Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1305

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Appelante : B. K.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (562935) datée du 19 janvier 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 27 juin 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 30 juin 2023
Numéro de dossier : GE-23-529

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Je suis en désaccord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance‑emploi du Canada a prouvé que l’appelante a été suspendueNote de bas de page 1 de son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui a entraîné sa suspension de son emploi). Cela signifie que l’appelante est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploiNote de bas de page 2.

Aperçu

[3] L’appelante a été suspendue de son emploi. L’employeur de l’appelante a déclaré qu’elle avait été suspendue parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 : elle n’avait pas été entièrement vaccinée.

[4] Même si l’appelante convient qu’elle n’a pas été entièrement vaccinée, elle affirme que son employeur l’a suspendue après avoir refusé sa demande d’exemption pour des motifs religieux sans raison valable. L’appelante affirme en outre qu’il n’a pas respecté son obligation de prendre des mesures d’adaptation.

[5] La Commission a accepté le motif de suspension invoqué par l’employeur. Elle a décidé que l’appelante était suspendue de son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi la Commission a décidé que l’appelante est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

Question en litige

[6] L’appelante a-t-elle été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[7] Je dois décider si l’appelante a été suspendue de son emploi en raison de son inconduite. Pour ce faire, je dois trancher deux éléments. Premièrement, je dois établir pourquoi l’appelante a été suspendue de son emploi. Je dois ensuite décider si la loi considère ce motif comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle été suspendue de son emploi?

[8] Je conclus que l’appelante a été suspendue de son emploi parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur : elle n’a pas été entièrement vaccinée.

[9] L’appelante et la Commission ne s’entendent pas sur la raison pour laquelle l’appelante a été suspendue de son emploi. La Commission affirme que la raison donnée par l’employeur est la véritable raison de la suspensionNote de bas de page 3. L’employeur a dit à la Commission que l’appelante avait été suspendue parce qu’elle n’avait pas respecté sa politiqueNote de bas de page 4.

[10] L’appelante n’est pas d’accord. L’appelante affirme que la véritable raison pour laquelle elle a été suspendue était que son employeur a rejeté sa demande d’exemption pour des motifs religieux sans motif valable et, par le fait même, n’a pas respecté son obligation de prendre des mesures d’adaptationNote de bas de page 5.

[11] Je note que l’employeur de l’appelante lui a envoyé un courriel le 23 mars 2022. Il est indiqué qu’elle est en congé sans solde à compter du 24 mars 2022 parce qu’elle n’a pas respecté sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19Note de bas de page 6.

[12] D’autre part, je conclus que l’appelante n’a pas démontré que son employeur l’a suspendue expressément parce qu’il a rejeté sa demande d’exemption pour des motifs religieux sans raison valable et qu’il n’a pas respecté son obligation de prendre des mesures d’adaptation. Elle n’a fourni aucune preuve que c’est précisément la raison pour laquelle son employeur l’a suspendue.

[13] Je reconnais que l’appelante estime que son employeur aurait dû approuver sa demande d’exemption pour des motifs religieux et qu’il n’a pas fourni de bonnes raisons de la refuser. Toutefois, dans cette section, je n’examine que les raisons pour lesquelles l’appelante a été suspendue de son emploi, de sorte que j’aborderai la partie susmentionnée de son argument plus loin dans la présente décision.

[14] Donc, bien que je reconnaisse que l’appelante pense que son employeur l’a suspendue pour la raison qu’elle mentionne, je conclus que la preuve (le courriel de l’employeur envoyé à l’appelante le 23 mars 2022) démontre qu’elle a été suspendue parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur.

Le motif de la suspension de l’appelante est-il une inconduite au sens de la loi?

[15] La raison de la suspension de l’appelante est une inconduite au sens de la loi.

[16] La Loi sur l’assurance-emploi (Loi) ne précise pas ce que signifie une inconduite. Cependant, la jurisprudence (décisions des tribunaux judiciaires et administratifs) nous montre comment établir si la suspension de l’appelante constitue une inconduite au sens de la Loi. Elle énonce le critère juridique applicable à l’inconduite, à savoir les questions et les critères à prendre en considération dans l’examen de la question de l’inconduite.

[17] D’après la jurisprudence, pour constituer une inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 7. L’inconduite est aussi une conduite à ce point insouciante qu’elle frôle le caractère délibéréNote de bas de page 8. Il n’est pas nécessaire que l’appelante ait une intention coupable (autrement dit, qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal) pour que sa conduite soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 9.

