Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : JC c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1219

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. C.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentant : Joshua Toews

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (0) datée du 24 mars 2023 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 juillet 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’intimée
Date de la décision : Le 17 août 2023
Numéro de dossier : GE-23-979

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande de prestations, que la date de début des prestations soit le 27 septembre ou le 3 octobre 2020. Autrement dit, l’appelant n’a pas fourni une explication acceptable selon la loi. Par conséquent, la demande de l’appelant ne peut pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.Note de bas de page 1

Aperçu

[3] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi le 22 avril 2022 et a demandé que sa demande initiale soit antidatée, c’est-à-dire traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 29 mars 2020.Note de bas de page 2

[4] La Commission a rejeté la demande de l’appelant de commencer sa période de prestations plus tôt.

[5] L’appelant a demandé à la Commission de réviser la décision qui rejetait sa demande de débuter sa période de prestations le 29 mars 2020. La Commission a rendu une décision de révision confirmant sa décision initiale de rejeter la demande d’antidatation de l’appelant.

[6] L’appelant a porté la décision de révision de la Commission en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[7] La division générale a rejeté l’appel.

[8] L’appelant a porté la décision de la division générale en appel à la division d’appel du Tribunal.

[9] La division d’appel a conclu que la division générale avait commis une erreur de droit et lui a renvoyé l’affaire pour qu’elle décide si la demande initiale de prestations d’assurance-emploi de l’appelant pouvait commencer le 27 septembre 2020 ou, sinon, le 3 octobre 2020.

Questions que je dois examiner en premier

Document présenté après l’audience

[10] L’appelant a déposé un document après l’audience.Note de bas de page 3 À l’audience, il n’a pas demandé s’il pouvait envoyer des documents supplémentaires.

[11] Selon les Règles de procédure du Tribunal de la sécurité sociale, je ne dois pas tenir compte des éléments de preuve qu’une partie dépose après la date limite fixée par le Tribunal ou les Règles, à moins de donner à la partie la permission d’utiliser ces éléments de preuve.

[12] Avant l’audience du 27 juillet 2023, le 30 mai 2023, une lettre a été envoyée aux deux parties pour les informer de la date limite (le 30 juin 2023) pour présenter des observations. Comme les documents de l’appelant ont été reçus après ce délai, je ne dois pas les examiner à moins de lui donner la permission d’utiliser ces éléments de preuve.

[13] Ayant examiné tous les éléments pertinents, je refuse à l’appelant la permission d’utiliser les éléments de preuve qu’il a déposés après l’audience et je ne tiendrai pas compte de ces éléments pour rendre ma décision.

[14] La preuve aurait pu être envoyée plus tôt. L’appelant a non seulement eu tout un mois pour présenter des observations et fournir des éléments de preuve, mais il avait eu quasiment tout un mois avant l’audience pour s’informer au sujet d’éléments de preuve supplémentaires s’il avait voulu en présenter.

[15] De plus, il ne s’agit pas d’un nouvel élément de preuve, l’appelant a simplement répété que son TDAH l’a empêché de comprendre les programmes et de demander des prestations d’assurance-emploi plus tôt. Il a déjà présenté de multiples arguments et observations sur ces questions, ainsi que sur les conséquences découlant de son TDAH.

Les actions du membre de la division générale

[16] À l’audience et dans ses documents, l’appelant a plusieurs fois dit que le membre qui a rendu la première décision de la division générale avait un parti pris contre lui.

[17] Je ne traiterai pas dans ma décision de cette question, car elle n’a rien à voir avec la question en litige. En effet, ma décision est une nouvelle décision qui porte sur la question en litige. Les actions d’un autre membre n’ont aucune incidence sur ma décision.

[18] Je cherche à savoir si l’appelant remplit les exigences pour que sa demande initiale soit antidatée au 27 septembre ou au 3 octobre 2020. Il doit démontrer qu’il avait un motif valable justifiant son retard durant la période qui s’étend de la date où il veut que ses prestations commencent à la date où il a présenté sa demande initiale. Ce que dit le membre de la division générale lors de l’audience et ce qu’il écrit dans sa décision rendue plusieurs mois après que le prestataire a présenté sa demande initiale n’ont aucune incidence sur la justification de son retard.

Les affaires déposées

[19] L’appelant a déposé une série d’affaires pour appuyer sa position selon laquelle il avait un motif valable. Je vais traiter de la majorité d’entre elles, mais il y en a deux que je vais mettre de côté immédiatement.

