Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1082

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (477061) datée du
2 juin 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 26 avril 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 8 mai 2023
Numéro de dossier : GE-23-411

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelant concernant sa disponibilité.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant ses études (du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021). Par conséquent, il est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pendant cette période.

Aperçu

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que l’appelant n’était pas admissible au bénéfice des prestations régulières de l’assurance-emploi du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021 parce qu’il n’était pas disponible pour travailler. Une partie appelante doit être disponible pour travailler pour recevoir des prestations régulières de l’assurance-emploi. La disponibilité est une exigence continue. Cela signifie qu’une partie appelante doit être à la recherche d’un emploi.

[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé qu’il était disponible pour travailler. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il était disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que l’appelant n’était pas disponible parce qu’il était aux études à temps plein et qu’il n’a pas cherché de travail pendant ses études.

[6] L’appelant n’est pas d’accord; il affirme que son horaire de cours lui permettait de travailler pendant ses études et qu’il a effectivement travaillé pendant cette période. Il dit aussi qu’il cherchait du travail alors qu’il était aux études.

Questions que je dois examiner en premier

J’accepte les documents envoyés après l’audience

[7] L’appelant a envoyé des documents après l’audienceNote de bas de page 1. Pendant l’audience, j’ai convenu de les accepter, car ils portent sur la disponibilité de l’appelant pendant ses études.

L’appelant n’a pas été dirigé vers un programme d’études

[8] L’appelant et la Commission étaient d’abord en désaccord sur la question de savoir si l’appelant avait reçu une approbation lui permettant de suivre une formation. L’appelant a soutenu que l’Alberta Student Aid [aide financière aux personnes aux études de l’Alberta] avait approuvé sa formationNote de bas de page 2. Cependant, la Commission a affirmé que l’Alberta Student Aid n’était pas une organisation reconnue et qu’on avait simplement accordé un prêt à l’appelant pour ses études, alors rien ne prouvait qu’il avait été autorisé à suivre une formationNote de bas de page 3.

[9] À l’audience, l’appelant a déclaré qu’il comprenait maintenant qu’il n’avait pas reçu d’approbation permettant de suivre une formation et qu’il ne voulait plus contester cette question. Cependant, il a également déclaré qu’il estimait que la Commission lui avait d’abord donné l’impression que sa formation avait été approuvée parce qu’elle n’avait soulevé aucun problème concernant son premier questionnaire sur la formation (qui mentionnait l’Alberta Student Aid) après qu’il l’a envoyé.Note de bas de page 4

[10] Comme l’appelant et la Commission s’entendent maintenant sur le fait que la formation n’est pas approuvée, je n’examinerai pas cette question plus en détail dans la présente décision.

[11] Quant aux commentaires de l’appelant sur le fait que la Commission n’a rien mentionné lorsqu’il lui a transmis pour la première fois des renseignements sur ses études, je vais en tenir compte plus loin. Je le ferai au moment d’examiner si la Commission a agi de façon judiciaire lorsqu’elle a décidé de revenir en arrière et d’examiner la demande de prestations de l’appelant.

Inadmissibilité aux termes de l’article 50(8)

[12] La Commission affirme qu’elle n’a pas déclaré l’appelant inadmissible aux termes de l’article 50(8) de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 5. Cet article prévoit que la Commission peut exiger d’une personne qu’elle prouve qu’elle a fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.

[13] Puisque la Commission n’a pas déclaré l’appelant inadmissible aux termes de l’article 50(8) de la Loi, je conclus que l’appelant n’est pas inadmissible au titre de cette partie de la loi. Par conséquent, ce n’est pas une chose dont je dois tenir compte ici.

Question en litige

[14] La Commission peut-elle revenir en arrière et examiner la demande de prestations de l’appelant?

[15] La Commission a-t-elle agi de façon judiciaire lorsqu’elle a décidé de revenir en arrière et d’examiner la demande de prestations de l’appelant?

