Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Citation : LC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 984

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : L. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (563334) datée du 20 janvier 2023 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Guillaume Brien
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 11 mai 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 17 mai 2023
Numéro de dossier : GE-23-316

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le prestataire n’a pas démontré que la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a agi de manière non judiciaire lorsqu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

Aperçu

[3] Le prestataire a établi une demande de prestations d’assurance-emploi prenant effet le 13 décembre 2020Note de bas de page 1.

[4] Le 13 septembre 2021, le système de traitement automatisé des demandes a autorisé le versement de prestations régulières au prestataire puisque celui-ci avait déclaré consacrer de 1 à 9 heures à sa formation par semaineNote de bas de page 2.

[5] Le 22 octobre 2021, le prestataire a rempli un questionnaire électronique concernant sa participation à un cours de formationNote de bas de page 3. Il a indiqué, entre autres, consacrer plus de 25 heures par semaine à ses études. Il suivait une formation par choix personnel. Il était disponible et capable de travailler dans le même genre d’emploi et sous les mêmes ou de meilleures conditions qu’il l’était avant le début de son programme.

[6] Le 22 novembre 2021, le prestataire a déclaré qu’il n’est pas et n’était pas disponible à temps plein, mais seulement à temps partielNote de bas de page 4.

[7] Le 30 novembre 2022, la Commission a tenté de contacter le prestataire. Celui-ci dit avoir cru à une arnaque et refuse de s’identifier et de répondre aux questionsNote de bas de page 5. La Commission rend alors une décision rétroactive de refus, expliquant que le prestataire a suivi un cours de formation de sa propre initiative et qu’il n’a pas pu démontrer qu’il était disponible pour travaillerNote de bas de page 6.

[8] Le 11 décembre 2022, la Commission avise le prestataire que la décision d’inadmissibilité a occasionné un trop-payé au montant de 2 194 $Note de bas de page 7.

[9] Le prestataire a présenté une demande de révision le 13 décembre 2022. Il explique qu’il croyait que l’appel du 30 novembre 2022 était frauduleuxNote de bas de page 8. Par la suite il dit ne pas avoir tenté de contacter la Commission parce qu’il était occupé et avait autre chose à faire que d’attendre 2 ou 3 heures avant de pouvoir parler à quelqu’un.

[10] Le 19 janvier 2023, la Commission contacte le prestataire afin de valider les informations au dossierNote de bas de page 9. Il est avisé la même journée par téléphone que la décision de refus est maintenueNote de bas de page 10.

[11] Le 20 janvier 2023, un Avis de décision est émis et informe le prestataire du maintien de la décision antérieureNote de bas de page 11. Cette lettre contient également un tableau explicatif du trop-payé réclaméNote de bas de page 12. Le trop-payé correspond à 5 semaines de prestations, pour les semaines du 5 septembre 2021 au 3 octobre 2021.

[12] Le 27 janvier 2023, le prestataire dépose son Avis d’appel au Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal). Il explique ne pas être d’accord avec le fait que l’on se base sur une période ultérieure à sa demande pour prouver qu’il n’était pas disponible à travailler à temps plein durant sa demande.

Question en litige

[13] La Commission a-t-elle agi de manière judiciaire lorsqu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire en verte de l’article 153.161 de la Loi ?

Analyse

L’article 153.161(1) de la Loi

[14] L’alinéa premier de l’article 153.161 de la Loi édicte qu’un prestataire qui suit un programme de formation non dirigé (c’est-à-dire de son plein gré) n’est pas admissible au versement des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin.

[15] L’obligation qu’à un prestataire de prouver sa disponibilité s’applique donc tout au long de sa demande, et ce pour chaque jour ouvrable d’une période de prestations.

[16] À son Avis d’appel, le prestataire allègue que la Commission se base sur une période ultérieure à sa demande afin de prouver qu’il n’était pas disponible à travailler à temps plein durant sa demande.

[17] Je ne suis pas d’accord. Le dossier démontre que la Commission s’est basée sur les sessions universitaires Automne 2021 et Hiver 2022 afin de déterminer la disponibilité du prestataire. Le trop-payé généré couvre les 5 semaines du 5 septembre 2021 au 3 octobre 2021, donc la session Automne 2021.

[18] La conversation du 19 janvier 2023 entre la Commission et le prestataire démontre que :

  1. a) La Commission s’est concentrée sur les sessions Automne 2021 et Hiver 2022 dans l’analyse de la disponibilité du prestataire.
  2. b) Celui-ci a dit avoir débuté ses cours le 8 septembre 2021 et avoir terminé ses cours le 20 décembre 2021.
  3. c) Il déclare que ses cours étaient à temps plein.
  4. d) Il était rendu à la 5e session sur 8. La formation durait 4 ans.
  5. e) Il suivait 21 heures de cours par semaine, et il étudiait de 3 à 4 heures par semaine, pour un total d’environ 25 heures consacrées à sa formation.
  6. f) Il avait un stage académique du 8 novembre 2021 au 20 décembre 2021. Ce stage était à temps plein du lundi au vendredi de 9am à 16h. Il avait 4 stages par année.
  7. g) L’horaire des cours était fixe et non modifiable.
  8. h) La session d’Hiver 2022 a débuté le 8 janvier 2022 et s’est terminée le 20 avril 2022.
  9. i) Le prestataire dit ne pas avoir travaillé du 11 octobre 2021 au 6 janvier 2022.
  10. j) Le prestataire dit qu’il était capable de travailler à temps plein, mais seulement après les cours et les fins de semaine.
  11. k) Le prestataire n’effectuait des recherches que sur internet et que pour des emplois dans le domaine de la restauration étant donné son horaire de cours.
  12. l) Il dit qu’il ne cherche pas et ne cherchait pas d’emploi de jour à cause de son programme serré de cours dans la journée.
  13. m) Il dit qu’il travaillait environ 15 heures par semaine durant ses études, et qu’il a maintenu ce nombre d’heures travaillées durant la session Hiver 2022.
  14. n) Il dit que, de sa vie, il n’a jamais travaillé et étudié à temps plein en même temps.
  15. o) Il dit que c’est à partir du 20 avril 2023, à la fin complète de sa formation, qu’il sera disponible pou travailler à temps plein.

