Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : HM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1781

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : H. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (447524) datée du 31 août 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 19 décembre 2022
Personne présente à l’audience : S.O.
Date de la décision : Le 21 décembre 2022
Numéro de dossier : GE-22-3384

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Décision

[1] L’appel est rejeté avec des modifications. Le prestataire ne peut pas recevoir de prestations régulières d’assurance-emploi au lieu de la prestation d’assurance-emploi d’urgence et il doit rembourser toutes les prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’il a reçues et auxquelles il n’était pas admissible, mais il a droit à une semaine de prestations d’assurance-emploi d’urgence de plus que ce qui lui avait été initialement versé.

Aperçu

[2] En raison de la pandémie de COVID-19, le gouvernement a modifié la Loi sur l’assurance-emploi pour créer une nouvelle prestation, la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Celle-ci est entrée en vigueur le 15 mars 2020.

[3] En général, les personnes qui auraient pu faire établir une période de prestations pour les prestations régulières d’assurance-emploi entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020 ont plutôt reçu la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[4] Le prestataire a demandé des prestations le 1er avril 2020. Il a reçu quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence. Il a également reçu une avance de 2 000 $ sous forme de prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[5] La Commission explique que normalement, après avoir commencé à verser les prestations d’assurance-emploi d’urgence, elle retient les versements pendant quatre semaines, ce qui équivaut à 2 000 $, pour compenser l’avance. Toutefois, dans le cas du prestataire, il n’a pas touché la prestation d’assurance-emploi d’urgence assez longtemps pour que la Commission puisse le faire, alors elle dit qu’il a un trop-payé de 2 000 $, car il doit rembourser l’avance étant donné que cela représente des semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence auxquelles il n’est pas admissible.

[6] La Commission affirme qu’elle a examiné l’admissibilité du prestataire et qu’elle a conclu qu’elle pouvait lui verser deux semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence de plus que ce qu’il avait reçu, ce qu’elle a appliqué au trop-payé. Elle dit donc qu’il doit rembourser seulement 1 000 $.

[7] Le prestataire soutient qu’il n’a jamais demandé la prestation d’assurance-emploi d’urgence et que, comme il n’a pas demandé l’avance de 2 000 $, la Commission n’aurait pas dû la lui verserNote de bas de page 1.

Question que je dois examiner en premier

[8] Le prestataire n’a pas assisté à l’audience prévue.

[9] Par la suite, il a envoyé un courriel disant qu’il voyageait et qu’il ne s’était pas rendu compte qu’il se trouvait dans un autre fuseau horaire, ce qui explique pourquoi il n’a pas assisté à l’audience. Il a demandé que l’audience soit reportée.

[10] Je rejette sa demande pour les raisons suivantes :

[11] Le prestataire savait qu’il avait une audience et on lui a envoyé la date et l’heure de l’audience dans l’avis d’audience. Il a même reçu un rappel téléphonique concernant son audience du 12 décembre 2022.

[12] L’avis d’audience indique l’heure de l’audience au prestataire dans le fuseau horaire pour l’adresse qu’il fournit au Tribunal.

[13] Il incombe au prestataire de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer de joindre l’audience au bon moment, surtout s’il doit voyager à l’extérieur de sa région d’origine, ce qui pourrait avoir une incidence sur l’heure à laquelle il doit se joindre à l’audience.

[14] Comme le prestataire connaissait la date et l’heure de l’audience bien avant la date réelle de l’audience et qu’il a reçu un rappel téléphonique, mais qu’il ne s’est pas présenté à l’audience, j’ai procédé à l’audience en son absence.

Questions en litige

[15] Le prestataire peut-il recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi au lieu de la prestation d’assurance-emploi d’urgence?

[16] Le prestataire doit-il rembourser 1 000 $ de l’avance?

Analyse

Le prestataire peut-il recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi au lieu de la prestation d’assurance-emploi d’urgence?

[17] Non, le prestataire ne peut pas recevoir de prestations régulières au lieu de la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[18] Le prestataire affirme qu’il n’a jamais demandé la prestation d’assurance-emploi d’urgence et qu’il n’a jamais demandé l’avance de 2 000 $Note de bas de page 2.

[19] La Commission affirme que le prestataire devait recevoir la prestation d’assurance-emploi d’urgence, car l’ordonnance provisoire qui a créé la prestation d’assurance-emploi d’urgence l’emporte sur toute autre partie de la loi, de sorte qu’il n’avait d’autre choix que d’en recevoirNote de bas de page 3.

