Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : HN c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 619

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : H. N.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (495565) datée du
15 août 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Audrey Mitchell
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 31 janvier 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 6 février 2023
Numéro de dossier : GE-22-3135

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec le prestataire.

[2] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était fondé (c’est-à-dire qu’il avait une raison acceptable selon la loi) à quitter son emploi quand il l’a fait. Il n’était pas fondé à quitter son emploi parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] Le prestataire a quitté son emploi de chauffeur le 17 décembre 2021. Il a ensuite demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons du prestataire pour avoir quitté son emploi. Elle a décidé qu’il avait quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’il avait choisi de quitter son emploi) sans justification. Par conséquent, elle ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi. Dans l’affirmative, je dois ensuite décider s’il a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme que le prestataire a quitté volontairement son emploi. Elle dit que ce dernier aurait pu continuer à travailler pendant les heures que son employeur avait mises à sa disposition jusqu’à ce qu’il soit mis à pied. La Commission affirme aussi que le prestataire aurait pu chercher un autre emploi convenable pour l’hiver. 

[6] Le prestataire n’est pas d’accord. Il affirme que son employeur et lui ont convenu d’une mise à pied temporaire. Il explique que c’était en raison du nombre réduit d’heures de travail en hiver et du fait qu’il devait parcourir une longue distance en voiture dans des conditions routières dangereuses.

Question en litige

[7] Le prestataire est-il exclu du bénéfice des prestations pour avoir quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord aborder la question du départ volontaire du prestataire. Je dois ensuite décider s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire a quitté volontairement son emploi

[9] La Commission doit prouver que le prestataire a quitté volontairement son emploi. Si c’est le cas, le prestataire doit alors démontrer qu’il était fondé à quitter son emploiNote de bas de page 1. Pour décider si le prestataire a quitté volontairement son emploi, il faut se poser la question suivante : avait-il le choix de rester ou de partirNote de bas de page 2?

[10] Le prestataire soutient qu’il n’a pas quitté son emploi. Il dit que son employeur et lui ont convenu d’une mise à pied temporaire de trois mois.

[11] La Commission affirme que l’employeur n’a pas dit au prestataire qu’il le mettrait à pied. Elle soutient que l’employeur n’avait pas établi qu’il y avait un manque de travail.

[12] L’employeur du prestataire a produit un relevé d’emploi. Il indique que la raison pour laquelle le relevé a été émis est la démission. L’employeur a dit à la Commission que le prestataire avait démissionné parce qu’il voulait prendre congé et qu’il retournait aux études. L’employeur a affirmé qu’il n’y avait pas de pénurie de travail. Il a dû embaucher un nouveau chauffeur pour remplacer le prestataire.

[13] Le prestataire a témoigné au sujet de son emploi. Il a dit qu’il transportait et livrait des tuyaux. Il a dit qu’il était difficile de monter sur le camion à plate-forme et d’en descendre en toute sécurité par des températures inférieures à zéro et sur des surfaces glissantes.

[14] Le prestataire a aussi témoigné au sujet d’emplois qu’il avait déjà occupés dans la même industrie. Il a dit qu’il travaillait normalement de 50 à 70 heures en été. Le prestataire a déclaré qu’il était mis à pied en hiver. Il a dit que le travail n’a pas été réduit petit à petit, mais qu’il s’est simplement arrêté en raison des conditions météorologiques. Le prestataire a joint trois relevés d’emploi d’anciens employeurs montrant qu’il avait été mis à pied en décembre de chaque année.

[15] Le prestataire a dit qu’il avait parlé à son employeur de la quantité de travail qu’il s’attendait à avoir en hiver. L’employeur ne le savait pas. Le prestataire a déclaré qu’il avait demandé à son employeur s’il pouvait être mis à pied temporairement et que l’employeur avait accepté.

[16] Le prestataire insiste sur le fait que son employeur a accepté qu’il soit mis à pied. Cependant, je considère comme vrai son témoignage selon lequel il a demandé à être mis à pied, pour les raisons que j’examinerai ci-dessous. J’estime que cela concorde avec la preuve de l’employeur que la Commission a présentée selon laquelle il n’y avait pas encore de pénurie de travail. J’estime que ce n’est pas parce que d’autres employeurs l’ont mis à pied en décembre que cet employeur connaîtrait aussi une pénurie de travail en décembre. 

