Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1157

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : C. W.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 24 mai 2023 (GE-22-4293)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 23 août 2023
Numéro de dossier : AD-23-566

Sur cette page

Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel. L’appel n’ira pas plus loin.

Aperçu

[2] C. W. est le demandeur dans la présente affaire. Je l’appellerai le « prestataire » parce qu’il a demandé des prestations d’assurance-emploi. La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté sa demande après avoir conclu qu’il avait été congédié pour inconduite.

[3] Le prestataire a demandé à la Commission de réviser son dossier, mais elle n’a pas modifié sa décision. Il a ensuite fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Elle a rejeté son appel. Il veut maintenant obtenir la permission de faire appel à la division d’appel.

[4] Je refuse la permission de faire appel. Le prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a agi de façon injuste ou qu’elle a fait une autre erreur.

Question en litige

[5] Est-il possible de soutenir que la division générale a agi de façon injuste?

[6] Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante parce qu’elle a ignoré la preuve portant sur les mauvais traitements que lui faisaient subir ses collègues?

Je refuse la permission de faire appel

Principes généraux

[7] Pour que la demande de permission de faire appel soit accueillie, il faut que les raisons pour lesquelles le prestataire veut faire appel s’inscrivent dans les « moyens d’appel ». Ceux-ci précisent les types d’erreurs que je peux prendre en considération.

[8] Je peux me pencher seulement sur les erreurs suivantes :

  1. a) La procédure de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question alors qu’elle aurait dû le faire ou elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 1.

[9] Pour accueillir la demande de permission de faire appel et permettre à l’appel de passer à la prochaine étape, je dois conclure qu’au moins un des moyens d’appel (argument) donne à l’appel une chance raisonnable de succès. Dans d’autres décisions judiciairesNote de bas de page 2, une chance raisonnable de succès était l’équivalent d’une « cause défendable ».

Équité de la procédure

[10] Le seul moyen d’appel que le prestataire a sélectionné quand il a rempli le formulaire de demande à la division d’appel était celui concernant l’équité procédurale.

[11] Il n’a toutefois pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale avait agi de façon injuste.

[12] L’équité procédurale concerne le caractère équitable de la procédure. Il ne s’agit pas de savoir si une partie estime que la décision amène un résultat équitable.

[13] Les parties qui se présentent devant la division générale ont droit à certaines garanties procédurales comme le droit d’être entendues, le droit de connaître les arguments avancés contre elles et le droit d’obtenir une décision rendue par une personne impartiale.

[14] Le prestataire n’a pas dit qu’il n’avait pas eu une chance équitable de se préparer pour l’audience ni qu’il ne savait pas ce qui se passait durant l’audience. Il n’a pas dit que l’audience ne lui a pas donné une occasion équitable de présenter ses arguments ou de répondre à ceux de la Commission. Il ne s’est pas plaint que le membre de la division générale avait un parti pris ou qu’il avait jugé l’affaire d’avance.

[15] Quand je lis la décision et examine le dossier d’appel, je constate que rien dans la conduite de la division générale, c’est-à-dire dans ce qu’elle a fait ou oublié de faire, ne m’amène à douter de l’équité de la procédure.

Erreur de fait importante

[16] Le formulaire de demande à la division d’appel disait au prestataire d’expliquer pourquoi il croyait que la division générale avait fait une erreur. Il avait coché la case de l’erreur relative à l’équité procédurale, mais son explication laissait entendre qu’il croyait que la division générale avait commis une erreur de fait importante.

[17] Le prestataire a expliqué que la division générale n’avait pas tenu compte des éléments de preuve montrant qu’il avait été victime d’intimidation au travail et que son employeur ne l’avait pas appuyé et n’avait pas fait de vérifications à la suite de sa plainte.

[18] Le 2 août 2023, j’ai écrit au prestataire pour lui expliquer les moyens d’appel et lui demander de fournir des précisions sur les raisons pour lesquelles il contestait la décision de la division générale. Je lui ai donné jusqu’au 16 août 2023 pour fournir des arguments supplémentaires, mais il n’a pas répondu.

[19] On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante parce qu’elle aurait ignoré la preuve montrant que le prestataire a été intimidé ou que l’employeur ne l’a pas soutenu.

[20] La division générale commet une erreur de fait importante quand elle fonde sa décision sur une conclusion qu’elle a tirée après avoir ignoré ou mal interprété des éléments de preuve pertinents ou sur une conclusion sans lien rationnel avec la preuveNote de bas de page 3.

[21] Pour conclure qu’il fallait exclure le prestataire du bénéfice des prestations d’assurance-emploi en raison d’une inconduite, la division générale devait d’abord conclure que le comportement du prestataire répondait à la définition légale de l’inconduite et que la raison de son congédiement était une inconduite.