[16] L’appelant était-il disponible pour travailler?

Analyse

La Commission peut-elle revenir en arrière et examiner la demande de prestations de l’appelant?

[17] Oui, c’est possible. La loi permet à la Commission de le faire.

[18] Deux articles de loi permettent à la Commission de revenir en arrière et d’examiner une demande.

[19] Premièrement, pendant la pandémie mondiale de COVID-19, le gouvernement a modifié temporairement la Loi sur l’assurance-emploi et a ajouté l’article 153.161, qui est entré en vigueur le 27 septembre 2020Note de bas de page 6.

[20] Cette mesure temporaire liée à la pandémie a donné à la Commission le pouvoir de vérifier qu’une partie appelante qui suit un « cours ou un programme d’instruction ou de formation non dirigé » est admissible aux prestations d’assurance-emploi en exigeant la preuve qu’elle était disponible pour travailler pour tout jour ouvrable de sa période de prestations à tout moment après le versement des prestations. Cela signifie que la vérification de l’admissibilité a lieu après le versement des prestations.

[21] Cette disposition s’applique à l’appelant parce que sa demande de prestations régulières d’assurance-emploi a commencé le 4 octobre 2020Note de bas de page 7 et qu’il a présenté une demande de renouvellement de prestations le 17 décembre 2020. De plus, l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi s’applique à toute demande de prestations régulières d’assurance-emploi ayant commencé entre le 27 septembre 2020 et le 25 septembre 2021.

[22] Par conséquent, je considère que la Commission a respecté les paramètres établis par le législateur pendant la pandémie. De plus, elle pouvait revenir en arrière et demander à l’appelant de vérifier son admissibilité aux prestations d’assurance-emploi en démontrant qu’il était disponible pour le travail alors qu’il était aux études du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021.

[23] Un article différent de la Loi sur l’assurance-emploi permet également à la Commission de modifier la décision initiale de verser des prestations d’assurance-emploi si une partie appelante n’est pas en mesure de vérifier son admissibilité.

[24] L’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi permet à la Commission d’examiner de nouveau (modifier) une demande de prestations d’assurance-emploi dans les 36 mois suivant le versement des prestationsNote de bas de page 8.

[25] La Commission a respecté ce délai pour la demande de l’appelant. Les prestations d’assurance-emploi en cause dans la présente affaire ont été versées pour la période allant du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021. La Commission a d’abord demandé à l’appelant, le 15 décembre 2021Note de bas de page 9, de vérifier sa disponibilité pour le travail au cours de cette période. Ensuite, le 31 décembre 2021Note de bas de page 10, la Commission a modifié sa décision concernant l’admissibilité de l’appelant aux prestations d’assurance-emploi au cours de cette même période. Cette vérification a été faite dans les 36 mois suivant le versement à l’appelant de la première semaine de prestations d’assurance-emploi (qui commençait le 10 janvier 2021).

[26] Par conséquent, je considère que la Commission a agi conformément à la loi et qu’elle pouvait revenir en arrière pour vérifier et examiner de nouveau (modifier) sa décision concernant l’admissibilité de l’appelant aux prestations d’assurance-emploi.

[27] Ainsi, les articles 52 et 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi permettent à la Commission de revenir en arrière et de vérifier l’admissibilité d’une partie appelante aux prestations d’assurance-emploi qu’elle a reçues et d’imposer un trop-payé, s’il y a lieuNote de bas de page 11.

La Commission a-t-elle agi de façon judiciaire lorsqu’elle a décidé de revenir en arrière et d’examiner la demande de prestations de l’appelant?

[28] Bien que la Commission puisse revenir en arrière et examiner la demande de prestations de l’appelant pour la période allant du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021, sa décision de le faire est discrétionnaire.

[29] Autrement dit, la Commission n’a pas à faire d’examen, mais elle peut choisir de le faire si elle le souhaite. Les deux articles qui permettent à la Commission de faire un examen disent qu’elle peut examiner une demande, mais non qu’elle doit le faire.

