Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RB c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1250

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelante : R. B.
Représentant : L. M.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance emploi du Canada (510923) datée du 16 août 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Paul Dusome
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience  : Le 23 janvier 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelante
Date de la décision : Le 31 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-22-3167

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. Le Tribunal est d’accord avec la prestataire.

[2] La Commission de l’assurance‑emploi du Canada (Commission) n’a pas prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Cela signifie que la prestataire n’est pas exclue du bénéfice des prestations d’assurance‑emploiNote de bas page 1.

Aperçu

[3] La prestataire a perdu son emploi. Son employeur a dit qu’elle a été congédiée parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de l’employeur sur la vaccination obligatoire contre la COVID-19 (politique).

[4] La prestataire a affirmé qu’il n’y avait pas eu d’inconduite de sa part. Elle était prête à recevoir le vaccin de Novavax dès qu’il serait approuvé par Santé Canada au début de 2022. Elle travaillait de la maison depuis mars 2020, de sorte que la vaccination n’était pas nécessaire pour protéger les autres. L’employeur avait autorisé une prolongation de son entente de travail à domicile qui devait commencer le 17 janvier 2022. Ce jour-là était la date limite prévue dans la politique pour se faire vacciner. La politique conférait à l’employeur le pouvoir discrétionnaire de prendre des mesures autres que le congédiement. L’employeur a refusé d’exercer ce pouvoir discrétionnaire.

[5] La Commission a accepté le motif du congédiement de l’employeur. Elle a conclu que la prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi la Commission a statué que la prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

Question que je dois examiner en premier

J’accepterai les documents envoyés après l’audience

[6] La prestataire était disposée à recevoir le vaccin de Novavax contre la COVID-19. Elle avait dit à l’employeur qu’elle était disposée à recevoir le vaccin de Novavax. Des éléments de preuve fournis par l’employeur le confirment. L’approbation de ce vaccin était attendue au moment où l’employeur a congédié la prestataire. Lors de son témoignage, elle n’était pas certaine de la date exacte de l’approbation de ce vaccin, ni du moment où il serait offert après avoir été approuvé. Elle pensait qu’il pourrait être offert le 17 février 2022. Je lui ai demandé si elle pouvait trouver des documents concernant la date d’approbation du vaccin de Novavax et la date à laquelle il serait offert. Cette preuve pourrait être pertinente en ce qui concerne la question de l’inconduite.

[7] La prestataire a fourni cet élément de preuve au Tribunal le lendemain de l’audience. Elle a inclus son nouveau contrat de travail avec l’employeur qui est entré en vigueur le 7 décembre 2022, après son congédiement. Le Tribunal a transmis la preuve à la Commission en lui demandant de fournir sa réponse au plus tard le 30 janvier. La Commission n’a pas répondu avant la date de publication de la présente décision.

Question en litige

[8] La prestataire a‑t‑elle perdu son emploi en raison de son inconduite?

Analyse

[9] Pour répondre à la question de savoir si la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite, je dois trancher deux éléments. D’abord, je dois établir pourquoi la prestataire a perdu son emploi. Je dois ensuite décider si ce motif constitue une inconduite au sens la loi.

Pourquoi la prestataire a‑t‑elle perdu son emploi?

[10] Je conclus que la prestataire a perdu son emploi parce qu’elle n’avait pas reçu le vaccin contre la COVID-19 au plus tard le 17 janvier 2022. La lettre de licenciement de l’employeur indiquait qu’elle avait refusé de se conformer à la politique.

[11] La prestataire n’est pas d’avis qu’elle a refusé de se conformer à la politique. La politique indiquait que les employés qui ne se conformaient pas ou qui refusaient de se conformer feraient l’objet de mesures disciplinaires à la discrétion de la direction. La prestataire a proposé des solutions pour éviter de recevoir l’un des vaccins à ARNm. Elle était disposée à recevoir le vaccin de Novavax qui devait être approuvé par Santé Canada peu après la date limite fixée dans la politique. L’employeur a rejeté toutes les propositions de la prestataire.

[12] Je conclus que l’employeur a congédié la prestataire parce qu’elle n’était pas entièrement vaccinée avec l’un des vaccins à ARNm au plus tard le 17 janvier 2022, comme l’exige la politique. Quant à savoir s’il y a eu inconduite, il s’agit d’une tout autre question.

Le motif du congédiement de la prestataire est‑il une inconduite au sens de la loi?

[13] Le motif du congédiement de la prestataire n’est pas une inconduite au sens de la loi.

