politique pour qu’il y ait congédiement. On s’entend pour dire que l’appelante a enfreint une partie de la politique : l’obligation de communiquer son statut vaccinal.

[19] Je n’ai pas besoin d’évaluer si elle a enfreint le reste de la politique pour établir la cause de son congédiement. Je conclus que l’appelante a été congédiée parce qu’elle n’a pas respecté certaines dispositions de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19.

La raison du congédiement est-elle une inconduite selon la loi?

[20] La décision de l’appelante de ne pas se conformer à la politique vaccinale de son employeur constitue une inconduite.

[21] Après avoir établi la raison de la perte d’emploi (un manquement à au moins une partie de la politique vaccinale), je dois maintenant vérifier si cette raison constitue une inconduite.

[22] La Loi sur l’assurance-emploi ne donne pas une définition exacte de ce qu’est une inconduite. Par contre, la jurisprudence (l’ensemble des décisions que les tribunaux ont rendues) m’aide à décider si les actions et les comportements de l’appelante constituent une inconduite selon cette loi.

[23] La Commission est responsable de prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’A. B. a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 18.

La décision d’A. B. de ne pas se conformer à la politique était délibérée

[24] Selon la jurisprudence, pour qu’il y ait inconduite, la conduite doit être délibérée. La Commission doit donc prouver que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 19. Elle n’a pas à prouver qu’il y a eu tromperie ou désir de causer du tort à l’employeur, mais seulement que le comportement a été adopté en toute connaissance de cause.

[25] L’appelante soutient que le non-respect de la politique n’était pas son choix : comme son employeur n’a pas répondu à ses questions sur la sûreté du vaccin et la légalité de la politique, elle n’a pas pu en accepter les dispositions.

[26] Elle soutient également que le fait que son employeur n’a pas répondu à sa demande d’exemption l’a empêchée de se conformer à la politique.

[27] La Commission n’est pas d’accord. Elle affirme que l’appelante a choisi de façon personnelle et consciente de ne pas se conformer à la politique.

[28] Comme je l’ai mentionné plus haut, A. B. a enfreint les deux parties de la politique :

  • l’obligation de communiquer son statut vaccinal;
  • l’obligation de se faire vacciner contre la COVID-19, à moins d’obtenir une exemption.

[29] Il y a un désaccord sur la question de savoir si la violation de la deuxième partie était délibérée, mais aucun désaccord au sujet de la première partie. A. B. admet qu’elle a refusé volontairement de communiquer son statut vaccinal.

[30] Je conclus que c’est suffisant pour dire que l’appelante a enfreint volontairement la politique de son employeur.

La politique était nécessaire et importante pour l’emploi de l’appelante

[31] La jurisprudence précise qu’une inconduite, dans le contexte de la Loi sur l’assurance-emploi, est un comportement qui peut empêcher une personne de remplir ses obligations envers son employeur.

[32] La Commission est donc responsable de prouver que le comportement de l’appelante mettait en jeu une partie nécessaire et importante de ses responsabilités professionnelles. Selon la jurisprudence, la Commission n’a pas à démontrer que le comportement était dangereux, criminel, trompeur ou contraire à l’éthique pour qu’il constitue une inconduite.

[33] L’appelante affirme que le respect de la politique n’avait pas d’incidence sur une partie nécessaire ou importante de son emploi. Elle soutient qu’elle n’avait pas à se faire vacciner pour effectuer son travail en toute sécurité, car son contact avec ses collègues et la clientèle était minimal. De plus, elle fait valoir que son employeur n’avait pas à connaître ses renseignements personnels sur sa santé pour qu’elle puisse faire son travail.

[34] La Commission affirme que la politique faisait nécessairement partie du travail de l’appelante, car elle avait été établie conformément aux directives provinciales dans le contexte pandémique, afin de préserver la sécurité publique.

[35] L’employeur a le droit de gérer son fonctionnement au quotidien, ce qui comprend le droit de créer et de mettre en œuvre des politiques en milieu de travail. Quand il a fait de sa politique vaccinale une exigence pour l’ensemble du personnel, elle est devenue du même coup une condition au maintien de l’emploi de l’appelante.

[36] L’appelante a enfreint la politique lorsqu’elle a refusé de s’y conformer. Je conclus que ce refus a nui à sa capacité de remplir ses obligations envers son employeur.

L’appelante savait que le non-respect de la politique entraînerait son congédiement

[37] Selon la jurisprudence, pour qu’il y ait inconduite dans le contexte de la Loi sur l’assurance-emploi, la personne devait savoir que ses actions pouvaient entraîner son congédiement.

[38] L’appelante reconnaît qu’elle a lu la politique quand elle a été annoncée et qu’elle savait que [traduction] « les membres du personnel qui ne se conform[aient] pas à la politique s’expos[aient] à des mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement ».

[39] Dans ses observations, elle soutient que cette formulation était ambiguë et ne donnait pas à penser qu’elle allait réellement être congédiée.

[40] Ce n’est pas le critère juridique à appliquer. J’estime qu’il était assez clair pour l’appelante que le non-respect de la politique pouvait raisonnablement mener à son congédiement.

[41] Quoi qu’il en soit, toute ambiguïté a été levée dans la correspondance envoyée par l’employeur les 15 octobre, 22 octobre, 1er novembre et 30 novembre 2021. Ces documents indiquaient tous que l’appelante serait congédiée si elle ne respectait pas la politique.

[42] Elle a tout de même continué de ne pas la respecter jusqu’à son congédiement le 2 janvier 2022.