[30] Cela signifie que je peux seulement modifier la décision de la Commission si celle-ci n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire correctement lorsqu’elle a rendu sa décisionNote de bas de page 12.

[31] Pour que la Commission ait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, elle ne doit pas avoir agi de mauvaise foi ou dans un but ou pour un motif irrégulier, pris en compte un facteur non pertinent, ignoré un facteur pertinent ou agi de manière discriminatoire lorsqu’elle a décidé d’examiner la demande de prestations de l’appelant pour la période allant du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021.

[32] L’appelant a déclaré que la Commission avait d’abord approuvé sa demande de prestations. Puis, près d’un an plus tard, elle lui avait dit qu’il ne pouvait pas vraiment recevoir de prestations. Cependant, l’appelant a aussi déclaré qu’il comprend maintenant que la Commission a assoupli ses exigences pendant la pandémie; il ne lui en veut donc pas pour cette raison.

[33] La Commission fait valoir qu’elle n’a pas agi de mauvaise foi. Elle affirme avoir automatiquement approuvé la demande de prestations de l’appelant en janvier 2021 conformément à l’arrêté provisoire no 10, qui était une mesure temporaire mise en place pendant la pandémieNote de bas de page 13.

[34] La Commission affirme que l’appelant a ensuite présenté une autre demande de prestations en octobre 2021 qui indiquait qu’il avait été dirigé vers un programme d’études, mais ne comprenait aucune pièce justificative. La Commission a examiné cette demande et a recueilli de nouveaux renseignements dans le cadre de ce processus, ce qui l’a amenée à conclure que l’appelant n’était pas réellement admissible aux prestations pendant ses étudesNote de bas de page 14.

[35] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi le 17 décembre 2020. Je constate qu’il a répondu « non » à la question « suivez-vous ou suivrez-vous un cours ou un programme de formation? », à laquelle il fallait répondre « oui » ou « nonNote de bas de page 15 ». Je remarque également que l’appelant a accepté l’attestation avant de présenter sa demande, déclarant qu’à sa connaissance, les renseignements qu’il a fournis en répondant aux questions étaient véridiquesNote de bas de page 16.

[36] Je constate que l’appelant a commencé à recevoir des prestations d’assurance-emploi au cours de la semaine du 10 janvier 2021Note de bas de page 17.

[37] Je remarque également que l’appelant a ensuite présenté un questionnaire sur la formation le 16 janvier 2021. Le questionnaire indiquait qu’il avait commencé ses études avec l’approbation du gouvernement donnée par l’Alberta Student Aid en date du 11 janvier 2021Note de bas de page 18.

[38] Selon moi, puisque l’appelant n’a pas indiqué qu’il était aux études dans sa demande de prestations, il ne peut pas dire que la Commission savait qu’il était étudiant lorsqu’il a commencé à recevoir des prestations. Ce n’était pas le cas. Il a présenté son questionnaire de formation après l’approbation automatique de sa demande et après avoir commencé à recevoir des prestations.

[39] Je n’ai pas non plus d’éléments de preuve montrant que la Commission a examiné les études de l’appelant avant qu’il commence à recevoir des prestations. La Commission affirme qu’elle ne l’a pas fait et le dossier qu’elle a préparé ne contient aucune information concernant ses conversations avec l’appelant qui me permettrait de croire qu’elle l’a fait.

[40] Je suis déçu que la Commission ait attendu aussi longtemps pour revenir en arrière et examiner la demande de prestations de l’appelant. Elle avait de nouveaux renseignements fournis par l’appelant au sujet de ses études et elle aurait pu agir plus tôt. Je maintiens cependant qu’elle a respecté la loi et il ne s’agit pas de mauvaise foi.

