Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Référence : JP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 244

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission d’en
appeler

Demandeur : J. P.
Défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 12 juillet 2023
(GE-23-876)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 21 septembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-764

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] J. P. est le demandeur. Étant donné qu’il a demandé des prestations d’assurance‑emploi, je l’appellerai le prestataire. Il a quitté son emploi en mai 2022 parce que son employeur a décidé de refuser ses demandes de congé après qu’il eut réservé un voyage à l’étranger. Il a demandé des prestations d’assurance‑emploi en décembre 2022, soit quelque temps après son retour au Canada. Il a demandé à la Commission d’antidater sa demande de prestations au 5 mai 2022.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (Commission), a refusé d’antidater sa demande parce qu’à son avis, il n’avait pas une bonne raison pendant toute la période de son retard. Dans la même décision, elle a conclu qu’il avait quitté volontairement son emploi sans justification, de sorte qu’il était exclu du bénéfice des prestations de toute façon. Lorsque le prestataire a demandé à la Commission de réviser la décision, cette dernière n’a pas modifié sa décision.

[4] Le prestataire a interjeté appel sur les deux questions devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a rendu une décision distincte pour chaque question. Dans l’une des décisions, elle a conclu que le prestataire était fondé à quitter son emploi. Il n’est donc pas exclu du bénéfice des prestations. Le prestataire ne fait pas appel de cette décision.

[5] La Commission a rejeté l’appel du prestataire sur la question de l’antidatation. Elle a jugé qu’il n’avait pas de motif valable justifiant le retard. Le prestataire demande la permission d’interjeter appel de cette décision devant la division d’appel.

[6] Je rejette la demande de permission d’en appeler du prestataire. On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur dans la façon dont elle a rendu sa décision.

Question préliminaire

[7] Le prestataire n’a mentionné aucun moyen d’appel dans sa demande à la division d’appel. Le Tribunal a écrit au prestataire le 29 août 2023 pour lui décrire les moyens d’appel et lui demander d’expliquer de nouveau pourquoi il croyait que la division générale avait commis une erreur.

[8] Le prestataire a répondu le 11 septembre 2023, mais il n’a pas expliqué comment la division générale avait commis une erreur. Il a plutôt expliqué à nouveau pourquoi il lui a fallu autant de temps pour demander des prestations.

[9] Toutefois, je tiens compte du fait que le prestataire n’est pas représenté par un avocat. La Cour fédérale a déclaré que la division d’appel devrait être particulièrement prudente avec les parties qui ne sont pas représentées par un avocat et qui ne savent peut‑être pas comment présenter leur appel. Elle a ajouté que la division d’appel devrait examiner le dossier pour voir si des éléments de preuve importants ont été négligés ou mal comprisNote de bas de page 1.

[10] Par conséquent, j’ai examiné le dossier pour voir si la division générale a commis une erreur de fait importante.

Question en litige

[11] La division générale a‑t‑elle commis une erreur de fait importante en omettant de prendre en considération une preuve pertinente ou en comprenant mal celle‑ci?

Analyse

Principes généraux

[12] Pour que la demande de permission d’en appeler du prestataire soit accueillie, les motifs de son appel devraient correspondre aux « moyens d’appel ». Les moyens d’appel établissent les types d’erreurs que je peux prendre en considération.

[13] Je ne peux tenir compte que des erreurs suivantes :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 2.

[14] Pour accueillir cette demande de permission et permettre à la procédure d’appel d’aller de l’avant, je dois conclure que le prestataire a une chance raisonnable de succès sur le fondement d’un ou de plusieurs moyens d’appel. D’autres décisions judiciaires ont assimilé une chance raisonnable de succès à une « cause défendable »Note de bas de page 3.

Erreur de fait importante

[15] Une erreur de fait importante est commise lorsque la division générale fonde sa décision sur une conclusion erronée qui a négligé ou mal compris la preuve pertinente ou qui ne découle pas de la preuveNote de bas de page 4.

