Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1114

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. B.
Représentante ou représentant : K. B.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (452400) datée du 4 février 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Amanda Pezzutto
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 15 juin 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 11 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-22-3776

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Décision

[1] R. B. est l’appelante dans cette affaire. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé de ne pas lui verser de prestations d’assurance-emploi. L’appelante fait appel de cette décision auprès du Tribunal de la sécurité sociale.

[2] J’accueille l’appel en partie. Je considère que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler du 4 octobre 2020 au 30 juin 2021. Elle n’a donc pas droit aux prestations d’assurance-emploi pendant cette période où elle ne peut pas prouver sa disponibilité.

[3] Cependant, je considère qu’elle a prouvé qu’elle était disponible pour travailler à partir du 1er juillet 2021. Par conséquent, elle a droit aux prestations d’assurance-emploi à partir de cette date, pourvu qu’elle remplisse toutes les autres conditions.

Aperçu

[4] L’appelante a reçu la prestation d’assurance-emploi d’urgence. La Commission l’a remplacée par des prestations régulières d’assurance-emploi à partir du 4 octobre 2020. Cependant, dans chacune de ses déclarations bimensuelles, l’appelante a mentionné qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Elle a expliqué à la Commission qu’elle craignait d’attraper la COVID-19 si elle allait travailler. La Commission a donc décidé qu’elle n’avait pas droit aux prestations d’assurance-emploi parce qu’elle n’avait pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler.

[5] La Commission affirme que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler et admissible aux prestations d’assurance-emploi. La Commission explique que l’appelante n’a pas cherché d’emploi avant d’être vaccinée contre la COVID-19. Elle précise que l’appelante devait être à la recherche d’un emploi pour recevoir des prestations d’assurance-emploi.

[6] L’appelante n’est pas d’accord avec la décision de la Commission. Elle dit qu’elle voulait travailler et qu’elle a toujours été prête à le faire. Elle ajoute qu’elle a essayé de se trouver un emploi, mais que personne ne voulait l’embaucher.

Question que je dois examiner en premier

La division d’appel a renvoyé cette affaire à la division générale

[7] Au début, la division générale a accueilli l’appel de l’appelante. Ensuite, la Commission a fait appel de cette décision devant la division d’appel, qui a accueilli l’appel de la Commission.

[8] La division d’appel affirme que la division générale doit réexaminer l’affaire. Je dois alors rendre une nouvelle décision pour établir si l’appelante a prouvé qu’elle était disponible pour travailler.

Question en litige

[9] L’appelante était-elle disponible pour travailler?

Analyse

[10] Deux articles de loi différents exigent que la partie prestataire démontre qu’elle est disponible pour travailler.

[11] Premièrement, la Loi sur l’assurance-emploi dit qu’une partie prestataire doit prouver qu’elle fait des « démarches habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. Le Règlement sur l’assurance-emploi donne des exemples qui aident à expliquer ce que signifie « démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 2  ».

[12] Deuxièmement, la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la partie prestataire doit prouver qu’elle est « capable de travailler et disponible à cette fin », mais qu’elle est incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 3. La jurisprudence énonce trois éléments que la partie prestataire doit prouver pour démontrer qu’elle est « disponible » en ce sensNote de bas de page 4 .

[13] La partie prestataire doit prouver qu’elle est disponible pour travailler selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est disponible pour travailler.

[14] La Commission affirme avoir refusé les prestations d’assurance-emploi à l’appelante selon les deux parties de la loi sur la disponibilité. Je vais donc examiner les deux parties pour décider si l’appelante a prouvé qu’elle était disponible pour travailler.

Démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi

[15] Pour rendre sa décision sur l’admissibilité de l’appelante aux prestations d’assurance-emploi, la Commission affirme avoir évalué ses démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. Je ne suis pas d’accord. Je ne pense pas que la Commission ait vraiment évalué cette partie de la loi dans sa décision.

[16] La Commission n’a pas demandé à l’appelante de fournir un dossier de recherche d’emploi. Elle ne l’a pas avertie que ses démarches étaient insuffisantes. Elle ne lui a pas expliqué ce qu’étaient des démarches de recherche d’emploi habituelles et raisonnables. La lettre de décision initiale ne dit rien sur les démarches de recherche d’emploi de l’appelante. On y mentionne plutôt que l’appelante n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a donné des renseignements contradictoires au sujet de sa disponibilité pour le travail.

