Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1117

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. M.
Représentante ou représentant : R. F.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (475179) datée du 25 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience  : Le 26 juillet 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelante
Date de la décision : Le 3 août 2023
Numéro de dossier : GE-23-1266

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a été suspendueNote de bas page 1 de son emploi en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’elle a fait quelque chose qui a entraîné sa suspension). Par conséquent, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas page 2.

Aperçu

[3] L’appelante a été suspendue de son emploi. Son employeur a déclaré qu’elle avait été suspendue parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 : elle ne s’était pas fait vacciner.

[4] Même si l’appelante ne conteste pas que c’est ce qui s’est passé, elle affirme avoir été congédiée, et non suspendue. Elle affirme également que ses agissements ne constituent pas une inconduite.

[5] La Commission a accepté la raison de la suspension que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante avait été suspendue de son emploi en raison de son inconduite. Pour cette raison, la Commission a conclu que l’appelante est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question que je dois examiner en premier

L’appelante a demandé une interprète

[6] L’appelante a demandé une interprète, car l’anglais n’est pas sa langue maternelle. À l’audience, l’appelante a confirmé qu’elle comprend un peu l’anglais et qu’elle avait seulement besoin de l’interprète pour traduire des choses qu’elle ne comprenait pas. L’audience a donc été menée en partie par l’entremise d’une interprète pour veiller à ce que l’appelante puisse comprendre la procédure.

Question en litige

[7] L’appelante a-t-elle été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] Pour décider si l’appelante a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite, je dois examiner deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison l’appelante a été suspendue de son emploi. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle été suspendue de son emploi?

[9] J’estime que l’appelante a été suspendue de son emploi parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur : elle ne s’est pas fait vacciner.

[10] L’appelante n’est pas d’accord pour dire qu’elle a été suspendue de son emploi. Elle fait valoir qu’elle a en fait été congédiée parce qu’une suspension devrait inclure des conditions sur la façon dont une personne employée peut retourner au travail, mais son employeur ne lui a pas donné de conditions lorsqu’il l’a mise en congé sans solde, comme lui dire qu’elle pouvait retourner au travail si elle se faisait vacciner ou donner une date à laquelle sa suspension prendrait finNote de bas page 3.

[11] Je reconnais que l’appelante estime avoir été congédiée, et non suspendue, de son emploi pour les raisons qu’elle mentionne.

[12] Cependant, je suis d’avis que la preuve montre que l’appelante a en fait été suspendue de son emploi. Voici les éléments de preuve :

  • Un courriel de l’employeur à l’appelante, daté du 16 septembre 2021. Le message précise que si elle ne respecte pas la politique au plus tard le 30 octobre 2021, elle sera placée en congé sans solde pour une période indéterminée jusqu’à ce qu’elle soit entièrement vaccinée ou jusqu’à ce que le vaccin contre la COVID-19 ne soit plus nécessaireNote de bas page 4.
  • Un courriel de l’employeur à l’appelante, daté du 31 octobre 2021. Le courriel indique que l’appelante est maintenant placée en congé sans solde pour une période indéterminée à compter du 31 octobre 2021 pour non-respect de sa politiqueNote de bas page 5.

[13] J’estime que ces éléments de preuve démontrent que l’employeur de l’appelante lui a bel et bien expliqué comment une personne placée en congé sans solde pour une période indéterminée pour non-respect de sa politique pouvait retourner au travail; elle pouvait soit se faire vacciner, soit être réintégrée une fois que la vaccination n’était plus requise. L’employeur a ensuite placé l’appelante en congé sans solde pour une période indéterminée pour ne pas avoir respecté sa politique.

[14] J’ai également demandé à l’appelante si elle avait reçu une lettre de licenciement de son employeur. Elle a déclaré que ce n’était pas le cas.

[15] Dans l’ensemble, je suis d’avis que la preuve montre que l’appelante a effectivement été suspendue de son emploi, et non congédiée. L’appelante peut avoir l’impression d’avoir été congédiée, mais rien ne démontre que c’est ce qui s’est passé.

