Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : Commission de l’assurance‑emploi du Canada c KM, 2023 TSS 1130.

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Isabelle Thiffault
Intimée : K. M.

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 9 mars 2023
(GE-22-2295)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 11 août 2023
Personnes présentes à l’audience : Représentante de l’appelante
Intimée
Date de la décision : Le 18 août 2023
Numéro de dossier : AD-23-327

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. L’intimée, K. M. (la prestataire) n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler du 7 au 25 février 2022. Elle n’a pas droit à des prestations d’assurance-emploi pour cette période.

Aperçu

[2] L’appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, interjette appel de la décision de la division générale. La division générale a jugé que la Commission n’a pas prouvé que la prestataire a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle a également jugé qu’elle était disponible pour travailler du 7 février 2022 au 16 mai 2022. Cela signifiait qu’elle avait droit à des prestations d’assurance-emploi.

[3] La Commission soutient que la division générale a négligé certains éléments de preuve lorsqu’elle a examiné si la prestataire était disponible pour travailler du 7 au 25 février 2022. La Commission me demande de rendre la décision que, selon elle, la division générale aurait dû rendre. Elle affirme que la division générale aurait dû décider que la prestataire n’était pas disponible pour travailler et qu’elle n’était donc pas admissible à recevoir des prestations d’assurance-emploi du 7 au 25 février 2022.

[4] La prestataire soutient qu’elle devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi pour cette période. Son employeur l’a licenciée, la laissant dans une position vulnérable, sans aucun soutien financier. Elle souligne qu’elle a contribué avec diligence à la caisse d’assurance-emploi. Elle affirme que l’assurance-emploi sert de filet de sécurité important pour protéger les travailleurs et assurer leur bien-être.

Questions en litige

[5] La Commission ne conteste pas la question de l’inconduite ni la disponibilité de la prestataire du 26 février 2022 au 26 mai 2022. En clair, le présent appel porte uniquement sur la disponibilité de la prestataire du 7 février 2022 au 25 février 2022.

[6] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle négligé l’un ou l’autre des éléments de preuve lorsqu’elle s’est penchée sur la question de savoir si la prestataire était disponible pour travailler?
  2. b) Dans l’affirmative, comment l’erreur devrait-elle être corrigée?

Analyse

[7] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale si cette dernière a commis des erreurs de compétence, de procédure ou de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 1.

[8] En ce qui concerne les erreurs de fait, la division générale devait avoir fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissanceNote de bas de page 2.

La division générale a-t-elle mal interprété ou négligé l’un ou l’autre des éléments de preuve?

[9] La Commission soutient que la division générale a négligé certains éléments de preuve qui établissaient que la prestataire n’était pas disponible pour travailler du 7 au 25 février 2022. La Commission soutient que la prestataire n’était pas disponible parce qu’elle était médicalement inapte à travailler pendant cette période. La prestataire n’a abordé aucun de ces éléments de preuve.

La décision de la division générale

[10] Elle a écrit ce qui suit :

[96] … Le retour au travail [de la prestataire] devait survenir le 25 janvier 2022. Le médecin de [la prestataire] l’a mise en arrêt de travail pour une semaine supplémentaire et a mentionné qu’elle serait en mesure de reprendre le travail selon l’horaire progressif à compter du 1er février 2022.

[97] … La [prestataire] a déclaré que, lorsqu’on lui a dit qu’elle avait été licenciée, elle a connu un recul au niveau de sa santé mentale pendant quelques semaines. Elle a déclaré qu’à compter du 26 février 2022, son médecin l’avait autorisée à travailler à temps partiel deux à trois jours par semaine pendant un à trois mois. Par conséquent, je trouve que pour la [prestataire], un emploi convenable serait un emploi qu’elle pourrait occuper pendant 4 heures par jour 3 jours par semaine du 7 au 26 février 2022 et de 2 à 3 jours par semaine du 26 février au 26 mai 2022 (les 3 mois recommandés par son médecin).