[14] Pour constituer une inconduite au sens de la loi, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas page 2. L’inconduite doit être une conduite à ce point insouciante qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas page 3. La prestataire n’a pas à avoir une intention coupable (autrement dit, elle n’a pas à vouloir faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas page 4.

[15] Il y a inconduite si la prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’elle soit congédiéeNote de bas page 5.

[16] La Commission doit prouver que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que la prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas page 6.

[17] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que la conduite de la prestataire était consciente et intentionnelle. Elle savait qu’elle risquait d’être congédiée si elle ne se conformait pas. Elle a refusé d’obtempérer. Sa conduite constituait un manquement à une obligation expresse énoncée dans la politique. Sa conduite a causé le congédiement.

[18] La prestataire affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce qu’elle n’a rien fait de mal et qu’elle n’a pas commis d’inconduite. Elle était une employée exceptionnelle, comme l’a confirmé l’employeur. Elle n’a pas refusé de se faire vacciner contre la COVID-19. Elle a refusé les vaccins à ARNm, mais elle était prête à recevoir le vaccin de Novavax, qui était en attente d’approbation par Santé Canada au premier trimestre de 2022. Elle travaillait de la maison et était disposée à se faire tester à ses frais si elle devait se présenter au bureau.

[19] Je conclus que la Commission n’a pas prouvé qu’il y a eu inconduite parce qu’elle n’a pas prouvé deux des quatre éléments qui constituent une inconduite aux fins de l’assurance-emploi.

Conclusions de fait

[20] La prestataire a travaillé pendant quatre ans et demi à titre de coordonnatrice d’événements pour l’organisme directeur d’une profession réglementée. Elle avait reçu des évaluations très positives de la part de la direction. Il n’a fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire ou évaluation négative. Elle était estimée et respectée par ses collègues. Ces faits ont été confirmés par une évaluation de mi-exercice en 2020-2021 et une lettre de sa supérieure immédiate datée du 26 septembre 2022. Cela a également été confirmé par le fait que le 7 décembre 2022 l’employeur a embauché la prestataire à titre d’entrepreneure au même poste qu’elle occupait auparavant. Dans sa lettre, sa supérieure a également confirmé que la prestataire lui avait dit à plusieurs reprises qu’elle était disposée à recevoir le vaccin de Novavax et à faire effectuer des tests de dépistage de la COVID-19.

[21] À compter du 16 mars 2020, la prestataire a commencé à travailler de la maison en raison de la pandémie de COVID-19. Entre le 15 mars 2020 et le 20 janvier 2022, la prestataire ne s’est présentée au bureau que quatre ou cinq fois. La période la plus longue qu’elle a passée au bureau était de cinq jours pour un projet. Au bureau, elle portait un masque.

[22] Le 13 décembre 2021, l’employeur a offert de prolonger l’entente de travail à domicile à partir du 17 janvier 2022. Selon l’entente, elle devait travailler à domicile du lundi au vendredi. L’entente devait être revue quatre mois plus tard, et au moins une fois par année par la suite. L’entente pourrait être résiliée par l’une ou l’autre des parties moyennant un préavis de deux semaines. La prestataire a accepté et a retourné sa copie signée de la lettre à l’employeur le 5 janvier 2022.

[23] La prestataire a reçu la politique non datée le 22 novembre 2021 par un courriel dans lequel il y avait un lien menant à la politique. Elle a lu et compris la politique. La politique s’appliquait à tout le personnel. Le terme [traduction] « entièrement vacciné » voulait dire avoir reçu plus de 14 jours auparavant toutes les doses d’un vaccin contre la COVID-19 approuvé par Santé Canada de façon provisoire ou permanente. Selon la politique, [traduction] « tout le personnel doit être entièrement vacciné au plus tard le 17 janvier 2022 comme condition de maintien de l’emploi ou du contrat ». Le personnel devait également présenter une preuve de vaccination avant le 17 janvier 2022. Le personnel pouvait demander une exemption de l’obligation d’être entièrement vacciné d’ici le 17 décembre 2021. La demande devait être fondée sur l’incapacité médicale d’être entièrement vaccinée ou sur une [traduction] « croyance religieuse » sincère selon la définition relative aux droits de la personne. La décision relative à une demande d’exemption est définitive, et est assujettie au pouvoir discrétionnaire de l’employeur de la réexaminer. La politique couvrait la non-conformité. Elle indiquait ce qui suit : [traduction] « Les membres du personnel qui refusent de se conformer à la présente politique, ou omettent de le faire, s’exposent à des conséquences disciplinaires imposées à la discrétion de la direction de [nom de l’employeur], pouvant aller jusqu’au congédiement ou à la résiliation de contrat pour motif valable ou manquement important ».