[18] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait nuire à l’exécution de ses fonctions envers son employeur et qu’il existait une possibilité réelle d’être suspendue pour cette raisonNote de bas de page 10.

[19] La Commission doit prouver que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a été suspendue en raison d’une inconduiteNote de bas de page 11.

[20] J’ai le pouvoir de trancher seulement les questions qui sont prévues dans la Loi. Je ne peux pas décider si l’appelante a d’autres options en vertu d’autres lois. Il ne m’appartient pas de me prononcer sur la question de savoir si l’appelante a été suspendue à tort ou si l’employeur aurait dû mettre en place des mesures raisonnables (mesures d’adaptation) à l’égard de l’appelanteNote de bas de page 12. Je ne peux examiner qu’une chose : la question de savoir si ce que l’appelante a fait ou a omis de faire est une inconduite au sens de la Loi.

[21] La Cour d’appel fédérale (Cour) s’est prononcée dans l’affaire intitulée Canada (Procureur général) c McNamaraNote de bas de page 13. M. McNamara a été congédié en application de la politique de dépistage de drogues de son employeur. Il a soutenu qu’il n’aurait pas dû être congédié parce que le test de dépistage de drogues n’était pas justifié dans les circonstances, c’est‑à‑dire qu’il n’existait aucun motif raisonnable de penser qu’il n’était pas en mesure de travailler en toute sécurité en raison de sa consommation de drogue et qu’il aurait dû être couvert par le test précédent auquel il s’était soumis. Essentiellement, M. McNamara a fait valoir qu’il devait toucher des prestations d’assurance‑emploi parce que les mesures prises par son employeur concernant son congédiement étaient inacceptables.

[22] En réponse aux arguments de M. McNamara, la Cour a déclaré que, selon une jurisprudence de la Cour, dans les cas d’inconduite, la question « [n’est pas] de dire si le congédiement d’un employé était ou non injustifié; plutôt […] de dire si l’acte ou l’omission reprochés à l’employé était effectivement constitutif d’une inconduite au sens de la Loi ». 

[23] Dans la même affaire, la Cour a poursuivi en soulignant que, dans l’interprétation et l’application de la Loi, « ce qu’il convient à l’évidence de retenir ce n’est pas le comportement de l’employeur, mais bien celui de l’employé ». Elle a indiqué que l’employé qui fait l’objet d’un congédiement injustifié « a, pour sanctionner le comportement de l’employeur, d’autres recours qui permettent d’éviter que par le truchement des prestations d’assurance-emploi les contribuables canadiens fassent les frais du comportement incriminé ».

[24] La décision plus récente intitulée Paradis c Canada (Procureur général) suit l’affaire McNamaraNote de bas de page 14. Comme M. McNamara, M. Paradis a été congédié après avoir eu un résultat positif à un test de dépistage de drogues. M. Paradis a fait valoir qu’il avait été congédié à tort, que les résultats des tests montraient qu’il n’avait pas les facultés affaiblies au travail et que l’employeur aurait dû lui offrir des mesures d’adaptation conformément à ses propres politiques et à la législation provinciale sur les droits de la personne. La Cour s’est fondée sur l’arrêt McNamara et a déclaré que la conduite de l’employeur n’est pas un facteur pertinent pour trancher la question de l’inconduite au sens de la LoiNote de bas de page 15.

[25] Une autre décision semblable a été rendue par la Cour dans l’affaire Mishibinijima c Canada (Procureur général)Note de bas de page 16. M. Mishibinijima a perdu son emploi pour des raisons liées à une dépendance à l’alcool. Il a soutenu que, comme la dépendance à l’alcool a été reconnue comme une déficience, son employeur était tenu de lui offrir des mesures d’adaptation. La Cour a encore affirmé que l’accent est mis sur ce que l’employé a fait ou non, et que l’absence de mesures de l’employeur pour aider son employé n’est pas une question pertinenteNote de bas de page 17.

[26] Ces affaires ne portent pas sur des politiques de vaccination contre la COVID-19. Cependant, je juge que les principes établis dans ces affaires demeurent pertinents. Il ne m’appartient pas d’examiner la conduite ou les politiques de l’employeur et de décider s’il a eu raison de congédier l’appelante. Je dois plutôt me concentrer sur ce que l’appelante a fait ou a omis de faire et sur la question de savoir s’il s’agit d’une inconduite au sens de la Loi.