[41] La loi permet à la Commission d’examiner une demande, quelle qu’en soit la raison. Le fait qu’elle ait pu verser des prestations à l’appelant initialement ne l’empêche pas de décider d’examiner la demande qu’il a présentée. Je conclus donc que le choix de la Commission d’exercer ce pouvoir que lui confère la loi n’est pas de la mauvaise foi.

[42] L’appelant a déclaré qu’il ne croit pas que la Commission a agi dans un but ou pour un motif irrégulier. Il a affirmé qu’il comprend maintenant que la Commission a assoupli ses exigences pendant la pandémie et qu’il ne lui en veut pas à cause de cela, comme je l’ai mentionné plus haut.

[43] Je conclus que la Commission n’a pas agi dans un but ou pour un motif irrégulier. L’appelant ne pense pas qu’elle l’a fait et je ne vois aucune preuve qui me permettrait de conclure que c’est le cas.

[44] L’appelant a déclaré que la Commission a tenu compte d’un facteur non pertinent parce qu’elle n’a pas examiné tous les faits. Il ajoute que si elle l’a fait, elle a pu voir qu’il travaillait et cherchait du travail.

[45] J’estime que la Commission n’a pas pris en compte un facteur non pertinent.

[46] Je comprends l’argument de l’appelant, mais il n’a rien à voir avec cette question. L’argument porte plutôt sur la suivante, à savoir si la Commission a ignoré un facteur pertinent, et je l’aborderai ici.

[47] Concernant cette question, j’estime que l’appelant n’a signalé aucun élément inclus par la Commission qui, selon lui, n’aurait pas dû l’être. Je ne vois rien non plus dont la Commission a tenu compte qui ne soit pas pertinent. Par conséquent, sans autre preuve, je ne peux pas conclure qu’elle a pris en compte un facteur non pertinent.

[48] Je conclus que la Commission n’a pas ignoré un facteur pertinent.

[49] Je comprends les préoccupations de l’appelant, selon lesquelles la Commission n’a pas tenu compte du fait qu’il a commencé à travailler en novembre 2021 et de ses démarches pour trouver du travail lorsqu’elle a décidé de réviser sa disponibilité, mais je n’ai aucune preuve indiquant que la Commission a fait cela.

[50] De plus, la Commission ne doit pas seulement prendre en compte le statut d’emploi d’une partie appelante avant d’examiner sa disponibilité. Elle peut tenir compte d’autres facteurs dans le cadre de ce processus, y compris la question de savoir si une personne a fourni des renseignements dans un questionnaire sur la formation, comme l’appelant l’a fait dans la présente affaire.

[51] L’appelant a déclaré qu’il ne croit pas que la Commission a fait preuve de discrimination à son égard.

[52] Je conclus que la Commission n’a pas fait preuve de discrimination à l’égard de l’appelant. L’appelant ne pense pas qu’elle l’a fait et je ne vois aucune preuve qui me permettrait de conclure que c’est le cas.

[53] Par conséquent, je conclus que la décision de la Commission d’examiner la disponibilité de l’appelant a été prise de façon judiciaire.

[54] Je vais donc maintenant passer à l’analyse de la disponibilité de l’appelant du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021.

L’appelant était-il disponible pour travailler pour la période allant du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021?

[55] L’appelant était aux études pendant sa période d’inadmissibilité. Selon la Cour d’appel fédérale, il existe une présomption selon laquelle les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travaillerNote de bas de page 19.

[56] Ainsi, la première chose que je dois faire est de vérifier si cette présomption s’applique à l’appelant.

[57] L’appelant reconnaît qu’il étudiait à temps plein, et rien ne démontre que ce n’est pas le cas. J’accepte donc le fait que l’appelant était aux études à temps plein et que la présomption s’applique à lui.

[58] Cependant, l’appelant peut réfuter la présomption, ce qui signifie qu’elle ne s’appliquera pas, s’il peut démontrer qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux étudesNote de bas de page 20. Il peut aussi démontrer qu’il existe des circonstances exceptionnelles dans son casNote de bas de page 21.