[24] La prestataire a eu des discussions avec l’employeur au sujet de la politique au cours des deux mois qui se sont écoulés entre la réception de la politique et son congédiement. Les discussions ont eu lieu avec son gestionnaire immédiat, le service des ressources humaines et un vice-président principal. Elle a souligné que le travail à domicile ne l’empêchait pas de s’acquitter de ses fonctions. Elle le faisait sans problème depuis près de deux ans. Elle n’était pas disposée à recevoir les vaccins à ARNm pour des raisons médicales et religieuses. Elle prendrait le vaccin de Novavax parce qu’il était fabriqué à partir de protéines plutôt que de l’ARNm. Elle ne refusait pas de se faire vacciner. L’utilisation du vaccin de Novavax n’avait pas encore été approuvée par Santé Canada, mais l’approbation était attendue au cours du premier trimestre de 2022. En attendant cette approbation et d’être vaccinée, elle ferait des tests de dépistage de la COVID-19 à ses frais et utiliserait d’autres mesures si elle devait se présenter au bureau. Elle a même présenté cette proposition au sujet du vaccin de Novavax par écrit, en ajoutant que si elle continuait à travailler et ne prenait pas le vaccin après son approbation, l’employeur pourrait la congédier sans avoir à lui verser une indemnité de départ. Le service des ressources humaines et le vice-président principal ont rejeté toutes ces propositions. La haute direction s’est montrée inflexible quant à l’application des modalités strictes de la politique. La haute direction n’a pas exercé le pouvoir discrétionnaire prévu dans la politique.

[25] Après l’audience, la prestataire a fourni des documents concernant l’approbation du vaccin de Novavax au Canada. Santé Canada a autorisé l’utilisation du vaccin Nuvaxovid de Novavax contre la COVID-19 pour prévenir la COVID-19 le 17 février 2022. Santé Canada a annoncé le début de la réception du vaccin le 31 mars 2022. La distribution du vaccin aux provinces avait commencé. L’annonce précisait également que le vaccin de Novavax [traduction] « offre une autre option vaccinale pour ceux qui veulent un vaccin à base de protéines ou qui ne sont pas en mesure de recevoir les vaccins à ARNm ».

[26] La prestataire n’a pas demandé d’être exemptée parce que l’employeur lui a dit qu’il était difficile de prouver les motifs de l’exemption. Son problème médical était de l’asthme sévère. Ses inquiétudes quant à la façon dont le vaccin pouvait compromettre sa santé lui ont causé du stress et de l’anxiété. Son médecin n’a pas pu lui donner de lettre d’exemption médicale. Son médecin a autorisé un congé médical de deux semaines en raison du stress et de l’anxiété. L’assureur de l’employeur a refusé d’autoriser le paiement pour invalidité de courte durée. La prestataire a pris le congé de deux semaines. L’employeur a payé à la prestataire des jours de congé de maladie pour une partie du congé. Le motif religieux de la prestataire pour s’opposer aux vaccins à ARNm était fondé sur ses propres croyances chrétiennes et non sur la doctrine ou une directive de l’Église. Des collègues qui avaient demandé une exemption avaient essuyé un refus. Quand elle a appris que les exemptions étaient refusées, elle a su qu’elle pouvait être congédiée.

Décision sur l’inconduite

[27] Pour les motifs énoncés ci‑après, je conclus que la Commission n’a pas prouvé que la prestataire a commis une inconduite. La Commission n’a pas prouvé les éléments du caractère délibéré et de manquement à une obligation envers l’employeur. Elle a prouvé les éléments de la connaissance des conséquences possibles et de la cause du congédiement. Mais la Commission doit prouver les quatre éléments pour qu’il soit fait droit à l’appel.

[28] Le Tribunal n’a pas à décider si la politique de l’employeur était raisonnable ou si le congédiement de la prestataire était justifié. Le Tribunal doit déterminer si la conduite de la prestataire constituait une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance‑emploiNote de bas page 7.

[29] Si l’inconduite découlait directement des gestes posés par l’employeur avant l’inconduite, une analyse de la conduite de l’employeur avant l’« inconduite » est nécessaire pour apprécier correctement si la conduite de l’employé était intentionnelle ou non. Dans une telle situation, le fait d’affirmer que la conduite de l’employeur n’était pas pertinente peut constituer une erreurNote de bas page 8.