[20] L’affaire JG c Ministre de l’Emploi et du Développement socialNote de bas de page 4 n’est pas pertinente à l’affaire en litige pour deux raisons. Premièrement, il s’agit d’une décision sur la permission d’en appeler. Il ne s’agit pas d’une décision définitive sur le fond de la question en litige. Accorder la permission signifie seulement qu’il y a des motifs d’appel, cela ne veut pas dire que les motifs donneront gain de cause au prestataire. Deuxièmement, il s’agit d’une décision relative aux prestations de survivant du Régime de pensions du Canada, c’est-à-dire une prestation différente aux termes d’une loi différente, laquelle n’a aucune incidence sur l’appel de l’appelant.

[21] L’affaire QB c Commission de l’assurance-emploi du CanadaNote de bas de page 5 n’aide pas non plus l’appelant. Il fait valoir que dans l’affaire QB, la division générale a commis des erreurs de droit et que les déclarations du prestataire avaient été présentées à temps. Il affirme que la division d’appel a conclu à des erreurs de droit dans sa décision initiale de la division générale, alors je devrais conclure que sa demande initiale a été présentée à temps.Note de bas de page 6

[22] Je conclus que QB est une conférence de règlement, ce qui signifie que les deux parties s’entendent sur l’issue, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. De plus, le simple fait que des erreurs de droit ont été commises dans QB et dans la décision de la division générale ne signifie pas que l’appelant a prouvé qu’il avait un motif valable dans son cas. Chaque cas comporte ses propres faits.

Question en litige

[23] La demande de prestations de l’appelant peut-elle être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt? C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande.

Analyse

[24] Lorsque l’appelant a perdu son emploi en mars 2020, il a d’abord demandé la Prestation canadienne d’urgence (PCU) par l’entremise de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Lorsque cette prestation a pris fin le 27 septembre 2020, il a ensuite demandé la Prestation canadienne de la relance économique.Note de bas de page 7

[25] Lorsqu’il a fait ses déclarations de revenus en 2022, son comptable l’a informé qu’en raison de la façon dont l’héritage de la succession de son père avait été traité, son revenu était supérieur au seuil de récupération pour les prestations versées par l’entremise de l’ARC. Il allait donc devoir rembourser les prestations qu’il avait reçues.

[26] L’appelant affirme que son comptable lui a dit de parler à la Commission et de voir s’il est possible de passer des prestations de l’ARC aux prestations d’assurance-emploi, car le seuil de récupération du programme d’assurance-emploi est beaucoup plus élevé. Si l’appelant avait reçu des prestations d’assurance-emploi au lieu de prestations par l’entremise de l’ARC, il n’aurait pas à rembourser de prestations.

[27] L’appelant a ensuite présenté une demande de prestations d’assurance-emploi en avril 2022 et a demandé qu’elle soit antidatée.

[28] Pour que sa demande de prestations soit antidatée, l’appelant doit prouver les deux choses suivantesNote de bas de page 8 :

  1. a) Il avait un motif valable justifiant son retard pendant toute la période. Autrement dit, il a une explication que la loi accepte.
  2. b) Il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations à la date antérieure (soit le 27 septembre 2020 ou le 3 octobre 2020).

[29] Les principaux arguments dans la présente affaire portent sur la question de savoir si l’appelant avait un motif valable. Je vais donc commencer par cela.

Motif valable

[30] Pour démontrer l’existence d’un motif valable, l’appelant doit prouver qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblables.Note de bas de page 9 Autrement dit, il doit démontrer qu’il a agi de façon raisonnable et prudente, comme n’importe qui d’autre l’aurait fait dans une situation semblable.

[31] L’appelant doit démontrer qu’il a agi de cette façon pendant toute la période du retard.Note de bas de page 10 Cette période s’étend des dates que la division d’appel m’a dit de prendre en considération pour l’antidatation de sa demande initiale (27 septembre ou 3 octobre 2020) jusqu’au jour où il a présenté sa demande (22 avril 2022).Note de bas de page 11

[32] L’appelant doit également démontrer qu’il a vérifié assez rapidement son droit aux prestations et les obligations que lui impose la loi.Note de bas de page 12 Cela signifie que l’appelant doit démontrer qu’il a essayé de s’informer de ses droits et responsabilités dès que possible et du mieux qu’il le pouvait. Si l’appelant n’a pas fait ces démarches, il doit démontrer qu’il y avait des circonstances exceptionnelles qui expliquent pourquoi il ne l’a pas fait.Note de bas de page 13

[33] L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valable justifiant son retard.

