Assurance-emploi (AE)

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Citation : DT c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 819

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : D. T.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (550276) datée du 21 novembre 2022 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Normand Morin
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 30 mars 2023
Personne présente à l’audience : L’appelante
Date de la décision : Le 26 mai 2023
Numéro de dossier : GE-22-4170

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Décision

[1] L’appel est accueilli en partie. 

[2] Je conclus que l’appelante démontre que si elle n’avait pas été malade, elle aurait été disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine, à compter du 10 janvier 2022Note de bas de page 1. Son admissibilité au bénéfice des prestations d’assurance-emploi de maladie (prestations spéciales) doit donc être établie à raison de trois jours ouvrables par semaine à compter de cette date, et ce, jusqu’à la fin de la période au cours de laquelle elle a été dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicales, soit jusqu’au 3 avril 2022.

[3] Je conclus que l’appelante démontre qu’à compter du 4 avril 2022, elle est disponible à travailler trois jours ouvrables par semaineNote de bas de page 2. Son admissibilité au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi doit donc être établie à raison de trois jours par semaine à compter de ce moment.

Aperçu

[4] Du 16 novembre 2020 au 11 janvier 2022, l’appelante a travaillé comme infirmière au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Capitale-Nationale (CIUSSS de la Capitale-Nationale ou CIUSSS de Québec-Nord ou l’employeur) et a cessé de travailler pour cet employeur en raison d’une maladie ou d’une blessureNote de bas de page 3.

[5] Le 9 avril 2022, elle présente une demande de prestations d’assurance-emploi de maladie (prestations spéciales)Note de bas de page 4. Une période de prestations a été établie à compter du 9 janvier 2022Note de bas de page 5.

[6] Le 7 septembre 2022, la Commission l’avise qu’elle n’a pas droit aux prestations de maladie (prestations spéciales) à partir du 10 janvier 2022 parce qu’elle n’a pas prouvé qu’elle aurait été disponible pour travailler si elle n’avait pas été malade. La Commission lui précise qu’elle a affirmé que si elle n’avait pas été malade, elle aurait seulement accepté de travailler à temps partielNote de bas de page 6. Dans son argumentation, la Commission explique avoir imposé à l’appelante une inadmissibilité d’une durée déterminée du 10 janvier 2022 au 1er avril 2022Note de bas de page 7.

[7] Le 8 septembre 2022, la Commission l’avise aussi qu’elle ne peut lui verser de prestations (prestations régulières) à partir du 4 avril 2022. La Commission lui explique que puisque celle-ci l’informée qu’elle désirait seulement travailler à temps partiel et qu’elle avait trouvé un emploi de ce genre, elle considère qu’elle n’est pas disponible pour travailler à temps pleinNote de bas de page 8.

[8] Le 21 novembre 2022, la Commission l’avise qu’elle maintient les décisions rendues à son endroit, en date du 7 février 2022Note de bas de page 9, quant à sa disponibilité à travailler, si elle n’avait pas été malade (prestations de maladie), et sa disponibilité à travaillerNote de bas de page 10.

[9] L’appelante fait valoir qu’elle aurait été disponible à travailler si elle n’avait pas été malade. Elle explique qu’après avoir pris sa retraite, en octobre 2020, elle est revenue sur le marché du travail en novembre 2020. L’appelante précise avoir fait le choix de travailler trois jours par semaine à son retour sur le marché du travail. Elle précise avoir travaillé comme infirmière au secteur des enquêtes épidémiologiques, de même qu’au secteur de la vaccination. L’appelante fait valoir que durant la période au cours de laquelle elle n’a pas été en mesure de travailler pour des raisons médicales, soit du 12 janvier 2022 au 3 avril 2022, elle aurait été disponible à le faire, à raison de trois jours par semaine.