[30] Caractère délibéré  Le présent appel porte sur une situation factuelle unique. La prestataire était disposée à recevoir un nouveau vaccin qui était en attente d’approbation par Santé Canada peu après la date limite pour se conformer à la politique. Elle en a fait part à la haute direction de l’employeur. L’employeur a refusé de lui accorder plus de temps pour obtenir le nouveau vaccin. Elle travaillait principalement de la maison depuis 2020. Le 13 décembre 2021, l’employeur avait prolongé son autorisation de travail à domicile à partir du 17 janvier 2022. Il s’agissait également de la date limite pour se conformer à la politique. La politique indiquait que les conséquences disciplinaires en cas de non-respect étaient à la discrétion de la direction de l’employeur. L’employeur n’a exercé aucun pouvoir discrétionnaire. Il a imposé la sanction maximale, soit le congédiement.

[31] Cette situation de fait relève du principe mentionné plus haut. Selon ce principe, si l’inconduite découle directement des gestes posés par l’employeur avant l’inconduite, une analyse de la conduite de l’employeur avant l’« inconduite » est nécessaire pour apprécier correctement la question de savoir si la conduite de l’employé était intentionnelle ou non.

[32] L’inconduite alléguée dans le présent appel est que la prestataire n’avait pas été entièrement vaccinée au moyen d’un vaccin contre la COVID-19 approuvé par Santé Canada avant la date limite du 17 janvier 2022. Ce statut de personne non vaccinée découlait-il directement des gestes posés par l’employeur avant le 17 janvier 2022? L’employeur a clairement indiqué qu’il serait très difficile pour la prestataire d’obtenir une exemption de la politique, de sorte qu’elle n’a pas demandé d’exemption. Dans sa lettre du 13 décembre 2021, l’employeur s’est engagé à conclure une entente de travail à domicile à compter du 17 janvier 2022, ou à une date ultérieure selon les protocoles relatifs à la pandémie, qui devait être revue quatre mois après la date d’entrée en vigueur. La prestataire a dit à l’employeur qu’elle était disposée à recevoir le vaccin de Novavax lorsqu’il serait offert, soit six à huit semaines après la date limite. Elle a dit qu’elle travaillerait de la maison, de sorte qu’elle ne présentait aucun risque pour la santé des autres employés. Si sa présence en personne était requise, elle effectuerait un test de dépistage à ses frais et porterait le masque, entre autres mesures. L’employeur a refusé, puis a justifié le congédiement en invoquant les très grandes préoccupations en matière de santé qui constituaient une violation importante de la politique. La politique conférait à l’employeur un pouvoir discrétionnaire. L’employeur a refusé d’exercer ce pouvoir discrétionnaire.

[33] La prestataire avait décidé de ne pas recevoir de vaccin à ARNm pour des raisons médicales et religieuses personnelles. Elle ne refusait pas de recevoir tous les vaccins. Elle a dit à l’employeur qu’elle était disposée à recevoir le vaccin de Novavax lorsqu’il serait offert dans les deux mois suivant la date limite. La politique conférait à l’employeur le pouvoir discrétionnaire de prendre des mesures autres que le congédiement ou d’accorder une prorogation du délai à la prestataire pour qu’elle reçoive le vaccin de Novavax. L’employeur a refusé. Cela indiquait que l’employeur donnait la priorité à la date limite énoncée dans la politique, qu’il avait le pouvoir discrétionnaire de la modifier, plutôt qu’au maintien en poste d’une employée précieuse et estimée. Ce refus était incompatible avec le fait d’avoir autorisé la prestataire à travailler à domicile à compter du 17 janvier 2022. Le refus était également incompatible avec le motif du licenciement : les très grandes préoccupations en matière de santé étant une violation importante de la politique. Le travail à domicile ne constituait pas une préoccupation importante en matière de santé. Si la prestataire recevait le vaccin de Novavax lorsqu’il serait offert, la préoccupation en matière de santé serait éliminée. Ce sont ces gestes de l’employeur qui ont donné lieu à l’inconduite alléguée.

[34] Je dois maintenant évaluer l’incidence de la conduite de l’employeur sur la question de savoir si la conduite du prestataire était intentionnelle ou non. Il ressort clairement de la preuve qu’elle avait décidé de ne pas recevoir les vaccins à ARNm. Il est également évident qu’elle était prête à recevoir le vaccin de Novavax lorsqu’il sera offert dans six à huit semaines. Elle l’a dit à plusieurs gestionnaires et cadres de l’employeur. Elle a demandé à l’employeur d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui donnait la politique afin qu’elle puisse être entièrement vaccinée. Elle voulait se conformer à la politique, mais ne pouvait pas respecter l’échéance. Il lui était possible de se conformer à la politique en recevant un vaccin approuvé par Santé Canada dans un bref délai. Dans ce contexte, la conduite inflexible de l’employeur à l’égard de la prestataire concernant les exemptions et la date d’échéance ne permet pas de conclure que la prestataire a intentionnellement refusé de se conformer à la politique. Elle était disposée à recevoir un vaccin approuvé par Santé Canada. Comme elle travaillait de la maison, elle ne présentait pas de risque pour la santé des autres, de sorte qu’elle n’enfreignait pas les principes de la politique visant à réduire la transmission et les effets néfastes sur la santé. Elle s’est fondée sur le pouvoir discrétionnaire accordé à l’employeur dans la politique. Pour ces motifs, je ne peux conclure que la Commission a prouvé que la prestataire a délibérément enfreint la politique.