[16] Pour le reste de la présente décision, je vais donc qualifier la perte de travail de l’appelante de « suspension » parce que c’est ce que la preuve démontre.

[17] Quant à la raison pour laquelle l’appelante a été suspendue, je conclus que c’est parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur. La Commission affirme que c’est la raison pour laquelle l’appelante a été suspendueNote de bas page 6. Et l’appelante convient que c’est la raison pour laquelle elle a été suspendueNote de bas page 7.

La raison de la suspension de l’appelante est-elle une inconduite selon la loi?

[18] Selon la loi, la raison de la suspension de l’appelante est une inconduite.

[19] La Loi sur lassurance-emploi ne définit pas l’inconduite. Par contre, la jurisprudence (l’ensemble des décisions que les tribunaux ont rendues) nous montre comment décider si la suspension de l’appelante est le résultat d’une inconduite au sens de la Loi. La jurisprudence établit le critère juridique lié à l’inconduite, c’est-à-dire les questions et les critères à prendre en compte quand on examine la question de l’inconduite.

[20] Selon la jurisprudence, pour qu’il y ait inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas page 8. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas page 9. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas page 10.

[21] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit suspendue pour cette raisonNote de bas page 11.

[22] La Commission doit prouver que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison de son inconduite, selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison de son inconduiteNote de bas page 12.

[23] Je peux seulement trancher les questions auxquelles la Loi sur l’assurance-emploi s’applique. Mon rôle n’est pas de décider si des lois offrent d’autres options à l’appelante. Je n’ai pas à décider si l’appelante a été suspendue à tort ou si son employeur aurait lui offrir des mesures d’adaptation raisonnablesNote de bas page 13. Je peux seulement évaluer une chose : si ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait est une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[24] Il y a une affaire de la Cour d’appel fédérale intitulée Canada (Procureur général) c McNamaraNote de bas page 14. M. McNamara a été congédié de son emploi au titre de la politique de son employeur sur le dépistage de drogues. Il a fait valoir qu’il n’aurait pas dû être congédié parce que le test de dépistage n’était pas justifié dans les circonstances, notamment parce qu’il n’y avait pas de motifs raisonnables de croire qu’il était incapable de travailler de façon sécuritaire en raison de la consommation de drogues, et qu’il aurait dû être couvert par le dernier test qu’il avait passé. Essentiellement, M. McNamara a soutenu qu’il devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi parce que les agissements de son employeur entourant son congédiement n’étaient pas corrects.

[25] En réponse aux arguments de M. McNamara, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’elle avait toujours dit que la question dans les cas d’inconduite n’était pas « de [savoir] si le congédiement d’un employé était ou non injustifié [mais] plutôt [de savoir] si l’acte ou l’omission reproché à l’employé était effectivement constitutif d’une inconduite au sens de la Loi ».

[26] Dans la même affaire, la Cour a ajouté que dans l’interprétation et l’application de la Loi sur l’assurance-emploi « ce qu’il convient à l’évidence de retenir ce n’est pas le comportement de l’employeur, mais bien celui de l’employé ». Elle a souligné qu’il existe d’autres recours disponibles pour les personnes qui ont été congédiées à tort, « qui permettent d’éviter que par le truchement des prestations d’assurance-emploi, les contribuables canadiens fassent les frais du comportement incriminé ».

[27] Une décision plus récente rendue à la suite de l’affaire McNamara est Paradis c Canada (Procureur général)Note de bas page 15. Comme M. McNamara, M. Paradis a été congédié après avoir échoué à un test de dépistage. M. Paradis a fait valoir qu’il avait été congédié à tort, que les résultats des tests montraient qu’il n’avait les facultés affaiblies au travail et que l’employeur aurait dû lui offrir des mesures d’adaptation conformément à ses propres politiques et aux lois provinciales sur les droits de la personne. La Cour s’est appuyée sur l’affaire McNamara et a déclaré que la conduite de l’employeur n’est pas un facteur pertinent lorsqu’il s’agit de décider de l’inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas page 16.

