Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1107

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : D. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (582129) datée du 24 avril 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Ambrosia Varaschin
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 juin 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Personne de soutien de l’appelant
Date de la décision : Le 27 juin 2023
Numéro de dossier : GE-23-1448

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi au moment de son départ (il n’avait pas de raison acceptable selon la loi). En effet, il y avait une solution raisonnable qui lui aurait évité de quitter son emploi. Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[3] L’appelant a quitté son emploi pour X le 29 janvier 2023 et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a examiné les raisons de son départ. Elle a conclu qu’il avait quitté volontairement son emploi (il avait choisi de le quitter) sans justification. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[4] Je dois décider si l’appelant a prouvé que quitter son emploi était la seule solution raisonnable dans son cas.

[5] La Commission affirme que l’appelant a dit qu’il était bien traité au travail et qu’il aurait gardé son emploi s’il l’avait pu. La seule raison qu’il a donnée pour son départ était qu’il croyait avoir assez d’heures d’emploi assurable pour demander de l’assurance-emploi. Quitter son emploi pour demander des prestations était un choix personnel. Toutefois, ce n’était pas justifié.

[6] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme avoir décidé d’arrêter de travailler pour se concentrer sur des problèmes judiciaires personnels.

Question en litige

[7] L’appelant est-il exclu du bénéfice des prestations parce qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification?

[8] Pour répondre à cette question, je dois d’abord examiner le départ volontaire de l’appelant. Je dois ensuite décider s’il était fondé à quitter son emploi.

Analyse

L’appelant a-t-il quitté volontairement son emploi?

[9] Je considère que l’appelant a quitté volontairement son emploi. La Commission et lui-même s’entendent sur son départ du 29 janvier 2023. Je n’ai aucune preuve du contraireNote de bas de page 1.

L’appelant était-il fondé à quitter son emploi?

[10] L’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi au moment de son départ.

[11] L’assurance-emploi n’est pas un programme d’aide sociale. C’est une assurance. Les employeurs et leur personnel cotisent au programme, et comme dans tout régime d’assurance, une personne peut recevoir des prestations si elle répond à certains critères.

[12] L’objectif du programme d’assurance-emploi est d’indemniser les personnes qui se retrouvent sans emploi pour des raisons hors de leur contrôle. Il n’est pas destiné à aider les personnes qui choisissent de ne pas travailler ou qui perdent leur emploi en raison de leurs propres actionsNote de bas de page 2. Comme c’est le cas dans les autres régimes d’assurance, les prestataires ne peuvent pas délibérément prendre le risque de se retrouver au chômage ni transformer un simple risque en une certitude de chômage, et s’attendre à recevoir des prestationsNote de bas de page 3.

[13] La loi prévoit qu’une personne est exclue du bénéfice des prestations si elle a choisi de quitter son emploi sans « justification »Note de bas de page 4. Avoir une « bonne raison » de quitter un emploi n’est pas la même chose qu’une « justification »Note de bas de page 5. La loi dit qu’une personne est fondée à quitter son emploi (elle a une justification) si son départ était la seule solution raisonnable compte tenu de toutes les circonstancesNote de bas de page 6.

[14] L’appelant doit prouver qu’il était fondé à quitter son emploiNote de bas de page 7. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que quitter son emploi était la seule solution raisonnableNote de bas de page 8.

[15] L’appelant affirme avoir quitté son emploi parce qu’il a une affaire en cours avec les Services à l’enfant et à la famille ainsi qu’une accusation criminelle de voies de fait actuellement devant les tribunaux. Il pourrait donc être obligé de suivre un traitement contre les dépendances et une thérapie comportementale. L’appelant explique que son départ était la seule solution raisonnable à ce moment-là parce qu’il ne pouvait pas travailler en plus de s’occuper de son dossier devant les tribunaux.