[27] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelante savait que son employeur avait une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 et savait qu’elle pouvait être suspendue pour ne pas l’avoir suivie, mais elle a choisi de ne pas la suivre de toute façonNote de bas de page 18.

[28] L’appelante affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce qu’elle a fait tout ce qu’elle pouvait pour respecter la politique de son employeur, mais qu’ils l’ont quand même suspendue. Elle ajoute qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce qu’elle ne s’attendait jamais à ce que son employeur la mette en congé sans solde pour ne pas avoir respecté sa politique.

[29] L’employeur de l’appelante a dit ce qui suit à la Commission :

  • L’appelante a été suspendue pour ne pas avoir respecté sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19Note de bas de page 19.
  • Leur politique a été affichée en ligne, et les employés ont reçu plusieurs courriels à ce sujetNote de bas de page 20.
  • Leur politique permettait aux membres du personnel de demander une exemption. Ils n’avaient qu’à soumettre une demande de mesures d’adaptationNote de bas de page 21.
  • L’appelante a demandé une exemption pour des motifs religieux, mais elle a été refuséeNote de bas de page 22.
  • Après avoir refusé l’exemption pour des motifs religieux de l’appelante, elle leur a demandé de réviser leur décision, mais ils ont refusé parce qu’elle n’a pas présenté de nouveaux renseignements à leur intentionNote de bas de page 23.
  • L’appelante savait qu’elle pourrait être suspendue si elle ne respectait pas leur politiqueNote de bas de page 24.

[30] La politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de l’employeur de l’appelante prescrit ce qui suit :

  • Entrée en vigueur le 6 octobre 2021Note de bas de page 25.
  • Application à tout le personnel, peu importe son lieu de travailNote de bas de page 26.
  • L’obligation de prendre des mesures d’adaptation s’applique. Les gestionnaires doivent traiter les demandes d’exemption au cas par cas, en temps opportun et tant qu’elles n’imposent pas une contrainte excessiveNote de bas de page 27.
  • Les employés doivent attester de leur statut vaccinal au plus tard le 29 octobre 2021Note de bas de page 28.
  • Les employés qui ne sont pas disposés à attester de leur statut vaccinal ou à se faire entièrement vacciner seront mis en congé sans solde deux semaines après la date limite d’attestationNote de bas de page 29.

[31] L’appelante affirme ce qui suit :