[59] Je remarque que l’appelant a fourni une lettre d’emploi indiquant qu’il travaillait à temps plein du 2 novembre 2021 au 12 janvier 2022Note de bas de page 22. Il a également fourni des talons de paie qui montrent qu’il a travaillé 61 heures du 2 novembre 2021 au 15 novembre 2021, 75 heures du 16 novembre 2021 au 30 novembre 2021 et 79 heures du 1er décembre 2021 au 15 décembre 2021Note de bas de page 23.

[60] Je conclus que l’appelant n’a pas réfuté la présomption selon laquelle il n’est pas disponible pour travailler.

[61] Je reconnais que l’appelant a fourni des éléments de preuve montrant qu’il travaillait pendant une partie de ses études, plus précisément du 2 novembre 2021 au 10 décembre 2021.

[62] Cependant, j’estime tout de même que l’appelant n’a pas fourni assez d’éléments de preuve pour démontrer qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant également aux études. En effet, selon la jurisprudence récente, cet historique doit s’échelonner sur plusieurs annéesNote de bas de page 24.

[63] Autrement dit, je conclus que l’appelant n’a pas démontré qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux études parce qu’il n’y a aucune preuve qu’il l’a fait avant novembre 2021.

[64] Je conclus également que l’appelant n’a pas démontré l’existence de circonstances exceptionnelles qui lui permettraient de réfuter la présomption. À l’audience, il n’a rien dit qui me permettrait de croire à l’existence de circonstances exceptionnelles dans son cas.

[65] L’appelant n’a donc pas réfuté la présomption selon laquelle il n’est pas disponible pour travailler.

[66] Jusqu’à maintenant, la Cour d’appel fédérale n’a pas établi de lien entre la présomption et les articles de loi traitant de la disponibilité. Puisque ce lien n’est pas clair, je vais poursuivre mon examen de ces articles de loi, même si j’ai déjà conclu que l’appelant est présumé ne pas être disponible.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[67] Je dois vérifier si l’appelant était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 25. La jurisprudence établit trois éléments à examiner pour rendre ma décision. L’appelant doit prouver les trois éléments suivantsNote de bas de page 26 :

  1. a) montrer qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. b) faire des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. c) éviter d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire limiteraient trop) ses chances de retourner travailler.

[68] Au moment d’examiner chacun de ces éléments, je dois prendre en considération l’attitude et la conduite de l’appelantNote de bas de page 27.

Vouloir retourner travailler

[69] L’appelant a montré qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.

[70] C’est ce que l’appelant a dit à la Commission et il a déclaré qu’il voulait retourner travailler tout en étant aux études. Je ne vois aucune preuve qui contredise ce qu’il a dit.

[71] L’appelant a également fourni des éléments de preuve montrant qu’il travaillait pendant ses études, plus précisément du 2 novembre 2021 au 10 décembre 2021, comme je l’ai mentionné plus haut.

[72] Compte tenu de cette preuve, je conclus que l’appelant avait le désir de travailler pendant toute sa période d’inadmissibilité (alors qu’il était aux études).

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[73] L’appelant n’a pas fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi convenable pendant la majeure partie de sa période d’inadmissibilité.

[74] L’appelant a déclaré qu’il cherchait activement du travail tout en étant aux études. Il a dit qu’il a surtout fait des recherches en ligne sur le site Indeed, qui lui envoyait des offres d’emploi presque toutes les heures de la journée. Il a également déclaré avoir finalement trouvé un emploi à temps plein (à compter du 2 novembre 2021) grâce à ces démarches.

[75] L’appelant a d’abord fourni des éléments de preuve qui, selon lui, montrent qu’il cherchait du travail alors qu’il était aux études. Cependant, je remarque que tous ces éléments de preuve datent de janvier 2020 à septembre 2020, soit avant le début de la période d’inadmissibilité de l’appelant (le 12 janvier 2021)Note de bas de page 28.

