Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 781

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse  : J. W.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 6 avril 2023
(GE-22-3284)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Date de la décision : Le 15 juin 2023
Numéro de dossier : AD-23-352

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, J. W. (prestataire), fait appel de la décision de la division générale. Celle‑ci a rejeté son appel. Elle a conclu qu’il n’avait pas démontré qu’il était disponible pour travailler. En conséquence, il était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[3] Selon le prestataire, la division générale a fait des erreurs de procédure, de compétence, de droit et de fait. Toutefois, la plupart des arguments du prestataire visent la question de savoir s’il a été congédié en raison d’une inconduite. L’appel porte sur la question de sa disponibilité pour le travail. Par conséquent, les arguments sur le congédiement du prestataire ne sont pas pertinents dans le présent appel.

[4] En ce qui concerne la question de la disponibilité, le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait sur la question de savoir s’il avait limité ses chances de retourner sur le marché du travail.

[5] Avant que l’appel du prestataire puisse aller de l’avant, je dois décider s’il a une chance raisonnable de succès. Autrement dit, il faut que la cause soit défendableNote de bas de page 1. Si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès, l’affaire est closeNote de bas de page 2.

[6] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Par conséquent, je refuse au prestataire la permission de passer à la prochaine étape de l’appel.

Question en litige

[7] Est‑il possible de soutenir que la division générale a fait une erreur de procédure, de compétence, de droit ou de fait?

Je refuse la permission de faire appel

[8] La division d’appel accorde la permission de faire appel à moins que l’appel n’ait aucune chance raisonnable de succès. Il y a une chance raisonnable de succès si la division générale a pu faire une erreur de compétence, de procédure, de droit ou un certain type d’erreur de faitNote de bas de page 3.

[9] Pour ce qui est des erreurs de fait, il faut que la division générale ait fondé sa décision sur une erreur qu’elle a commise de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Peut‑on soutenir que la division générale a fait une erreur de procédure, de compétence, de droit ou de fait?

[10] Selon le prestataire, la division générale a fait des erreurs de procédure, de compétence et de droit.

[11] Le formulaire Demande présentée à la division d’appel ‑ Assurance-emploi demande à la partie demanderesse d’expliquer pourquoi elle conteste la décision de la division générale. Le formulaire énumère quatre motifs possibles que la division d’appel peut prendre en considération. Les voici :

  • La division générale n’a pas respecté l’équité procédurale.
  • La division générale a commis une erreur de compétence.
  • La division générale a commis une erreur de droit.
  • La division générale a commis une erreur de fait importante.

[12] Le prestataire a coché les quatre cases. Mais il n’a cerné aucune erreur de procédure, de compétence ou de droit précise ni expliqué comment la division générale avait pu commettre un de ces types d’erreurs.

Le prestataire n’a relevé aucune erreur de procédure

[13] Aucun des arguments du prestataire ne porte sur la question de savoir si la procédure de la division générale a été équitable. Par exemple, il ne laisse pas entendre que la membre de la division générale ne l’a pas avisé adéquatement de la tenue de l’audience, qu’elle ne lui a pas divulgué certains documents de la façon appropriée ou qu’elle a fait quoi que ce soit qui aurait porté atteinte à son droit d’être entendu ou de présenter ses arguments.

[14] Le prestataire ne laisse pas non plus entendre que la membre de la division générale était partiale ou qu’elle avait préjugé l’appel.

[15] Le prestataire soutient que la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, aurait dû lui fournir des copies des lois applicables qui donnent à son employeuse le pouvoir de recueillir des renseignements personnels.

[16] Je comprends que le prestataire soutient que la divulgation de la preuve était incomplète, mais les arguments qu’il avance visent la Commission, et non la division générale. Pour établir l’existence d’une chance raisonnable de succès, les arguments du prestataire doivent porter sur une erreur commise par la division générale. De plus, les documents que le prestataire veut obtenir de la Commission n’ont rien à voir avec la question de la disponibilité.

[17] Comme les arguments du prestataire ne portent pas sur la question de savoir si la procédure de la division générale était équitable, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès sur ce point.

Le prestataire n’a relevé aucune erreur de compétence

[18] Le prestataire ne soutient pas que la division générale n’a pas examiné une question ou qu’elle s’est penchée sur une question qui dépassait sa compétence.