[34] L’appelant a soulevé plusieurs raisons démontrant un motif valable :

Il n’était pas en retard

[35] L’appelant a fait valoir qu’en réalité, même s’il s’est d’abord inscrit à la PCU (administrée par l’ARC), puis à la Prestation canadienne de la relance économique lorsque la PCU a pris fin (l’ARC administrait également la Prestation canadienne de la relance économique), il s’agit essentiellement du même programme que les prestations d’assurance-emploi.

[36] L’appelant fait valoir qu’au moment où il a perdu son emploi, les prestations d’urgence pour la COVID-19 étaient versées par l’entremise de deux organismes différents (soit, l’assurance-emploi et l’ARC), mais il s’agissait essentiellement du même programme. Ce n’est que plus tard que les deux organismes ont commencé à offrir des prestations différentes dans le cadre de programmes distincts.

[37] Ainsi, selon l’appelant, lorsque l’agent de l’ARC lui a dit de présenter une demande de PCU par l’entremise de l’ARC, cette personne agissait à titre d’agent de l’assurance-emploi, car à ce moment-là, les deux programmes étaient fusionnés. L’appelant affirme que cela signifie qu’à partir du moment où il a présenté sa demande de PCU, il n’avait pas à avoir un motif valable.Note de bas de page 14

[38] Je ne suis pas d’accord avec les observations de l’appelant et je signale qu’il n’est pas d’accord avec ses propres observations.

[39] Premièrement, l’appelant fait référence à une période qui n’est pas prise en considération dans la présente décision. Je ne me penche pas sur le moment où il a demandé la PCU à l’ARC. J’examine plutôt le temps qui s’est écoulé après la fin de la PCU jusqu’à la présentation de la demande de Prestation canadienne de la relance économique.

[40] D’ailleurs, la raison pour laquelle l’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi est qu’il y a une différence, selon lui, entre le programme d’assurance-emploi et les prestations qu’il recevait par l’entremise de l’ARC. Il affirme que le seuil de récupération du revenu est beaucoup plus bas dans le programme de l’ARC. On lui demande de rembourser ces prestations parce qu’il a gagné trop de revenus. Il affirme que s’il avait été inscrit aux prestations d’assurance-emploi, étant donné son seuil de récupération du revenu beaucoup plus élevé, on ne lui aurait pas demandé de rembourser de l’argent.Note de bas de page 15

[41] Ainsi, comme le démontrent les observations de l’appelant, peu importe les délais des programmes, son argument est voué à l’échec, car il est clair que les deux programmes (assurance-emploi et Prestation canadienne de la relance économique) sont différents. Cela signifie qu’il devait continuer à prouver qu’il avait un motif valable après avoir demandé la PCU.

Le TDAH de l’appelant et sa méconnaissance des programmes

[42] L’appelant affirme qu’il est atteint d’une invalidité de longue date en raison de son TDAH et qu’il souffre d’un déclin cognitif. Il dit aussi qu’il n’aime pas l’informatique et, comme il ne vit pas au Canada depuis longtemps, il ne connaissait pas ses régimes de prestations, car c’était la première fois qu’il en demandait.

[43] L’appelant affirme que son TDAH fait en sorte qu’il est difficile pour lui de remettre en question ce que disent les autorités, mais le vrai problème pour lui c’est l’anxiété qui découle son problème de santé.

[44] L’appelant affirme que lorsqu’il a perdu son emploi et qu’il n’a pas pu joindre quelqu’un à l’assurance-emploi, il a téléphoné à l’ARC. L’agent de l’ARC lui a dit que, comme il gagnait si peu et que les deux programmes (soit l’assurance-emploi et l’ARC) versaient le même montant de prestations, il ferait aussi bien de simplement présenter une demande par l’entremise de l’ARC.

[45] L’appelant se sentait soulagé d’être finalement inscrit à un programme de prestations. Il affirme également qu’il ne sentait pas le besoin de demander à l’agent de l’ARC s’il s’agissait du bon programme pour lui.

[46] L’appelant affirme qu’il ne sait pas comment il est entré dans le programme de la Prestation canadienne de la relance économique, une fois que la PCU (versée par l’ARC) a pris fin. Il dit qu’il est à peu près certain d’avoir fait une demande par téléphone et que quelqu’un a dû l’aider, mais il ne s’en souvient pas.