[20] Je suis d’accord avec l’observation de la Commission.

[21] Je conclus que, même si le prestataire voulait peut-être recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi, et qu’il y avait peut-être même droit au moment où il a présenté sa demande, il n’avait pas le choix de recevoir des prestations d’assurance-emploi ou la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[22] Le prestataire a rempli une demande de prestations le 1er avril 2020Note de bas de page 4. La loiNote de bas de page 5 prévoit que, pour la période commençant le 15 mars 2020 et se terminant le 26 septembre 2020, aucune période de prestations ne doit être établie à l’égard des prestations régulières. Je juge que la loi ne prévoit aucune option permettant au prestataire de refuser la prestation d’assurance-emploi d’urgence et de recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi à la place, ou de choisir de ne pas recevoir la prestation d’assurance-emploi d’urgence.

[23] Même si le gouvernement a décidé de façon arbitraire de forcer tout le monde à recourir à la prestation d’assurance-emploi d’urgence, qu’il le veuille ou non, je ne peux pas réécrire la loi ou l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaireNote de bas de page 6, mais le rôle du Parlement est de modifier la loi.

[24] Ainsi, même si le prestataire n’avait peut-être pas voulu recevoir la prestation d’assurance-emploi d’urgence, il n’avait d’autre choix que de la recevoir.

Le prestataire doit-il rembourser 1 000 $ de l’avance?

[25] Le prestataire n’a pas à rembourser 1 000 $ de l’avance, seulement 500 $, car cela représente la semaine de prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’il a reçue et à laquelle il n’est pas admissible.

[26] La Commission soutient qu’elle a d’abord versé au prestataire quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence et qu’elle lui a avancé 2 000 $ de ces prestations, ce qui représente quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 7.

[27] La Commission affirme qu’elle a le pouvoir de verser des prestations d’assurance-emploi d’urgence à l’avance conformément à la loiNote de bas de page 8.

[28] La Commission affirme que normalement, elle récupérerait cette avance en retenant quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence pendant la durée de la période de prestations, mais que le prestataire n’a pas touché la prestation d’assurance-emploi d’urgence assez longtemps pour qu’elle puisse le faire.

[29] La Commission affirme qu’à l’étape de la révision, elle a établi que le prestataire avait droit à deux semaines supplémentaires de prestations d’assurance-emploi d’urgence pour la période du 15 au 28 mars 2020Note de bas de page 9.

[30] La Commission affirme qu’elle a appliqué ces deux semaines supplémentaires au trop-payé du prestataire, ce qui signifie qu’il doit seulement rembourser 1 000 $Note de bas de page 10.

[31] Le prestataire affirme qu’il n’a jamais demandé l’avance de 2 000 $ et qu’il est injuste de lui demander de la rembourser après tout ce temps. 

Le retard de la Commission à demander le remboursement

[32] Je peux comprendre la frustration du prestataire à l’idée que la Commission revienne deux ans après lui avoir donné les 2 000 $ et lui avoir demandé de les rembourser, mais la loi donne à la Commission jusqu’à 36 mois pour examiner une demande de prestationsNote de bas de page 11, et elle respecte bien ce délai dans le cas présent, puisque le versement anticipé a été fait le 13 avril 2020Note de bas de page 12, et que l’examen de la demande a été effectué en novembre 2021Note de bas de page 13.

Versements anticipés

[33] Je suis d’accord avec l’observation de la Commission selon laquelle elle a le pouvoir, en vertu de la loi, de faire des versements anticipés, car la loi précise clairement qu’elle peut le faireNote de bas de page 14.

[34] Cependant, je peux comprendre qu’il y ait une certaine confusion au sujet du fait que le prestataire ait reçu cette avance, puisqu’il dit qu’il ne l’a jamais demandée, alors je vais essayer de fournir quelques éclaircissements sur la situation.

[35] Dans une demande de prestations d’assurance-emploi d’urgence, une partie prestataire peut théoriquement toucher des prestations pendant un maximum de 28 semainesNote de bas de page 15.

[36] La loi permet à la Commission de verser la prestation d’urgence avant le moment habituel pour le faireNote de bas de page 16, ce que la Commission affirme avoir fait, car elle a versé quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence (2 000 $) au prestataire, ce qui représente les prestations d’assurance-emploi d’urgence que le prestataire aurait théoriquement reçues les semaines 13 et 14 et 20 et 21 s’il avait pu demander la totalité des 28 semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 17.