  • Elle était au courant de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeurNote de bas de page 30.
  • Elle a reçu la première dose de vaccin contre la COVID-19. Mais elle a subi des effets secondaires après la première dose et s’inquiétait de l’utilisation des cellules fœtales dans le développement d’un vaccin, de sorte qu’elle n’a pas reçu d’autres dosesNote de bas de page 31.
  • La politique de son employeur permettait aux employés de demander une exemption pour des motifs médicaux ou religieux. Pour ce faire, elle a dû déposer une demande fondée sur l’obligation de prendre des mesures d’adaptation. Elle a appris cela à la fin d’octobre 2021Note de bas de page 32.
  • Elle a demandé une exemption pour des motifs religieux de la politique de son employeur en novembre 2021. Sa foi (catholicisme) dit que l’utilisation des cellules fœtales dans le domaine de la recherche est un péché moral et qu’il lui appartient de décider si elle doit se faire vaccinerNote de bas de page 33.
  • Après avoir soumis sa demande d’exemption pour des motifs religieux, elle a eu une entrevue avec un représentant des RH en décembre 2021Note de bas de page 34. Ils ont dit que son employeur déciderait de sa demande d’ici la fin de janvier 2022Note de bas de page 35.
  • Elle n’a pas eu de nouvelles de son employeur au sujet de sa demande et n’a pas été suspendue à la fin de janvier 2022. Elle a supposé qu’il avait accepté sa demande et qu’elle ne serait pas suspendueNote de bas de page 36.
  • Elle a reçu un courriel de son employeur en février 2022, mais elle a eu de la difficulté à l’ouvrir et ne s’est pas rendu compte qu’il s’agissait de sa demande d’exemptionNote de bas de page 37.
  • Elle a finalement pu ouvrir le courriel de son employeur en mars 2022 et a appris que sa demande d’exemption avait été refusée et qu’elle serait mise en congé sans solde parce qu’elle n’était pas entièrement vaccinéeNote de bas de page 38.
  • Elle a ensuite demandé à son employeur de lui donner les raisons pour lesquelles il avait refusé sa demande d’exemption afin qu’elle puisse lui donner plus de renseignements pour réviser sa décision. Cependant, tout ce qu’elle a obtenu, c’est une réponse selon laquelle elle devait déposer une demande d’AIPRP si elle voulait savoir pourquoi sa demande avait été refuséeNote de bas de page 39.
  • Elle a décidé de lui envoyer de toute façon plus d’informations sur sa demande d’exemption. Il a accepté l’information, mais lui a dit qu’elle allait quand même être mise en congé sans soldeNote de bas de page 40.
  • Son employeur n’a pas rempli son obligation de prendre des mesures d’adaptation parce qu’il n’a pas expliqué les raisons pour lesquelles il ne s’est pas conformé à son obligation de prendre des mesures d’adaptation en vertu de sa politique et les raisons pour lesquelles la prise de mesures d’adaptation lui causerait une contrainte excessiveNote de bas de page 41.
  • Sa demande d’AIPRP a montré que son employeur semblait avoir des questions internes qu’il ne lui a jamais posées au sujet de sa demande d’exemption, de sorte qu’il a pris sa décision concernant sa demande sans être pleinement informé de son posteNote de bas de page 42.
  • Elle travaillait de la maison depuis le début de la pandémie et ne constituait donc pas un risque pour la santé, de sorte que son employeur n’avait aucune raison de lui demander de se faire vaccinerNote de bas de page 43.
  • Une autre décision du Tribunal (A. L. c Commission de l’assurance-emploi du Canada) démontre qu’elle n’a pas commis d’inconduiteNote de bas de page 44.
  • Elle a été surprise que son employeur n’ait pas respecté sa propre obligation de prendre des mesures d’adaptation en vertu de sa politiqueNote de bas de page 45.
  • Elle savait que le personnel qui ne respectait pas la politique de son employeur pouvait être mis en congé sans soldeNote de bas de page 46. Elle a également reçu les courriels disant qu’elle serait mise en congé sans solde après le refus de sa demande d’exemption pour des motifs religieuxNote de bas de page 47.
  • Cependant, elle ne pensait pas qu’elle serait mise en congé sans solde pour ne pas avoir respecté la politique de son employeur. Cette politique avait pour but de lui permettre de demander la prise de mesures d’adaptation. Après qu’elle eut demandé une exemption pour des motifs religieux, il incombait à son employeur de lui donner l’occasion de répondre aux préoccupations qu’il avait au sujet de sa demande, mais il ne l’a pas fait. Et comme il ne l’a pas fait, les décisions que son employeur a prises par la suite (y compris la mettre en congé sans solde) ne s’appliquaient pas à elle et n’étaient pas validesNote de bas de page 48.

[32] Je compatis avec l’appelante, mais je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les motifs suivants.

[33] Je conclus que l’appelante a commis les gestes qui ont mené à sa suspension, car elle savait que son employeur avait une politique obligatoire de vaccination contre la COVID-19 et elle savait ce qu’elle devait faire pour s’y conformer.

[34] Je conclus en outre que les gestes de l’appelante étaient intentionnels, car elle a pris la décision consciente de ne pas se conformer à la politique de son employeur.

[35] Des éléments de preuve montrent que l’appelante était au courant de la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle était au courant de celle‑ci, comme il a été mentionné précédemment. Elle a également présenté une demande d’exemption pour motifs religieux, ce qui démontre à mon avis qu’elle était au courant de la politique et de ses exigences.

[36] De plus, des éléments de preuve montrent que l’appelante a choisi de ne pas respecter la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle n’avait pas été entièrement vaccinée comme l’exigeait la politique, comme il a été mentionné précédemment.

[37] Je reconnais que l’appelante affirme que son employeur aurait dû approuver sa demande d’exemption pour des motifs religieux parce qu’elle a fourni une preuve de la sincérité de ses croyances religieuses et qu’ils n’ont pas respecté leur obligation de prendre des mesures d’adaptation en vertu de leur politique lorsqu’ils ont refusé sa demande malgré cette preuve.

[38] Je reconnais également que l’appelante affirme que son employeur n’a pas fourni de bonnes raisons pour lesquelles il a refusé sa demande d’exemption et qu’il avait des questions internes au sujet de sa demande qu’il ne lui a jamais posées avant de décider de la refuser.

[39] Et je reconnais que l’appelante affirme que son employeur aurait dû lui donner le choix de continuer à travailler de la maison sans se faire entièrement vacciner parce qu’elle le faisait sans problème depuis le début de la pandémie.