[47] Lorsque sa PCU a pris fin, il dit qu’il a continué à recevoir des prestations par l’entremise de l’ARC, s’inscrivant ainsi à la Prestation canadienne de la relance économique. Il n’a pas pensé à demander des prestations dans le cadre d’un autre programme. Il affirme que, comme il s’était déjà engagé dans une voie (les prestations via l’ARC), il n’a pas jugé nécessaire d’opter pour une autre voie, surtout étant donné qu’on ne lui a pas conseillé de le faire.

[48] L’appelant affirme également qu’il y avait tellement de confusion avec les noms des programmes que même la division générale du Tribunal s’est mêlée en notant les noms des programmes dans sa décision initiale. Il dit que si les organismes gouvernementaux et le Tribunal confondent les programmes de prestations, il n’est pas surprenant qu’une personne atteinte du TDAH et d’un déclin cognitif se sente aussi mêlée.

[49] La Commission affirme que l’appelant n’a pas démontré en quoi son TDAH l’empêchait de demander des prestations d’assurance-emploi. Elle dit qu’il a communiqué avec l’ARC en mars 2020 pour s’informer au sujet des prestations. Ainsi, à tout moment de la période du retard, il aurait pu communiquer avec la Commission ou l’ARC pour se renseigner sur les répercussions fiscales de ses prestations.

[50] J’admets que l’appelant a fait des démarches pour présenter une demande de Prestation canadienne de la relance économique, car la loi sur cette prestation mentionne qu’il faut remplir un formulaire de demande de prestations.Note de bas de page 16 Cela appuie le témoignage de l’appelant selon lequel il a peut-être présenté une demande par téléphone.

[51] J’admets que l’appelant est atteint d’un TDAH et d’un déclin cognitif. J’admets que ces problèmes de santé causent de l’anxiété. Je peux également accepter qu’il ne soit pas très doué en informatique et qu’il ne connaissait pas bien les programmes de prestations offerts par le gouvernement du Canada.

[52] Cependant, je ne trouve pas crédible son affirmation selon laquelle son TDAH fait en sorte qu’il est difficile pour lui de remettre en question l’autorité. Il a déjà déclaré que dans le cadre de son emploi, il intervenait auprès de la police si certains des nouveaux arrivants au Canada avec lesquels il travaillait avaient des démêlés avec la justice. Il dit qu’il essayait d’intervenir et d’agir comme un arbitre.

[53] J’estime que le fait qu’il aide des clients en difficulté en s’entretenant avec la police invalide à son affirmation selon laquelle son TDAH nuit à sa capacité à remettre en question ce que dit une personne qui fait autorité. Un policier est évidemment une autorité importante. Pourtant, l’appelant a déclaré qu’il se faisait volontairement l’intermédiaire entre la police et ses clients.

[54] Même si j’ai reconnu que l’appelant a un TDAH et un déclin cognitif, ce qui cause de l’anxiété, qu’il n’est pas très bon en informatique et qu’il ne connaissait pas les programmes de prestations du Canada, j’estime que ces raisons, prises ensemble, ne lui donnent pas de motif valable justifiant son retard.

[55] Bien que l’appelant ne soit pas un expert des programmes de prestations canadiens, il savait tout de même qu’il y avait deux organismes qui administraient les prestations, soit l’ARC et l’assurance-emploi.

[56] Lorsque sa PCU a pris fin, il a continué à recevoir des prestations par l’entremise de l’ARC, s’inscrivant ainsi à la Prestation canadienne de la relance économique. Cela montre qu’il savait qu’il existait d’autres programmes, il a simplement choisi de ne pas les considérer.

[57] Je comprends que l’appelant était anxieux à l’idée de ne pas pouvoir s’inscrire à un programme. Je retiens également qu’en raison de son anxiété, une fois qu’il avait trouvé son programme il n’aurait pas modifié son choix, à moins de recevoir des instructions contraires. Toutefois, je juge que cela ne l’aurait pas empêché de demander des prestations d’assurance-emploi au lieu de demander la Prestation canadienne de la relance économique ou, à tout le moins, de communiquer avec l’assurance-emploi pour discuter du programme, s’il avait voulu.

