Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1294

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision sur la prorogation du délai et la
permission d’en appeler

Demandeur : R. M.
Représentante : B. P.
Défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 13 octobre 2022
(GE-22-2881)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 25 septembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-567

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Décision

[1] J’ai décidé que la division d’appel a reçu la demande à temps, de sorte que je n’ai pas à décider s’il y a lieu d’accorder plus de temps au demandeur pour interjeter appel.

[2] Toutefois, je refuse la permission de faire appel. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[3] R. M. est le demandeur. Il a demandé des prestations d’assurance-emploi, alors je l’appellerai le prestataire. En raison de modifications législatives temporaires apportées pendant la pandémie, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a converti la demande du prestataire en demande au titre de la Prestation d’assurance-emploi d’urgence (PAEU). Dans le cadre du programme de la PAEU, la Commission pourrait avancer immédiatement 2 000 $ et verser la prestation hebdomadaire de 500 $. La Commission s’attendait à recouvrer l’avance de 2 000 $ plus tard dans la demande en ne versant pas de prestations lors de certaines semaines couvertes ultérieurement par la demande.

[4] Le prestataire a repris le travail et a cessé de demander la PAEU avant que la Commission ait eu l’occasion de recouvrer l’avance. La Commission a donc décidé que le prestataire a reçu un versement excédentaire. Elle a demandé au prestataire de rembourser l’avance de 2 000 $.

[5] Le prestataire n’était pas d’accord avec cette position. Il a demandé à la Commission de la réviser, mais la Commission ne l’a pas modifiée.

[6] Le prestataire a interjeté appel de la décision de révision de la Commission devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a rejeté l’appel le 13 octobre 2022 parce qu’elle était d’accord avec la décision de la Commission. Le prestataire a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel le 26 mai 2023.

[7] J’admets que l’appel du prestataire n’est pas tardif. Toutefois, je refuse la permission d’interjeter appel. Le prestataire n’a pas démontré que la division générale a agi injustement.

Questions en litige

[8] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La demande présentée à la division d’appel était‑elle tardive?
  2. b) Si elle l’était, devrais‑je prolonger le délai pour déposer la demande?
  3. c) Peut‑on soutenir que la division générale a agi injustement en n’envoyant pas sa décision au prestataire en temps opportun?

Analyse

La demande n’était pas tardive

[9] Dans son avis d’appel à la division générale, le prestataire a autorisé le Tribunal à communiquer avec lui par courriel. La division générale a rendu sa décision le 13 octobre 2022. Elle a envoyé la décision au prestataire par courriel le lendemain.

[10] Lorsque le Tribunal envoie un document à une partie par courriel, ses Règles prévoient qu’il considère que le destinataire a reçu le document le jour ouvrable suivantNote de bas de page 1. Les Règles permettent également à une partie de démontrer que cette règle ne devrait pas s’appliquer à elleNote de bas de page 2.

[11] Le délai pour interjeter appel d’une décision de la division générale devant la division d’appel est de 30 jours à compter de la date à laquelle elle est communiquée par écritNote de bas de page 3. Si la règle de livraison des documents s’applique, la date limite que devait respecter le prestataire était le 13 novembre 2022, soit 30 jours à compter du 14 octobre 2022.

[12] Toutefois, le prestataire a démontré que la règle ne devrait pas s’appliquer dans son cas. Selon le prestataire, il n’a pris connaissance de la décision que le 11 mai 2023, lorsqu’il a appris que l’Agence du revenu du Canada (ARC) avait prélevé le montant du versement excédentaire de 2 000 $. Il a déclaré qu’il attendait la décision de la division générale, mais qu’il n’avait rien reçu par courriel, par la poste ou par tout autre moyen. Il a mentionné que la Commission lui avait dit qu’elle attendait également la décisionNote de bas de page 4.

[13] Parallèlement, je reconnais que la représentante du prestataire a appelé le Tribunal le 5 mai 2023 pour lui demander pourquoi il n’a jamais reçu la décision et pour dire que l’ARC avait recouvré le versement excédentaire anticipé du prestataire sur son remboursement d’impôt. Au cours de cette conversation, la représentante n’a pas dit quand le prestataire a appris la décision de la division générale pour la première fois.

[14] De toute évidence, le prestataire était au courant de la décision avant le 5 mai 2023. Je note que le document original de la demande à la division d’appel du prestataire comportait une date encore plus ancienne, soit le 27 avril 2023. Cette date semble également être liée au recouvrement du versement excédentaire par l’ARC, bien qu’il ne s’agisse pas nécessairement de la date à laquelle il a compris pour la première fois que la division générale avait rejeté son appel.

[15] Peu importe le moment où le prestataire a eu connaissance de la décision ou a compris que la décision était défavorable, la loi prévoit qu’une demande d’autorisation doit être présentée 30 jours après la communication de la décision « par écrit ». Il s’agit donc de savoir quand le prestataire a reçu la décision écrite.

[16] Je reconnais que le prestataire a dit qu’il n’a pris connaissance de la décision que le 11 mai 2023. Toutefois, je n’admets pas qu’il s’agisse d’une déclaration exacte, puisque la représentante du prestataire a laissé croire autre chose lors de l’appel téléphonique du 5 mai 2023.

[17] En réponse à l’appel de la représentante du prestataire du 5 mai 2023, le Tribunal a envoyé par courriel au prestataire une deuxième copie de la décision de la division générale. Je reconnais que la décision a été communiquée par écrit au plus tard le jour ouvrable suivant l’appel téléphonique du 5 mai, soit le lundi 8 mai 2023.

