Assurance-emploi (AE)

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Citation : MA c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 290

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : M. A.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (529353) datée du 20
septembre 2022 rendue par la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Normand Morin
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 26 janvier 2023
Personne présente à l’audience : L’appelant
Date de la décision : Le 17 mars 2023
Numéro de dossier : GE-22-3276

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Je conclus que la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) est justifiée de réclamer à l’appelant la somme d’argent qui lui a été versée en trop à titre de versement anticipé de prestations de la Prestation d’assurance-emploi d’urgence (PAEU) (trop-payé)Note de bas de page 1. L’appelant doit rembourser la somme d’argent qui lui a été versée en trop à ce titre.

Aperçu

[2] Le 12 avril 2020, après avoir travaillé comme opérateur de chariot élévateur pour l’employeur X, du 28 janvier 2020 au 7 avril 2020, l’appelant présente une demande initiale de prestations d’assurance-emploi (prestations régulières)Note de bas de page 2. Une période de prestations est établie à compter du 5 avril 2020 afin que l’appelant puisse recevoir des prestations de la PAEUNote de bas de page 3.

[3] Le 28 mai 2022, un avis de dette est envoyé à l’appelant par Emploi et Développement social CanadaNote de bas de page 4.

[4] À la suite d’une demande du Tribunal, la Commission précise ne pas avoir envoyé de lettre à l’appelant l’avisant de la décision initialement rendue à son endroit pour des prestations versées en tropNote de bas de page 5. Elle lui a plutôt envoyé un avis de detteNote de bas de page 6. Je considère que l’avis de dette envoyé à l’appelant, en date du 28 mai 2022, tient lieu de décision initialement rendue à son endroit dans ce casNote de bas de page 7.

[5] Le 20 septembre 2022, à la suite d’une demande de révision, la Commission l’informe qu’elle maintient la décision rendue à son endroit concernant le trop-payé en prestations qui lui a été versé (versement anticipé – recouvrement du paiement forfaitaire)Note de bas de page 8.

[6] L’appelant explique avoir reçu des prestations pour une somme totale de 4 500,00 $. Il soutient que ce montant ne représente pas entièrement des prestations de la PAEU ou de la prestation canadienne d’urgence (PCU). Selon l’appelant, il a reçu une somme de 2 000,00 $ en prestations de la PAEU ou de la PCU et 2 500,00 $ en prestations régulières d’assurance-emploi. Il soutient qu’il avait le droit de recevoir les prestations qui lui ont été versées. Le 11 octobre 2022, l’appelant conteste auprès du Tribunal la décision en révision de la Commission. Cette décision fait l’objet du présent recours devant le Tribunal.

Question en litige

[7] Je dois déterminer si la Commission est justifiée de réclamer à l’appelant la somme d’argent qui lui a été versée en trop à titre de versement anticipé de prestations de la PAEU (trop-payé) et s’il doit rembourser cette sommeNote de bas de page 9.

Analyse

[8] En raison de la COVID-19Note de bas de page 10, la Loi sur l’assurance-emploi a été modifiée entre autres, avec la mise en place de la PAEU. Différentes raisons permettent de devenir prestataire de la PAEU. Ce type de prestations n’est pas seulement destiné aux personnes qui ont cessé de travailler pour les raisons liées à la COVID-19.

[9] L’une des raisons qui permettent à un prestataire de recevoir des prestations de la PAEU est que sa période de prestations aurait pu être établie au cours de la période du 15 mars 2020 au 26 septembre 2020 inclusivement, pour bénéficier entre autres, de prestations régulières d’assurance-emploiNote de bas de page 11. Toutefois, au cours de cette période, aucune période de prestations ne peut être établie en prestations régulières d’assurance-emploi ou de prestations spéciales (ex. : prestations de maladie)Note de bas de page 12.

[10] Dans le présent dossier, la Commission réfère aux prestations de la PCU et de la PAEU ayant été versées à l’appelantNote de bas de page 13. L’appelant, quant à lui, réfère aux prestations de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) pour désigner ces prestations, de même qu’aux prestations régulières d’assurance-emploiNote de bas de page 14.

[11] Je précise que même si les prestations de la PAEU et celles de la PCU peuvent être considérées comme semblables, il s’agit de deux types différents de prestations.

[12] Pendant la période au cours de laquelle ces types de prestations étaient disponibles, soit du 15 mars 2020 au 3 octobre 2020 inclusivement (semaine ayant commencé le 27 septembre 2020), les personnes normalement admissibles au bénéfice des prestations d’assurance-emploi (prestations régulières ou prestations spéciales) ont reçu des prestations de la PAEU et celles qui n’y étaient pas normalement admissibles ont reçu des prestations de la PCU, si elles remplissaient les conditions requises pour en recevoir.

[13] Le montant versé dans les deux cas était le même, soit 500,00 $ par semaineNote de bas de page 15.