[43] Je conclus que la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités qu’A. B. a perdu son emploi en raison d’une inconduite. L’appelante savait que la politique exigeait les deux choses suivantes dans certains délais précis :

  • la communication de son statut vaccinal;
  • la vaccination ou l’exemption.

[44] Elle savait qu’elle risquait d’être congédiée si elle ne se conformait pas à la politique. Et elle a quand même décidé de ne pas s’y conformer.

Autres questions soulevées

[45] L’appelante a soulevé d’autres questions dans ses observations.

[46] Elle affirme que l’obligation vaccinale allait à l’encontre de sa convention collective et de son contrat de travail initial.

[47] Elle affirme aussi que son congédiement était injustifié parce que sa présence sur le lieu de travail ne comportait aucun risque pour la santé et la sûreté de ses collègues ou de la clientèle.

[48] Elle soutient également que la politique allait à l’encontre de diverses lois, dont le Code criminel, la Déclaration canadienne des droits, la Loi sur la santé et la sécurité au travail, la Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé et la Charte canadienne des droits et libertés.

[49] La Cour d’appel fédérale a déjà établi que le Tribunal de la sécurité sociale ne peut pas décider si la politique d’un employeur était équitable, ou si le congédiement ou la sanction imposée était justifiéNote de bas de page 20. Pour faire valoir des arguments à ce sujet, l’appelante peut intenter une action en justice ou devant tout autre tribunal compétent en matière d’équité.

[50] Le rôle du Tribunal de la sécurité sociale est plutôt de décider si la conduite de l’appelante constituait une inconduite selon la Loi sur l’assurance-emploi. Le Tribunal doit se concentrer sur le comportement et les actions de l’appelante, et non sur la conduite de l’employeurNote de bas de page 21.

[51] Dans une décision de la Cour d’appel fédérale qui s’intitule McNamara, un prestataire a affirmé qu’il devrait avoir droit à des prestations d’assurance-emploi parce que son employeur l’avait congédié injustementNote de bas de page 22. Il avait perdu son emploi à cause de la politique de son employeur sur le dépistage de drogues. Il a fait valoir qu’il n’aurait pas dû être congédié, puisque le test de dépistage n’était pas justifié dans les circonstances et allait à l’encontre de sa convention collective.

[52] Il a ajouté qu’il n’y avait aucun motif raisonnable de croire qu’il était incapable de travailler en toute sécurité parce qu’il aurait consommé de la drogue. Il s’était fié aux directives sur la santé et la sécurité applicables au travail à ce moment-là.

[53] La Cour d’appel fédérale a répondu en faisant remarquer qu’elle a toujours dit que, dans les dossiers d’inconduite, la question est de savoir si l’action ou l’omission de la personne est une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi, que la personne ait été congédiée injustement ou nonNote de bas de page 23.

[54] La Cour d’appel fédérale a également précisé que, lorsqu’on interprète et applique la Loi sur l’assurance-emploi, il faut se concentrer sur le comportement de la personne visée, et non sur celui de l’employeur. Elle a aussi souligné qu’une personne congédiée injustement a d’autres recours, comme différentes procédures judiciaires, des griefs et des requêtes adressées à d’autres tribunaux. Ces solutions pénalisent précisément le comportement de l’employeur et évitent que ses actions coûtent de l’argent aux contribuables en versements de prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 24.

[55] Dans une affaire plus récente qui s’intitule Paradis, un prestataire a été congédié pour avoir échoué à un test de dépistage de droguesNote de bas de page 25. Il a soutenu qu’il avait été congédié injustement, car les résultats du test montraient qu’il n’avait pas travaillé avec des facultés affaiblies. La Cour fédérale s’est appuyée sur l’affaire McNamara pour déclarer que le comportement de l’employeur n’est pas pertinent pour décider d’une inconduite aux termes de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 26.

[56] En résumé, mon rôle n’est pas d’examiner le comportement ou les politiques de l’employeur, et de décider si c’était correct de congédier l’appelante. Ma compétence se limite plutôt à examiner ce qu’A. B. a fait ou n’a pas fait, et à évaluer si cela constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[57] J’ai déjà décidé que la conduite de l’appelante constitue une inconduite selon la Loi sur l’assurance-emploi.

[58] L’appelante a aussi fait valoir qu’elle avait cotisé à l’assurance-emploi pendant toute sa vie active. Selon elle, il était injuste qu’elle se fasse maintenant refuser des prestations au moment où elle en a le plus besoin.

[59] La Loi sur l’assurance-emploi est un régime d’assurance. Comme pour tout autre régime de ce type, il faut satisfaire à des conditions précises pour recevoir des prestationsNote de bas de page 27. Le rôle du Tribunal de la sécurité sociale est de décider si l’appelante, qui demande des prestations du régime d’assurance, remplissait les conditions requises. Le Tribunal n’a pas le pouvoir de rendre une décision fondée sur la compassion ou l’équité. Il doit suivre le droit lié à l’affaire et appliquer la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 28.

[60] L’appelante pourrait avoir d’autres recours pour faire valoir ses allégations. Elle prétend que la politique de l’employeur a porté atteinte à ses droits fondamentaux et qu’une mesure d’adaptation aurait dû être prise à son égard. Ces questions doivent être traitées par la cour ou le tribunal approprié.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[61] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. En effet, ses actions ont entraîné son congédiement. Elle a agi délibérément. Elle savait que le refus de communiquer son statut vaccinal allait probablement lui faire perdre son emploi. 

Conclusion

[62] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[63] Par conséquent, l’appel est rejeté. Jillian Evans Membre de la division générale, section de l’assurance-emploi

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