[35] Manquement à une obligation envers l’employeur  À première vue, la prestataire a contrevenu à la politique parce qu’elle n’a pas été entièrement vaccinée avant la date limite du 17 janvier 2022. Mais cela ne tient pas compte de la politique qui donne explicitement à l’employeur le pouvoir discrétionnaire de déterminer les mesures disciplinaires à imposer, le cas échéant, en cas de violation du texte de la politique en dehors de ce pouvoir discrétionnaire. L’employeur a approuvé une entente de travail à domicile de quatre mois pour la prestataire qui commençait le 17 janvier 2022, date limite de l’obligation de vaccination. Il serait raisonnable d’en conclure que l’employeur était disposé à repousser la date limite pour la prestataire. Ce n’est qu’en janvier 2022 que l’employeur a clairement indiqué à la prestataire que la date limite était ferme pour les vaccins à ARNm approuvés et qu’il n’y avait pas d’autre solution. Selon la lettre de congédiement, la prestataire a clairement indiqué qu’elle ne se conformerait pas à la politique. Cela ne tient pas compte du fait qu’elle était prête à recevoir un vaccin non ARNm qui n’était pas encore approuvé. Elle ne refusait pas tous les vaccins. La lettre de congédiement évoque les très grandes préoccupations en matière de santé pour justifier le congédiement. L’approbation par l’employeur de l’entente de travail à domicile de la prestataire à compter du 17 janvier 2022 contredit cette justification. L’employeur savait, au moment d’accorder cette approbation, que la prestataire ne voulait pas recevoir les vaccins à ARNm. De son domicile, la prestataire n’aurait aucun contact avec ses collègues ou les clients. Dans les rares cas où sa présence au bureau pouvait être requise, elle a offert de fournir des tests de dépistage négatifs à ses frais et de respecter des mesures comme le port du masque et l’éloignement physique pour réduire les risques. La justification du congédiement de l’employeur ne résiste pas à un examen. Il faut ajouter à cela le fait que la prestataire était une employée estimée, qui avait eu des évaluations positives de la direction et entretenait des relations positives avec ses collègues et les clients. Compte tenu de tous les facteurs susmentionnés, c’est le défaut de l’employeur d’exercer son pouvoir discrétionnaire prévu dans la politique qui a mené au congédiement de la prestataire. La Commission n’a donc pas prouvé cet élément de l’inconduite.

[36] La prestataire connaissait ou aurait dû connaître les éventuelles conséquences  La prestataire a affirmé qu’elle croyait initialement que la satisfaction de l’employeur à l’égard de son travail l’emporterait sur le congédiement. Elle a reconnu en décembre 2021, lorsque d’autres employés se sont fait refuser des exemptions, qu’elle pouvait être congédiée. Elle croyait toujours que sa bonne réputation auprès de l’employeur et son bon dossier ne mèneraient pas à ce résultat. Ce n’est que lors de la dernière journée de travail, quand le vice-président a rejeté sa demande de recevoir le vaccin de Novavax lorsqu’il serait offert, qu’elle a compris qu’elle serait congédiée. À cette date tardive, il était impossible pour la prestataire de se conformer à la politique. Toutefois, la prestataire savait dès décembre qu’il était possible qu’elle soit congédiée. La Commission a prouvé cet élément de l’inconduite.

[37] Cause du congédiement  D’après la preuve, il n’y a pas d’autre raison pour le congédiement de la prestataire que le non-respect de la politique (mis à part le pouvoir discrétionnaire de l’employeur). La Commission a prouvé cet élément de l’inconduite.

Par conséquent, la prestataire a‑t‑elle perdu son emploi en raison de son inconduite?

[38] Compte tenu des conclusions que j’ai tirées plus haut, je suis d’avis que la prestataire n’a pas perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[39] La Commission n’a pas prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, la prestataire n’est pas exclue du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

[40] L’appel est donc accueilli.

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