[14] Dans le cas présent, selon les renseignements de la Commission dans son argumentation, les prestations versées à l’appelant sont des prestations de la PAEUNote de bas de page 16. La Commission explique que l’appelant remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’une période de prestations aurait pu être établie à son profit à compter du 22 mars 2020Note de bas de page 17. Je vais décrire les prestations reçues par l’appelant en référant aux prestations de la PAEUNote de bas de page 18.

[15] La Loi prévoit que si une personne a reçu des prestations d’assurance-emploi, dont celles de la PAEU, auxquelles elle n’était pas admissible ou parce qu’elle était exclue du bénéfice de ces prestations, elle est tenue de les rembourser ou de rembourser le versement excédentaire qui en a découléNote de bas de page 19.

[16] La Commission dispose d’un délai de 36 mois pour examiner de nouveau toute demande de prestations payées ou payables à un prestataire, incluant les prestations de la PAEU, et ce délai est de 72 mois si elle estime qu’une déclaration ou affirmation fausse ou trompeuse a été faite relativement à une demande de prestationsNote de bas de page 20.

[17] La Commission fait valoir les éléments suivants :

  1. a) Le 13 avril 2020, l’appelant a reçu un versement anticipé de 2 000,00 $. Ce versement équivaut à quatre semaines de prestations de la PAEU (4 X 500,00 $ = 2 000,00 $). La Commission peut verser des prestations de la PAEU avant le moment normalement prévu pour le faireNote de bas de page 21 ;
  2. b) L’appelant a également reçu des prestations pour cinq semaines, soit du 5 avril 2020 au 9 mai 2020, selon un taux de 500,00 $ par semaine, ce qui représente un total de 2 500,00 $ (5 X 500,00 $ = 2 500,00 $)Note de bas de page 22 ;
  3. c) En incluant la somme de 2 000,00 $ qui lui a été payée à titre de versement anticipé, l’appelant a reçu l’équivalent de neuf semaines de prestations (9 X 500,00 $ = 4 500,00 $) alors qu’il n’a réclamé des prestations que pour cinq semainesNote de bas de page 23 ;
  4. d) Un trop-payé a été créé en en raison du versement anticipé qu’il a reçu. Ce trop-payé représente quatre semaines de prestations, soit 2 000,00 $ (4 X 500,00 $ = 2 000,00 $Note de bas de page 24 ;
  5. e) Ce trop-payé n’a pu être récupéré par le « système de versement » de prestations parce que l’appelant n’a réclamé des prestations que pour cinq semaines. Cette situation s’explique parce que le « système de versement » de prestations a été programmé pour faire en sorte que le « non-paiement » de prestations s’effectue aux 13e et 14e semaines de la séquence de paiement des prestations ainsi que pour les 20e et 21e semaines de cette séquenceNote de bas de page 25 ;
  6. f) La somme d’argent représentant le versement anticipé que l’appelant a reçu n’a donc pas pu être déduite dans les 13e et 14e semaines de ses prestations ainsi que dans les 20e et 21e semaines de celles-ciNote de bas de page 26 ;
  7. g) Bien que l’appelant déclare ne pas avoir reçu $2 000,00 dans le cadre de la PAEU, car il n’a pas reçu une somme de $2 000,00 dans un seul versementNote de bas de page 27, les preuves démontrent le contraire. Une somme de 2 000,00$ lui a été versée le 13 avril 2020Note de bas de page 28. Le relevé bancaire de l’appelant montre qu’une somme de 2 000,00 $ a été déposée dans son compte le 21 avril 2020Note de bas de page 29 ;
  8. h) L’appelant a reçu des prestations pour chacune des semaines pour lesquelles il en a demandées. Il a aussi reçu une somme de 2 000,00 $ à titre de versement anticipé. Cette somme de 2 000,00 $ n’a pas été récupérée. L’appelant doit la rembourserNote de bas de page 30.

[18] Le témoignage et les déclarations de l’appelant indiquent les éléments suivants :

  1. a) Il a reçu des prestations pour une somme totale de 4 500,00 $Note de bas de page 31, mais il ne s’agit pas de la somme qu’il a reçue en prestations de la PAEU ;
  2. b) Le chèque de 2 000,00 $ qu’il a reçu (versement fait le 13 avril 2020) représente des prestations de la PAEUNote de bas de page 32. Il s’agit de la seule somme d’argent qu’il a reçue à ce titre. Selon l’appelant, les prestations de la PAEU sont versées par tranche de 2 000,00 $Note de bas de page 33 ;
  3. c) Lorsqu’il a demandé des prestations de la PAEU, il satisfaisait à toutes les exigences pour recevoir ce type de prestationsNote de bas de page 34 ;
  4. d) Après avoir cessé de travailler chez X, il n’a pas demandé des prestations de la PAEUNote de bas de page 35 ;
  5. e) Il a reçu une autre somme de 2 500,00 $, soit deux chèques de 1 000,00 $ et un de 500,00 $Note de bas de page 36, mais il ne s’agissait pas de prestations de la PAEU, selon lui. Il s’agissait de prestations régulières d’assurance-emploi. Il réfère aussi à des « prestations sociales » dans ce casNote de bas de page 37 ;
  6. f) Il soutient qu’il avait le droit de recevoir les prestations qui lui ont été verséesNote de bas de page 38.

