Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : EL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 968

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Prolongation du délai et décision relative à une
demande de permission de faire appel

Partie demanderesse : E. L.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 4 avril 2023
(GE-22-1252)

Membre du Tribunal : Jude Samson
Date de la décision : Le 24 juillet 2023
Numéro de dossier : AD-23-630

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Décision

[1] La prestataire, E. L., a présenté une demande à la division d’appel. Je rejette sa demande parce qu’elle est prématurée. Elle n’ira donc pas de l’avant.

Aperçu

[2] La prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi après avoir perdu son emploi. Elle a ensuite demandé 15 semaines de prestations de maternité et 35 semaines de prestations parentales. Toutefois, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que la prestataire pouvait seulement recevoir 13 semaines de prestations parentales parce que c’est à ce moment-là que sa période de prestations prenait fin.

[3] La prestataire a porté la décision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal. Elle a également soutenu que la loi violait ses droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés.

[4] Les appels fondés sur la Charte au Tribunal suivent un processus spécial. Plus précisément, une partie demanderesse doit déposer un avis exposant les parties de la loi qui sont contestées, ainsi que les grandes lignes d’un argument fondé sur la Charte.

[5] Dans la présente affaire, la division générale a conclu que l’avis de la prestataire était incomplet. On lui a donc accordé six mois de plus pour remédier à la situation. Toutefois, la division générale a conclu que l’avis de la prestataire ne contenait toujours pas de texte cohérent expliquant en quoi la loi violait ses droits garantis par la CharteNote de bas de page 1. Par conséquent, la division générale a décidé que l’appel de la prestataire serait traité comme un appel régulier et non comme un appel fondé sur la Charte.

[6] La prestataire veut maintenant faire appel de la décision de la division générale au sujet de la façon dont se déroulera son appel.

[7] Je rejette la demande de la prestataire parce qu’elle est prématurée.

Questions en litige

[8] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  1. a) La demande à la division d’appel était-elle en retard?
  2. b) Dois-je prolonger le délai de présentation de la demande?
  3. c) La division d’appel devrait-elle examiner les appels de décisions interlocutoires avant la fin du processus de la division générale?
  4. d) Existe-t-il des circonstances exceptionnelles dans la présente affaire qui justifient l’acceptation de la demande de la prestataire?

Analyse

La demande était en retard

[9] La décision de la division générale est datée du 4 avril 2023, et la prestataire admet l’avoir reçue le même jourNote de bas de page 2. Sa demande devait donc être présentée 30 jours plus tard, soit le 4 mai 2023Note de bas de page 3.

[10] Toutefois, le Tribunal a plutôt reçu la demande de la prestataire le 14 juin 2023, alors elle était en retard.

Je prolonge le délai pour le dépôt de la demande

[11] Pour décider s’il faut donner à la prestataire plus de temps pour présenter sa demande, je dois vérifier si elle a une explication raisonnable pour son retardNote de bas de page 4.

[12] La prestataire affirme que la décision du 4 avril 2023 ne l’informait pas de ses droits d’appel. Elle a plutôt appris qu’elle pouvait contester la décision dans la lettre de la division générale datée du 31 mai 2023Note de bas de page 5. Dans les circonstances, la prestataire a fourni une explication raisonnable pour son retard.

La demande de la prestataire est prématurée et ne devrait pas aller de l’avant

[13] Le Tribunal peut rendre des décisions interlocutoires (ou provisoires) tout au long d’une instance. Par exemple, une personne peut demander que son audience soit reportée ou que les documents demeurent confidentiels. Les décisions interlocutoires sont souvent de nature procédurale. Elles sont différentes des décisions définitives qui mettent fin à un appel.

Normalement, la division d’appel refuse d’entendre les appels de décisions interlocutoires

[14] Toute décision de la division générale peut faire l’objet d’un appel à la division d’appelNote de bas de page 6. Toutefois, la division d’appel a le pouvoir de contrôler ses procédures. Cela comprend la capacité de ne pas juger des appels prématurésNote de bas de page 7. Pour cette raison, la division d’appel a déclaré qu’à l’exception de circonstances exceptionnelles, elle refusera d’examiner les appels de décisions interlocutoires tant que la division générale n’aura pas rendu sa décision définitive dans l’appelNote de bas de page 8.

[15] Cela ne veut pas dire que la division d’appel refuse complètement de tenir compte des décisions interlocutoires. Il faut plutôt permettre à la procédure de la division générale de suivre son cours. Ensuite, la division d’appel peut examiner toutes les questions en même temps, en se fondant sur un dossier complet.

[16] Je suis d’accord avec le raisonnement de ces décisions de la division d’appel et j’ai décidé de les suivre.

Il n’y a pas de circonstances exceptionnelles dans la présente affaire

[17] Donc, y a-t-il des circonstances exceptionnelles qui justifient l’examen de la demande de la prestataire maintenant au lieu d’attendre que la division générale rende sa décision définitive dans son appel? Sinon, la demande est prématurée.

[18] Une question semblable se pose à la Cour d’appel fédérale. Toutefois, elle aussi autorise peu de demandes à aller de l’avant jusqu’à ce que le Tribunal ait terminé son processusNote de bas de page 9. En fait, la Cour a déclaré que des questions juridiques ou constitutionnelles importantes ne constituent pas une circonstance exceptionnelle qui justifie d’intervenir dans une procédure en coursNote de bas de page 10. Je suis d’accord.

[19] Le fait de permettre à la prestataire de faire appel de toute décision interlocutoire défavorable que la division générale pourrait rendre fragmenterait inutilement le processus de la division générale et entraînerait des retards importants.

[20] Dans la présente affaire, la prestataire n’a pas démontré qu'il existait des circonstances exceptionnelles qui justifieraient l’examen de sa demande maintenant. La division générale devrait être autorisée à terminer son travail et à rendre une décision définitive dans le cadre de l’appel.

Conclusion

[21] Je rejette la demande de la prestataire parce qu’elle est prématurée. Normalement, la division d’appel ne devrait pas entendre les appels de décisions interlocutoires. La prestataire n’a pas démontré qu’il existait des circonstances exceptionnelles qui justifieraient que l’on aille de l’avant plus rapidement dans son cas.

[22] Une fois que la division générale a rendu sa décision définitive, la prestataire peut, bien sûr, présenter une autre demande à la division d’appel. Et dans sa demande, elle peut toujours soutenir que la membre de la division générale a eu tort de conclure que son appel ne pouvait pas aller de l’avant comme un appel fondé sur la Charte.

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