Assurance-emploi (AE)

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Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c CC, 2023 TSS 868

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Julie Meilleur
Partie intimée : C. C.
Représentante ou représentant : J. D.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du
10 novembre 2022 (GE-22-2068)

Membre du Tribunal : Jude Samson
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 5 avril 2023

Personnes présentes à l’audience :

Représentante de l’appelante
Intimé
Représentant de l’intimé

Date de la décision : Le 30 juin 2023
Numéro de dossier : AD-22-894

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel de la Commission de l’assurance-emploi du Canada et je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle examine la question de fond.

Aperçu

[2] C. C. est le prestataire dans cette affaire. Il a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi et la Commission lui a versé ces prestations.

[3] Plusieurs mois plus tard, la Commission a conclu que le prestataire n’était pas disponible pour travailler pendant ses études, et qu’il n’était donc pas admissible aux prestations qu’il avait reçues pendant ces périodes. La décision de la Commission a créé un trop-payé au compte du prestataire.

[4] Le prestataire a fait appel de la décision de la Commission auprès de la division générale du présent Tribunal. Il a soutenu qu’il ne devrait pas avoir à rembourser le trop-payé parce que la Commission savait qu’il était étudiant dès le départ. Il lui a fourni cette information à plusieurs reprises.

[5] La division générale a accueilli l’appel du prestataire en disant que la Commission n’avait pas exercé son pouvoir discrétionnaire en matière de révision de façon judiciaire.

[6] La Commission fait maintenant appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel. Elle soutient que la division générale a commis des erreurs de droit.

[7] La Commission a raison. J’accueille son appel.

Questions en litige

[8] Les questions en litige sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en concluant que la Commission n’avait pas utilisé de façon judiciaire son pouvoir discrétionnaire de réévaluer la disponibilité du prestataire après le versement des prestations?
  2. b) Si oui, quelle est la réparation à offrir?

Analyse

[9] La loi me permet d’intervenir dans cette affaire si la division générale a commis une erreur de droitNote de bas de page 1.

La division générale a commis une erreur de droit

[10] La division générale a commis une erreur de droit en concluant que la Commission n’avait pas utilisé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a réévalué la disponibilité du prestataire après le versement des prestations.

Les articles 52 et 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi s’appliquent conjointement

[11] Les pouvoirs dont la Commission dispose au titre des articles 52 et 153.161(2) de la Loi sur l’assurance-emploi sont discrétionnaires. La Commission peut réexaminer une demande de prestations et peut vérifier l’admissibilité d’une personne aux prestations qu’elle a déjà reçues, mais elle n’est pas obligée de le faire.

[12] La loi confère donc à la Commission des pouvoirs assez vastes pour revoir une décision antérieure et récupérer des sommes payées en trop à une personneNote de bas de page 2.

[13] La Commission a élaboré une politique de réexamen pour orienter l’utilisation de ses pouvoirs discrétionnaires en matière de révision au titre de l’article 52Note de bas de page 3. On y lit ce qui suit :

17.3.3 Politique de réexamen

La Commission a élaboré une politique afin d’assurer une application uniforme et juste de l’article 52 de la Loi et d’empêcher la création de trop-payés lorsque le prestataire a touché des prestations en trop pour une raison indépendante de sa volonté. La Commission ne procédera au nouvel examen d’une demande que dans les situations suivantes :

  • il y a un moins-payé de prestations;
  • des prestations ont été versées contrairement à la structure de la Loi;
  • des prestations ont été versées à la suite d’une déclaration fausse ou trompeuse;
  • le prestataire aurait dû savoir qu’il recevait des prestations auxquelles il n’avait pas droit.

[14] Dans le cas présent, la division générale a conclu que la Commission n’a pas utilisé son pouvoir de vérification au titre de l’article 153.161(2) de la Loi sur l’assurance-emploi. À l’appui de sa décision, la division générale a fait remarquer que la Commission n’avait pas demandé au prestataire de prouver son admissibilité comme l’article pertinent l’exige.

[15] Cette conclusion a permis à la division générale d’axer sa décision sur le pouvoir de réexamen énoncé à l’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi et sur la politique de réexamen qui y est associée.

[16] Cependant, la division d’appel a décidé de façon constante que les articles 52 et 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi s’appliquent conjointement à des cas comme celui-ciNote de bas de page 4. De plus, la politique de réexamen de la Commission ne peut pas prévaloir sur l’intention du législateur telle qu’elle est exprimée dans l’article 153.161.

[17] La division générale a donc commis une erreur de droit en écartant l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi et en fondant sa décision presque exclusivement sur le respect de la politique de réexamen de la Commission.

La Commission n’avait pas l’obligation d’exiger d’autres preuves du prestataire sur la question de son admissibilité aux prestations

[18] Peu importe la conclusion ci-dessus, le prestataire soutient que la Commission n’a pas utilisé ses pouvoirs discrétionnaires de façon judiciaire puisqu’elle ne lui a pas demandé de prouver son admissibilité de la façon prévue à l’article 153.161(2) de la Loi sur l’assurance-emploi. Selon lui, cet oubli a empêché la Commission – et la division générale par la suite – de réévaluer son admissibilité aux prestations.

[19] À l’appui de son argument, le prestataire souligne surtout les mots ci-dessous :

Vérification

153.161 (2) La Commission peut vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire visé au paragraphe (1) est admissible aux prestations en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestations.

[20] La division d’appel a déjà rejeté l’argument du prestataire dans la décision PJNote de bas de page 5. J’ajoute les observations suivantes :

  • La Commission a demandé au prestataire de fournir de plus amples informations concernant ses études et sa disponibilité pour travailler tout au long de sa période de prestations et dans le cadre du réexamen du dossierNote de bas de page 6;
  • Même si la division générale annulait la décision discrétionnaire rendue par la Commission, la loi l’accorde le pouvoir de rendre la décision que la Commission aurait dû rendreNote de bas de page 7.

[21] La Commission affirme qu’elle avait suffisamment d’information pour rendre une décision au sujet de la disponibilité du prestataire.

[22] J’estime alors que la manière dont la Commission a procédé à la vérification du dossier du prestataire ne signifie pas qu’elle a utilisé ses pouvoirs discrétionnaires de façon non judiciaire. De plus, cette façon de procéder n’a pas empêché la division générale d’examiner la question de la disponibilité du prestataire.

Je renvoie l’affaire à la division générale pour réexamen

[23] La Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a entamé la vérification du dossier du prestataire.

[24] Cependant, la question principale n’a toujours pas été tranchée : le prestataire a-t-il démontré sa disponibilité pour travailler pendant les périodes pertinentes? Cette question dépend d’une évaluation de plusieurs élémentsNote de bas de page 8.

[25] Je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle entende toutes les preuves concernant ces facteurs et qu’elle les évalue.

Conclusion

[26] J’accueille l’appel de la Commission. La division générale a commis une erreur de droit en concluant que la Commission n’avait pas utilisé de façon judiciaire son pouvoir discrétionnaire de réexaminer la disponibilité du prestataire après le versement des prestations.

[27] Je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle examine la question de fond : le prestataire a-t-il démontré sa disponibilité pour travailler pendant les périodes pertinentes?

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