[19] Dans le cas présent, l’appelant reconnaît avoir reçu des prestations pour une somme totale de 4 500,00 $, ce qui inclut la somme de 2 000,00 $ versée à titre de versement anticipé de prestations de la PAEU.

[20] Bien que l’appelant fasse valoir que la somme de 2 500,00 $ qu’il a reçue en plus de son versement anticipé représente des prestations régulières, cela n’était pas le cas. Il ne pouvait pas recevoir ce type de prestations pour la période du 5 avril 2020 au 9 mai 2020.

[21] Les dispositions prévues à la LoiNote de bas de page 39 en lien avec la pandémie de COVID-19 ne le lui permettaient pas.

[22] Une période de prestations a été établie à compter du 5 avril 2020 afin que l’appelant puisse recevoir des prestations de PAEUNote de bas de page 40.

[23] Les demandes de prestations régulières ou de prestations spéciales (ex. : prestations de maladie) dont le début de la période de prestations a été établi au cours de la période du 15 mars 2020 au 26 septembre 2020 inclusivement, sont considérées comme des demandes de prestations permettant de bénéficier des prestations de la PAEU ou de la PCU selon le casNote de bas de page 41.

[24] Même si l’appelant remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’une période de prestations aurait pu être établie à son profit à compter du 22 mars 2020Note de bas de page 42, il ne pouvait pas recevoir de prestations régulières suivant la présentation de sa demande de prestations, le 12 avril 2020.

[25] Je ne retiens pas l’argument de l’appelant selon lequel les sommes de 1 000,00 $ ou de 500,00 $ en prestations qu’il a reçues par chèques représentaient de prestations régulières et que seul le chèque de 2 000,00 $ était un chèque de prestations de la PAEU.

[26] Les chèques qu’il a reçus, représentant une somme totale de 4 500,00 $Note de bas de page 43, étaient des prestations de la PAEU.

[27] L’appelant a reçu un versement anticipé de 2 000,00 $, en plus de recevoir des prestations pour une période de cinq semaines.

[28] La somme de 2 000,00 $ qu’il a reçue à titre de versement anticipé représente quatre semaines de prestations.

[29] Ce faisant, il a reçu des prestations pour une période équivalant à neuf semaines, alors qu’il pouvait en recevoir pour une période de cinq semaines, soit pour la période échelonnée du 5 avril 2020 au 9 mai 2020.

[30] Le versement anticipé de 2 000,00 $ n’a pu être récupéré par la Commission lorsque l’appelant a reçu des prestations de la PAEU.

[31] Selon les explications de la Commission, ce versement anticipé devait être récupéré à compter des 13e et 14e semaines de prestations de l’appelant et ensuite sur les 20e et 21e semaines de celles-ci, mais cela n’a pas été possible, car ce dernier n’a reçu des prestations de la PAEU que pendant cinq semaines.

[32] Malgré le désaccord de l’appelant avec le fait qu’il doive rembourser la somme de 2 000,00 $ reçue à titre de versement anticipé de prestations de la PAEU, il demeure qu’il doit rembourser cette somme.

[33] L’appelant a reçu ce versement anticipé en plus de recevoir des prestations pour chacune des cinq semaines pour lesquelles il en a demandé.

[34] Le versement anticipé de 2 000,00 $ que la Commission n’a pas été en mesure de récupérer lorsqu’elle lui a versé des prestations de la PAEU représente ainsi un versement excédentaire qui doit être remboursé.

[35] La Cour d’appel fédérale (la Cour) nous informe que le montant du versement excédentaire indiqué dans un avis de dette devient remboursable à la date de notification et que la personne qui reçoit un versement excédentaire de prestations est tenue d’en restituer immédiatement le montantNote de bas de page 44.

[36] La situation de l’appelant ne peut avoir pour effet de l’exempter de son obligation de rembourser le montant du trop-payé réclamé pour des prestations qui lui ont été versées en trop.

[37] Bien que sympathique à la cause de l’appelant, la Cour nous informe qu’il n’est pas permis aux arbitres, ce qui inclut le Tribunal, de réécrire la Loi ou de l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaireNote de bas de page 45.

[38] Je considère que la Commission est justifiée de réclamer le montant du trop-payé à l’appelant. Il appartient à la Commission d’examiner les modalités de remboursement de la somme d’argent qu’elle lui réclame.

Conclusion

[39] Je conclus que la somme d’argent représentant les prestations versées en trop à l’appelant à titre de versement anticipé, et qui lui est réclamée par la Commission, doit être remboursée selon les modalités établies par cette dernière.

[40] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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