Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1158

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. W.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de révision (558985) rendue le 20 décembre 2022 par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Katherine Parker
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 4 mai 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 24 mai 2023
Numéro de dossier : GE-22-4293

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’il a fait quelque chose qui a entraîné la perte de son emploi). Par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[3] L’appelant a perdu son emploi. Son employeur a expliqué qu’il l’a congédié parce qu’il harcelait d’autres membres du personnel et piquait des colères devant la clientèle. L’employeur a dit que l’appelant avait reçu de nombreux avertissements de vive voix et par écrit.

[4] Même si l’appelant ne conteste pas ces faits, il affirme que ce n’est pas la vraie raison de son congédiement. Il dit que l’employeur l’a plutôt congédié parce qu’il a exprimé ses préoccupations au sujet des membres du personnel qui ne faisaient pas leur travail. Il affirme que l’employeur a exagéré l’importance des incidents après que l’appelant s’est plaint du milieu de travail toxique auprès du siège social.

[5] L’appelant convient qu’il avait reçu des avertissements verbaux et écrits sur son comportement, mais il affirme que tout ce qu’il faisait, c’était dire la vérité et essayer de s’amuser. Il a reçu des avertissements concernant :

  • la façon dont il rabaissait et harcelait ses collègues;
  • les scènes qu’il faisait dans la salle à manger en disant, devant la clientèle, des jurons et des choses dégradantes sur le personnel, ce qui était embarrassant pour le restaurant;
  • la façon dont il faisait fléchir les genoux de ses collègues et mettait ses mains froides et mouillées sur leur visage;
  • la plainte que l’employeur a reçue contre l’appelant parce qu’il avait plaqué une collègue contre une armoire et ne voulait pas la relâcher.

[6] La Commission a accepté la raison fournie par l’employeur pour expliquer le congédiement. Elle a décidé que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle a donc conclu qu’il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[7] L’appelant a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[8] Pour savoir si l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois déterminer la raison pour laquelle il a perdu son emploi. Ensuite, je dois voir si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelant a-t-il perdu son emploi?

[9] Je juge que l’appelant a perdu son emploi parce qu’il rabaissait régulièrement le personnel, il utilisait un langage vulgaire devant la clientèle, il piquait souvent des colères dans la salle à manger et il harcelait ses collègues.

[10] L’appelant et la Commission ne s’entendent pas sur la raison pour laquelle l’appelant a perdu son emploi. Selon la Commission, la raison fournie par l’employeur est la véritable raison du congédiement. Voici ce qu’il a déclaré à la Commission :

  • L’appelant a reçu trois avertissements écrits et plusieurs avertissements verbaux concernant son comportement perturbateur dans la salle à manger où il travaillait comme serveur.
  • L’employeur est un restaurant et l’appelant était un serveur.
  • Après plusieurs avertissements verbaux, l’appelant a reçu un avertissement écrit le 17 avril 2022. Il a été avisé qu’il perdrait son emploi s’il continuait de se comporter de la même façonNote de bas de page 2.
  • Le 6 août 2022, l’appelant a reçu un avertissement écrit parce qu’il poussait les gens à l’arrière des genoux et il se mouillait les mains avec de l’eau froide avant de les mettre sur le visage de son collègue. La personne qui le supervisait lui avait dit à de nombreuses reprises d’arrêter de faire cela. On lui a dit que de tels gestes ne seraient pas tolérés et que s’il continuait, il serait congédié.
  • L’avertissement du 6 août 2022 accusait aussi l’appelant d’avoir plaqué contre le comptoir une personne avec qui il travaillait et de ne pas avoir voulu la relâcher jusqu’à ce qu’elle se fâcheNote de bas de page 3.
  • Le 6 octobre 2022, l’appelant a reçu un troisième avertissement parce qu’il se chamaillait avec des collègues devant la clientèle. Il était question de ses gestes et son langageNote de bas de page 4.
  • Le 27 octobre 2022, l’appelant a reçu un avis écrit indiquant qu’il s’était comporté de façon inappropriée avec d’autres membres du personnel et que cela minait le moral de l’équipe. Il a rabaissé ses collègues en leur disant qu’il ne savait pas pourquoi on les payait ni même pourquoi on leur avait donné un emploi. La clientèle s’était plainte après l’avoir entendu jurer contre ses collègues et parler d’une façon négative à d’autres collèguesNote de bas de page 5.
  • Dans la lettre du 27 octobre 2022, il est écrit que le restaurant croyait qu’il fallait poursuivre ses activités sans l’appelant et qu’il était congédié.

