Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 827

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : M. S.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 8 mars 2023 (GE-22-3646)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Date de la décision : Le 21 juin 2023
Numéro de dossier : AD-23-307

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Décision

[1] Je refuse à la demanderesse la permission de faire appel parce qu’elle ne présente aucun argument défendable. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse a perdu son emploi et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a approuvé sa demande le 4 octobre 2020.

[3] Dans une lettre datée du 29 septembre 2021, la Commission a déclaré la demanderesse inadmissible aux prestations de façon rétroactive. Elle a conclu que, comme la demanderesse suivait un cours, elle n’avait pas été disponible pour travailler à compter du 15 mars 2021. Après avoir établi que la demanderesse avait reçu trop de prestations, la Commission lui a envoyé un avis de dette.

[4] Neuf mois plus tard, le 20 juin 2022, la demanderesse a demandé à la Commission de réviser sa décision d’inadmissibilité. La Commission a refusé parce que la demande était en retard. Elle a établi que la demande avait été faite bien après le délai de 30 jours permettant de présenter une demande de révision. Elle a conclu que l’explication de la demanderesse pour son retard ne justifiait pas de lui accorder plus de temps pour présenter sa demande. Elle a également conclu que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle avait l’intention constante de présenter une demande.

[5] La demanderesse a fait appel du refus de la Commission devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Elle a affirmé qu’elle n’était pas au courant du délai de 30 jours et a insisté sur le fait qu’elle avait une bonne raison qui justifiait son retard : elle est mère de deux enfants, elle travaillait, elle suivait un cours exigeant et elle était atteinte d’une dépression.

[6] La division générale a tenu une audience par téléconférence, puis a rejeté l’appel. Elle a conclu que la demande de révision était en retard et que la Commission avait utilisé correctement son pouvoir discrétionnaire pour rejeter la demande.

[7] La demanderesse demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale. Elle affirme que la division générale n’a pas tenu compte de la façon dont elle a été traitée par une personne [traduction] « impolie et méprisante » de Service Canada. Celle-ci lui aurait donné l’impression qu’elle ne pouvait rien faire pour contester la décision initiale de la Commission, qui la rendait inadmissible aux prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[8] Il y a quatre moyens d’appel à la division d’appel. La partie prestataire doit démontrer au moins une des choses suivantes :

  • la division générale a agi de façon inéquitable;
  • elle a outrepassé ses pouvoirs ou a refusé de les exercer;
  • elle a mal interprété la loi;
  • elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 1.

[9] Un appel peut aller de l’avant seulement si la division d’appel accorde d’abord la permission de faire appelNote de bas de page 2. À cette étape, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 3. Ce critère est peu exigeant. La partie prestataire doit présenter au moins un argument défendableNote de bas de page 4.

[10] Je devais décider si le motif d’appel de la demanderesse correspondait à au moins un des moyens d’appel mentionnés ci-dessus. Si oui, je devais voir si elle présentait un argument défendable.

Analyse

[11] J’ai examiné la décision de la division générale, ainsi que le droit applicable et la preuve qui l’ont menée à sa décision. J’ai conclu que la demanderesse ne présente aucun argument défendable.

On ne peut pas soutenir que la division générale a mal interprété la loi

[12] Selon la Loi sur l’assurance-emploi, une personne qui n’est pas d’accord avec la décision initiale de la Commission a 30 jours pour lui demander de réviser cette décisionNote de bas de page 5.

[13] La Commission peut accorder un délai plus long si elle est convaincue que : 1) la personne a une explication raisonnable justifiant sa demande de prolongation du délai; 2) la personne a manifesté l’intention constante de demander la révision. La Commission doit évaluer ces deux critères et être convaincue qu’ils sont respectésNote de bas de page 6.

[14] Si la personne demande une révision plus de 365 jours après avoir été avisée de la décision, la Commission doit également être convaincue que : 3) la demande a des chances raisonnables de succès; 4) le délai supplémentaire ne portera préjudice à aucune partie. La Commission doit alors évaluer les quatre critères et être convaincue qu’ils sont tous respectésNote de bas de page 7.