[17] Pour rendre ma décision, je n’examinerai donc pas la partie de la loi sur les démarches habituelles et raisonnables. Je ne suis pas en train de dire que j’accueille l’appel de l’appelante. Je dois tout de même examiner la deuxième partie de la loi qui porte sur la disponibilité pour le travail.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[18] La deuxième partie de la loi qui traite de la disponibilité dit qu’une personne doit prouver qu’elle est capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[19] La jurisprudence me donne trois éléments à examiner quand vient le temps de rendre une décision sur la disponibilité pour le travail. Je dois donc répondre à chacune des questions suivantes :

  1. 1. L’appelante a-t-elle démontré qu’elle voulait retourner travailler dès qu’un emploi convenable lui serait offert? Son attitude et sa conduite montrent-elles qu’elle voulait retourner travailler dès que possible?
  2. 2. L’appelante a-t-elle démontré qu’elle avait fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi convenable?
  3. 3. L’appelante avait-elle des restrictions, ou des conditions personnelles, qui auraient pu l’empêcher de trouver un emploi? Si oui, a-t-elle démontré que ces restrictions étaient raisonnablesNote de bas de page 5?

Vouloir retourner travailler

[20] L’appelante a fourni des renseignements contradictoires sur sa volonté de retourner travailler dès qu’un emploi lui serait offert.

[21] Dans ses déclarations bimensuelles, elle a mentionné qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Elle a expliqué à la Commission qu’elle n’était pas à l’aise de travailler parce qu’elle craignait d’attraper la COVID-19.

[22] Dans sa demande de révision, elle a dit qu’elle voulait travailler. Dans son avis d’appel, elle a dit qu’elle voulait travailler, mais qu’elle est devenue disponible une fois qu’elle a été entièrement vaccinée contre la COVID-19.

[23] À l’audience, l’appelante et son fils (qui était son représentant) ont fait des déclarations contradictoires. Ils ont dit qu’elle avait toujours voulu travailler. Mais son fils a aussi déclaré qu’elle a été en mesure de le faire une fois vaccinée.

[24] En cas de déclarations contradictoires, je dois décider ce qui est le plus probable. Je dois examiner tous les éléments de preuve et rendre une décision selon la prépondérance des probabilitésNote de bas de page 6.

[25] À mon avis, les déclarations initiales de l’appelante ont plus de chances d’être vraies, car elle les a faites pendant la période en question. Je pense que les déclarations de l’appelante en 2020 et en 2021 ont plus de chances de refléter son état d’esprit à ce moment-là.

[26] Selon le registre des conversations, la Commission a simplement demandé à l’appelante si elle était disponible pour travailler, et celle-ci a répondu qu’elle ne l’était pas.

[27] Par conséquent, je considère que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle voulait retourner travailler dès qu’elle trouverait un emploi convenable. J’estime qu’elle ne voulait pas retourner travailler avant d’être vaccinée contre la COVID-19 parce qu’elle craignait d’attraper la maladie si elle allait au travail.

[28] Dans son avis d’appel, l’appelante a déclaré qu’elle a été entièrement vaccinée à partir du 1er juillet 2021. La Commission ne m’a donné aucune raison d’en douter, alors je considère que l’appelante était vaccinée le 1er juillet 2021.

[29] L’appelante a été claire sur le fait qu’elle voulait travailler une fois vaccinée. Je conclus donc qu’elle a prouvé qu’elle voulait retourner travailler à partir du 1er juillet 2021.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[30] La Commission affirme que l’appelante n’a pas de dossier de recherche d’emploi et qu’elle n’a pas cherché activement un emploi avant le 1er juillet 2021.

[31] L’appelante a fait des déclarations contradictoires au sujet de ses démarches de recherche d’emploi.

[32] Dans ses déclarations bimensuelles, elle a mentionné qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Elle a expliqué à la Commission qu’elle n’était pas à l’aise de travailler parce qu’elle craignait d’attraper la COVID-19. Dans son avis d’appel, elle a dit qu’elle est devenue prête à travailler une fois entièrement vaccinée. À l’audience, elle a dit qu’elle était prête à travailler à partir du 4 octobre 2020. Mais son fils a ajouté qu’elle a été en mesure de le faire une fois entièrement vaccinée.

[33] Comme il y a des déclarations contradictoires sur sa volonté de travailler et ses recherches d’emploi, l’appelante aurait dû fournir des renseignements détaillés sur ses démarches de recherche d’emploi pour que je puisse éclaircir les choses.

[34] Cependant, elle n’a pas de renseignements détaillés sur ses démarches de recherche d’emploi. Elle n’a pas de dossier de recherche d’emploi pour la période qui m’intéresse. À l’audience, je l’ai interrogée sur ses démarches de recherche d’emploi. Elle a seulement pu me donner quelques renseignements vagues sur les endroits où elle a cherché du travail et les dates où elle est entrée en contact avec ces employeurs potentiels. Souvent, elle ne pouvait même pas me donner le nom des employeurs.

