Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : MJ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1808

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelante (prestataire) : M. J.
Intimée (Commission) : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance emploi du Canada (462502) datée du
25 avril 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gerry McCarthy
Mode d’audience : Téléconférence et vidéoconférence
Date de l’audience : Le 5 octobre 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 12 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-1761

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance‑emploi du Canada (Commission) a prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance‑emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] La prestataire, qui travaillait comme infirmière autorisée, a été mise en congé sans solde le 26 octobre 2021 et a été congédiée le 9 décembre 2021. L’employeur de la prestataire (« Interior Health Authority ») a affirmé que la prestataire avait été mise en congé sans solde le 26 octobre 2021 comme étant une employée qui avait reçu une dose de vaccin avant le 12 octobre 2021, mais qui n’avait pas été confirmée comme étant entièrement vaccinée après le 15 novembre 2021, comme l’exige le décret de l’autorité de santé provinciale (ASP). L’employeur de la prestataire a également affirmé que la prestataire avait été congédiée le 9 décembre 2021 parce qu’elle ne s’était pas conformée au décret de l’autorité de santé provinciale qui exigeait qu’elle soit entièrement vaccinée après le 15 novembre 2021.

[4] La Commission a accepté le motif du congédiement de l’employeur. Elle a conclu que la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi la Commission a décidé que la prestataire était exclue du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi à compter du 21 novembre 2021.

[5] La Commission affirme que la décision de la prestataire de ne pas se faire entièrement vacciner était consciente et intentionnelle et qu’elle savait, ou aurait dû savoir, que, si elle refusait de se faire vacciner conformément à la politique, elle pouvait être mise en congé sans solde et congédiée.

[6] La prestataire affirme qu’elle ne croyait pas qu’elle serait congédiée. La prestataire affirme en outre que sa conduite n’était pas délibérée.

Questions que je dois examiner en premier

J’accepterai les documents envoyés après l’audience

[7] Avant le début de l’audience, la prestataire a expliqué qu’elle n’avait reçu le dossier d’appel que la veille de l’audience. La prestataire a affirmé qu’elle avait présenté des documents supplémentaires au Tribunal après avoir lu le dossier d’appel. J’ai expliqué à la prestataire que ces documents n’avaient pas encore été versés au dossier. La prestataire a indiqué qu’elle citerait ses documents supplémentaires pendant l’audience et qu’elle était disposée à aller de l’avant et à présenter ses arguments. J’ai expliqué à la prestataire que je pouvais recevoir ses documents supplémentaires comme documents postérieurs à l’audience et qu’ils seraient devant moi lorsque je rendrais ma décision. Les documents supplémentaires de la prestataire ont été versés au dossier le 6 octobre 2021 (le lendemain de l’audience). J’ai accepté que ces documents soient versés au dossier d’appel et ils figurent maintenant aux pages GD14-1 à GD14-26.

[8] La prestataire a également envoyé des documents supplémentaires après l’audience. Ces documents ont été acceptés et figurent maintenant aux pages GD15-1 à GD15-9.

[9] Enfin, l’audience de la prestataire a été inscrite pour être entendue par vidéoconférence. Toutefois, lorsque la prestataire s’est connectée à la vidéoconférence, elle a confirmé qu’elle pouvait me voir à l’écran, mais qu’elle ne pouvait pas activer sa caméra pour que je puisse la voir à l’écran. La prestataire a ensuite confirmé qu’elle était disposée à tenir une audience par téléconférence et vidéoconférence.

Question en litige

[10] La prestataire a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[11] Pour décider si la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois trancher deux éléments. D’abord, je dois établir pourquoi la prestataire a perdu son emploi. Je dois ensuite décider si la loi considère ce motif comme étant une inconduite.

Pourquoi la prestataire a‑t‑elle perdu son emploi?

[12] Je conclus que la prestataire a perdu son emploi parce qu’elle ne s’est pas conformée au décret de l’ASP qui exigeait d’être entièrement vaccinée au plus tard le 15 novembre 2021.

[13] La Commission affirme que le motif invoqué par l’employeur est le motif du congédiement. L’employeur a expliqué que la prestataire ne s’était pas conformée au décret de l’ASP qui exigeait d’être entièrement vacciné au plus tard le 15 novembre 2021 (page GD3-56).

[14] La prestataire affirme que l’employeur n’avait pas de politique de vaccination et qu’elle ne pensait pas être congédiée.

[15] Je conclus que la prestataire a perdu son emploi parce qu’elle ne s’est pas conformée au décret de l’ASP qui exigeait d’être entièrement vaccinée au plus tard le 15 novembre 2021.

Le motif du congédiement de la prestataire est‑il une inconduite au sens de la loi?

[16] Le motif du congédiement de la prestataire est une inconduite au sens de la loi.

[17] Pour qu’il s’agisse d’une inconduite au sens de la loi, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 2. L’inconduite doit être une conduite à ce point insouciante qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas de page 3. La prestataire n’a pas à avoir une intention coupable (autrement dit, elle n’a pas à vouloir faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 4.

[18] Il y a inconduite si la prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait nuire à l’exécution de ses fonctions envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’elle soit congédiéeNote de bas de page 5.

[19] La Commission doit prouver que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 6.