[40] Malheureusement, je conclus que ces arguments ne sont pas pertinents en l’espèce. Comme il a été mentionné précédemment, la Loi et la Cour disent que je dois me concentrer sur les actions de l’appelante (et non sur celles de l’employeur) lorsque j’analyse l’inconduite. Cela signifie que je ne peux examiner que les mesures que l’appelante a prises ou n’a pas prises pour respecter la politique de son employeur.

[41] En d’autres termes, je ne peux pas décider si l’employeur de l’appelante a agi injustement pour les raisons qu’elle mentionne. Si l’appelante veut faire valoir ces arguments, elle doit le faire devant un autre tribunal ou organisme décisionnel.

[42] Je reconnais également que l’appelante estime qu’une autre décision du Tribunal (je l’appellerai A. L.) aide à démontrer qu’elle n’a pas commis d’inconduite. Elle soutient qu’A. L. affirme que si une personne ne veut pas se faire vacciner en raison de ses croyances religieuses, ses actions ne peuvent pas être considérées comme une inconduiteNote de bas de page 49.

[43] Je ne suis pas lié par les décisions antérieures du Tribunal. Cela signifie que je peux décider par moi-même si je suis d’accord avec ces décisions et si elles contribuent à étayer l’appel d’un appelant.

[44] Dans la présente affaire, je ne suis pas d’accord avec la décision A. L. et l’analyse de l’inconduite du membre du Tribunal. Selon une partie de cette analyse, un appelant a le droit de choisir d’accepter un traitement médical et l’exercice de ce droit ne peut être considéré comme une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 50.

[45] Je conclus que, bien qu’un appelant ait le droit de choisir d’accepter un traitement médical, sa décision d’exercer ou non ce droit peut toujours constituer une inconduite. Je considère cette décision comme délibérée puisqu’elle implique un choix conscient et intentionnel d’accepter ou de refuser quelque chose (comme une vaccination), et la Cour affirme qu’une action délibérée peut être considérée comme une inconduite, comme il a été mentionné précédemment.

[46] De plus, je note que la Cour a récemment déclaré dans une autre décision que la décision A. L. n’établit aucune règle générale qui s’applique à d’autres situations factuelles, que la décision fait l’objet d’un appel et qu’elle ne lie pas la CourNote de bas de page 51.

[47] Pour ces raisons, je ne vais pas suivre la décision A. L. et je ne lui accorderai pas beaucoup de poids ici.

[48] Ainsi, je prends acte des préoccupations de l’appelante au sujet de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur, mais j’estime que la preuve démontre clairement qu’elle a pris consciemment la décision de ne pas s’y conformer. Elle n’a pas été entièrement vaccinée comme l’exigeait la politique, même après le refus de sa demande d’exemption pour des motifs religieux, ce qui montre que ses actions étaient intentionnelles et donc délibérées.

[49] Je conclus également que l’appelante savait ou aurait dû savoir que le fait de ne pas respecter la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur pourrait mener à sa suspension.

[50] Des éléments de preuve indiquent que l’appelante savait qu’elle pourrait être suspendue si elle ne respectait pas la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle le savait, comme il a été mentionné précédemment.

[51] Il existe également d’autres éléments de preuve selon lesquels l’employeur de l’appelante lui a dit qu’elle serait suspendue si elle ne respectait pas leur politique. Ces éléments de preuve sont les suivants :

  • Un courriel de son employeur daté du 12 février 2022. Il mentionne que l’appelante n’a pas démontré que sa croyance religieuse empêche la vaccination, de sorte que sa demande d’exemption est refusée. Conformément à la politique de l’employeur, elle a maintenant jusqu’au 1er mars 2022 pour obtenir sa deuxième dose de vaccin contre la COVID-19 et confirmer de nouveau son statut vaccinal. Si elle ne le fait pas avant le 15 mars 2022, elle sera mise en congé sans solde à compter du 16 mars 2022Note de bas de page 52.
  • Un courriel de son employeur daté du 11 mars 2022. Il indique que l’employeur a examiné en profondeur sa documentation et ses réponses à l’entrevue pour sa demande d’exemption pour des motifs religieux et qu’il a décidé qu’elle n’avait pas démontré que ses croyances religieuses l’empêchaient de se faire vacciner, de sorte que sa décision de refuser sa demande d’exemption demeure inchangée. Il est également indiqué qu’elle doit toujours se conformer à sa politique comme l’employeur lui a déjà dit, mais qu’elle a reporté la date limite pour le faire puisqu’elle est en congé préapprouvé du 14 au 18 mars 2022. Donc, si elle ne respecte pas la politique de l’employeur, elle sera mise en congé sans solde à compter du 24 mars 2022Note de bas de page 53.