[58] Je conclus qu’au moment où la PCU a pris fin, il n’était plus inscrit au programme. Les prestations étaient terminées et il devait prendre des mesures proactives pour s’inscrire à un autre programme. Il n’était pas engagé dans une voie particulière. Il savait également que l’assurance-emploi existait et qu’il s’agissait d’un programme pour lequel il pouvait présenter une demande.

[59] De plus, lorsqu’il a perdu son emploi, il a tout de même tenté de communiquer avec les deux organismes (l’assurance-emploi et l’ARC) – malgré son anxiété – pour se renseigner sur leurs programmes. J’estime que cela montre que son anxiété ne l’aurait pas empêché de le faire de nouveau, au lieu de simplement s’inscrire directement à la Prestation canadienne de la relance économique.

[60] Même si j’acceptais ses affirmations selon lesquelles il a de la difficulté à remettre en cause les autorités, cela n’aiderait pas l’appelant puisqu’il n’y avait pas lieu de remettre en cause une autorité particulière de toute façon. Il dit avoir fait les démarches pour demander la Prestation canadienne de la relance économique par l’entremise de l’ARC. Je ne vois rien qui appuie le fait qu’une personne faisant autorité lui aurait dit qu’il devait demander la Prestation canadienne de la relance économique. Il aurait tout aussi bien pu rejoindre l’assurance-emploi par téléphone en vue de parler du début d’une période de prestations après la fin de sa PCU. Mais, il dit qu’il a plutôt présenté une nouvelle demande de prestations par l’entremise de l’ARC.

[61] Il n’était pas non plus nécessaire qu’il soit expert en informatique ou en programmes gouvernementaux. Il aurait pu simplement téléphoner à l’assurance-emploi s’il avait voulu. J’estime que malgré son déclin cognitif, l’appelant a démontré qu’il en était capable, car il dit qu’il utilisait le téléphone constamment pour faire ses déclarations de PCU et il a déclaré qu’il se spécialisait dans la communication et qu’il utilisait le téléphone dans le cadre de son emploi précédent.

[62] Il a également déclaré qu’il aidait les nouveaux arrivants au Canada à trouver un emploi. Il faisait du réseautage avec des entreprises pour diriger les nouveaux arrivants vers les emplois qui correspondaient le mieux à leurs compétences. Il dit aussi que son travail consistait à résoudre des problèmes. Il réglait les différends entre les employeurs et les travailleurs, et il dit même qu’il intervenait auprès de la police lorsque les nouveaux arrivants avaient des démêlés avec la justice. Il dit avoir agi comme un conciliateur et un défendeur des intérêts des gens qu’il orientait.

[63] [sic]

[64] J’estime que son témoignage concernant son emploi appuie davantage le fait qu’il était capable de communiquer avec l’assurance-emploi pour discuter de son programme et le comparer à la Prestation canadienne de la relance économique. Étant spécialiste de la communication dans un emploi qui exigeait de communiquer avec des personnes et des entreprises, il avait de l’expérience pertinente.

[65] Je retiens également le témoignage de l’appelant selon lequel dès que son comptable lui a dit de communiquer avec la Commission et d’essayer de faire transférer ses prestations de l’ARC à l’assurance-emploi pour qu’il n’ait pas à rembourser de prestations, il a immédiatement présenté une demande d’assurance-emploi. J’estime que cela démontre encore une fois que, malgré son TDAH et son déclin cognitif, l’appelant aurait été en mesure de présenter une demande à l’assurance-emploi, ou à tout le moins, de contacter l’assurance-emploi s’il avait voulu, au lieu de simplement demander la Prestation canadienne de la relance économique.

Il ne savait pas qu’il devait s’inscrire à un autre programme

[66] L’appelant affirme que son père est décédé à la fin de 2019, soit juste au début de la pandémie de COVID-19.

[67] Il dit que sa sœur s’occupait de la succession et qu’elle a embauché un comptable aux États-Unis, où son père vivait, pour gérer la succession. Il dit que sa sœur l’a tenu au courant de l’évolution de la situation.

[68] L’appelant a déclaré que la succession de son père a malheureusement été très mal gérée. En raison de la façon dont son héritage de la succession de son père a été géré, on lui a octroyé beaucoup plus de revenus qu’il n’aurait dû recevoir. L’appelant affirme que ce n’est qu’en avril 2022 qu’il a appris que cela lui poserait problème.