[20] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que la prestataire a pris une décision consciente et intentionnelle et qu’elle savait, ou aurait dû savoir, que, si elle refusait de se faire vacciner conformément à la politique, elle pouvait être mise en congé sans solde et congédiée.

[21] La prestataire affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce qu’elle ne croyait pas qu’elle serait congédiée et que sa conduite n’était pas délibérée.

[22] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite parce qu’elle a démontré que la prestataire était au courant du décret de l’ASP et des deux notes de service de l’employeur donnant des mises à jour sur les exigences de vaccination contre la COVID-19. Plus précisément, la prestataire a indiqué à la Commission qu’elle était au courant du décret de l’ASP, mais qu’elle avait pris la décision personnelle de ne pas s’y conformer (page GD3-53). De plus, la Commission a produit une copie du décret de l’ASP qui confirmait qu’une deuxième dose du vaccin devait être reçue avant le 15 novembre 2021 pour qu’un employé puisse continuer à travailler (page GD3-76). La Commission a également présenté une copie de la [traduction] « Politique sur les exigences en matière d’immunisation contre la COVID-19 » de l’employeur, selon laquelle le non-respect de sa politique pourrait entraîner des mesures disciplinaires [traduction] « pouvant aller jusqu’au congédiement » (page GD3-64).

[23] Je comprends que la prestataire a témoigné qu’elle ne croyait pas qu’elle serait congédiée parce qu’elle n’avait pas reçu la deuxième dose de vaccin. Néanmoins, je conclus que la Commission a démontré que la prestataire était au courant du décret de l’ASP et de la possibilité réelle que l’employeur la congédie parce qu’elle n’était pas entièrement vaccinée au plus tard le 15 novembre 2021.

Témoignage supplémentaire de la prestataire

[24] Je constate que la prestataire a également affirmé que les notes de service sur les exigences en matière de vaccination émises par l’employeur n’étaient pas des politiques (pages GD3-57 à GD3-59). Néanmoins, la note de service de l’employeur du 15 octobre 2021 indique que le décret de l’ASP sur les exigences de vaccination obligatoire [traduction] « pour tous les travailleurs de la santé » a été affiché sur le site Web de l’ASP. La note de service de l’employeur précise en outre que [traduction] « les personnes entièrement vaccinées au moyen de deux doses d’un vaccin contre la COVID-19 seront considérées comme étant conformes au décret ». En bref, les exigences en matière de vaccination énoncées dans le décret de l’ASP étaient des exigences légales imposées aux employés du secteur de la santé de l’« Interior Health Authority ».

[25] La prestataire a également témoigné qu’elle n’était pas au courant de la [traduction] « Politique sur les exigences en matière d’immunisation contre la COVID-19 » de l’employeur datée du 1er décembre 2021 (page GD3-60). Néanmoins, l’employeur a clairement indiqué dans sa note de service du 15 octobre 2021 que les employés qui n’avaient pas reçu une première dose de vaccin contre la COVID-19 au plus tard le 15 novembre 2021 devraient s’attendre à ce que leur emploi (ou toute autre entente contractuelle) soit résilié (page GD3-58). Je comprends que la prestataire a confirmé qu’elle avait reçu la première dose du vaccin vers le 28 septembre 2021. Je reconnais également que la mention du licenciement dans la note de service du 15 octobre 2021 visait les personnes n’ayant pas reçu une première dose du vaccin au plus tard le 15 novembre 2021. Néanmoins, la prestataire a pris la décision personnelle de ne pas recevoir la deuxième dose du vaccin et ne s’est pas conformée au décret de l’ASP d’être entièrement vacciné au plus tard le 15 novembre 2021. Dans les circonstances, la Commission a démontré que la prestataire savait (ou aurait dû savoir) qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée si elle ne se conformait pas au décret de l’ASP au plus tard le 15 novembre 2021.

[26] Je reconnais également que la prestataire a fait valoir que les exigences de l’employeur en matière de vaccination introduisaient une nouvelle condition d’emploi et que ses exigences étaient « déraisonnables ». Toutefois, la question de savoir si la politique de l’employeur était juste ou raisonnable ne relevait pas de ma compétence. Bref, la prestataire dispose d’autres moyens pour faire valoir ces argumentsNote de bas de page 7.  

[27] Enfin, la prestataire a fait valoir que le décret de l’ASP et les notes de service de l’employeur contenaient des renseignements contradictoires. Néanmoins, la note de service de l’employeur du 15 octobre 2021 indiquait clairement que les personnes entièrement vaccinées avec deux doses de vaccin contre la COVID-19 [traduction] « seront considérées comme étant conformes » au décret de l’ASP. À cet égard, la prestataire a pris la décision personnelle de ne pas se conformer au décret de l’ASP au plus tard le 15 novembre 2021 et a été congédiée par l’employeur pour ne pas s’être conformée à ce décret.

Par conséquent, la prestataire a‑t‑elle perdu son emploi en raison de son inconduite?

[28] Compte tenu des conclusions que j’ai tirées précédemment, je conclus que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite.

Conclusion

[29] La Commission a prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite. C’est pourquoi la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi à compter du 21 novembre 2021.

[30] Par conséquent, l’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.