[10] Concernant sa disponibilité à travailler, l’appelante explique qu’elle était disponible à le faire à compter du 4 avril 2022. Elle indique avoir signifié à son employeur, le CIUSSS de la Capitale-Nationale, qu’elle était disponible à travailler à compter de ce moment, à raison de trois jours par semaine, comme elle l’avait fait lors de son retour sur le marché du travail en novembre 2020. L’appelante précise avoir recommencé à travailler pour l’employeur le 13 avril 2022 et avoir cessé de travailler pour lui, le 21 décembre 2022. Elle explique être en communication régulière avec l’employeur pour lui fournir ses disponibilités. L’appelante précise que pour travailler dans les établissements du CIUSSS de la Capitale-Nationale, elle doit postuler auprès de lui, et non auprès de chacun des établissements qui y sont rattachés. Elle souligne que le territoire couvert par le CIUSSS de la Capitale-Nationale s’étend de La Malbaie à Portneuf. L’appelante précise ne pas avoir fait d’autres démarches pour trouver un autre emploi puisqu’elle savait qu’elle allait recommencer à travailler au CIUSSS de la Capitale-Nationale dès que sa santé le lui permettrait. Elle soutient être disponible à travailler et satisfaire les exigences de la Loi à cet égard, même si elle n’est pas disponible à temps plein. Elle souligne que nulle part sur le site du gouvernement (site de l’assurance-emploi) il n’est indiqué qu’une personne travaillant à temps partiel n’est pas admissible au bénéfice des prestations.

[11] Le 16 décembre 2022, l’appelante conteste les décisions en révision de la Commission. Ces décisions font l’objet du présent recours devant le Tribunal.

Questions en litige

[12] Je dois déterminer si l’appelante démontre que si elle n’avait pas été malade, elle aurait été disponible à travailler à compter du 10 janvier 2022Note de bas de page 11.

[13] Je dois également déterminer si l’appelante démontre qu’elle est disponible à travailler à compter du 4 avril 2022Note de bas de page 12.

Analyse

Disponibilité à travailler à compter du 10 janvier 2022 si l’appelante n’avait pas été malade

[14] La Loi prévoit qu’un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, incapable de travailler à la suite d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine prévue par règlement et aurait été sans cela disponible pour travaillerNote de bas de page 13.

[15] Autrement dit, un prestataire doit démontrer que s’il n’avait pas été malade, blessé ou mis en quarantaine, il aurait été disponible à travailler.

[16] Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il aurait été disponible pour travailler s’il n’avait pas été malade, blessé ou mis en quarantaine.

[17] La notion de « disponibilité » n’est pas définie dans la Loi. Des décisions rendues par la Cour d’appel fédérale (la Cour) ont établi des critères qui permettent d’établir la disponibilité d’une personne à travailler de même que son admissibilité ou non à recevoir des prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 14. Ces critères sont :

  • Le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert ;
  • La manifestation de ce désir par des efforts ou des démarches pour trouver cet emploi convenable ;
  • Le non-établissement ou l’absence de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travailNote de bas de page 15.

[18] Dans le cas d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine, le prestataire n’a toutefois pas à démontrer qu’il est vraiment disponible. Il doit montrer qu’il aurait été en mesure de satisfaire aux exigences liées aux trois critères énoncés par la Cour au sujet de la disponibilité à travailler, s’il n’avait pas été malade, blessé ou mis en quarantaine. Ce qui signifie que le prestataire doit démontrer que la seule chose qui l’empêchait de satisfaire aux exigences liées à chacun de ces éléments était, soit sa maladie, sa blessure ou sa mise en quarantaine.

[19] Dans le présent dossier, je considère que l’appelante démontre qu’à compter du 10 janvier 2022, date à laquelle la Commission lui a imposé une inadmissibilité aux prestations de maladie (prestations spéciales), elle était disponible à travailler trois jours ouvrables par semaineNote de bas de page 16.

[20] L’appelante fait valoir qu’elle aurait été disponible à travailler si elle n’avait pas été malade. Son témoignage et ses déclarations indiquent les éléments suivants :