[76] L’appelant a déclaré qu’il avait commis une erreur en envoyant cette preuve et qu’il enverrait les bons documents après l’audience. Je lui ai dit que je les accepterais, comme je l’ai mentionné plus haut.

[77] L’appelant a envoyé les documents suivants après l’audience :

[78] L’appelant affirme que ces documents sont les résultats de ses recherches d’emploi sur les sites Web Indeed et Glassdoor, mais que Glassdoor n’incluait pas les datesNote de bas de page 32. Cela m’amène à conclure que les quatre offres d’emploi non datées proviennent de Glassdoor et que les deux autres offres qui comprennent des dates proviennent d’Indeed.

[79] J’estime que ces documents ne démontrent pas que l’appelant cherchait activement du travail pendant ses études, comme il l’affirme.

[80] Même si j’admets que les offres d’emploi de Glassdoor datent du moment où l’appelant était aux études, je suis d’avis qu’il n’y a aucune preuve qu’il a effectivement postulé l’un ou l’autre de ces emplois. Il a seulement démontré qu’il a trouvé ces emplois en ligne.

[81] Je constate également que l’appelant a présenté seulement deux offres d’emploi d’Indeed, même s’il a déclaré avoir reçu des offres de ce site Web presque toutes les heures de la journée, comme je l’ai mentionné plus haut. J’estime raisonnable de croire que s’il avait reçu des offres d’emploi de ce site à cette fréquence, il aurait pu en présenter plus de deux ou expliquer pourquoi il ne pouvait pas le faire.

[82] De plus, je remarque que l’une des offres d’Indeed était datée du 12 décembre 2021, soit après la fin de la période d’inadmissibilité de l’appelant (le 10 décembre 2021). Autrement dit, il a présenté une seule offre d’emploi de ce site Web à partir du moment où il était aux études.

[83] Par conséquent, je conclus qu’il y a des lacunes importantes dans la preuve de l’appelant concernant ses démarches de recherche d’emploi pendant ses études. Il a fourni cinq offres d’emploi seulement pour toute la durée de ses études, même s’il a dit qu’il en recevait régulièrement pendant cette période. De plus, il n’a fourni aucune preuve montrant qu’il a même postulé l’un ou l’autre de ces emplois. Ainsi, je n’accorde pas beaucoup d’importance à cet élément de preuve.

[84] L’appelant a déclaré que la lettre relative à l’emploi qu’il a commencé le 2 novembre 2021 montre qu’il a cherché du travail et présenté des demandes d’emploi alors qu’il était aux études.

[85] Malheureusement, je ne suis pas du tout d’accord avec l’appelant.

[86] Je reconnais que la lettre indique que l’appelant a commencé à travailler le 2 novembre 2021. J’admets aussi que le document indique que l’employeur a trouvé le curriculum vitae de l’appelant sur Indeed en octobre 2021.

[87] Cependant, j’estime que la lettre n’apporte aucune nouvelle information sur les démarches de l’appelant pour se trouver du travail pendant ses études. Elle ne précise pas quand l’appelant a affiché son curriculum vitae ni s’il l’a mis à jour régulièrement. Le document ne précise pas non plus s’il a postulé des emplois provenant d’Indeed avant de commencer à travailler en novembre 2021 ou après cette date.

[88] De plus, j’estime que l’appelant a fourni des éléments de preuve (plus précisément une offre d’emploi) montrant qu’il utilisait Indeed à un moment donné alors qu’il était aux études, comme je l’ai mentionné plus haut. La lettre confirme donc simplement une chose déjà connue.

[89] Autrement dit, je suis d’avis que la lettre montre seulement que l’appelant utilisait Indeed alors qu’il était aux études, et non à quelle fréquence et dans quelle mesure il l’utilisait. Selon moi, cela signifie que la lettre ne dresse pas un portrait clair de ses démarches pour trouver du travail pendant cette période. Ainsi, je n’accorde pas beaucoup d’importance à la lettre dans ce cas-ci non plus.