[19] Il a fait référence aux articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 29 aborde les circonstances où une personne est fondée à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé. L’article 30 porte sur l’exclusion pour inconduite ou pour un départ sans justification. On ne sait pas trop si le prestataire avance que la division générale aurait dû examiner ou appliquer les deux articles. Toutefois, aucun des articles n’est pertinent pour trancher la question de la disponibilité.

[20] Le prestataire a aussi parlé des circonstances entourant son congédiement. Il n’était pas d’accord avec la politique de vaccination de son employeuse pour plusieurs raisons. Il a soutenu qu’elle l’avait congédié à tort. Il a déposé un grief. Il semble laisser entendre que la division générale aurait dû régler ces questions. Toutefois, elles ne sont pas liées à la question de la disponibilité.

[21] Le prestataire affirme que, comme il avait déposé des griefs, il n’était pas approprié de chercher un emploi ailleurs. Il a peut-être raison, mais cet argument n’est pas du tout pertinent pour décider s’il était disponible pour travailler.

[22] Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’argument voulant que la division générale ait fait une erreur de compétence donne à l’appel une chance raisonnable de succès.

Le prestataire n’a relevé aucune erreur de droit

[23] Enfin, le prestataire soutient que la division générale a fait des erreurs de droit. Toutefois, rien ne laisse croire que la division générale a mal interprété la loi ou qu’elle a utilisé les mauvais éléments pour savoir s’il était disponible pour travailler. Elle a établi que le prestataire devait prouver trois choses :

  1. i. Il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable était disponible.
  2. ii. Il a fait des efforts pour trouver un emploi convenable.
  3. iii. Il n’a pas établi de conditions personnelles qui limitaient beaucoup trop ses chances de retourner au travail.

[24] La division générale a correctement énoncé les éléments que le prestataire devait prouver pour établir sa disponibilité. Elle a fait référence aux éléments retenus par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire FaucherNote de bas de page 4.

[25] Le prestataire conteste la façon dont la division générale a appliqué les éléments de la décision Faucher aux faits de l’affaire. Cependant, comme la Cour d’appel fédérale l’a affirmé dans l’affaire Quadir, l’application de principes établis aux faits est une question mixte de droit et de fait et ne constitue pas une erreur de droit. La division d’appel n’a pas le pouvoir de modifier les décisions de la division générale sur la base de questions mixtes de droit et de faitNote de bas de page 5, à moins qu’il y ait des erreurs de fait frappantes.

[26] Je vais vérifier s’il est possible de soutenir que la division générale a manifestement commis des erreurs de fait.

Le prestataire soutient que la division générale s’est trompée sur les faits entourant son programme de formation

[27] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait lorsqu’elle a conclu qu’il avait établi des conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner sur le marché du travail.

[28] Il a suivi un programme de formation. Il explique qu’il n’a pas abandonné le programme de formation, car il augmentait ses chances de retour au travailNote de bas de page 6.

[29] Mais le prestataire dit que sa participation au programme de formation n’était pas une condition personnelle qui limitait indûment ses chances de retourner sur le marché du travail. Il dit cela parce qu’il affirme que si on lui avait offert un poste, il aurait envisagé d’interrompre sa formationNote de bas de page 7. Autrement dit, il affirme que le programme de formation ne nuisait pas à sa disponibilité, car il aurait pu retourner au travail.

[30] Sur la question de savoir si le prestataire avait limité indûment ses chances de retourner travailler, la division générale a écrit ceci :

[49] [Le prestataire] a aussi dit au Tribunal qu’il avait décidé de façon intentionnelle de ne postuler à aucun autre emploi tant que son grief contre son ancienne employeuse n’était pas réglé.

[50] Il affirme que poser sa candidature pour un autre emploi serait malhonnête, car cela [traduction] « minerait les intérêts contractuels légitimes d’un nouveau contrat de travail conclu de mauvaise foi avec un nouvel employeur » [citation omise]. Il croit aussi que le fait de commencer à travailler pour une nouvelle entreprise violerait le contrat qu’il avait conclu de bonne foi avec son ancienne employeuse. Selon lui, ce contrat demeure en vigueur jusqu’à ce que son grief soit réglé, malgré le fait qu’il ait été congédié.