[15] Malgré ces restrictions, la Commission a une certaine marge de manœuvre pour décider d’accorder ou non une prolongation. Toutefois, la jurisprudence exige que la Commission exerce ce pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire Note de bas de page 8. La Cour fédérale a établi qu’une décideuse ou un décideur n’exerce pas son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire si elle ou il commet au moins une des fautes suivantes :

  1. 1) agir de mauvaise foi;
  2. 2) agir dans un but ou pour un motif irrégulier;
  3. 3) prendre en compte un facteur non pertinent;
  4. 4) ignorer un facteur pertinent;
  5. 5) agir de manière discriminatoireNote de bas de page 9.

[16] Dans la présente affaire, la division générale a établi que, comme la demande de révision a été présentée après le délai « flexible » de 30 jours (mais avant le délai « ferme » d’un an), la Commission était seulement tenue d’examiner si la demanderesse : 1) avait une explication raisonnable justifiant sa demande de prolongation du délai; 2) avait manifesté l’intention constante de demander la révision. La division générale a ensuite conclu que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle avait refusé de prolonger le délai.

[17] D’après mon examen du dossier, je ne vois aucune erreur que la division générale aurait commise dans sa compréhension ou son application de la loi pertinente.

On ne peut pas soutenir que la division générale a ignoré des éléments de preuve importants

[18] La demanderesse prétend que la division générale a ignoré la preuve selon laquelle une personne de Service Canada l’a traitée de façon impolie et ne lui a pas bien expliqué ses droits.

[19] Je ne vois pas le bien-fondé de cet argument.

[20] Dans son rôle de juge des faits, la division générale a droit à une certaine latitude dans son examen des renseignements au dossierNote de bas de page 10. Dans la présente affaire, la division générale a examiné la façon dont la Commission a évalué la justification du retard. Elle a pris en compte la déclaration de la demanderesse selon laquelle une personne de Service Canada lui avait donné l’impression qu’elle ne pouvait rien faire pour changer le résultat de la décision, ce qui, selon elle, l’avait fait abandonner jusqu’à ce qu’une de ses connaissances lui recommande de faire une demandeNote de bas de page 11.

[21] Toutefois, la division générale a souligné que la demanderesse avait bel et bien été informée du délai de 30 jours dans la lettre de la Commission datée du 29 septembre 2021, même si elle prétendait qu’elle n’en était pas au courant. Pour cette raison, la division générale a conclu que la Commission n’avait commis aucune des fautes suivantes : 1) agir de mauvaise foi; 2) agir dans un but ou pour un motif irrégulier; 3) prendre en compte un facteur non pertinent; 4) ignorer un facteur pertinent; 5) agir de manière discriminatoire.

[22] La division générale a également conclu que la Commission avait agi de façon judiciaire lorsqu’elle avait décidé que l’autre explication de la demanderesse pour son retard, soit le fait d’être trop occupée par ses études, ne justifiait pas une prolongation. Comme la division générale l’a souligné, cette explication donnait aussi à penser que la demanderesse n’avait pas l’intention constante de demander une révision.

[23] La demanderesse n’est manifestement pas d’accord avec la décision de la division générale, mais cela ne suffit pas en soi pour que son appel soit accueilli. La division d’appel ne permet pas aux prestataires de l’assurance-emploi de débattre à nouveau du fond de leur affaire en espérant un résultat différent. La division générale a examiné la preuve, a tiré des conclusions appuyées par cette preuve, puis a appliqué la loi appropriée. Elle a décidé d’approuver le refus de la Commission de prolonger le délai. En l’absence d’erreur importante de fait ou de droit, je ne vois aucune raison de remettre en question sa décisionNote de bas de page 12.

Conclusion

[24] Pour les raisons que j’ai mentionnées, je ne suis pas convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès. La permission de faire appel est donc refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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