Preuve de la disponibilité de la prestataire

[11] La Commission soutient que la division générale a négligé les éléments de preuve suivants :

  • Question 10 du formulaire médical du médecin daté du 5 janvier 2022. Le médecin a indiqué que la prestataire était apte à retourner au travail dans le cadre d’un plan de retour au travail progressif à compter du 25 janvier 2022Note de bas de page 3.
  • Billet de médecin daté du 26 janvier 2022. Le médecin a indiqué qu’il avait réévalué la prestataire ce jour-là. Il a conclu qu’elle était inapte au travail cette semaine-là. Elle était apte à reprendre le travail le 1er février 2022 selon un horaire progressifNote de bas de page 4.
  • Billet de médecin daté du 25 février 2022. Le médecin a écrit : [traduction] « Demeure déprimée et inapte à chercher un emploi pour l’instant 1-3/12 »Note de bas de page 5.

Autres éléments de preuve de la disponibilité de la prestataire

[12] À l’audience devant la division générale, la prestataire a témoigné que son ancien employeur l’avait congédiée de son emploi. Elle n’a pas consulté son médecin sur-le-champ. La prestataire a témoigné qu’après son congédiement, elle n’avait pas [traduction] « le pouvoir en [elle-même] de poursuivre une recherche d’emploi ou quoi que ce soit »Note de bas de page 6.

[13] La prestataire a consulté son médecin deux semaines plus tard, soit le 25 février 2022. Elle a décrit comment elle se sentait. Elle a déclaré qu’elle était vraiment déprimée et qu’elle éprouvait encore des difficultés. Son médecin a fourni un billet de maladie indiquant qu’elle était inapte à chercher du travail pendant un à trois moisNote de bas de page 7.

[14] La prestataire a également témoigné que, malgré son billet du médecin, elle était certaine qu’elle avait commencé à chercher du travail en mars 2022Note de bas de page 8.

La division générale a mal interprété et a négligé la preuve

[15] La division générale a conclu que la prestataire avait déclaré qu’à compter du 26 février 2022, son médecin l’avait autorisée à travailler à temps partiel deux à trois jours par semaine pendant un à trois mois.

[16] Je ne vois aucune preuve de cela.

[17] La division générale s’est peut-être fondée sur le formulaire médical du 5 janvier 2022 et sur un billet de maladie daté du 26 janvier 2022 déclarant que la prestataire était apte à un retour progressif au travail le 1er février 2022. Dans le formulaire médical, le médecin a convenu qu’un horaire de retour progressif au travail de quatre heures par jour, trois jours par semaine était appropriéNote de bas de page 9.

[18] Toutefois, cette preuve était datée. La preuve démontre également qu’il y a eu un changement important dans la situation de la prestataire après janvier 2022. L’ancien employeur de la prestataire l’a congédiée le 7 février 2022. La prestataire a accusé un recul au niveau de sa santé mentale en raison du congédiementNote de bas de page 10. Il a déclenché une récurrence ou une exacerbation des symptômes mêmes qui ont amené la prestataire à s’absenter du travail à la fin de 2021 et en janvier 2022.

[19] La prestataire a consulté son médecin le 25 février 2022. Il était d’avis que la prestataire demeurait déprimée et qu’elle était inapte à chercher du travail pendant la période de trois mois qui suit. La prestataire a confirmé que le médecin lui avait tenu ces propos. Elle a expliqué que son médecin ne pouvait pas établir avec certitude à quel moment elle serait apte à commencer à chercher du travail. Elle a donc mentionné une période d’un à trois mois.

[20] Il est clair que la division générale n’a pas compris le témoignage de vive voix de la prestataire sur ce point. Malgré tout, la preuve documentaire n’étayait pas les conclusions de la division générale.

[21] La division générale semblait avoir négligé le fait qu’il existait une note subséquente du médecin datée du 25 février 2022. Elle connaissait les circonstances qui ont donné lieu à cette visite chez le médecin de la prestataire et à la note du médecin datée du 25 février 2022. Toutefois, la division générale n’a pas tenu compte de l’incidence du congédiement sur la prestataire.

[22] Si la division générale n’a pas négligé la note médicale du 25 février 2022, elle a mal interprété son contenu. La note mentionne que la prestataire n’était pas apte à chercher du travail pendant un à trois mois. La division générale a toutefois compris que la prestataire pouvait travailler à temps partiel pendant un à trois mois.