  1. a) En octobre 2020, elle a pris sa retraite après 43 ans de service. Elle est revenue sur le marché du travail en novembre 2020Note de bas de page 17 ;
  2. b) À son retour sur le marché du travail, elle a fait le choix de travailler trois jours par semaine. Elle a donné trois jours de disponibilité par semaine à l’employeur, du dimanche au samedi, et celui-ci a établi son horaire de travail en fonction des disponibilités qu’elle lui a fournies. Elle souligne qu’elle est « malléable » quant à l’organisation de son horaire de travail par l’employeurNote de bas de page 18 ;
  3. c) Elle soutient satisfaire les critères selon lesquels elle était dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicales du 12 janvier 2022 au 3 avril 2022, à la suite de la chirurgie qu’elle a subie (prothèse totale de genou)Note de bas de page 19 ;
  4. d) Durant la période au cours de laquelle elle n’a pas été en mesure de travailler pour des raisons médicales, elle aurait été disponible à le faire, à raison de trois jours par semaineNote de bas de page 20 ;
  5. e) Elle a recommencé à travailler le 13 avril 2022 selon les conditions établies lors de son retour sur le marché du travail en novembre 2020 ;
  6. f) Elle fait valoir qu’elle satisfait toutes les exigences pour qu’elle puisse recevoir des prestations de maladie. Elle a accumulé suffisamment d’heures assurables au cours des 52 semaines ayant précédé sa demande de prestationsNote de bas de page 21;
  7. g) Elle dit ne pas comprendre pourquoi le fait d’avoir travaillé à temps partiel ne lui permet pas d’être admissible au bénéfice des prestations de maladie durant la période au cours de laquelle elle a été dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicalesNote de bas de page 22 ;
  8. h) Elle fait valoir qu’à aucun endroit sur le site du gouvernement (site de l’assurance-emploi) il est indiqué qu’une personne doit être disponible à travailler à temps plein pour être admissible au bénéfice des prestationsNote de bas de page 23.

[21] De son côté, la Commission fait valoir les éléments suivants :

  1. a) Les faits au dossier démontrent que si elle n’avait pas été malade, l’appelante n’aurait pas été disponible à travailler, car elle limite volontairement sa disponibilité à trois jours par semaineNote de bas de page 24 ;
  2. b) Bien que l’appelante satisfait les conditions permettant d’établir une demande de prestations maladie à compter du 9 janvier 2022, elle doit aussi démontrer qu’elle aurait été disponible pour travailler si elle n’avait pas été maladeNote de bas de page 25 ;
  3. c) La maladie n’est pas la seule raison pour laquelle l’appelante n’est pas disponible à travaillerNote de bas de page 26 ;
  4. d) Si l’appelante n’avait pas été malade, elle n’aurait pas été disponible à travailler, car elle aurait limité sa disponibilité à trois jours par semaine, comme elle le faisait avant et après sa période de maladieNote de bas de page 27 ;
  5. e) Puisqu’elle n’a pas démontré qu’elle aurait été disponible à travailler, si elle n’avait pas été malade, elle n’est donc pas admissible au bénéfice des prestations de maladie du 10 janvier 2022 au 1er avril 2022, en vertu de l’article 18(1)b) de la LoiNote de bas de page 28 ;
  6. f) La Cour a confirmé le principe que les prestations de maladie ne sont payables à un prestataire que lorsque sa propre maladie le rend incapable de travailler et durant une période où il était disponible pour travaillerNote de bas de page 29.

[22] Dans le présent dossier, je considère que si l’appelante n’avait pas été malade, elle aurait été disponible à travailler à raison de trois jours ouvrables par semaine à compter du 10 janvier 2022.

[23] L’appelante démontre qu’elle n’était pas dans une situation qui l’empêchait complètement d’être disponible à travailler, si elle n’avait pas été malade ou blessée, comme l’a conclu la Commission.

[24] Après avoir pris sa retraite, l’appelante a fait le choix de revenir sur le marché du travail, en novembre 2020, et de travailler trois jours par semaine.

[25] Je retiens du témoignage de l’appelante qu’elle donne trois jours de disponibilité par semaine à son employeur, du dimanche au samedi, et que celui-ci établit l’horaire de travail de cette dernière en fonction du nombre de jours de disponibilité qu’elle lui fournit. Je retiens également que l’appelante était ainsi disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine.

[26] Objectivement, à compter du 10 janvier 2022, soit la date à partir de laquelle la Commission a imposé à l’appelante une inadmissibilité au bénéfice des prestations de maladie (prestations spéciales), cette dernière serait demeurée disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine si elle n’avait pas été malade.

[27] Je considère qu’à compter de cette date, l’appelante a continué de démontrer son désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui aurait été offertNote de bas de page 30.

[28] Je considère toutefois que le choix de l’appelante de travailler trois jours par semaine ne démontre pas son désir de retourner sur le marché du travail pour chaque jour ouvrable de la semaine à compter du 10 janvier 2022.

[29] J’estime également que si l’appelante n’avait pas été malade, elle aurait manifesté son désir de retourner sur le marché du travail par des efforts ou des démarches pour se trouver un emploi représentant trois jours par semaineNote de bas de page 31. Elle aurait continué d’occuper son emploi.