[28] Une autre affaire semblable tranchée par la Cour d’appel fédérale est la décision Mishibinijima c Canada (Procureur général)Note de bas page 17. M. Mishibinijima a perdu son emploi pour des raisons liées à une dépendance à l’alcool. Il a fait valoir que, comme la dépendance à l’alcool a été reconnue comme une invalidité, son employeur était tenu de lui fournir des mesures d’adaptation. La Cour a répété que l’accent est mis sur ce que l’employé a fait ou omis de faire, et que le fait que l’employeur n’a pas offert de mesures d’adaptation à son employé n’est pas un facteur pertinentNote de bas page 18.

[29] Ces cas ne portent pas sur les politiques de vaccination contre la COVID-19; toutefois, les principes qu’ils renferment sont toujours pertinents. Il ne m’appartient pas d’examiner la conduite ou les politiques de l’employeur et de décider s’il a eu raison de congédier l’appelante. Je dois plutôt concentrer mon examen sur ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait et sur la question de savoir si cela constitue une inconduite au sens de la Loi.

[30] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelante savait que son employeur avait une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 et qu’elle savait qu’elle pouvait être suspendue pour ne pas l’avoir respectée, mais elle a quand même choisi de ne pas la respecterNote de bas page 19.

[31] L’appelante affirme qu’il n’y a pas eu inconduite parce qu’elle n’a enfreint aucune loi en choisissant de ne pas se faire vacciner. Elle ajoute que son employeur a agi injustement en rejetant sa demande d’exemption pour motifs religieux, en lui demandant de respecter sa politique même si elle ne présentait pas une menace pour ses collègues ou le public, et en refusant de lui offrir d’autres options que la vaccination pour continuer à travaillerNote de bas page 20.

[32] L’employeur de l’appelante a fait les déclarations suivantes à la CommissionNote de bas page 21 :

  • L’employeur a adopté une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 et l’a annoncée au personnel le 7 septembre 2021.
  • Selon la politique, les personnes employées avaient jusqu’au 30 octobre 2021 pour se faire entièrement vacciner, sans quoi elles seraient placées en congé sans solde parce qu’elles n’avaient pas respecté la politique, à moins d’avoir une exemption approuvée.
  • L’appelante a demandé une exemption pour motifs religieux et a présenté une note de son église dans le cadre de cette demande d’exemption.
  • Le comité interne de l’employeur a examiné la demande d’exemption religieuse de l’appelante le 28 septembre 2021 et a conclu que sa situation ne satisfaisait pas aux critères d’exemption pour motifs religieux parce qu’elle était incapable d’établir un lien entre sa foi catholique romaine et sa foi personnelle.
  • Le 22 octobre 2021, l’employeur a dit à l’appelante que sa demande d’exemption pour motifs religieux avait été rejetée.
  • Par la suite, le 30 octobre 2021, l’employeur a placé l’appelante en congé sans solde pour une période indéterminée parce qu’elle refusait toujours de respecter sa politique.
  • Elle est toujours en congé sans solde et son statut n’a pas changé.

[33] L’appelante déclare ce qui suitNote de bas page 22 :

  • Elle connaissait la politique de son employeur et son exigence de vaccination.
  • Elle a demandé une exemption religieuse à la politique, mais son employeur l’a refusée. Cela s’est produit même si elle a indiqué que ses croyances religieuses sont sincères.
  • Elle ne s’est pas fait vacciner après que son employeur a rejeté sa demande d’exemption pour motifs religieux. Le vaccin va à l’encontre de ses croyances religieuses.
  • Elle a le droit de ne pas se faire vacciner et l’exercice de ce droit n’est pas une inconduite.
  • La politique de son employeur ne faisait pas partie de son contrat de travail initial.
  • Son employeur ne lui a pas offert de solutions de rechange à la vaccination pour lui permettre de continuer à travailler.
  • La politique de son employeur n’aurait pas dû s’appliquer à elle. Elle travaillait surtout en privé auprès des patientes et patients chez eux; alors elle ne présentait pas une menace pour ses collègues ou le grand public.
  • Elle savait qu’elle pouvait être suspendue si elle ne respectait pas la politique de son employeur.
  • Elle a été une bonne employée et n’a jamais eu de difficultés avec son employeur auparavant.