[16] L’appelant a déclaré qu’il [traduction] « a recours à l’assurance-emploi presque tous les ans » et que c’est la première fois qu’on la lui refuse. Il affirme être allé travailler pour X parce que son emploi régulier précédent ne lui offrait pas assez d’heures d’emploi assurable pour demander des prestations. Il a expliqué qu’une fois qu’il a su qu’il avait assez d’heures d’emploi assurable, il a arrêté de travailler et a demandé des prestations.

[17] L’appelant dit que son travail pour X lui permettait de faire des journées complètes ou non, de prendre des congés et de refuser du travail sans problème. Il explique que l’employeur [traduction] « l’appelait pour lui dire qu’il avait besoin de lui », et qu’il pouvait accepter ou non.

[18] L’appelant affirme être sans emploi en ce moment parce qu’il ne veut pas [traduction] « travailler plus d’heures et avoir des problèmes ». Il dit aussi qu’il ne peut pas travailler et [traduction] « se battre contre le gouvernement » en même temps. Il ajoute qu’il tente de [traduction] « reprendre [sa] vie en main » et de [traduction] « ravoir [ses] enfants ». Il dit avoir besoin de prestations d’assurance-emploi pour ne pas se retrouver sans-abri pendant qu’il mène ses batailles judiciaires et qu’il suit les programmes de traitement que les tribunaux pourraient lui prescrire.

[19] La Commission affirme que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’une solution raisonnable autre que son départ s’offrait à lui à ce moment-là. Elle précise que l’appelant n’avait aucune raison de quitter son emploi et qu’il aurait pu continuer de travailler pour X.

[20] Pendant son témoignage, l’appelant a bel et bien expliqué pourquoi il avait quitté son emploi : il voulait se concentrer sur son dossier aux Services à l’enfant et à la famille et sur ses accusations criminelles. Il n’a pas précisé ce qui l’empêchait vraiment de travailler, même lorsqu’on le lui a demandé. Il a simplement dit qu’il ne pouvait pas travailler pendant qu’il s’occupait de ses démêlés judiciaires, et qu’il ne pourrait pas travailler non plus s’il devait suivre un programme de traitement des dépendances ou de gestion de la colère.

[21] Les raisons qu’il a fournies sont liées à des problèmes personnels. Même s’il croit qu’il avait une bonne raison de quitter son emploi, il n’était pas fondé à le faire. La Cour affirme que les raisons personnelles ne sont généralement pas des motifs valables pour refuser un emploi convenableNote de bas de page 9. Elles ne justifient donc pas une démission. Il a toujours été clair que les allégations de nature civile, criminelle ou liées à une inconduite ne justifient pas qu’une personne quitte son emploi, car c’est son comportement même qui a créé les circonstances ayant entraîné son départNote de bas de page 10.

[22] Je conclus donc que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi.

Y avait-il des solutions raisonnables?

[23] Même si l’on considérait les raisons de l’appelant comme une justification, il a quitté son emploi trop tôt. Son travail lui aurait permis de prendre congé pour ses audiences judiciaires et ses rendez-vous au besoin. Ses démêlés avec la justice ne sont pas encore terminés, alors il ne sait pas quand il pourrait devoir suivre un programme de traitement, ni même si ce sera requis à la base. Il aurait pu continuer à travailler jusqu’à ce qu’il sache vraiment ce qui était attendu de lui.

[24] Si une personne quitte son emploi trop tôt, sans raison distincte qui constitue une justification, la Cour dit que cette personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 11.

[25] Il y avait donc une solution raisonnable qui s’offrait à l’appelant. Il n’avait pas à quitter son emploi le jour où il l’a fait.

Conclusion

[26] L’appelant a choisi personnellement de quitter son emploi, mais une solution raisonnable autre que son départ s’offrait à lui à ce moment-là. Même s’il avait peut-être de bonnes raisons, ce n’est pas la même chose qu’une justification en droitNote de bas de page 12.

[27] Je conclus que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations.

[28] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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