Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : AM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 881

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission de faire
appel

Partie demanderesse : A. M.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 9 janvier 2023
(GE-22-2194)

Membre du Tribunal : Candace R. Salmon
Date de la décision : Le 30 juin 2023
Numéro de dossier : AD-23-140

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel parce que le prestataire n’a pas de cause défendable. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] A. M. est le prestataire. Il a établi une période de prestations d’assurance-emploi d’urgence (PAEU). Il a reçu des prestations de la PAEU jusqu’à la fin du programme de prestations et sa demande est passée aux prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] Les prestations régulières du prestataire ont commencé le 4 octobre 2020 et ont pris fin le 6 mars 2021 parce qu’il est retourné au travail. Par la suite, il a perdu son emploi et a demandé le renouvellement de sa demande de prestations. La demande a été renouvelée et il a reçu des prestations régulières d’assurance-emploi du 17 juin 2021 au 2 octobre 2021, date à laquelle sa demande a pris fin.

[4] Le prestataire était admissible à une nouvelle période de prestations commençant le 3 octobre 2021. Il a reçu 27 semaines de prestations régulières du 3 octobre 2021 au 16 avril 2022. Il croit qu’il aurait dû recevoir 50 semaines de prestations d’assurance-emploi, au lieu de 27 semaines, dans le cadre de sa demande du 3 octobre 2021.

[5] Il a fait appel de la décision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada lui versant 27 semaines de prestations auprès de la division générale du Tribunal. La division générale a rejeté l’appel.

[6] Le prestataire veut porter la décision de la division générale en appel à la division d’appel. Il a besoin de la permission pour que son appel aille de l’avant.

[7] Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[8] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  • Est-il possible de soutenir que la division générale n’a pas offert une procédure équitable?
  • Est-il possible de soutenir que la division générale a omis d’exercer sa compétence lorsqu’elle a refusé d’examiner toutes les questions soulevées par le prestataire?
  • Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait au sujet du taux d’emploi dans la région du prestataire?
  • Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit au sujet du crédit unique de 300 heures?
  • Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de suivre les décisions antérieures du Tribunal?

Le critère pour obtenir la permission de faire appel

[9] Un appel peut aller de l’avant seulement si la division d’appel donne la permission de faire appel.Note de bas de page 1 Je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.Note de bas de page 2 Cela signifie qu’il doit exister un motif défendable qui permettrait à l’appel d’être accueilli.Note de bas de page 3

[10] Pour satisfaire à ce critère juridique, le prestataire doit établir que la division générale a peut-être commis une erreur reconnue par la loi.Note de bas de page 4 Si les arguments du prestataire ne montrent pas d’erreur qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès, je dois refuser la permission de faire appel.Note de bas de page 5

On ne peut pas soutenir que la division générale n’a pas assuré un processus équitable

[11] Le prestataire affirme que la division générale n’a pas respecté les règles d’équité procédurale.Note de bas de page 6 Il prétend que la division générale avait un parti pris contre lui, parce qu’elle a préféré les déclarations de la Commission.

[12] La partialité est une allégation grave. Il s’agit d’un décideur qui n’aborde pas sa prise de décision avec un esprit ouvert. Selon la loi, une telle allégation ne peut reposer sur de simples soupçons, de pures conjectures, des insinuations ou de simples impressions.Note de bas de page 7

[13] C’est à la partie qui prétend qu’il y a partialité qu’il incombe d’établir l’existence d’une telle partialité, et le critère pour conclure à l’existence d’une partialité est important. Le critère juridique pour établir la partialité est de savoir si une personne bien renseignée, qui étudierait la question en profondeur et de façon réaliste et pratique, conclurait qu’il était plus probable qu’improbable que la membre de la division générale, consciemment ou inconsciemment, n’allait pas trancher l’affaire de façon équitable.Note de bas de page 8

[14] Le prestataire affirme que la division générale a fait preuve de partialité parce que la membre s’est fiée à la preuve de la Commission et qu’elle l’a tenue [traduction] « en plus haute considération » que la sienne. Le dossier ne confirme pas l’exactitude de cette information. La division générale a abordé la preuve et les observations du prestataire dans sa décision. Elle a conclu que le prestataire n’avait présenté aucun élément de preuve pour convaincre la membre que le taux d’emploi était erroné ou qu’il avait droit à des semaines supplémentaires de prestations.Note de bas de page 9

[15] Le travail de la division générale consiste à soupeser la preuve et à décider sur quoi s’appuyer pour rendre une décision. Une part de ce processus signifie que la preuve d’une partie sera souvent préférée à celle d’une autre partie, selon la force ou le poids que le décideur accorde à la preuve. Le fait de suivre ce processus et de décider de la preuve à privilégier fait partie du travail de la division générale; ce n’est pas un manquement à l’obligation d’offrir un processus équitable. Le prestataire n’a fourni aucune preuve de partialité, sauf pour soutenir que la division générale préférait la preuve de la Commission.