[30] Je souligne que pour le versement de prestations de maladie (prestations spéciales), l’article 18(1)b) de la Loi ne demande pas à un prestataire d’être disponible pour obtenir un emploi convenable, mais plutôt d’être disponible à travailler s’il n’avait pas été malade. Je suis d’avis que dans un tel cas, la disponibilité d’un prestataire doit être examinée d’une manière hypothétique, car il est malade.

[31] Je souligne également que l’article 9.002 du Règlement, qui décrit les critères servant à déterminer ce qui constitue un emploi convenable, mentionne qu’il s’applique lorsqu’une question de disponibilité est soulevée sous l’article 18(1)a) de la Loi. L’article 18(1)b) n’est pas mentionné dans ce paragraphe.

[32] Je prends également en considération le fait que l’appelante a recommencé à travailler dès qu’elle en a eu la possibilité à la suite de sa période d’incapacité à le faire pour des raisons médicales.

[33] Je suis d’avis qu’en choisissant de travailler trois jours par semaine, l’appelante a établi des conditions personnellesNote de bas de page 32 relativement à sa disponibilité à travailler.

[34] Toutefois, je n’ai pas à déterminer si en raison de ce choix, les conditions personnelles que l’appelante a établies ont limité indûment ses chances de retourner sur le marché du travailNote de bas de page 33 puisqu’elle est retournée travailler chez l’employeur à compter du 13 avril 2022.

[35] Je ne retiens donc pas l’argument de la Commission voulant que l’appelante ne démontre pas qu’elle aurait été disponible à travailler, car elle limite volontairement sa disponibilité à trois jours par semaineNote de bas de page 34.

[36] En résumé, je considère qu’à compter du 10 janvier 2022, l’appelante démontre que si elle n’avait pas été malade, elle aurait été disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine.

[37] Par conséquent, l’imposition à l’appelante d’une inadmissibilité au bénéfice des prestations de maladie (prestations spéciales), par la Commission, n’est pas justifiée à compter de cette dateNote de bas de page 35.

[38] Puisque l’appelante démontre être disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine, son inadmissibilité au bénéfice des prestations ne doit s’appliquer que pour deux jours ouvrables par semaineNote de bas de page 36.

[39] L’appel est partiellement fondé sur la question portant sur la disponibilité à travailler de l’appelante à compter du 10 janvier 2022 si elle n’avait pas été malade.

Disponibilité à travailler à compter du 4 avril 2022

[40] Deux articles de la Loi indiquent qu’un prestataire doit démontrer qu’il est disponible à travaillerNote de bas de page 37. Les articles en question traitent tous deux de la disponibilité, mais il s’agit de deux inadmissibilités distinctesNote de bas de page 38.

[41] D’une part, un prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin, et incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 39.

[42] D’autre part, pour démontrer la disponibilité à travailler, la Commission peut exiger du prestataire qu’il prouve qu’il fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenableNote de bas de page 40.

[43] Pour déterminer si un prestataire est disponible à travailler, je dois considérer les critères spécifiques énoncés dans la Loi permettant d’établir si ses démarches pour trouver un emploi convenable constituent des démarches habituelles et raisonnablesNote de bas de page 41. Selon ces critères, les démarches doivent être : 1) soutenues, 2) orientées vers l’obtention d’un emploi convenable et 3) compatibles avec neuf activités spécifiques qui peuvent être utilisées pour aider les prestataires à obtenir un emploi convenableNote de bas de page 42. Ces activités sont, entre autres, les suivantes : évaluer les possibilités d’emploi, s’inscrire à des outils de recherche d’emploi, des banques d’emploi en ligne ou auprès de bureaux de placement, communiquer avec des employeurs éventuels et présenter des demandes d’emploiNote de bas de page 43.

[44] Les critères servant à déterminer ce qui constitue un emploi convenable sont les suivants : 1) L’état de santé et les capacités physiques du prestataire lui permettent de se rendre au lieu de travail et d’effectuer le travail, 2) L’horaire de travail n’est pas incompatible avec les obligations familiales du prestataire ou ses croyances religieuses, 3) La nature du travail n’est pas contraire aux convictions morales ou aux croyances religieuses du prestataireNote de bas de page 44.

[45] En plus des trois critères énoncés par la CourNote de bas de page 45, l’attitude et la conduite du prestataire doivent être prises en considération pour déterminer s’il est disponible à travaillerNote de bas de page 46.