[34] Je suis sensible à la situation de l’appelante, mais je suis d’avis que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les raisons qui suivent.

[35] J’estime que l’appelante a posé les gestes ayant mené à sa suspension, car elle savait que son employeur avait une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 et ce qu’elle devait faire pour la respecter.

[36] J’estime également que les agissements de l’appelante étaient intentionnels, car elle a pris la décision consciente de ne pas respecter la politique de son employeur.

[37] Il y a des éléments de preuve montrant que l’appelante était au courant de la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle était au courant. Elle a également demandé une exemption pour motifs religieux, ce qui démontre qu’elle connaissait la politique et ses exigences.

[38] Il y a aussi des éléments de preuve montrant que l’appelante a choisi de ne pas respecter la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle ne s’était pas fait vacciner après que son employeur a rejeté sa demande d’exemption religieuse.

[39] Je reconnais que l’appelante affirme que son employeur aurait dû approuver sa demande d’exemption pour motifs religieux parce qu’elle a fourni à celui-ci la preuve de la sincérité de ses croyances religieuses.

[40] Je reconnais également que, selon l’appelante, la politique de son employeur n’aurait pas dû s’appliquer à elle parce qu’elle travaillait surtout en privé auprès des patientes et patients chez eux et qu’elle ne présentait pas une menace pour ses collègues ou le grand public.

[41] De plus, je reconnais que l’appelante affirme que la politique de son employeur ne faisait pas partie de son contrat de travail initial et que celui-ci aurait dû lui offrir d’autres options pour continuer à travailler en plus de la vaccination.

[42] Malheureusement, j’estime que ces arguments ne sont pas pertinents ici parce qu’ils se rapportent à des choses que l’employeur de l’appelante a faites ou n’a pas faites. Comme je l’ai mentionné plus haut, la Loi et la Cour disent que je dois me concentrer sur les agissements de l’appelante (et non sur ceux de l’employeur) lorsque j’analyse l’inconduite. Cela signifie que je peux seulement examiner ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait durant la période précédant sa suspension.

[43] Autrement dit, je ne peux pas vérifier si l’employeur de l’appelante a agi de façon déraisonnable pour les raisons qu’elle avance. Si l’appelante veut invoquer ces arguments, elle doit le faire auprès d’un autre tribunal ou d’une autre instance de décision.

[44] Je reconnais également que l’appelante affirme qu’elle a le droit de ne pas se faire vacciner et que l’exercice de ce droit n’est pas une inconduite.

[45] Je suis d’accord avec l’appelante pour dire qu’elle a le droit de choisir de se faire vacciner ou non. Cependant, je conclus que sa décision d’exercer ce droit constitue quand même une inconduite. Je considère que sa décision est délibérée puisqu’elle impliquait un choix conscient et intentionnel de sa part de ne pas se faire vacciner contre la COVID-19 même si la politique de son employeur l’exigeait, et la Cour affirme qu’un geste délibéré peut être considéré comme une inconduite, comme je l’ai indiqué ci-dessus.

[46] De plus, je reconnais que l’appelante affirme qu’elle a été une bonne employée et qu’elle n’a jamais eu de difficultés avec son employeur auparavant.

[47] Je crois l’appelante lorsqu’elle dit cela. Je n’ai aucune raison de douter de son témoignage.

[48] Malheureusement, je suis d’avis que cet argument n’est pas pertinent non plus dans la présente affaire. L’inconduite fait partie de la Loi sur l’assurance-emploi. Comme je l’ai mentionné plus haut, la Loi ne précise pas ce qu’est une inconduite, mais la jurisprudence a aidé à en clarifier le sens, qui porte sur les gestes posés par une partie appelante et qui ont mené à sa suspension ou à son congédiement. Cela signifie que lorsque la Commission conclut à l’inconduite, elle se fonde sur ce que disent la Loi et la jurisprudence.