[16] On ne peut pas soutenir que la division générale a fait preuve de partialité à l’égard du prestataire parce que préférer la preuve de la Commission n’appuie pas le fait que la division générale avait un parti pris contre lui.

[17] Le prestataire soutient également que son droit d’être entendu a été violé. Il a dit que la Commission et la division générale auraient pu lui demander pourquoi il croyait que les données sur le taux d’emploi étaient inexactes. Il affirme que, comme ni l’un ni l’autre ne lui ont demandé, il n’a pas été autorisé à présenter pleinement ses préoccupations et à faire prendre en considération son point de vue.

[18] Cela n’est pas confirmé par le dossier. J’ai écouté l’enregistrement de l’audience, qui a duré environ une heure et vingt minutes. Le prestataire a eu plusieurs occasions de présenter son point de vue. Lors de l’audience, il a expliqué sa position sur le taux d’emploi.Note de bas de page 10

[19] On ne peut pas soutenir que la division générale a été injuste sur le plan procédural parce que le prestataire a eu une occasion complète et équitable de présenter ses éléments de preuve et ses observations.

On ne peut pas soutenir que la division générale a omis d’exercer sa compétence lorsqu’elle a refusé d’examiner toutes les questions soulevées par le prestataire

[20] Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de compétence. Une erreur de compétence signifie que la division générale n’a pas tranché une question qu’elle devait trancher ou a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher.

[21] Le prestataire affirme que la division générale s’est concentrée sur une seule question : le nombre de semaines de prestations d’assurance-emploi auxquelles il avait droit. Il affirme que la Commission, puis la division générale n’ont pas tenu compte des autres questions qu’il a soulevées.

[22] La Loi sur lassurance-emploi prévoit qu’une personne qui fait l’objet d’une décision de la Commission peut demander à la Commission de la réviser. Tant que la demande satisfait aux exigences, la Commission doit réviser sa décision. Lorsqu’elle rend une décision de révision, la partie prestataire peut ensuite faire appel de la décision auprès de la division générale du Tribunal. C’est le fondement de la compétence de la division générale, qui découle de la décision de révision de la Commission.Note de bas de page 11

[23] Cela signifie que ce n’est pas une erreur de compétence de limiter l’appel à la question qui figure dans la lettre de révision, parce que c’est la question de droit dont le Tribunal est saisi. La loi prévoit que la division générale peut rendre une décision concernant [traduction] « une décision de la… Commission », et confirmer, infirmer ou modifier la décision, mais elle ne peut agir que sur une question abordée par la Commission dans sa décision.Note de bas de page 12 On ne peut pas soutenir que la division générale a omis d’exercer sa compétence en refusant d’examiner d’autres questions.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait au sujet du taux d’emploi dans la région du prestataire

[24] Le prestataire soutient que la division générale a fondé sa décision sur des erreurs importantes concernant les faits de son affaire. Je ne peux pas intervenir simplement parce que la division générale a commis une erreur au sujet d’un fait mineur. La loi me permet d’intervenir seulement si la division générale « a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance ».Note de bas de page 13 Une conclusion de fait abusive ou arbitraire est une conclusion qui contredit la preuve ou qui n’est pas étayée par la preuve.Note de bas de page 14 Cela implique d’examiner les questions suivantes :

  • La preuve contredit-elle directement l’une des principales conclusions de la division générale?
  • Y a-t-il des éléments de preuve qui pourraient appuyer rationnellement l’une des principales conclusions de la division générale?
  • La division générale a-t-elle ignoré des éléments de preuve essentiels qui contredisent l’une de ses principales conclusions?