[35] Lorsque l’appelante dit qu’elle s’est rendue à [traduction] « plusieurs endroits » pour chercher du travail, ce n’est pas suffisant. Elle ne peut pas seulement dire qu’elle est allée dans une pizzeria ou une boutique de bonbons. Ce n’est pas là un dossier de recherche d’emploi détaillé et fiable. Ces renseignements ne suffisent pas pour éclaircir ses déclarations contradictoires.

[36] J’estime donc que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle a fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi.

[37] L’appelante a clairement déclaré qu’elle cherchait du travail et qu’elle essayait de trouver un emploi après avoir été entièrement vaccinée le 1er juillet 2021. Je n’ai aucune raison d’en douter. Son retour au travail en octobre 2021 ajoute du poids à cette déclaration. Je remarque aussi que la Commission reconnaît qu’elle cherchait du travail à partir du 1er juillet 2021.

[38] Je conclus donc que l’appelante a prouvé qu’elle a fait des démarches raisonnables pour trouver un emploi à partir du 1er juillet 2021.

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[39] L’appelante a fait des déclarations contradictoires au sujet de possibles conditions personnelles dans le cadre de sa recherche d’emploi.

[40] Dans ses déclarations bimensuelles, elle a mentionné qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Elle a expliqué à la Commission qu’elle ne pouvait pas travailler parce qu’elle craignait d’attraper la COVID-19.

[41] À l’audience, l’appelante et son fils ont fait des déclarations contradictoires. Ils n’ont pas dit la même chose sur la volonté de l’appelante de travailler avant d’être entièrement vaccinée. Ils ont dit qu’elle avait toujours voulu travailler et avait toujours été capable de le faire, même avant d’être vaccinée. Mais son fils a aussi déclaré qu’elle a été en mesure de travailler une fois entièrement vaccinée. Lorsque j’ai demandé au fils d’expliquer les déclarations contradictoires, il a simplement répété ce qu’il avait dit.

[42] L’appelante ne m’a pas bien expliqué pourquoi elle avait fait des déclarations contradictoires au sujet de sa disponibilité pour le travail. Je choisis donc de me fier à ses déclarations initiales, car je pense qu’elles ont plus de chances de refléter son état d’esprit en 2020 et au début de 2021. Ce sont les déclarations qu’elle a faites à la Commission pendant la période en question.

[43] J’estime donc que l’appelante a établi des conditions personnelles dans sa recherche d’emploi. À mon avis, elle ne voulait pas travailler avant d’être entièrement vaccinée. À cause de cette condition personnelle, il a été difficile pour elle de trouver un emploi avant d’être entièrement vaccinée.

[44] L’appelante dit qu’elle a été entièrement vaccinée à partir du 1er juillet 2021. Je la crois, alors je conclus qu’elle n’avait aucune condition personnelle qui limitait ses chances de trouver un emploi à partir du 1er juillet 2021.

Alors, l’appelante était-elle capable de travailler et disponible pour le faire?

[45] J’estime que l’appelante n’a pas démontré qu’elle voulait travailler avant d’être entièrement vaccinée. Elle n’a pas démontré non plus qu’elle faisait des démarches raisonnables pour trouver un emploi. De plus, je suis d’avis qu’elle a établi des conditions personnelles qui ont limité ses chances de trouver un emploi parce qu’elle ne voulait pas travailler avant d’être entièrement vaccinée contre la COVID-19.

[46] Je conclus donc qu’elle n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler du 4 octobre 2020 au 30 juin 2021.

[47] Cependant, je considère que l’appelante était entièrement vaccinée à partir du 1er juillet 2021. J’estime qu’elle voulait travailler et qu’elle a commencé à faire des démarches raisonnables pour trouver un emploi convenable après cette date. À partir de ce moment-là, elle n’avait plus de conditions personnelles qui limitaient ses chances de trouver un emploi.

[48] Je conclus donc qu’elle a prouvé qu’elle était disponible pour travailler à partir du 1er juillet 2021.

Conclusion

[49] J’accueille l’appel en partie. L’appelante n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler du 4 octobre 2020 au 30 juin 2021. Par conséquent, elle n’a pas droit aux prestations d’assurance-emploi pour cette période.

[50] Cependant, elle a prouvé qu’elle était disponible pour travailler à partir du 1er juillet 2021. Par conséquent, elle a droit aux prestations d’assurance-emploi à partir de cette date, pourvu qu’elle remplisse toutes les autres conditions.

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