Réparation des erreurs

[23] La Commission me demande de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. La Commission affirme que la preuve mène à une seule conclusion : que la prestataire n’était pas disponible pour travailler du 7 au 25 février 2022.

[24] La prestataire me demande de rejeter l’appel. Elle soutient qu’il serait injuste de la priver de l’aide financière dont elle a besoin. Elle souligne qu’elle a contribué à la caisse d’assurance-emploi. Elle affirme que je devrais également décider si elle avait droit à des semaines supplémentaires de prestations de maladie de l’assurance-emploi. Elle se demande si elle peut avoir accès à d’autres prestations.

[25] La solution de rechange à ma propre décision consiste à renvoyer l’affaire à la division générale. Cependant, toute la preuve est devant moi pour que je puisse prendre ma propre décision. Renvoyer l’affaire à la division générale ne ferait que retarder les choses. Rien ne justifie un tel renvoi, alors je vais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre.

[26] La preuve démontre que la prestataire a vécu une exacerbation ou une récurrence de ses symptômes après son congédiement par l’employeur le 7 février 2022. Elle a témoigné qu’après le congédiement, elle ne pouvait poursuivre aucune recherche d’emploi. Elle a déclaré qu’elle était vraiment déprimée et qu’elle éprouvait encore des difficultés.

[27] La prestataire a consulté son médecin le 25 février 2022 et a décrit ses symptômes. Le médecin a conclu qu’elle était inapte à chercher du travail pendant un à trois mois. Malgré ces conseils, la prestataire a réussi à reprendre ses recherches en mars 2022. La preuve au dossier laisse croire que la prestataire a commencé à présenter des demandes d’emploi à la mi-mars 2022. Cela concorde avec son témoignage selon lequel elle a commencé à chercher du travail ce mois-là.

[28] D’après les témoignages de vive voix et la preuve documentaire, il est clair que la prestataire était inapte sur le plan médical à chercher du travail à compter du 7 février 2022. Elle n’était pas en mesure d’effectuer des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable. Comme elle était inapte à chercher du travail, elle n’était pas disponible pour travailler du 7 février 2022 jusqu’au 25 février 2022, au minimum, lorsque la prestataire a consulté son médecin et a déclaré qu’elle éprouvait toujours des difficultés.

[29] Compte tenu de la note médicale du 25 février 2022, j’aurais peut-être examiné la question de savoir si la prestataire était disponible pour travailler après le 25 février 2022. Cependant, la Commission accepte que la prestataire fût disponible pour travailler à compter du 26 février 2022. Toute question concernant la disponibilité de la prestataire après le 25 février 2022 ne faisait pas partie de l’appel dont je suis saisie.

[30] J’admets que, pour des raisons médicales, la prestataire n’était pas disponible pour travailler du 7 au 25 février 2022.

[31] La prestataire soutient qu’elle devrait recevoir des prestations d’assurance-emploi parce qu’elle a cotisé à la caisse d’assurance-emploi. Toutefois, le fait de cotiser à la caisse ne garantit pas à lui seul l’admissibilité aux prestations ou le droit à celles-ci. Un prestataire doit satisfaire aux critères d’admissibilité et ne pas être inadmissible ni exclu du bénéfice des prestations.

[32] Un prestataire doit prouver qu’il est capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable. Sinon, il n’a pas droit au bénéfice des prestationsNote de bas de page 11. C’est la situation à laquelle la prestataire fait face.

[33] La prestataire a deux demandes :

  1. i. Elle veut savoir si elle a droit à des semaines supplémentaires de prestations de maladie de l’assurance-emploi. Comme l’a fait remarquer la division générale, la prestataire a déjà reçu le maximum de 15 semaines de prestations de maladie du 31 octobre 2021 au 15 janvier 2022Note de bas de page 12. Aucune autre prestation de maladie n’est offerte à la prestataire pour cette demande.
  2. ii. Elle veut savoir si elle peut avoir accès à d’autres prestations pour la période du 7 au 25 février 2022. Je ne connais pas d’autres prestations en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) qui pourraient lui être offertes. La Commission le confirme elle aussi.

Conclusion

[34] L’appel de la Commission est accueilli. La prestataire n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler du 7 au 25 février 2022 aux fins de l’article 18(1)a) de la Loi.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.