[18] La date postérieure de trente jours au 8 mai 2023 est le 8 juin 2023, ce qui ferait de cette dernière date la limite pour déposer la demande du prestataire. La division d’appel a reçu sa demande le 26 mai 2023, soit avant la date limite.

[19] J’admets que l’appel du prestataire n’est pas tardif. Par conséquent, je n’ai pas à me demander si je devrais proroger le délai pour déposer la demande. Je peux examiner sa demande de permission d’interjeter appel.

Je n’accorde pas au prestataire la permission d’interjeter appel

Principes généraux

[20] Pour que la demande de permission d’en appeler du prestataire soit accueillie, les motifs de son appel devraient correspondre aux « moyens d’appel ». Pour accueillir cette demande de permission et permettre à la procédure d’appel d’aller de l’avant, je dois conclure qu’il y a une chance raisonnable de succès sur le fondement d’un ou de plusieurs moyens d’appel.

[21] Les moyens d’appel établissent les types d’erreurs que je peux prendre en considération. Je ne peux tenir compte que des erreurs suivantes :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 5.

[22] Les tribunaux ont assimilé une chance raisonnable de succès à une « cause défendable »Note de bas de page 6.

Équité procédurale

[23] Dans sa demande à la division d’appel, le prestataire a choisi le moyen d’appel relatif à l’équité procédurale. Il a fait valoir qu’il n’était pas juste que la division générale ne lui ait pas envoyé la décision immédiatement. Pour cette raison, l’ARC a recouvré le versement excédentaire de 2 000 $ à même son remboursement d’impôt avant qu’il ait eu l’occasion de contester la décision de la division générale.

[24] Le prestataire n’a invoqué aucun autre moyen d’appel. Il n’a pas soutenu que le processus de la division générale était injuste d’une autre façon.

[25] On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur en matière d’équité procédurale.

[26] Premièrement, il n’y a aucune preuve que la division générale a tardé à envoyer la décision au prestataire. J’ai accepté la parole du prestataire selon laquelle il n’avait pas reçu la décision lorsqu’elle a été envoyée pour la première fois. Cependant, cela ne signifie pas qu’il a démontré que la faute incombe à la division générale.

[27] Le Tribunal indique qu’il a envoyé la décision par courriel le 14 octobre 2023. Rien dans les dossiers du Tribunal n’indique qu’il n’a pas transmis la décision le 14 octobre 2023.

[28] Ni le prestataire ni sa représentante n’ont appelé le Tribunal pour s’enquérir de la décision avant le 5 mai 2023. À ce moment-là, le Tribunal a confirmé auprès de la représentante du prestataire que l’adresse de courriel figurant dans ses dossiers était la bonne adresse de courriel du prestataire. Elle lui a envoyé une deuxième copie à la même adresse courriel, et le prestataire n’a pas nié l’avoir reçue.

[29] Deuxièmement, la réception tardive de la décision par le prestataire ne signifie pas que le processus de la division générale était injuste. Elle n’aurait pu modifier le résultat de la décision de la division générale. Cela n’a pas nui à sa capacité d’être entendu ou de connaître la preuve contre lui lorsqu’il a eu son audience à la division générale. Le retard de la décision n’aurait pu porter préjudice qu’à son nouvel appel devant la division d’appel, seulement s’il avait entraîné le rejet de son appel par la division d’appel.

[30] Comme le prestataire n’est pas d’accord avec la division générale, il lui était loisible de faire valoir les moyens d’appel qui, selon lui, s’appliquaient. Lorsque j’ai examiné la demande initiale du prestataire, je n’ai pas compris clairement ce qu’il faisait valoir au sujet de la façon dont la division générale a commis une erreur. Je lui ai écrit le 25 août 2023 pour lui demander de préciser les motifs de son appel. Il a fourni une réponse le 18 septembre 2023, mais il n’a plaidé aucun fondement à l’appel, si ce n’est qu’il a reçu la décision de la division générale tardivement.

[31] Si le retard de la décision est son seul fondement d’appel, il est difficile de voir comment ses retards auraient pu lui porter préjudice de quelque façon que ce soit. S’il avait reçu la décision immédiatement, il n’aurait eu aucun fondement pour interjeter appel de la décision de la division générale.

Erreur de fait importante

[32] Le seul moyen d’appel retenu par le prestataire concerne son affirmation selon laquelle une erreur d’équité procédurale a été commise.

[33] Toutefois, je comprends que la représentante du prestataire n’est pas une avocate. Je comprends également que l’appel n’a peut-être pas été formulé de la meilleure façon possible. La Cour fédérale a ordonné à la division d’appel d’examiner l’affaire au-delà des moyens d’appel énoncés lorsque le demandeur se représente lui-mêmeNote de bas de page 7. J’admets que cela peut également s’appliquer aux demandeurs qui n’ont pas de représentant légal.

[34] Par conséquent, j’ai examiné le dossier pour voir si la division générale a ignoré ou mal compris tout élément de preuve important qui aurait pu entraîner une erreur de fait importante.

[35] Je n’ai découvert aucun cas où des éléments de preuve importants ont été mal traités, et les conclusions de la division générale découlent rationnellement de la preuve qui lui est soumise.

[36] On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

[37] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[38] Je refuse la permission d’interjeter appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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