[90] J’estime également que le témoignage de l’appelant concernant ses démarches de recherche d’emploi n’était pas convaincant. À l’audience, il a dit très clairement qu’il était actif sur des sites d’emplois pendant ses études et qu’il recevait de nombreux courriels chaque jour au sujet d’offres d’emploi. Par la suite, il a déposé très peu d’éléments de preuve à l’appui de ce témoignage, comme je l’ai mentionné plus haut.

[91] Par conséquent, je ne suis pas convaincu que le témoignage de l’appelant au sujet de ses démarches de recherche d’emploi concorde avec la preuve qu’il a envoyée plus tard. C’est pourquoi je n’accorde pas beaucoup d’importance à son témoignage dans ce cas-ci non plus.

[92] Dans l’ensemble, je suis d’avis qu’il n’y a pas assez d’éléments de preuve pour démontrer que l’appelant cherchait activement du travail pendant ses études, comme il l’affirme. En effet, je ne suis pas convaincu que la preuve qu’il a fournie (cinq offres d’emploi seulement) montre que sa recherche d’emploi était suffisante ou qu’il a fait des démarches continues pendant cette période. Son témoignage ne me convainc pas non plus, car il laisse une impression différente de ses démarches de recherche d’emploi comparativement au reste de sa preuve.

[93] Par conséquent, je conclus que l’appelant n’a pas fait des démarches suffisantes pour trouver un emploi pendant toute sa période d’inadmissibilité.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[94] L’appelant a établi des conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner travailler.

[95] L’appelant a déclaré qu’il était disponible pour travailler à tout moment alors qu’il était aux études. Il a dit que son horaire était très souple, car il suivait ses cours en ligne seulement et ils étaient peu nombreux. Il a dit que cela lui permettait d’être disponible pour travailler pendant la journée et d’étudier en soirée.

[96] Cependant, l’appelant a également déclaré qu’il ne pouvait pas travailler les jours où il avait des dates limites de remise de travaux scolaires parce qu’il devait les terminer pendant la journée (plutôt que d’étudier le soir comme il le faisait le reste du temps).

[97] J’ai demandé à l’appelant combien de fois il avait des dates de remise de travaux scolaires. Il a déclaré qu’il devait en remettre environ une fois par semaine.

[98] J’ai également demandé à l’appelant quel était son horaire de travail lorsqu’il a commencé son emploi en novembre 2021. Il a dit qu’il travaillait presque toujours du lundi au vendredi de 8 h 30 à 17 h.

[99] J’estime que le programme d’études de l’appelant était une condition personnelle qui limitait trop sa capacité de retourner sur le marché du travail pendant la majeure partie du temps où il a été aux études, plus précisément lorsqu’il devait remettre des travaux en respectant une date limite dans le cadre des cours qu’il suivait.

[100] Je reconnais que l’appelant avait un horaire scolaire flexible qui lui permettait d’être disponible la plupart du temps.

[101] Cependant, je suis d’avis que l’appelant a confirmé qu’il ne pouvait pas travailler en moyenne une fois par semaine parce qu’il devait remettre des travaux scolaires en respectant un échéancier. Autrement dit, sa disponibilité était limitée chaque semaine aux jours où il n’avait pas de dates limites, ce qui aurait diminué ses chances de trouver du travail, car il n’aurait pas pu occuper des emplois ayant un horaire de travail fixe (non flexible).

[102] En d’autres mots, je considère que les chances de l’appelant de se trouver du travail étaient limitées puisqu’il pouvait seulement accepter des emplois lui permettant de travailler en fonction de son horaire de cours (plus précisément en fonction de l’échéancier de remise de ses travaux scolaires)Note de bas de page 33.

[103] Bien que l’appelant ait déclaré qu’il était également disponible la fin de semaine, j’examine seulement sa disponibilité pour les jours ouvrables et selon la loi, le samedi et le dimanche ne sont pas des jours ouvrablesNote de bas de page 34.