[11] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme que la véritable raison pour laquelle il a perdu son emploi est qu’il a exprimé ses préoccupations au sujet de l’incompétence du personnel et que l’employeur n’a pas aimé cela. Il affirme n’avoir jamais vu deux des trois avertissements écrits, mais confirme avoir reçu un avertissement verbal.

[12] Je juge que l’appelant savait que ce qu’il faisait causait des problèmes et qu’il pouvait être congédié. J’accepte la preuve de l’employeur selon laquelle le comportement de l’appelant était inacceptable et qu’il avait reçu par écrit et de vive voix des avertissements selon lesquels son comportement ne serait pas toléré et pourrait entraîner son congédiement.

[13] L’appelant a déclaré avoir été averti au sujet de son comportement le 17 avril 2022, le 6 août 2022 et le 6 octobre 2022. Par conséquent, je conclus que l’appelant a perdu son emploi parce qu’il rabaissait régulièrement le personnel, il utilisait un langage vulgaire devant la clientèle, il piquait régulièrement des colères dans la salle à manger et il harcelait ses collègues.

La raison du congédiement est-elle une inconduite au sens de la loi?

[14] La raison pour laquelle l’appelant a été congédié est une inconduite au sens de la loi.

[15] Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il faut que la conduite soit délibérée. En d’autres termes, elle doit être consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 6. L’inconduite comprend aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 7. Il n’est pas nécessaire que l’appelant ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 8.

[16] Il y a inconduite si l’appelant savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et que la possibilité de se faire renvoyer pour cette raison était bien réelleNote de bas de page 9.

[17] La Commission doit prouver que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 10.

[18] Selon la Commission, il y a eu inconduite parce que l’employeur a donné plusieurs avertissements verbaux et écrits à l’appelant. Elle affirme que les avertissements étaient clairs : tout autre incident du genre, comme harceler d’autres membres du personnel et faire une scène, entraînerait son congédiement. Son comportement inquiétait non seulement le personnel, mais aussi la clientèle.

[19] L’appelant affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce qu’il essayait seulement de s’amuser au travail. Il explique que, quand il faisait fléchir les genoux de ses collègues et qu’il leur arrosait le visage, il n’essayait pas d’être impoli, il voulait juste faire le drôle.

[20] Il a dit que les avertissements écrits avaient été amplifiés par l’employeur après coup parce qu’il était allé porter plainte au siège social. Mais il a seulement déposé sa plainte en novembre 2022, après avoir été congédié. Ainsi, je rejette l’idée que l’employeur a modifié les avertissements par après.

[21] Je juge que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite parce que l’employeur a imposé des mesures disciplinaires progressives et que l’appelant savait qu’il pouvait se faire congédier :

  • L’appelant a reçu trois avertissements écrits de l’employeur.
  • Les avertissements écrits s’ajoutaient à plusieurs avertissements verbaux que l’appelant a admis avoir reçus.
  • Le comportement de l’appelant minait le moral du personnel et embarrassait l’employeur.
  • Même si l’appelant n’a pas reçu les deux avertissements écrits du 6 août 2022 et du 6 octobre 2022, il a été averti verbalement.
  • La clientèle se plaignait de son comportement, ce qui menaçait la réputation du restaurant.
  • L’appelant savait qu’il risquait de perdre son emploi s’il continuait de se comporter de la même façon, mais il a quand même continué.

Somme toute, l’appelant a-t-il perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[22] Compte tenu des conclusions que je viens de tirer, je juge que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[23] La Commission a prouvé que l’appelant a perdu son emploi en raison d’une inconduite. En conséquence, l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[24] L’appel est donc rejeté.

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