Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : SA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 711

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : S. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (513712) datée du
20 août 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Kristen Thompson
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 7 mars 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 8 mars 2023
Numéro de dossier : GE-22-3141

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] L’appelante a perdu son emploi. L’employeur de l’appelante affirme qu’elle a été congédiée parce qu’elle est allée à l’encontre de sa politique de vaccination : elle ne s’est pas fait vacciner.

[4] Même si l’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé, elle affirme qu’aller à l’encontre de la politique de vaccination de son employeur n’est pas une inconduite.

[5] La Commission a accepté la raison de la suspension fournie par l’employeur. Elle a conclu que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, elle a décidé que l’appelante est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[6] L’appelante affirme que l’employeur aurait dû lui accorder une exemption pour des motifs religieux à la politique. Elle dit que la politique est contraire à plusieurs lois et principes juridiques, que le vaccin n’empêche pas la transmission, et qu’il est dangereux.

Question en litige

[7] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] La loi prévoit qu’une personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance‑emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cela s’applique, peu importe si l’employeur a congédié ou suspendu la personneNote de bas de page 2.

[9] Pour répondre à la question de savoir si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois déterminer pourquoi l’appelante a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère ce motif comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[10] Je considère que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle est allée à l’encontre de la politique de vaccination de son employeur.

[11] L’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé.

[12] La Commission affirme que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle s’est opposée à la politique de vaccination de son employeur.

[13] Je conclus qu’il est incontesté que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle s’est opposée à la politique de vaccination de son employeur.

La raison de la suspension de l’appelante est-elle une inconduite au sens de la loi?

[14] La raison de la suspension de l’appelante est une inconduite au sens de la loi.

[15] La Loi sur l’assurance-emploi ne précise pas ce qu’est une inconduite. Cependant, la jurisprudence (décisions des cours et tribunaux) nous montre comment établir si la suspension de l’appelante constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Elle énonce le critère juridique de l’inconduite, c’est-à-dire les questions et les critères à prendre en considération lors de l’examen de la question de l’inconduite.

[16] Selon la jurisprudence, pour être considérée comme une inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 3. L’inconduite comprend également une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 4. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de malNote de bas de page 5).

[17] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas de page 6.

[18] La loi ne dit pas que je dois tenir compte du comportement de l’employeurNote de bas de page 7. Je dois plutôt me concentrer sur ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait et sur la question de savoir si cela constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 8.

[19] Je dois me concentrer uniquement sur la Loi sur l’assurance-emploi. Je ne peux pas décider si l’appelante a d’autres options au titre d’autres lois. Il ne m’appartient pas de décider si l’appelante a été congédiée à tort ou si l’employeur aurait dû prendre des dispositions raisonnables pour l’appelanteNote de bas de page 9 (lui offrir des mesures d’adaptation). Je peux examiner une seule chose : la question de savoir si ce que l’appelante a fait ou omis de faire est une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[20] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante ait perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 10.

[21] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • l’employeur avait une politique de vaccination;
  • l’appelante connaissait la politique de l’employeur;
  • l’appelante a eu amplement le temps de se conformer à la politique;
  • la demande d’exemption pour motifs religieux de l’appelante a été rejetée par l’employeur.

[22] L’appelante affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite pour les raisons suivantes :

  • l’employeur aurait dû lui accorder une exemption à la politique pour des motifs religieux, médicaux et de conscience;
  • la politique est contraire à plusieurs lois et principes juridiques, y compris la Déclaration canadienne des droits, la Charte canadienne des droits et libertés, le Code criminel du Canada, les lois sur les droits de la personne, les lois sur la protection de la vie privée et les lois sur la santé;
  • le vaccin n’empêche pas la transmission;
  • la prise du vaccin entraîne des effets indésirables.

[23] La politique de vaccination de l’employeur prévoit que les membres du personnel doivent être entièrement vaccinés contre la COVID-19 au plus tard le 1er novembre 2021. Les membres du personnel qui ne respectent pas la politique pourraient être suspendus ou faire l’objet d’autres mesures disciplinairesNote de bas de page 11. La date limite a été reportée au 15 novembre 2021Note de bas de page 12.

[24] L’appelante a déclaré qu’elle n’a pas reçu le vaccin.

[25] L’appelante affirme avoir des allergies, y compris une allergie à la pénicilline. Elle dit qu’elle n’a pas pu obtenir un billet médical à l’appui d’une exemption médicale de la politique.

[26] L’appelante affirme avoir demandé une exemption pour motifs religieux de la politique à son employeur le 26 octobre 2021. Elle dit avoir joint une lettre à l’appui d’un chef religieux. L’employeur a rejeté sa demande dans une lettre datée du 1er novembre 2021Note de bas de page 13.

[27] L’appelante affirme avoir écrit à son employeur à plusieurs reprises, après le rejet de sa demande d’exemption, pour lui demander de réévaluer sa demande. Elle dit que son employeur n’a pas répondu.

[28] L’appelante affirme avoir été suspendue de son emploi le 15 novembre 2021. Ce jour-là, elle indique avoir été convoquée à une rencontre avec l’employeur et son chef syndical. Elle dit qu’on lui a annoncé qu’elle était suspendue parce qu’elle n’avait pas respecté la politique.

[29] L’employeur a remis à l’appelante la correspondance suivante :

  • Une lettre datée du 15 novembre 2021 indiquant qu’elle n’a pas respecté la politique. Elle précise que l’employeur exige que les membres du personnel soient entièrement vaccinés au plus tard le 15 novembre 2021. Elle indique également qu’elle est suspendue du 15 novembre 2021 au 1er février 2022. Elle précise que si elle se conforme à la politique, elle peut communiquer avec l’employeur au sujet de son retour au travailNote de bas de page 14.
  • Une lettre datée du 19 janvier 2022 indiquant qu’elle n’a pas respecté la politique. Elle précise que sa suspension sera prolongée jusqu’au 31 mars 2022Note de bas de page 15.
  • Une lettre datée du 19 mars 2022, indiquant que la politique a été modifiée et que l’appelante peut retourner au travail à compter du 4 avril 2022Note de bas de page 16.

[30] L’appelante affirme être retournée au travail le 4 avril 2022.

[31] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • l’employeur avait une politique de vaccination qui disait que les membres du personnel devaient être vaccinés contre la COVID-19;
  • l’employeur a clairement informé l’appelante de ce qu’il attendait des membres de son personnel en ce qui concerne la vaccination;
  • l’employeur a envoyé plusieurs lettres et a parlé à l’appelante pour lui faire part de ses attentes;
  • l’appelante connaissait ou aurait dû connaître les conséquences du non‑respect de la politique de vaccination de l’employeur.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[32] Selon mes conclusions précédentes, je conclus que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[33] En effet, les actions de l’appelante ont mené à sa suspension. Elle a agi délibérément. Elle savait que le refus de se faire vacciner allait probablement lui faire perdre son emploi.

Conclusion

[34] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[35] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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