[25] Aucune des allégations du prestataire ne remplit les critères énoncés ci-dessus d’une manière qui me permettrait d’intervenir dans son cas. Dans ses observations à la division d’appel, il a examiné les tendances du taux de chômage. Il a dit que les données de Statistique Canada étaient peut-être incorrectes, parce qu’il [traduction] « est généralement accepté et largement rapporté que le chômage a augmenté pendant la pandémie de COVID-19 ».Note de bas de page 15 Il dit que c’est [traduction] « évident quand on examine les données qu’elles ne sont pas correctes ». Il n’a fourni aucun élément de preuve autre que son opinion selon laquelle cela devait être le cas.

[26] La division générale a fondé sa décision sur le taux d’emploi grâce aux éléments de preuve fournis par la Commission.Note de bas de page 16 Le prestataire n’a fourni à la division générale aucun élément de preuve contradictoire. Par conséquent, on ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait au sujet du taux d’emploi.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit au sujet du crédit unique de 300 heures

[27] Le prestataire affirme que la division générale a commis une erreur de droit parce qu’elle a refusé d’appliquer le crédit unique de 300 heures à sa demande d’octobre 2021. Il affirme que les [traduction] « tribunaux se sont penchés » sur cette question et que l’argument de la Commission selon lequel le [traduction] « crédit s’applique à la première demande, peu importe si il est nécessaire » n’a pas été accepté.Note de bas de page 17 

[28] La division générale a examiné la question du crédit unique de 300 heures. Elle a conclu que le crédit ne pouvait pas être utilisé pour la demande d’octobre 2021 parce qu’il avait déjà été appliqué à la demande d’octobre 2020. On ne pouvait pas l’appliquer une deuxième fois. De plus, le crédit était seulement disponible pour les premières demandes, à partir du 27 septembre 2020 et jusqu’au 25 septembre 2021.Note de bas de page 18

[29] Le prestataire a fait référence à des décisions précises qu’il estimait appuyer sa cause.Note de bas de page 19 Je vais aborder ces décisions ci-dessous. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur en refusant d’appliquer le crédit de 300 heures à la demande d’octobre 2021 du prestataire, parce que le crédit n’était pas disponible au moment où la demande a commencé.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en refusant de suivre les décisions antérieures

[30] Le prestataire affirme que les [traduction] « tribunaux se sont penchés » sur la question du crédit et conviennent que le crédit de 300 heures n’a pas forcément à être appliqué à la première demande si la partie prestataire a déjà accumulé assez d’heures ou si ce n’est pas à son avantage.Note de bas de page 20 Il laisse entendre que le Tribunal aurait dû suivre cette décision.

[31] La décision en question est NK c Commission de l’assurance-emploi du Canada.Note de bas de page 21 Il s’agit d’une décision du Tribunal. Dans l’affaire NK, la division générale a conclu que la Commission avait eu tort d’appliquer le crédit de 300 heures à la première demande de la prestataire parce qu’elle avait déjà accumulé assez d’heures pour établir une période de prestations. La division générale a dit que le crédit devrait rester disponible pour aider la prestataire à établir une demande ultérieure, au besoin.Note de bas de page 22

[32] Cette décision a été portée en appel et annulée.Note de bas de page 23 Les deux parties ont convenu que la division générale avait commis une erreur de droit. La division d’appel a rendu la décision que la division générale aurait dû rendre, soit que le crédit de 300 heures devait s’appliquer à la première demande.Note de bas de page 24

[33] De plus, les membres du Tribunal ne sont pas tenus de suivre les décisions de leurs collègues. Les membres sont seulement tenus de suivre les décisions des cours supérieures, comme la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale. Les arguments du prestataire en l’espèce ne font référence à aucune décision exécutoire des tribunaux.

[34] Par conséquent, il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en refusant de suivre le raisonnement des décisions antérieures.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur révisable

[35] Le Tribunal doit respecter la loi. Un appel à la division d’appel n’est pas une nouvelle occasion de débattre de la demande originale. Il s’agit plutôt de trancher la question de savoir si la division générale a commis une erreur aux termes de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.   

[36] Je reconnais que le prestataire n’est pas d’accord avec la décision de la division générale. Toutefois, il ne s’agit pas d’un motif d’appel.

[37] En plus des arguments du prestataire, j’ai examiné l’ensemble du dossier, écouté l’enregistrement de l’audience et examiné la décision de la division générale. La division générale a résumé la loi et a utilisé des éléments de preuve pour appuyer sa décision. Je n’ai pas trouvé d’éléments de preuve pertinents que la division générale aurait ignoré ou mal interprété.Note de bas de page 25   

Conclusion

[38] Le présent appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Pour cette raison, je refuse la permission de faire appel.

[39] Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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