[51] Je juge qu’en suivant une formation à temps plein et en limitant ses options à une seule, soit un retour à son emploi précédent, [le prestataire] a fait des choix qui ont limité indûment sa capacité à retourner travailler.

(C’est moi qui souligne.)

[31] Le prestataire affirme qu’il ne limitait pas ses possibilités d’emploi. Il a soutenu que le développement de ses compétences professionnelles améliorait ses perspectives d’emploi. Il a ajouté qu’il faisait du bénévolat au sein de son industrieNote de bas de page 8.

[32] Au départ, le prestataire a dit à la Commission que s’il trouvait un emploi à temps plein, il abandonnerait sa formationNote de bas de page 9.

[33] Pourtant, certains éléments de preuve montrent aussi qu’il poursuivrait ses études. Il a dit à la Commission qu’il se concentrait sur ses études à temps plein et qu’il ne chercherait pas de travail avant d’avoir terminé sa formationNote de bas de page 10. C’est la raison pour laquelle il n’avait posé sa candidature nulle part.

[34] De toute évidence, certains éléments de preuve pouvaient mener à la conclusion que la formation que suivait le prestataire avait pour effet de limiter ses chances de reprendre le travail.

[35] Par la suite, le prestataire a confirmé qu’il n’avait pas essayé de trouver un autre emploi. Il a expliqué qu’il ne pouvait pas conclure un nouveau contrat de travail avant d’avoir réglé ses griefs contre son ancienne employeuseNote de bas de page 11.

[36] Le prestataire a aussi dit à la Commission qu’il était passé à autre chose et qu’il n’attendait plus le règlement des griefs contre son employeuseNote de bas de page 12. Mais la réintégration dans son emploi était un résultat possibleNote de bas de page 13.

[37] La division générale a considéré la formation du prestataire comme quelque chose qui limitait indûment ses chances de retourner travailler, mais il y avait aussi autre chose. Elle a aussi tenu compte du fait qu’il [traduction] « limit[ait] ses options à une seule, soit un retour à son emploi précédentNote de bas de page 14 » et de son grief toujours non réglé contre son employeuse. La division générale a conclu que ces deux éléments ont contribué à limiter indûment la capacité du prestataire à retourner au travail.

[38] La division générale a pu conclure que le prestataire avait établi des conditions personnelles lorsqu’il avait limité ses options (à la réintégration dans son ancien emploi) tout simplement parce qu’il n’avait pas essayé de trouver un autre emploi. Elle avait le droit de tirer cette conclusion, considérant la preuve dont elle disposait.

[39] Le prestataire avait peut-être une bonne raison de retarder ses recherches d’emploi le temps de régler ses griefs. Mais cela a contribué à l’établissement de conditions personnelles et le rendait non disponible pour le travail.

[40] Je ne suis pas convaincue qu’il soit possible de soutenir que la division générale a ignoré un élément de preuve essentiel, ou qu’elle a mal énoncé ou mal interprété un élément de preuve, ou qu’elle a tiré une conclusion abusive ou arbitraire. Ses conclusions concordaient avec les éléments de preuve portés à sa connaissance.

[41] Enfin, même si la division générale avait commis une erreur de fait sur l’établissement de conditions personnelles qui limitaient indûment les chances du prestataire de retourner sur le marché du travail, il y a deux autres éléments que le prestataire devait prouver pour démontrer sa disponibilité.

[42] Il devait aussi démontrer qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable était disponible et qu’il avait fait des efforts pour trouver un emploi convenable. La preuve montre que le prestataire n’a fait aucun effort pour essayer de trouver un autre emploi tant que ses griefs n’étaient pas réglés. Par conséquent, la division générale a conclu qu’il ne remplissait pas ces conditions. Le prestataire ne nie pas qu’il ne répondait pas aux deux autres conditions.

[43] De toute façon, comme le prestataire n’a pas été en mesure de prouver qu’il voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable était disponible ou qu’il avait fait des démarches pour trouver un emploi convenable, il n’aurait pas pu démontrer qu’il était disponible.

Conclusion

[44] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[45] La permission de faire appel est refusée. Cela met donc un terme à l’appel.

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