[37] Autrement dit, l’avance de 2 000 $ n’est pas un type spécial de paiement distinct de la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Il s’agit simplement du paiement anticipé des semaines 13, 14, 20 et 21 de la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Par conséquent, il n’est pas nécessaire que le prestataire présente une demande spéciale pour que l’avance soit versée. Le prestataire a fait une demande disant qu’il voulait des prestations et, une fois qu’il l’a fait, la loi permet à la Commission de verser les prestations demandées plus tôt, ce qui est exactement ce qu’elle a fait.

[38] Pour contrebalancer le fait que quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence ont été versées au prestataire plus tôt, la Commission affirme qu’elle n’aurait pas versé quatre semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence comme le prestataire l’avait demandé.

[39] Donc, si, en théorie, le prestataire avait continué à demander des prestations d’urgence et n’avait pas pu retourner au travail aux semaines 13, 14, 20 et 21, il n’aurait pas reçu de prestations d’assurance-emploi d’urgence pour ces semaines, car elles lui avaient déjà été versées techniquement à l’avance, lorsqu’il a reçu le versement anticipé de 2 000 $Note de bas de page 18.

[40] Toutefois, ce n’est pas parce que la Commission lui a versé des semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence à l’avance qu’il était admissible à ces semaines. C’est ce que je vais décider maintenant.

Admissibilité aux versements anticipés

[41] L’admissibilité à l’avance de 2 000 $ n’est pas différente de l’admissibilité à d’autres semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence.

[42] La Commission ne présente pas d’observations explicites sur l’admissibilité du prestataire aux prestations d’assurance-emploi d’urgence, mais elle convient qu’il y est admissible en général.

[43] Il y a différentes façons d’être une « partie prestataire » aux fins de la prestation d’assurance-emploi d’urgenceNote de bas de page 19, mais, peu importe la façon dont le prestataire est arrivé à être considéré comme un « prestataire » aux fins de la prestation d’assurance-emploi d’urgence, il n’a pas besoin d’avoir de revenu provenant d’un emploi pendant au moins sept jours consécutifs au cours de la période de deux semaines pour laquelle il a cessé de travailler, ou avoir demandé la prestation pour être admissibleNote de bas de page 20.

[44] Lorsque j’examine les conditions d’admissibilité, je conclus que le prestataire est admissible à une semaine de prestations d’assurance-emploi d’urgence de plus que celle pour laquelle il a été payé, car il est admissible à la semaine du 26 avril au 2 mai 2020. Le prestataire est admissible à cette semaine parce que, pendant la période de demande de deux semaines au cours de laquelle tombe cette semaine (du 19 avril au 2 mai), il a eu sept jours consécutifs sans revenu d’emploi, car il n’a pas travaillé la semaine du 19 au 25 avril 2020; il est retourné au travail à compter du 27 avril 2020Note de bas de page 21.

[45] Par conséquent, comme j’ai conclu que le prestataire est admissible à une semaine de prestations d’assurance-emploi d’urgence de plus que celle pour laquelle il a reçu la prestation, il doit seulement rembourser 500 $, car le montant de 1 000 $ qui lui a été versé en trop représente deux semaines de prestations d’assurance-emploi d’urgence, et comme il doit rembourser une semaine supplémentaire, ce qui équivaut à 500 $, soustraire cela du montant de 1 000 $ qui lui est dû signifie qu’il lui reste seulement un trop-payé de 500 $.

[46] Je comprends que le prestataire ne veut pas rembourser l’avance, mais la loi prévoit que si une personne reçoit de l’argent auquel elle n’était pas admissible, elle doit rembourser le montant qu’elle a reçu et auquel elle n’était pas admissible.Note de bas de page 22 Comme j’ai conclu que le prestataire n’est pas admissible à 500 $ de l’avance, il doit la retourner.

[47] Je ne peux pas non plus annuler ou effacer le trop-payé, car seule la Commission peut le faireNote de bas de page 23.

Conclusion

[48] L’appel est rejeté avec des modifications. Le prestataire ne peut pas recevoir de prestations régulières d’assurance-emploi à la place de la prestation d’assurance-emploi d’urgence et il doit rembourser les prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’il a reçues et auxquelles il n’est pas admissible. Toutefois, comme il est admissible à une semaine de plus de prestations d’assurance-emploi d’urgence que ce qu'il a reçu, il doit seulement rembourser 500 $.

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