[22] La division générale a bien expliqué ce que la loi dit au sujet de l’inconduite aux fins de l’assurance-emploi. Elle a souligné que l’inconduite est délibérée ou que c’est une conduite si insouciante qu’elle est presque délibérée. Elle a aussi précisé qu’on peut conclure qu’il y a eu inconduite même en l’absence d’une intention coupable. Elle a écrit qu’il y a inconduite quand les prestataires savent ou devraient savoir que leur conduite peut les empêcher de remplir leurs obligations envers leur employeur et que la possibilité de se faire congédier est bien réelleNote de bas de page 4.

[23] La division générale a pris en compte ce qui était écrit dans les avertissements de l’employeur ainsi que la preuve présentée par le prestataire. Elle a conclu que l’appelant « rabaissait régulièrement le personnel, il utilisait un langage vulgaire devant la clientèle, il piquait régulièrement des colères dans la salle à manger et il harcelait ses collèguesNote de bas de page 5 ». Elle a aussi conclu que son comportement inquiétait le personnel et la clientèleNote de bas de page 6.

[24] La division générale a noté que le prestataire a dit qu’il voulait juste faire le drôle. Mais elle a conclu que son comportement minait le moral du personnel, qu’il embarrassait l’employeur et qu’il menaçait la réputation du restaurant (de l’employeur). Elle a conclu que le prestataire avait reçu des avertissements et qu’il savait qu’il pouvait se faire congédier en raison de son comportement, mais qu’il avait continué à se comporter de la même façonNote de bas de page 7.

[25] Autrement dit, la division générale a admis que le comportement du prestataire répondait à la définition de l’inconduite. Il s’est volontairement comporté d’une façon qui, comme il le savait ou aurait dû le savoir, l’empêchait de remplir ses obligations envers son employeur. Et il savait ou aurait dû savoir que la possibilité de se faire congédier était bien réelle.

[26] La division générale a aussi conclu que le comportement du prestataire était la raison de son congédiement.

[27] Le prestataire n’a pas contesté la façon dont la division générale a qualifié son comportement ni le fondement des conclusions qu’elle a tirées. Son argument portait d’abord et avant tout sur la façon dont la division générale a ignoré la preuve portant sur le comportement de ses collègues et la façon dont son employeur a répondu à sa plainte.

[28] Durant ses discussions avec la Commission, le prestataire n’a pas dit qu’il avait été intimidé. Il n’a pas non plus affirmé que l’employeur n’avait fait aucune vérification à la suite de ses plaintes de harcèlementNote de bas de page 8. Il n’a pas mentionné ces préoccupations dans la lettre qu’il a écrite à la Commission pour expliquer pourquoi il demandait la révision de son dossierNote de bas de page 9.

[29] La seule preuve de ces préoccupations se trouve dans le témoignage que le prestataire a livré à la division générale. Il a dit avoir déposé une plainte au siège social en raison des mauvais traitements et de la violence verbale que lui ont fait subir d’autres membres du personnel. Il a affirmé que l’employeur était censé faire une enquête, mais que rien ne s’était passéNote de bas de page 10. Il a aussi reconnu avoir déposé la plainte au mois de novembre, après avoir été congédiéNote de bas de page 11.

[30] Le membre de la division générale lui a demandé s’il s’était déjà plaint du milieu de travail [traduction] « toxique » avant de déposer sa plainte en novembre. Le prestataire a répondu qu’il s’était plaint du fait que d’autres membres du personnel ne faisaient pas leur travailNote de bas de page 12.

[31] Le prestataire n’a pas précisé ce que les autres membres du personnel faisaient pour le maltraiter ou le harceler. La division générale n’avait reçu aucune preuve démontrant la nature ou la gravité de ces mauvais traitements.

[32] Le prestataire a déposé sa plainte auprès de l’employeur après son congédiement. Les cours ont affirmé que la conduite de l’employeuse ou de l’employeur, en particulier ce qui survient après l’inconduite des prestataires, n’est pas pertinente lorsqu’on évalue si les gestes posés par une personne constituent une inconduiteNote de bas de page 13.

[33] Par conséquent, il n’est pas surprenant que la division générale n’ait pas mentionné le témoignage du prestataire sur la possibilité que l’employeur n’ait pas enquêté sur sa plainte. Cela n’aurait rien changé aux conclusions de la division générale. De même, l’opinion du prestataire sur les mauvais traitements que ses collègues lui faisaient subir d’une façon quelconque ne permettait pas de savoir si ses propres comportements constituaient une inconduite. Son opinion n’aurait rien changé non plus aux conclusions de la division générale.

[34] Ces éléments de preuve n’étaient pas pertinents pour tirer une conclusion dont la division générale aurait besoin pour décider si le prestataire a été congédié en raison d’une inconduite. Même s’ils avaient une certaine pertinence, leur importance serait si mince pour la division générale qu’elle ne ferait aucune erreur si elle les omettait de sa décision. En temps normal, on présume que la division générale a examiné la preuve. Elle n’est pas obligée de mentionner chaque élément de preuveNote de bas de page 14.

[35] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[36] Je refuse la permission de faire appel. Cela met donc un terme à l’appel.

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