[69] L’appelant affirme qu’en avril 2022, son compte [sic] lui a dit qu’il y avait une grande différence entre les seuils de récupération du revenu du programme de l’ARC (auquel il était inscrit) et celui de l’assurance-emploi. Étant donné l’héritage, il a reçu un revenu beaucoup plus élevé que ce à quoi on s’attendait normalement. Et, vu que le seuil de récupération du revenu du programme de l’ARC était plus bas, il serait obligé de rembourser les prestations qu’il a reçues de l’ARC.

[70] Il dit que son comptable lui a dit de communiquer avec la Commission et d’essayer de faire transférer ses prestations à l’assurance-emploi, afin qu’il puisse profiter du revenu admissible beaucoup plus élevé du programme d’assurance-emploi et ne pas avoir à rembourser de prestations.

[71] L’appelant affirme que dès qu’on lui a dit cela, il a présenté sa demande d’assurance-emploi.

[72] L’appelant affirme que jusqu’à ce que son comptable lui dise en avril 2022 qu’il devait suivre un autre programme, il n’avait aucune idée qu’il aurait dû recevoir des prestations d’assurance-emploi, alors il ne pouvait pas savoir qu’il aurait dû demander des prestations d’assurance-emploi avant avril 2022.

[73] La Commission affirme que l’appelant n’a pas vérifié rapidement ses droits et ses obligations aux termes de la loi, car il n’a pas contacté l’assurance-emploi avant que son comptable lui dise qu’il aurait dû demander des prestations d’assurance-emploi.

[74] Je peux accepter que l’appelant ignorait toute incidence que la succession de son père pouvait avoir sur son obligation de rembourser les prestations jusqu’à ce que son comptable lui parle du seuil de récupération du revenu. Cependant, l’ignorance ne constitue pas un motif valable puisqu’elle est survenue parce que l’appelant n’a fait aucun effort pour comprendre l’impact éventuel de son héritage sur ses prestations.

[75] J’estime qu’en septembre 2020, lorsque l’appelant a demandé la Prestation canadienne de la relance économique, il savait que son père était décédé et qu’il recevrait un héritage puisqu’il dit avoir reçu de l’argent en janvier 2020.Note de bas de page 17 De plus, il dit que sa sœur le tenait au courant de la façon dont la succession était gérée.

[76] Ainsi, à ce moment-là, l’appelant aurait pu parler à l’assurance-emploi pour voir si ce programme ressemblait ou non à la Prestation canadienne de la relance économique et comment son héritage aurait pu avoir une incidence sur ses prestations.

[77] Je remarque que l’appelant a également déclaré qu’en 2020, lorsqu’il a présenté sa première demande de PCU, il a dit que l’agent de l’ARC lui avait dit que comme il ne gagnait pas beaucoup d’argent, il importait peu dans quel programme il allait s’inscrire.

[78] J’estime que ces commentaires de l’agent de l’ARC montrent que l’appelant a été averti du fait que le montant de son revenu pouvait être pertinent par rapport à ses prestations et de l’organisme auprès duquel il a choisi de recevoir des prestations. Bien qu’il ait été averti de ce fait et qu’il ait reçu un héritage, lorsque la PCU a pris fin, il a choisi de ne pas communiquer avec l’assurance-emploi pour examiner leur programme et comparer l’incidence que son héritage pourrait avoir sur ses prestations.

[79] Je comprends son argument selon lequel son héritage aurait dû être géré d’une manière différente qui ne lui aurait pas permis de recevoir autant de revenus, mais il aurait quand même dû prendre des mesures pour déterminer si une demande d’assurance-emploi aurait été la meilleure option. Il a plutôt choisi de ne pas faire d’enquête et de simplement continuer avec une demande de Prestation canadienne de la relance économique.

[80] Il a affirmé qu’il ignorait les différents seuils de récupération du revenu, soit dans le cadre du programme de prestations de l’ARC et du programme de prestations d’assurance-emploi, et dans quelle mesure cela aurait une incidence sur sa situation. Cela ne constitue pas un motif valable, parce qu’il n’a même pas pris la peine de se renseigner sur le programme d’assurance-emploi.

Induit en erreur par l’ARC

[81] L’appelant fait valoir qu’il a été induit en erreur par les agentes et agents de l’ARC avec qui il a parlé, car aucun d’eux ne lui a expliqué la différence entre les seuils de récupération du revenu.