[49] Autrement dit, la décision de la Commission de déclarer l’appelante inadmissible au bénéfice des prestations en raison d’une inconduite n’a rien à voir avec le fait qu’elle a été une bonne employée. La décision porte plutôt seulement sur les agissements de l’appelante (donc sur ce qu’elle a fait ou n’a pas fait) qui ont mené à sa suspension.

[50] Par conséquent, même si je reconnais les préoccupations de l’appelante concernant la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur, j’estime que la preuve montre qu’elle a pris la décision consciente de ne pas la respecter. Elle ne s’est pas fait vacciner comme l’exigeait la politique, même après le rejet de sa demande d’exemption pour motifs religieux, ce qui démontre que ses agissements étaient intentionnels.

[51] J’estime également que l’appelante savait ou aurait dû savoir que le non-respect de la politique de son employeur pouvait entraîner sa suspension.

[52] Il y a des éléments de preuve montrant que l’appelante savait qu’elle pouvait être suspendue pour non-respect de la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle le savait.

[53] Il y a aussi d’autres éléments de preuve qui montrent que l’employeur de l’appelante l’a informée qu’elle pouvait être suspendue pour ne pas avoir respecté sa politique. Voici les éléments de preuve :

  • Un courriel à l’appelante, daté du 16 septembre 2021. Le message dit que la politique de l’employeur exige que tout le personnel soit entièrement vacciné au plus tard le 30 octobre 2021. Il dit aussi que toute personne qui ne respectait pas la politique serait placée en congé sans solde pour une période indéterminée jusqu’à ce qu’elle soit entièrement vaccinée ou que le vaccin contre la COVID-19 ne soit plus nécessaireNote de bas page 23.
  • Un courriel à l’appelante, daté du 17 septembre 2021. Il réitère les exigences de la politique, notamment le fait que toute personne employée qui ne la respecte pas serait placée en congé sans solde d’une durée indéterminée à compter du 31 octobre 2021Note de bas page 24.
  • Un courriel à l’appelante, daté du 22 octobre 2021. Le message dit que sa demande d’exemption religieuse est rejetée. Il précise également que si elle ne se fait pas vacciner au plus tard le 30 octobre 2021, elle sera placée en congé sans solde d’une durée indéterminée à compter du 31 octobre 2021Note de bas page 25.
  • Un courriel à l’appelante, daté du 25 octobre 2021. Il réitère les exigences de la politique. Le message dit aussi que l’appelante n’a pas fourni de preuve de vaccination complète, alors elle serait placée en congé sans solde à compter du 31 octobre 2021, à moins de fournir une preuve avant cette dateNote de bas page 26.

[54] Par conséquent, je conclus que la conduite de l’appelante constitue une inconduite au sens de la loi puisqu’elle a posé les gestes qui ont mené à sa suspension (c’est-à-dire qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur), que ses agissements étaient intentionnels et qu’elle savait ou aurait dû savoir qu’ils allaient mener à sa suspension.

Alors, l’appelante a-t-elle été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite?

[55] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite.

[56] En effet, les agissements de l’appelante ont mené à sa suspension. Elle a agi délibérément en ne se faisant pas vacciner comme l’exigeait la politique de son employeur. Elle savait ou aurait dû savoir que ne pas se faire vacciner allait probablement entraîner sa suspension.

[57] L’appelante affirme être admissible à l’assurance-emploi parce qu’elle y a cotisé pendant de nombreuses années. Elle dit qu’elle fait maintenant face à des difficultés financières parce qu’elle n’a pas reçu de chèque de paie depuis sa suspension.

[58] Je comprends l’argument de l’appelante et je suis vraiment sensible à sa situation. Cela dit, l’assurance-emploi n’est malheureusement pas une prestation automatique. Comme pour tout autre régime d’assurance, il faut satisfaire à certaines exigences pour avoir droit de recevoir des prestations. Dans la présente affaire, l’appelante ne satisfait pas à ces exigences puisqu’elle a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[59] La Commission a prouvé que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, elle est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[60] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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