[19] Les informations pour la session Automne 2021 et Hiver 2022 sont sensiblement les mêmes, le prestataire ayant étudié à temps plein et travaillé une quinzaine d’heures par semaine, en plus d’avoir eu à effectuer des stages à temps plein obligatoires durant ces deux sessions.

[20] Après avoir analysé le dossier et après avoir entendu le prestataire, rien ne me permet de croire que la Commission a tenu compte d’une période ultérieure à sa demande de prestations pour prouver que le prestataire n’était pas disponible à travailler à temps plein.

[21] Le fait pour la Commission d’avoir demandé des informations sur la session Hiver 2022 démontre simplement un désir de prendre une décision éclairée basée sur l’ensemble des informations disponibles. Comme les informations du prestataire étaient semblables pour les deux sessions, ces informations n’ont pas pu affecter la décision ayant trait à la non-disponibilité du prestataire d’une manière injuste.

L’article 153.161(2) de la Loi

[22] Le deuxième alinéa de l’article 153.161 de la Loi donne un pouvoir discrétionnaire à la Commission pour vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire y était admissible, en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestation.

[23] Une décision de ce Tribunal confirme que la Commission peut vérifier rétroactivement l’admissibilité du prestataire aux prestations demandéesNote de bas de page 13.

[24] Puisque ce pouvoir est discrétionnaire, je ne peux intervenir que si la Commission a exercé son pouvoir de manière non judiciaire.

[25] Dans l’utilisation de son pouvoir discrétionnaire, la Commission doit avoir exercé son pouvoir de bonne foi, en examinant l’ensemble des facteurs pertinents au dossier, et en ignorant les facteurs non pertinentsNote de bas de page 14.

[26] J’ai demandé au prestataire si la Commission avait agi de mauvaise foi dans son dossier. Celui-ci me dit qu’il ne croit pas, mais que l’argent a été attribué un peu trop facilement. Il n’y a pas eu de vérifications quand on lui avait demandé s’il était disponible à travailler à temps plein. Il faudrait mettre une meilleure définition aux formulaires.

[27] Je détermine donc que la Commission n’a pas agi de mauvaise foi dans le dossier en utilisant son pouvoir discrétionnaire. La Commission avait légalement le droit de vérifier l’admissibilité du prestataire rétroactivement, et c’est ce qu’elle a fait.

[28] J’ai demandé au prestataire si, selon lui, la Commission avait omis de tenir compte d’un facteur pertinent à son dossier. Il me répond encore une fois que les formulaires devraient contenir une meilleure définition de la disponibilité à temps plein.

[29] Je détermine donc que la Commission n’a pas omis de tenir compte d’un facteur pertinent dans le dossier du prestataire.

[30] J’ai demandé au prestataire si, selon lui, la Commission avait tenu compte d’un facteur non pertinent dans l’analyse de son dossier. Il me répond que c’est le fait de vérifier ultérieurement ou antérieurement ses heures de travail et de ne pas s’être référé à ses besoins. Il dit que la Commission s’est référée à des périodes complètement autres pour déterminer ses besoins.

[31] Je ne suis pas d’accord avec le prestataire. La Commission avait légalement le droit de vérifier rétroactivement si le prestataire se qualifiait aux prestations reçues en avance. Comme discuté ci-dessus, la Commission a tenu compte des périodes Automne 2021 et Hiver 2022, des périodes couvrant l’année scolaire en cours lors de la demande de prestation et qui comportent des faits similaires. Finalement, les prestations d’assurance-emploi ne dépendent pas des besoins des prestataires. Comme son nom l’indique, l’assurance-emploi est un programme d’assurance auquel on doit se qualifier afin de bénéficier des prestations.

[32] Je détermine donc que la Commission n’a pas tenu compte de facteurs non pertinents dans l’analyse du dossier du prestataire.

[33] J’ai également demandé au prestataire s’il existait des circonstances exceptionnelles à son dossier qui pourraient différencier sa situation avec celle d’autres étudiants à temps plein dans une situation semblable. Il m’a répondu que non.

[34] La Cour d’appel fédérale a réitéré le principe qu’une personne inscrite à un cours à temps plein est présumée ne pas être disponible pour travailler, cette présomption ne pouvant être réfutée que dans des circonstances exceptionnellesNote de bas de page 15.

[35] Après avoir analysé le dossier, je détermine que le prestataire n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que la Commission a agi de manière non judiciaire lorsqu’elle a fait usage de sa discrétion sous l’article 153.161 de la Loi.

Conclusion

[36] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.