Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : PZ c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1200

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : P. Z.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (478667) datée du 2 juin 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Linda Bell
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 17 janvier 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 25 janvier 2023
Numéro de dossier : GE-22-2455

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel, en modifiant la date de fin de l’inadmissibilité.

[2] Je ne suis pas d’accord avec P. Z. Il est l’appelant (prestataire) dans la présente affaire.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a démontré que le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’il a fait quelque chose qui a entraîné sa suspension).

[4] Le prestataire est retourné au travail le 10 janvier 2022. Par conséquent, il est inadmissible aux prestations d’assurance-emploi pendant la période de sa suspension, soit du 13 décembre 2021 au 7 janvier 2022Note de bas de page 1.

Aperçu

[5] Le prestataire travaillait comme infirmier autorisé dans un hôpital, pour les services de santé provinciaux. L’employeur l’a mis en congé sans solde (suspendu) parce qu’il ne s’est pas conformé à sa politique de vaccination contre la COVID-19.

[6] Même si le prestataire ne conteste pas ce qui s’est passé, il affirme que le non-respect de la politique de vaccination de son employeur n’est pas une inconduite.

[7] Au début, la Commission a décidé que le prestataire avait cessé de travailler en prenant volontairement une période de congé. Après révision, la Commission a modifié sa décision pour dire que le prestataire avait été suspendu. La Commission a accepté la raison de la suspension fournie par l’employeur. Elle a décidé que le prestataire avait été suspendu en raison d’une inconduite. Pour cette raison, la Commission a décidé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Questions que je dois examiner en premier

Partie potentielle mise en cause

[8] Parfois, le Tribunal envoie une lettre à l’ancien employeur de la partie prestataire pour lui demander s’il veut être ajouté comme partie à l’appel. Pour être mis en cause, l’employeur doit avoir un intérêt direct dans l’appel. J’ai décidé de ne pas mettre l’employeur en cause dans le présent appel. En effet, rien au dossier ne me porte à croire que ma décision imposerait des obligations légales à l’employeur.

Question en litige

[9] Le prestataire a-t-il été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[10] La loi prévoit qu’une personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cela s’applique lorsque l’employeur suspend une personneNote de bas de page 2.

[11] Pour décider si le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite, je dois décider deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison il a été suspendu. Ensuite, je dois vérifier si la loi considère ce motif comme une inconduite.

Pourquoi le prestataire a-t-il été suspendu?

[12] Les deux parties conviennent que le prestataire a été mis en congé sans solde (suspendu) parce qu’il a refusé de se faire vacciner dans le délai prévu par la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de l’employeur.

[13] Il n’y a rien au dossier qui me porte à croire le contraire. Je conclus donc que le prestataire a été suspendu parce qu’il a refusé de se faire vacciner conformément à la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur.

La raison de la suspension du prestataire est-elle une inconduite au sens de la loi?

[14] Oui. Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite. Voici ce dont j’ai tenu compte.

[15] Pour être considérée comme une inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite du prestataire était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 3. L’inconduite comprend également une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 4.

[16] Il n’est pas nécessaire que le prestataire ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’il ait voulu faire quelque chose de mal) pour que son comportement soit une inconduite au sens de la loiNote de bas de page 5.

[17] Il y a inconduite si le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’il soit suspendu ou congédié pour cette raisonNote de bas de page 6.

[18] La Commission doit prouver que le prestataire a été suspendu ou qu’il a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie que la Commission doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) que le prestataire a été suspendu ou qu’il a perdu son emploi en raison d’une inconduiteNote de bas de page 7.

[19] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • Le prestataire savait que tous les membres du personnel devaient fournir une preuve de vaccination complète au plus tard le 30 novembre 2021. Cette période a été prolongée au 12 décembre 2021.
  • Le prestataire a confirmé qu’on lui avait donné beaucoup de préavis qu’il allait devoir se faire vacciner pour continuer à travailler à l’hôpital.
  • Le prestataire savait qu’il serait mis en congé sans solde (suspendu) s’il ne prouvait pas qu’il était entièrement vacciné.
  • Le prestataire a refusé de se faire vacciner, alors il a été suspendu. Son dernier jour de travail était le 8 décembre 2021.

[20] Le prestataire affirme qu’il avait été avisé environ un mois à l’avance qu’il serait mis en congé sans solde (suspendu) s’il ne se conformait pas à la politique de vaccination complète. Il a demandé une exemption religieuse, mais celle-ci a été refusée. Il a fait appel de ce refus de lui accorder une exemption religieuse, mais son appel a été rejeté.

[21] Le prestataire affirme que ses gestes ne constituent pas une inconduite pour les raisons suivantes :

  • il n’a pas agi de façon contraire à l’éthique;
  • il n’a pas fait preuve de négligence en prenant soin des patientes et des patients;
  • il a de bons antécédents de travail;
  • il n’avait aucun problème disciplinaire.

[22] Le prestataire affirme que la politique de l’employeur n’est pas moralement correcte ou légale. Il a fait valoir qu’il a des libertés politiques et religieuses ou qu’il n’en a pas, et qu’il s’agit de son corps, et donc de son choix. Il a déposé un grief par l’entremise de son syndicat puis il est retourné au travail le 10 janvier 2022.

[23] La loi ne dit pas que je dois tenir compte de la façon dont l’employeur s’est comporté pour établir s’il y a eu inconduite aux fins des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 8. Je dois plutôt me concentrer sur ce que le prestataire a fait ou omis de faire, et sur la question de savoir si cela constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 9.

[24] La Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont toutes deux déclaré que la question de savoir si un employeur a omis de prendre des mesures d’adaptation à l’égard d’un membre du personnel au titre de la loi sur les droits de la personne n’est pas pertinente à la question de l’inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi. En effet, il ne s’agit pas de la conduite de l’employeur qui est en cause. Ces questions peuvent être traitées par d’autres instancesNote de bas de page 10.

[25] Il est également important de savoir que je ne peux pas décider si le prestataire avait d’autres options au titre d’autres lois. Il ne m’appartient pas de décider si le prestataire a été suspendu à tort ou si l’employeur aurait dû prendre des dispositions raisonnables pour e prestataireNote de bas de page 11 (lui offrir des mesures d’adaptation). Je ne peux examiner qu’une seule chose : la question de savoir si ce que le prestataire a fait ou omis de faire constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[26] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite parce que le refus du prestataire d’être vacciné était délibéré ou intentionnel. Le prestataire a clairement été avisé qu’il serait mis en congé sans solde ou empêché de travailler (suspendu) s’il ne se faisait pas vacciner contre la COVID-19. Il y avait un lien de cause à effet entre son refus de se faire vacciner et sa suspension. Je conclus donc que le prestataire a été suspendu de son emploi en raison d’une inconduite.

[27] La demande (période de prestations) a pris effet le 12 décembre 2021. Le prestataire est retourné au travail le lundi 10 janvier 2022. Par conséquent, le prestataire est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du lundi 13 décembre 2021 au vendredi 7 janvier 2022Note de bas de page 12.

Conclusion

[28] La Commission a prouvé que le prestataire a été suspendu en raison d’une inconduite. Par conséquent, il est inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[29] L’appel est rejeté, avec la modification de la date de fin de l’inadmissibilité.

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