Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : LH c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1009

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission de faire
appel

Partie demanderesse : L. H.
Représentante : C. Z.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 17 avril 2023
(GE-22-3543)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 31 juillet 2023
Numéro de dossier : AD-23-528

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a décidé que la demanderesse (prestataire) était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi parce qu’elle suivait un cours de formation de sa propre initiative et qu’elle n’avait pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler.

[3] Le 11 mai 2023, la division générale a rendu une décision sur la question de la disponibilité. La prestataire a porté la décision en appel à la division d’appel. La division d’appel a renvoyé le dossier à la division générale pour qu’elle tranche la question de savoir si la Commission devait agir et si elle avait agi de façon judiciaire en décidant de réviser la demande de la prestataire.

[4] La division générale a conclu que la Commission avait le pouvoir de réviser la demande et qu’elle avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

[5] La prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale auprès de la division d’appel. À l’appui de sa demande de permission de faire appel, la prestataire soutient que la Commission devrait assumer la responsabilité totale (ou du moins partielle) de son erreur. Elle n’a rien fait de mal. La prestataire soutient qu’un règlement équitable devrait être proposé étant donné les circonstances.

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur révisable qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès.  

[7] Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès? 

Analyse

[9] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont les suivantes :

  1. a) la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] La demande de permission de faire appel est une étape préliminaire à une audience sur le fond. La prestataire doit franchir cette première étape, mais celle-ci est moins exigeante que celle de l’audience de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission de faire appel, la prestataire n’a pas à prouver ses prétentions. Elle doit plutôt établir que l’appel a une chance raisonnable de succès en raison d’une erreur révisable. 

[11] Autrement dit, je dois être convaincu que les motifs de l’appel correspondent à l’un ou l’autre des moyens d’appel mentionnés ci-dessus et qu’au moins un des motifs confère à l’appel une chance raisonnable de succès pour accorder la permission d’en appeler.

La prestataire soulève-t-elle une erreur révisable que la division générale aurait commise qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

[12] La prestataire soutient que la Commission devrait assumer la responsabilité totale (ou du moins partielle) de son erreur. Elle n’a rien fait de mal. La prestataire soutient qu’un règlement équitable devrait être proposé étant donné les circonstances.

[13] La division générale a décidé que la Commission avait effectivement le pouvoir de demander à une partie prestataire une preuve de disponibilité de façon rétroactive, comme le prévoit l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi.

[14] La division générale a conclu que la Commission a exercé son pouvoir de façon judiciaire : elle n’a pas agi de mauvaise foi, ni dans un but ou pour un motif irrégulier, elle n’a pas tenu compte d’un facteur non pertinent ni ignoré un facteur pertinent, et elle n’a pas agi de façon discriminatoire lorsqu’elle a pris la décision de réviser sa décision initiale.

[15] Le pouvoir de révision de la Commission est énoncé à l’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi. Cet article prévoit que la Commission peut réviser une demande de prestations dans les 36 mois suivants le moment où les prestations ont été payées ou sont payables.   

[16] La jurisprudence a établi que le délai est la seule restriction au pouvoir de révision de la Commission, et ce, en vertu de l’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi. Par conséquent, la Commission peut réviser une demande de prestations au titre de l’article 52 même s’il n’y a aucun fait nouveau. Autrement dit, elle peut retirer son approbation antérieure et exiger que les prestataires remboursent les prestations qui ont été versées.

[17] Pendant la pandémie, le gouvernement a pris divers arrêtés provisoires modifiant la Loi sur l’assurance-emploi. L’article 153.161 a été ajouté à la Loi sur l’assurance-emploi et est entré en vigueur le 27 septembre 2020.

[18] L’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi mentionne ce qui suit :

Disponibilité

Cours ou programme d’instruction ou formation non dirigée

153.161 (1) Pour l’application de l’alinéa 18(1)a), le prestataire qui suit un cours ou un programme d’instruction ou de formation pour lequel il n’a pas été dirigé conformément aux alinéas 25(1)a) ou b) n’est pas admissible au versement des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin.

Vérification

(2) La Commission peut vérifier, à tout moment après le versement des prestations, que le prestataire visé au paragraphe (1) est admissible aux prestations en exigeant la preuve qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin pour tout jour ouvrable de sa période de prestations.

[19] Cette disposition temporaire prévoit qu’en appliquant l’article 18(1)(a) de la Loi sur l’assurance-emploi, la Commission peut vérifier si les prestataires ont droit à des prestations en exigeant la preuve de leur disponibilité à travailler à tout moment après le versement des prestations. Le libellé de l’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi est articulé différemment. Il prévoit que la Commission peut réviser une demande de prestations dans les 36 mois suivant le versement des prestations.

[20] Il faut lire ensemble l’article 153.161 et l’article 52 de la Loi sur l’assurance-emploi. Les deux articles visent à réclamer les sommes indûment reçues par les prestataires. De plus, la décision de demander une vérification au titre de l’article 153.161 et de réviser une demande au titre de l’article 52 est une décision discrétionnaire. Cela signifie que même si la Commission a le pouvoir de demander la vérification de l’admissibilité et de réviser une demande, elle n’est pas obligée de le faire.

[21] La loi prévoit que les pouvoirs discrétionnaires doivent être exercés de façon judiciaire. Cela signifie que lorsque la Commission décide de réviser une demande, elle ne peut pas agir de mauvaise foi, dans un but ou pour un motif irrégulier, elle ne peut pas tenir compte d’un facteur non pertinent ni ignorer un facteur pertinent ou agir de façon discriminatoire.

[22] Je n’ai aucun doute que la prestataire a agi de bonne foi et a déclaré ses études à la Commission. La Commission a révisé la demande en se fondant sur les faits dont elle disposait au moment de la décision initiale sur l’admissibilité et quand les prestations ont été versées.

[23] Lorsqu’il y avait des mesures temporaires mises en place pendant la pandémie, le pouvoir discrétionnaire de la Commission de décider s’il faut réviser une demande devait être exercé en gardant à l’esprit l’intention législative de l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi. En mettant en œuvre cet article temporaire pendant la pandémie, le législateur a clairement voulu souligner que la Commission avait le pouvoir d’examiner la disponibilité et de réviser si une partie prestataire qui suivait un cours, un programme d’instruction ou une formation était admissible aux prestations d’assurance-emploi, même après le versement des prestations.

[24] L’un des principes de l’interprétation des lois est que le législateur ne parle pas inutilement. En mettant en œuvre l’article 153.161 de la Loi sur l’assurance-emploi, le législateur a clairement décidé que la révision d’une décision initiale concernant la disponibilité d’un étudiant ou d’une étudiante rendue pendant la pandémie l’emportait sur l’importance de rendre une décision définitive. La Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire selon les paramètres établis par le législateur pendant la pandémie.

[25] Dans ces circonstances, je ne vois aucune erreur révisable commise par la division générale lorsqu’elle a conclu que la Commission avait exercé son pouvoir discrétionnaire correctement.

[26] Le Tribunal n’a pas la compétence d’imposer un règlement à une partie. Si la prestataire veut demander l’annulation de sa dette, elle peut le faire en demandant directement à la Commission de rendre une décision sur cette question.Note de bas de page 1

[27] Après avoir examiné le dossier d’appel, la décision de la division générale et les arguments de la prestataire, je suis d’avis que la division générale a examiné la preuve dont elle disposait et qu’elle a correctement appliqué la loi. Je n’ai d’autre choix que de conclure que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[28] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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