Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : PM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1778

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : P. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la
Commission de l’assurance-emploi du Canada
(460751) datée du 24 mars 2022 (communiquée
par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lilian Klein
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 13 juin 2022
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 13 juillet 2022
Numéro de dossier : GE-22-1201

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel de la prestataire. La présente décision explique pourquoi.

[2] La prestataire n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler après avoir été congédiée de son emploi parce qu’elle ne s’était pas conformée à la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’hôpital où elle travaillait.

[3] Par conséquent, elle n’est pas admissible aux prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[4] La prestataire a travaillé au même hôpital pendant 21 ans. L’hôpital l’a mise en congé sans solde le 29 septembre 2021, puis l’a congédiée le 15 octobre 2021 parce qu’elle ne s’était pas conformée à ses politiques de vaccination contre la COVID-19.

[5] Le 1er novembre 2021, la prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi. La Commission a décidé que la prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations, car elle n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler.

[6] Je dois décider si la prestataire a prouvé qu’elle était disponible pour travailler. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle était disponible pour travailler.

[7] Pour ce faire, la prestataire doit démontrer qu’elle voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert, qu’elle a fait des démarches pour trouver un emploi et qu’elle n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de trouver un emploi.

[8] La Commission affirme que, en refusant de se faire vacciner, la prestataire a établi une condition personnelle qui limitait ses chances de retourner travailler dans le domaine des soins de santé. La Commission affirme que la prestataire n’a pas non plus démontré qu’elle a fait des démarches pour trouver du travail.

[9] La prestataire n’est pas d’accord. Elle soutient que l’employeur l’a injustement congédiée. Elle dit qu’elle avait des inquiétudes au sujet de l’effet de la vaccination sur sa santé ainsi que des préoccupations religieuses. Elle dit ne pas avoir cherché un autre emploi parce qu’elle prévoit de retourner travailler pour son ancien employeur.

[10] Mon rôle est de décider si la prestataire était disponible pour travailler lorsqu’elle a demandé des prestations. Les questions de savoir pour quelle raison elle a été congédiée et si elle a été congédiée injustement ne sont pas pertinentes.

Question en litige

[11] La prestataire était-elle disponible pour travailler?

Analyse

[12] Chaque personne qui cesse de travailler ne reçoit pas nécessairement des prestations régulières d’assurance-emploi. Pour recevoir des prestations, la personne doit démontrer qu’elle est disponible pour travailler et qu’elle cherche un emploi.

[13] La Commission dit qu’une partie prestataire doit avoir fait des démarches « habituelles et raisonnables » pour trouver un emploi. Cependant, la prestataire n’a pas cherché un emploi, alors la Commission n’a rien dit de plus.

[14] Pour cette raison, ma décision sur l’admissibilité aux prestations conformément à l’article 50 de la Loi sur l’assurance-emploi ne peut pas être fondée sur l’absence de démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi. J’examinerai seulement le critère de disponibilité énoncé à l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[15] Je dois tenir compte de trois facteurs pour décider si la prestataire était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenableNote de bas de page 1. La prestataire doit prouver les trois éléments suivants :

  1. a) montrer qu’elle veut retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui est offert;
  2. b) faire des démarches pour trouver un emploi convenable;
  3. c) éviter d’établir des conditions personnelles qui limiteraient indûment (c’est-à-dire qui limiteraient trop) ses chances de trouver un emploiNote de bas de page 2.

[16] Pour trancher la question de la disponibilité, je dois examiner chacun de ces trois facteursNote de bas de page 3. Je dois aussi prendre en considération l’attitude et la conduite de la prestataireNote de bas de page 4.

La prestataire voulait retourner à son ancien travail seulement

[17] La prestataire affirme qu’elle voulait retourner au travail le plus tôt possible, mais qu’elle attendait de récupérer son ancien emploi. Par conséquent, elle voulait retourner travailler, mais seulement pour son ancien employeur.

[18] La prestataire affirme qu’elle était prête à travailler tous les jours. Cependant, le fait de vouloir travailler et d’avoir le temps de travailler n’équivaut pas à être disponible pour travaillerNote de bas de page 5. Comme je l’ai mentionné plus haut, la loi dit qu’une personne doit continuer de chercher un emploi; elle ne peut pas simplement toucher des prestations.

La prestataire n’a pas essayé de trouver un autre emploi convenable

[19] Rien ne prouve que la prestataire a fait des démarches pour trouver un autre emploi convenable.

[20] La prestataire convient qu’elle n’a pas cherché un emploi dans le domaine des soins de santé ou dans un autre secteur. Elle dit qu’elle attendait que l’hôpital annule son congédiement puisqu’elle souhaite récupérer son ancien emploi.

[21] La prestataire affirme qu’elle ne savait pas qu’elle devait chercher un autre emploi à partir du moment où elle a demandé des prestations. Elle soutient que la Commission a fait preuve de négligence en ne lui donnant pas cette information.