[17] Même si l’employeur du prestataire avait accepté la mise à pied, je conclus que le prestataire avait le choix de conserver son emploi ou de le quitter. Il a choisi de démissionner. J’estime que ce faisant, le prestataire a quitté volontairement son emploi.

Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi

[18] Les parties ne sont pas d’accord sur le fait que le prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi quand il l’a fait.

[19] La loi prévoit qu’une partie prestataire est exclue du bénéfice des prestations si elle quitte volontairement son emploi sans justificationNote de bas de page 3. Il ne suffit pas d’avoir une bonne raison de quitter un emploi pour prouver que le départ était fondé.

[20] La loi explique ce que veut dire « être fondé à ». Elle dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi si son départ est la seule solution raisonnable, compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 4.

[21] Le prestataire est responsable de prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploiNote de bas de page 5. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnable. Pour trancher la question, je dois examiner toutes les circonstances présentes quand il a quitté son emploi.

[22] Le prestataire affirme qu’il a quitté son emploi parce que les conditions hivernales sont dangereuses et qu’il n’était pas logique de travailler moins d’heures dans de telles conditions.

[23] La Commission affirme que le prestataire n’était pas fondé à quitter son emploi parce que d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui. Plus précisément, elle dit que le prestataire aurait pu continuer à travailler jusqu’à ce que son employeur le mette à pied. La Commission affirme également que le prestataire aurait pu chercher un autre emploi qu’il pensait pouvoir occuper en hiver.

[24] Je conclus que quitter son emploi au moment où il l’a fait n’était pas la seule solution raisonnable dans le cas du prestataire. J’estime qu’il aurait pu conserver son emploi jusqu’à ce qu’il y ait une réduction réelle du travail et la fin de la saison. 

[25] Comme je l’ai mentionné plus haut, lors d’emplois précédents, le prestataire travaillait un nombre d’heures excédentaire pendant l’été et était mis à pied en décembre. Il a déclaré qu’en 2021, si son employeur lui avait dit qu’il pouvait lui donner au moins 40 heures par semaine en hiver, il aurait continué à travailler. Mais il a déclaré qu’autrement, cela n’aurait pas de sens.

[26] Le témoignage du prestataire concorde avec ce qu’il a dit à la Commission. Les notes de la Commission montrent que le prestataire a dit que dans le passé, durant l’hiver, le travail était lent et les conditions de conduite, dangereuses. Il a dit qu’avec cet employeur, il devait parfois travailler trois ou quatre heures et conduire toute la journée pour faire ce nombre d’heures.

[27] Je comprends qu’il n’était pas logique pour le prestataire d’avoir à travailler moins d’heures dans des conditions météorologiques difficiles. Cependant, je juge que sa décision de quitter son emploi était prématurée.

[28] Le prestataire a déclaré qu’on n’avait pas encore réduit ses heures de travail lorsqu’il a quitté son emploi. Il a dit que d’après son expérience, le travail ne diminuait pas petit à petit; il cessait tout simplement. Cependant, je ne suis pas convaincue que le travail avait cessé quand il est parti. J’accepte le témoignage du prestataire comme un fait et je conclus que son employeur lui a dit qu’il ne savait pas s’il aurait du travail pendant l’hiver.

[29] J’ai interrogé le prestataire au sujet de l’observation de la Commission selon laquelle il aurait pu conserver son emploi pendant qu’il cherchait un autre emploi qu’il croyait pouvoir occuper en hiver. Le prestataire a dit qu’il était toujours à la recherche de meilleures possibilités d’emploi.

[30] Je n’ai aucune raison de douter du témoignage du prestataire selon lequel il cherchait toujours un autre emploi. Cependant, je suis d’accord avec la Commission et je conclus qu’il aurait pu conserver son emploi jusqu’à ce qu’il soit mis à pied ou qu’il trouve une autre possibilité d’emploi.

[31] J’estime que le prestataire avait peut-être un motif valable de quitter son emploi quand il l’a fait. Cependant, je juge qu’il n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. En effet, j’estime que son départ n’était pas la seule solution raisonnable dans son cas.

[32] Le prestataire a soulevé de nombreuses questions au sujet du relevé d’emploi que son employeur lui a envoyé. Il a fait référence aux exigences détaillées dans la Loi sur les normes d’emploi. Ce n’est pas quelque chose qui relève de mon pouvoir. Je peux seulement décider si le prestataire a quitté son emploi sans justification. J’ai conclu que c’est ce qu’il a fait.

Conclusion

[33] Je conclus que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations.

[34] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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