[52] Je note que l’appelante a confirmé à l’audience qu’elle avait reçu les courriels susmentionnésNote de bas de page 54. Je conclus que la réception de ces courriels démontre qu’elle savait ou aurait dû savoir qu’elle serait suspendue pour ne pas avoir respecté la politique de son employeur.

[53] Je reconnais que l’appelante dit qu’elle ne s’attendait pas à ce que son employeur la suspende parce qu’elle n’a pas respecté sa politique, parce qu’elle estimait qu’elle avait de solides motifs (ses croyances religieuses) de ne pas se faire entièrement vacciner.

[54] Je reconnais également que l’appelante affirme qu’elle ne pensait pas être suspendue pour ne pas avoir respecté la politique de son employeur parce qu’elle n’avait pas eu de nouvelles de ce dernier au sujet de sa demande d’exemption à la fin de janvier. L’employeur lui avait dit qu’elle aurait des nouvelles à ce moment-là. Elle a donc supposé que sa demande serait approuvée. Elle croyait qu’elle ne serait pas suspendue.

[55] En outre, je reconnais que l’appelante affirme qu’elle ne croyait pas que la partie sur la conformité de la politique de son employeur (c’est-à-dire ce qu’elle devait faire pour éviter d’être mise en congé sans solde) s’appliquait à elle une fois qu’elle avait présenté une demande d’exemption, parce que son employeur avait l’obligation de prendre des mesures d’adaptation en vertu de la politique et qu’il était alors tenu de lui donner l’occasion de répondre aux préoccupations qu’il avait au sujet de sa demande avant de prendre sa décision à ce sujet.

[56] Cependant, je ne suis pas d’accord avec ces arguments.

[57] Je crois l’appelante lorsqu’elle dit qu’elle ne pensait pas être suspendue pour les raisons qu’elle formule.

[58] Malheureusement, je conclus que cela ne signifie pas que l’appelante ne pouvait pas non plus savoir qu’elle pouvait être suspendue pour ne pas avoir respecté la politique de son employeur. À mon avis, la preuve démontre qu’elle aurait dû savoir qu’elle pourrait en fait être suspendue pour cette raison.

[59] En d’autres termes, j’estime qu’il était tout à fait possible pour l’appelante de croire les deux choses (qu’elle serait en mesure de continuer à travailler, mais qu’elle pourrait également être suspendue) en même temps. Elle était au courant de la politique de son employeur et ce dernier lui a dit qu’elle serait suspendue après avoir rejeté sa demande d’exemption pour des motifs religieux, comme il a été mentionné précédemment. Elle aurait donc dû savoir que ce scénario pourrait également se dérouler.

[60] Par conséquent, même si je prends acte du fait que l’appelante ne croyait pas qu’elle serait suspendue parce qu’elle n’avait pas respecté la politique de son employeur, j’estime que la preuve démontre qu’elle savait ou aurait dû savoir qu’elle pourrait tout de même être suspendue pour cette raison.

[61] Je conclus donc que la conduite de l’appelante constitue une inconduite au sens de la loi, car elle a adopté la conduite qui a mené à sa suspension (elle n’a pas respecté la politique de son employeur sur la vaccination obligatoire contre la COVID-19), ses gestes étaient intentionnels et elle savait ou aurait dû savoir qu’ils mèneraient à sa suspension.

Ainsi, l’appelante a‑t‑elle été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite?

[62] Compte tenu de mes conclusions ci-dessus, je juge que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite.

[63] Cela s’explique par le fait que les gestes de l’appelante ont mené à sa suspension. Elle a agi délibérément en ne se faisant pas entièrement vacciner comme l’exigeait la politique de son employeur, même après le refus de sa demande d’exemption. Elle savait ou aurait dû savoir qu’elle pourrait se faire suspendre de son emploi vu son refus de se faire entièrement vacciner.

Conclusion

[64] La Commission a prouvé que l’appelante a été suspendue de son emploi en raison d’une inconduite. C’est pourquoi l’appelante est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance‑emploi.

[65] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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