[16] On ne peut soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

[17] La division générale a compris que le prestataire a quitté son emploi le 6 mai 2022 et qu’il a quitté le pays quelques jours plus tard. Elle a compris qu’il s’est absenté pendant environ deux mois et qu’il a demandé des prestations le 5 décembre 2022. Ces faits ne sont pas contestés.

[18] Elle a compris également que le prestataire a justifié le retard en expliquant qu’il cherchait du travail et qu’il espérait trouver quelque chose et ne pas avoir besoin de prestations d’assurance‑emploi. Elle a compris qu’il avait également dit qu’il était un nouvel arrivant au Canada et qu’il ne comprenait pas le régime d’assurance‑emploi. C’est ce que confirment la preuve au dossier et les observations du prestataire.

[19] Je note que le prestataire a dit à la Commission qu’un ami lui avait suggéré de demander des prestations d’assurance‑emploi en novembre 2022 (avant le 15 novembre). Il a dit que son ami lui avait dit comment communiquer avec la Commission. Le prestataire a déclaré qu’il a fait quelques tentatives pour appeler la Commission avant de finalement parler à quelqu’un au cours de la dernière semaine de novembre. À ce moment‑là, l’agent de la Commission lui a suggéré de présenter une demande et de demander une antidatationNote de bas de page 5.

[20] La division générale n’a pas mentionné cette preuve, mais rien ne permet de soutenir qu’il s’agit d’une erreur de fait importante. Elle n’est pas tenue de faire référence à tous les éléments de preuve dans tous les casNote de bas de page 6.

[21] En l’espèce, on peut présumer que la division générale a compris que le prestataire n’a pris connaissance des prestations d’assurance‑emploi qu’en novembre. Cette preuve n’est pas suffisamment importante pour que la division générale soit tenue de la mentionner : elle n’aurait pas modifié la décision de la division générale.

[22] La division générale a décidé que le prestataire n’avait pas de motif valable justifiant le retard. Elle a eu raison de dire que la loi exige qu’un prestataire agisse comme le ferait une personne raisonnable et prudente dans des circonstances semblables. Elle a eu raison de dire également que l’ignorance de la loi n’est pas considérée comme étant un motif valable et qu’un prestataire doit prendre des mesures raisonnablement rapides pour comprendre les droits et responsabilités que prévoit la loi à son égardNote de bas de page 7.

[23] La division générale a fondé sa décision sur une conclusion selon laquelle le prestataire n’a pas pris de mesures raisonnablement rapides pour comprendre ses droits et ses obligations. Il se pourrait bien qu’il n’ait compris qu’en novembre qu’il pouvait demander des prestations, mais cela ne change rien au fait qu’il n’avait rien fait pour connaître ses droits et ses obligations plus tôt. La division générale a conclu qu’il aurait pu le faire. Elle a dit que le prestataire aurait facilement pu en apprendre davantage sur l’assurance‑emploi en se rendant dans un bureau de Service Canada, en appelant ou en s’informant en ligne.

[24] Enfin, la division générale n’a pas accepté que des circonstances exceptionnelles aient pu exempter le prestataire de devoir prendre des mesures raisonnablement rapides. Je n’ai pas trouvé de preuve de circonstances exceptionnelles que la division générale a négligées ou mal comprises, et sa conclusion découle rationnellement de la preuve dont elle était saisie.

[25] La division générale a mentionné le fait que le prestataire était au Canada depuis quatre ans avant de démissionner, qu’il occupait deux emplois à temps plein et qu’il avait un dossier impressionnant d’études et d’expérience. Elle en a conclu qu’il est capable de s’y retrouver dans les règles et règlements et qu’il aurait facilement pu découvrir ses droits et obligations liés aux prestations d’assurance‑emploi.

[26] L’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès

Conclusion

[27] Je refuse la permission de faire appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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