[104] Je reconnais que l’appelant a déclaré qu’il avait un horaire régulier (du lundi au vendredi, de 8 h 30 à 17 h) lorsqu’il travaillait à temps plein pendant ses études.

[105] Cependant, j’estime qu’il y a aussi des éléments de preuve montrant que l’horaire scolaire de l’appelant a changé peu de temps après qu’il a commencé à travailler. Son calendrier de formation montre que ses cours ont pris fin le 14 novembre 2021 et qu’il a fait un stage pendant les quatre dernières semaines de son programme (du 15 novembre 2021 au 12 décembre 2021)Note de bas de page 35.

[106] Comme la formation de l’appelant est passée de cours à un stage le 15 novembre 2021, je juge raisonnable de croire qu’il n’avait pas d’autres dates limites de remise de travaux en date du 15 novembre 2021, car un stage type comporte habituellement plus d’apprentissage pratique à l’extérieur de la salle de classe.

[107] Autrement dit, je suis d’avis que l’appelant a probablement pu travailler selon un horaire fixe dans le cadre de son nouvel emploi seulement parce qu’il est passé de cours à un stage peu de temps après avoir commencé à y travailler, ce qui voulait dire qu’il n’avait plus de dates limites à respecter pour la remise de travaux. Je pense qu’il est raisonnable de croire que cela n’aurait pas été possible avant le 15 novembre 2021 puisque l’appelant avait encore des cours et qu’il a dit qu’il ne pouvait pas travailler les jours où il avait à remettre des travaux.

[108] Ainsi, je conclus que des restrictions limitaient indûment la capacité de l’appelant de trouver du travail pendant la majeure partie de ses études, plus précisément au moment où il suivait des cours, du 12 janvier 2021 au 14 novembre 2021. Cependant, je juge qu’il n’avait aucune restriction alors qu’il effectuait son stage à la fin de son programme d’études, soit du 15 novembre 2021 au 10 décembre 2021.

Somme toute, l’appelant était-il capable de travailler et disponible pour le faire?

[109] Selon mes conclusions sur les trois éléments, je suis d’avis que l’appelant n’était pas disponible pour travailler pour la période allant du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021. Il a démontré qu’il avait le désir de travailler pendant cette période et qu’il n’avait aucune restriction qui limitait indûment ses chances de trouver du travail entre le 15 novembre 2021 et le 10 décembre 2021 (une fois qu’il a commencé son stage). Cependant, il n’a pas démontré qu’il a fait des démarches suffisantes pour trouver du travail pendant ses études ni qu’il avait évité d’établir des restrictions limitant indûment ses chances de trouver du travail entre le 12 janvier 2021 et le 14 novembre 2021 (puisqu’il avait encore des cours et des échéanciers de remise de travaux à ce moment-là).

[110] Bien que je sois sensible à la situation de l’appelant, qui fait maintenant face à un trop-payé important, je n’ai pas le pouvoir de l’effacer, quelles que soient les circonstancesNote de bas de page 36. La loi ne me permet pas de le faire, même si je conclus que la situation est injuste. La partie appelante demeure responsable du remboursement d’un trop-payéNote de bas de page 37.

[111] Voici quelques options pour l’appelant :

  • Il peut demander à la Commission d’envisager d’annuler la dette en raison d’un préjudice abusifNote de bas de page 38. Si la réponse de la Commission ne lui est pas favorable, l’appelant peut faire appel devant la Cour fédérale du Canada.
  • Il peut communiquer avec le Centre d’appels de la gestion des créances de l’Agence du revenu du Canada au 1-866-864-5823 pour demander un plan de remboursement ou toute autre mesure permettant d’alléger sa detteNote de bas de page 39.

Conclusion

[112] L’appelant n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi du 12 janvier 2021 au 10 décembre 2021. Pour cette raison, je conclus que l’appelant est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi pendant cette période.

[113] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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