Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision

Citation : SG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1422

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : S. G.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du
25 juillet 2023 (GE-23-1225)

Membre du Tribunal : Pierre Lafontaine
Date de la décision : Le 30 octobre 2023
Numéro de dossier : AD-23-808

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Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] La demanderesse (prestataire) a quitté son emploi et a demandé des prestations d’assurance-emploi. La défenderesse (Commission) a examiné les raisons de la prestataire pour quitter son emploi. Elle a conclu que cette dernière a quitté volontairement son emploi (c’est-à-dire qu’elle a choisi de quitter son emploi) sans justification prévue par la loi. Par conséquent, la Commission ne pouvait pas lui verser de prestations.

[3] La prestataire a demandé la révision de cette décision mais la Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès de la division générale.

[4] La division générale a déterminé que la prestataire a choisi de quitter son emploi car l’employeur a refusé qu’elle porte un signe religieux au cou à l’extérieur de ses vêtements. Elle a déterminé qu’il s’agissait d’un objet qui pouvait se retrouver dans les préparations culinaires. La division générale a déterminé que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi. Elle aurait pu porter son chapelet sous ses vêtements, tel que proposé par son employeur, afin de respecter les normes d’hygiènes. La division générale a conclu que la prestataire n’était pas justifiée de quitter son emploi au moment où elle l’a fait.

[5] La prestataire demande à la division d’appel la permission d’en appeler de la décision de la division générale. La prestataire fait valoir que la division générale a commis une erreur de droit et une erreur de fait importante.

[6] Je refuse la permission d’en appeler puisqu’aucun des moyens d’appel soulevés par la prestataire confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[7] Est-ce que la prestataire soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

Analyse

[8] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, spécifie les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont que :

  1. Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une certaine façon.
  2. La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question sans pouvoir de le faire.
  3. La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. La division générale a commis une erreur de droit dans sa décision.

[9] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond de l'affaire. C'est une première étape que la prestataire doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui auquel elle devra rencontrer à l'audience de l'appel sur le fond. À l’étape de la demande permission d’en appeler, la prestataire n’a pas à prouver sa thèse mais, elle doit établir que son appel a une chance raisonnable de succès. En d’autres mots, elle doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a eu erreur révisable sur laquelle l’appel peut réussir.

[10] La permission d’en appeler sera en effet accordée si je suis convaincu qu’au moins l’un des moyens d’appel soulevé par la prestataire confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Est-ce que la prestataire soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

[11] La prestataire fait valoir qu’elle a quitté son emploi en raison de discrimination religieuse. Elle fait valoir qu’il s’agit d’un droit constitutionnel. La prestataire appuie sa position sur le Guide de détermination de l’admissibilité (Guide). Elle fait valoir que la division générale n’a pas reconnu que les propos dits par l’employeur étaient simplement une invitation à quitter son emploi. La prestataire conteste la compréhension inexacte de son dossier à chaque niveau du gouvernement.

[12] La question devant la division générale était de déterminer si la prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas page 1 Ceci doit être déterminé selon les circonstances qui prévalent au moment du départ.

[13] La division générale a déterminé que la prestataire a choisi de quitter son emploi car l’employeur a refusé qu’elle porte un signe religieux à l’extérieur de ses vêtements. Puisqu’une nouvelle employée était autorisée à porter le hijab, la prestataire considérait qu’elle avait également le droit de porter un signe religieux, sans discrimination.

[14] La prestataire travaillait depuis 27 ans pour l’employeur. La preuve démontre que la prestataire aurait pu continuer à travailler pour son employeur mais qu’elle a choisi de quitter devant le refus de l’employeur qu’elle porte son chapelet au cou à l’extérieur de ses vêtements. Dans sa demande de prestations, elle a reconnu avoir quitté son emploi pour discrimination.Note de bas page 2

[15] Lors de ses entrevues avec la Commission, la prestataire a reconnu avoir choisi de quitter son emploi devant le refus de son employeur de lui laisser porter son chapelet.Note de bas page 3 L’employeur a également indiqué dans le relevé d’emploi que la prestataire avait volontairement quitté son emploi.Note de bas page 4

[16] Tel que souligné par la division générale, il n’était pas possible pour l’employeur de permettre à la prestataire de porter un objet pouvant tomber dans les aliments. L’employeur a offert un compromis à la prestataire, soit de porter son chapelet à l’intérieur de ses vêtements, afin de lui permettre d’exercer ses croyances religieuses, tout en permettant à l’employeur de respecter ses obligations légales en matière d’hygiène alimentaire. La prestataire a refusé et a choisi de quitter immédiatement.

[17] La division générale a déterminé que la prestataire avait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi. Elle aurait pu accepter le compromis offert par l’employeur et porter son chapelet sous ses vêtements afin de respecter les normes d’hygiènes. Cela lui aurait accordé le temps nécessaire afin de se trouver un autre emploi qui lui était plus convenable.

[18] La division générale a conclu que la prestataire n’était pas justifiée de quitter son emploi au moment où elle l’a fait.

[19] Bien que je ne sois pas lié par le Guide, je note que celui-ci indique que la jurisprudence reconnait le droit de quitter un emploi lorsqu’un employeur n’est pas disposé à accommoder une personne qui veut faire valoir ses croyances religieuses, ce qui n’est manifestement pas le cas dans le présent dossier. Il y est mentionné qu’une solution raisonnable pour un prestataire est d’envisager un compromis qui respecte ses croyances religieuses.Note de bas page 5

[20] Je suis d’avis que la division générale a correctement énoncé le critère juridique applicable en matière de départ volontaire. Elle a appliqué ce critère aux faits en l’espèce et a cherché à savoir si la prestataire, après avoir considéré toutes les circonstances, n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi.

[21] La prestataire était manifestement en désaccord avec la position de l’employeur de permettre à la nouvelle employée de porter le hijab contrairement aux directives habituelles de l’employeur. Cependant, il existait d’autres solutions raisonnables que de quitter son emploi au moment où elle l’a fait.

[22] Après examen du dossier d’appel, de la décision de la division générale et des arguments au soutien de la demande de permission d’en appeler, je n’ai d’autres choix que de conclure que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[23] La permission d’en appeler est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

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