[22] Cependant, l’exigence selon laquelle la prestataire devait continuer de chercher du travail est clairement énoncée dans sa demande de prestations. Elle s’applique à toutes les personnes qui font une demande de prestations et pour chaque jour ouvrable de leur période de prestations.

La prestataire a établi des conditions personnelles

[23] La prestataire a établi des conditions personnelles qui ont limité indûment ses chances de retourner travailler et de trouver un emploi convenable.

[24] La Commission affirme que la prestataire a établi une condition personnelle en limitant ses choix à un emploi où son statut vaccinal n’aurait aucune importance. La Commission affirme que cette condition limitait ses chances de trouver un emploi dans le domaine des soins de santé, où elle travaillait.

[25] La prestataire a confirmé que le fait de ne pas être vaccinée l’empêchait de retourner à son ancien emploi et de travailler dans un autre hôpital où elle effectuait parfois des quarts de travail. Cette affirmation appuie l’argument de la Commission selon lequel il serait particulièrement difficile pour la prestataire de trouver un autre emploi dans le domaine des soins de santé.

[26] Je conviens que la prestataire n’a pas pu se conformer aux politiques contre la COVID-19 de l’hôpital où elle travaillait en raison de son statut vaccinal. Par conséquent, elle ne pouvait pas se conformer aux politiques de l’autre hôpital où elle travaillait parfois. La même situation se serait probablement produite dans presque tous, ou tous, les établissements de soins de santé.

[27] La prestataire affirme qu’elle se serait peut-être fait vacciner si les tests médicaux avaient confirmé qu’elle pouvait le faire. Cependant, les tests ont été reportés en raison de la COVID-19, donc le retard n’était pas de sa faute. Elle affirme que l’hôpital n’a pas repoussé la date limite pour se confirmer à la politique, ce qui lui aurait permis de prendre une décision éclairée au sujet de la vaccination, et que son syndicat a refusé de l’aider.

[28] Cependant, la prestataire, ministre de culte, a également demandé une exemption pour des motifs religieux. Dans une déclaration sous serment, elle refuse toute forme de vaccinationNote de bas de page 6. Elle soutient qu’il s’agit d’une procédure expérimentale qui ne devrait pas être effectuée sur des hommes, des femmes et des enfants en bonne santé. Elle dit que les chrétiens qui sont malades doivent aller voir les anciens de son église, non les médecins. Elle ajoute qu’ils utilisent seulement des prières et des herbes. Elle affirme que l’utilisation de produits pharmaceutiques peut constituer de la sorcellerieNote de bas de page 7.

[29] Cette déclaration sous serment montre qu’il est plus probable qu’improbable que la prestataire aurait refusé le vaccin contre la COVID-19, même si les tests avaient révélé qu’il n’y avait aucune raison médicale de le refuser. Pour cette raison, je conclus qu’en refusant de se faire vacciner, elle a établi une condition personnelle qui limitait indûment ses chances de trouver du travail, surtout dans son domaine d’emploi privilégié.

[30] Le fait que la prestataire voulait attendre de récupérer son ancien emploi plutôt que de chercher un autre emploi était aussi une condition personnelle qui limitait indûment ses chances de trouver un nouvel emploiNote de bas de page 8.

Alors, la prestataire était-elle capable de travailler et disponible pour le faire?

[31] Selon mes conclusions sur les trois éléments mentionnés ci-dessus, je conclus que la prestataire n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable.

[32] La prestataire affirme qu’elle ne savait pas qu’elle devait chercher du travail à partir du moment où elle a demandé des prestations. Elle fait valoir que la Commission a manqué à sa responsabilité, car elle n’a jamais communiqué avec elle pour lui faire part de cette information. La prestataire affirme que c’était irrespectueux. Elle soutient également qu’il est injuste pour les nouveaux arrivants au Canada de recevoir des prestations sans travailler, alors qu’elle verse des cotisations à l’assurance-emploi depuis qu’elle a 14 ans.

[33] Je suis sensible au fait que la prestataire ne reçoit ni rémunération ni prestations. Je ne peux toutefois pas changer la loi, même dans les cas de difficultés financièresNote de bas de page 9. Le programme d’assurance-emploi est un régime d’assurance. Comme pour les autres régimes, il faut non seulement cotiser au régime, mais il faut aussi remplir les conditions requisesNote de bas de page 10. La prestataire ne remplissait pas les conditions, car elle n’a pas démontré qu’elle était disponible pour travailler à partir du moment où elle a demandé des prestations.

Conclusion

[34] La prestataire n’a pas démontré qu’elle était capable de travailler et disponible pour le faire en date du 1er novembre 2021. Elle est donc inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi à compter de cette date.

[35] Par conséquent, je rejette l’appel de la prestataire.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.