Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 901

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une prorogation de délai et à
une demande de permission de faire appel

Partie demanderesse : J. D.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 19 janvier 2023
(GE-22-2820)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 9 juillet 2023
Numéro de dossier : AD-23-259

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Décision

[1] La prolongation du délai pour présenter une demande à la division d’appel est accordée. La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse, J. D. (prestataire), a été suspendue puis congédiée de son emploi parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de vaccination de son employeur. La prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a conclu que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. La Commission dit que la prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations pour la période où elle a été suspendue, puis elle l’a exclue du bénéfice des prestations à la suite de son congédiement.

[4] La prestataire a porté la décision de la Commission en appel devant la division générale du Tribunal. La division générale a rejeté l’appel avec modification. Elle a conclu que la prestataire a perdu son emploi parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de vaccination de l’employeur. Elle a décidé que la raison du congédiement est une inconduite, mais elle a modifié la date de début de l’inadmissibilité de la prestataire.

[5] La prestataire veut maintenant faire appel de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. Elle soutient que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante. Cependant, elle doit obtenir la permission pour que son appel puisse aller de l’avant.

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur révisable qui pourrait donner à l’appel une chance de succès. Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[7] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  1. a) La prestataire a-t-elle présenté sa demande en retard à la division d’appel?
  2. b) La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès?

Analyse

La demande n’a pas été présentée en retard

[8] La décision de la division générale a été rendue le 19 janvier 2023, mais elle n’a pas été envoyée à la prestataire avant le 16 février 2023. La prestataire a présenté une demande de permission de faire appel le 14 mars 2023.

[9] La demande de permission de faire appel doit être présentée dans les 30 jours suivant la date à laquelle la division générale a communiqué sa décision et ses motifs à la partie prestataireNote de bas de page 1. Dans la présente affaire, la décision est datée du 19 janvier 2023, mais il semble qu’elle n’a pas été communiquée à la prestataire avant le 16 février 2023. La prestataire a présenté sa demande de permission de faire appel dans les 30 jours qui ont suivi cette date, donc la demande n’a pas été présentée en retard.

Je n’accorde pas à la prestataire la permission de faire appel

[10] Le critère juridique que la prestataire doit remplir pour demander la permission de faire appel est peu exigeant : y a-t-il un moyen qui permettrait de soutenir que l’appel a une chance de succèsNote de bas de page 2?

[11] Pour trancher cette question, je me suis concentrée sur la question de savoir si la division générale avait peut-être commis une ou plusieurs des erreurs pertinentes (appelées « moyens d’appel ») qui figurent dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 3.

[12] Un appel n’est pas une nouvelle occasion de débattre de la demande originale. En fait, je dois plutôt décider si la division générale a commis l’une des erreurs suivantes :

  1. a) elle a mené une procédure inéquitable;
  2. b) elle n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher ou elle a tranché une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 4;
  4. d) elle a commis une erreur de droitNote de bas de page 5.

[13] Avant que l’appel de la prestataire puisse passer à la prochaine étape, je dois être convaincue qu’au moins un des moyens d’appel ci-dessus donne à l’appel une chance raisonnable de succès. Par « une chance raisonnable de succès », on entend qu’en faisant valoir ses arguments, la prestataire pourrait gagner sa cause. Je dois aussi tenir compte des autres moyens d’appel possibles, ceux que la prestataire n’a pas cernés avec précisionNote de bas de page 6.

Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur

[14] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de fait importante. Elle affirme qu’aucune exigence de vaccination ne figure dans sa convention collectiveNote de bas de page 7. La prestataire fait valoir qu’il n’y avait pas d’obligation expresse de se faire vacciner dans son contrat de travail.

[15] La prestataire soutient qu’elle n’était pas d’accord avec la politique de son employeur, et ce, avant même qu’elle soit mise en congé et congédiée. Elle ajoute que l’employeur n’a pas tenté de rencontrer l’agente ou l’agente de négociation pour que la question de la vaccination soit abordée dans la convention collective. La prestataire a déposé un grief auprès de son syndicatNote de bas de page 8.

[16] La prestataire soutient que la loi n’oblige pas une personne à se faire vacciner. Elle affirme qu’une personne a le droit de contrôler ce qui arrive à son corps. La prestataire s’appuie sur une autre décision rendue par la division générale du Tribunal.

[17] Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante. La prestataire a soulevé ces points devant la division générale, qui en a tenu compte pour rendre sa décisionNote de bas de page 9.

[18] Dans sa décision, la division générale a énoncé la jurisprudence pertinente de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale concernant la question de l’inconduiteNote de bas de page 10. Elle a ensuite appliqué le critère juridique, conformément à ce qui est énoncé dans la jurisprudence, à la situation de la prestataire. Elle a conclu que la Commission avait prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite pour les raisons suivantes :

  • L’employeur avait une politique de vaccination qui précisait que les personnes qui ne s’y conformaient pas seraient mises en congé sans solde, puis congédiéesNote de bas de page 11.
  • La prestataire a déclaré qu’elle était au courant de la politiqueNote de bas de page 12.
  • La prestataire connaissait ou aurait dû connaître les conséquences du non-respect de la politiqueNote de bas de page 13.
  • La prestataire a pris la décision personnelle et délibérée de ne pas se conformer à la politiqueNote de bas de page 14.
  • La prestataire savait que sa décision pouvait entraîner un congé sans solde et un congédiementNote de bas de page 15.

[19] La division générale a examiné les arguments de la prestataire au sujet de la conduite de l’employeur. Comme elle l’a indiqué dans sa décision, il ne lui appartient pas de décider si la prestataire a été suspendue et congédiée injustementNote de bas de page 16.

[20] Dans sa demande de permission de faire appel, la prestataire a indiqué qu’elle avait déposé un grief. Il s’agit de la bonne façon de contester la conduite de son employeur et la validité de la politique de vaccination.

[21] La division générale a souligné que l’employeur doit gérer les opérations quotidiennes sur le lieu de travailNote de bas de page 17. Pour ce faire, il peut élaborer des politiques qui portent sur la santé et la sécurité. Il n’appartient pas à la division générale de décider si les politiques de l’employeur sont raisonnables ou valides. Il n’appartient pas non plus au Tribunal de décider si les actions de l’employeur étaient justifiées. Il peut seulement examiner la conduite de la prestataireNote de bas de page 18.

[22] La décision Cecchetto c Canada (Procureur général) rendue récemment par laCour fédéralea confirmé que le Tribunal ne peut pas tenir compte de la conduite de l’employeur ni de la validité de la politique de vaccinationNote de bas de page 19.

[23] Dans l’affaire Cecchetto, la Cour a convenu qu’un employé qui avait délibérément décidé de ne pas suivre la politique de vaccination de son employeur avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. La Cour a confirmé que la loi ne permet pas au Tribunal d’examiner le bien-fondé, la légitimité ou la légalité de la politique de l’employeurNote de bas de page 20.

[24] En plus des arguments de la prestataire, j’ai également examiné les autres moyens d’appel. La prestataire n’a soulevé aucune iniquité procédurale de la part de la division générale, et je ne vois aucune preuve que la procédure a été inéquitable. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou de compétence.

[25] La prestataire n’a relevé aucune erreur que la division générale aurait commise et qui pourrait donner à l’appel une chance de succès. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[26] La prolongation du délai est accordée. La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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