[82] L’appelant a également cité de nombreux cas qui appuient le fait qu’être induit en erreur est un motif valable justifiant le retard d’une demande de prestations.Note de bas de page 18

[83] Je conclus que l’appelant n’a pas été induit en erreur.

[84] D’après son propre témoignage, l’appelant n’a jamais parlé à l’ARC de ses questions de succession, de fiscalité, de seuils de récupération du revenu ou de toute autre différence entre les prestations d’assurance-emploi et les prestations de l’ARC. Il ajoute qu’il n’a jamais parlé de ces questions à l’assurance-emploi.

[85] Je conclus que l’appelant ne peut pas être induit en erreur sur un point par quelqu’un, s’il n’a jamais parlé à quelqu’un de la chose dont il prétend avoir été induit en erreur.

[86] Je conclus également que, comme l’appelant n’a jamais été induit en erreur par qui que ce soit, les cas qu’il a cités concernant cette question ne l’aident pas.

Alors, l’appelant a-t-il un motif valable?

[87] J’estime qu’en considérant l’ensemble des circonstances soulevées par l’appelant, il n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable.

[88] Je conclus que l’appelant n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblables et qu’il n’a pas vérifié assez rapidement s’il avait droit aux prestations et quelles obligations la loi lui imposait.

[89] J’estime qu’une personne raisonnable et prudente dans une situation semblable, sachant qu’il existe des prestations d’assurance-emploi et de l’ARC, sachant qu’elle recevra un héritage et sachant, suite à sa conversation avec un agent de l’ARC, que le revenu peut avoir une incidence sur les prestations, n’aurait pas simplement demandé la Prestation canadienne de la relance économique sans faire de démarches pour enquêter sur les prestations d’assurance-emploi.

[90] Je juge qu’une personne raisonnable et prudente aurait communiqué avec l’assurance-emploi rapidement avant de s’inscrire au programme de la Prestation canadienne de la relance économique pour déterminer s’il y avait une différence entre les deux programmes et ce qui lui conviendrait le mieux.

[91] Je juge également que l’appelant n’a présenté aucune circonstance exceptionnelle qui pourrait le dispenser de l’obligation de vérifier assez rapidement son admissibilité aux prestations et les obligations que lui impose la loi.

[92] Son TDAH et l’anxiété qui en découle, son déclin cognitif, son manque de compétences en informatique et son manque de connaissance approfondie des programmes gouvernementaux ne constituent pas des circonstances exceptionnelles.

[93] Je conclus que le TDAH de l’appelant, ainsi que l’anxiété et le déclin cognitif qui y sont associés, ne l’empêcheraient pas de communiquer avec l’assurance-emploi pour s’informer au sujet de leur programme afin de le comparer à celui de la Prestation canadienne de la relance économique. Il a déclaré qu’il est un spécialiste des communications et qu’il communiquait souvent avec des entreprises et des gens pour recueillir des renseignements dans le cadre de son travail. Il a également réussi à dûment présenter une demande d’assurance-emploi en avril 2022, lorsque son comptable lui a suggéré de le faire. Cela confirme qu’il aurait pu, à tout le moins, communiquer avec l’assurance-emploi en vue de voir quelles étaient les différences entre leur programme et celui de la Prestation canadienne de la relance économique.

[94] De plus, je conclus qu’il n’avait pas besoin de renseignements détaillés sur les prestations gouvernementales, car il savait qu’il existait deux programmes, l’un offert par l’assurance-emploi et l’autre offert par l’ARC. C’est suffisant pour qu’il sache qu’il existe un autre programme pour lequel il pourrait présenter une demande (ou avec lequel il aurait pu communiquer), mais il a choisi de ne pas le faire.

[95] En résumé, l’appelant n’a pas agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait et n’a pas vérifié assez rapidement ses droits et ses obligations aux termes de la loi. De plus, il n’y a pas de circonstances exceptionnelles qui le dispensent de faire ces démarches. Cela signifie que sa demande ne peut pas commencer à l’une ou l’autre date antérieure, parce que peu importe la date, il n’a pas démontré qu’il avait un motif valable pendant toute la période du retard.

[96] Enfin, je n’ai pas besoin d’examiner si l’appelant remplissait les conditions requises à la date antérieure pour recevoir des prestations. Si l’appelant n’a pas de motif valable, sa demande ne peut pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.

Conclusion

[97] L’appelant n’a pas prouvé qu’il avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations pendant toute la période écoulée.

[98] L’appel est rejeté.

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