[46] Je considère qu’à compter du 4 avril 2022, l’appelante satisfait les critères énoncés par la Cour pour démontrer sa disponibilité à travailler. Elle démontre que ses démarches pour trouver un emploi à compter de cette date étaient habituelles et raisonnables.

Question no 1 : Est-ce que l’appelante a manifesté le désir ou la volonté de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert?

[47] Je considère que l’appelante a démontré son désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui aurait été offert à compter du 4 avril 2022.

[48] L’appelante fait valoir qu’elle est disponible à travailler. Son témoignage et ses déclarations indiquent les éléments suivants :

  1. a) Après avoir pris sa retraite en octobre 2020, elle est revenue sur le marché du travail en novembre 2020, car son « besoin d’aider » était toujours présentNote de bas de page 47 ;
  2. b) Elle a indiqué à l’employeur pour lequel elle avait travaillé pendant plus de 40 ans qu’elle était disponible à travailler, trois jours par semaine, soit du dimanche au samedi. Elle n’a pas le choix des journées pendant lesquelles elle peut travailler. C’est l’employeur qui établit son horaire de travail en tenant compte de l’ancienneté des employés ;
  3. c) Depuis son retour sur le marché du travail, elle a travaillé successivement au secteur des enquêtes épidémiologiques et au secteur de la vaccination (travail auprès de la « Santé publique » et par le biais du site « Je contribue »)Note de bas de page 48 ;
  4. d) À la suite de la période pendant laquelle elle a été dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicales, soit du 12 janvier 2022 au 3 avril 2022, elle a informé l’employeur qu’elle pouvait recommencer à travailler selon une disponibilité de trois jours par semaine ;
  5. e) Elle a repris le travail le 13 avril 2022. Elle a continué de travailler pour lui jusqu’au 21 décembre 2022 et continue de lui signifier sa disponibilité à travailler.

[49] Je considère que le fait que l’appelante ait choisi de revenir sur le marché du travail en novembre 2020, après avoir pris sa retraite, démontre son désir de retourner sur le marché du travail pour occuper un emploi convenable depuis ce moment.

[50] Je n’ai aucune raison de remettre en doute le fait que l’appelante veut travailler et continuer d’être sur le marché du travail à compter du 4 avril 2022.

[51] Elle n’a pas cessé de manifester son désir ou sa volonté de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable lui aurait été offert à compter de cette date.

[52] Après avoir été dans l’incapacité de travailler pour des raisons de santé, du 10 janvier 2022 au 3 avril 2022, l’appelante a repris son travail au CIUSSS de la Capitale-Nationale à compter du 13 avril 2022. Elle a travaillé pour cet employeur jusqu’au 21 décembre 2022 et continue de lui signifier sa disponibilité pour le faire.

Question no 2 : Est-ce que l’appelante a exprimé ce désir par des efforts ou des démarches pour trouver cet emploi convenable?

[53] Je considère que l’appelante a manifesté son désir de retourner sur le marché du travail par des efforts ou des démarches pour trouver un emploi convenable à compter du 4 avril 2022.

[54] Relativement à ses recherches d’emploi, le témoignage et les déclarations de l’appelante indiquent les éléments suivants :

  1. a) Pour travailler dans des établissements relevant du CIUSSS de la Capitale-Nationale, elle doit postuler auprès de cet employeur et non auprès des établissements qui y sont rattachés (ex. : établissements hospitaliers, groupes de médecine familiale – GMF, centres locaux de services communautaires – CLSC). Elle souligne que le CIUSSS de la Capitale-Nationale, c’est « tellement gros » comme employeur qu’elle devrait être en mesure de continuer de travailler pour lui. Le territoire desservi par cet employeur s’étend de La Malbaie à Portneuf ;
  2. b) Chaque mois, elle reçoit un courriel de l’employeur (ex. : formulaire de disponibilités ponctuelles pour les sites de vaccination) lui indiquant les sites de vaccination où il lui est possible de travailler et les horaires proposés. Elle doit remplir ce formulaire pour donner ses disponibilités. Les quarts de travail sont attribués selon l’ancienneté des employésNote de bas de page 49 ;
  3. c) Après avoir signifié ses disponibilités à travailler, l’employeur lui envoie un courriel pour confirmer les quarts de travail qui lui ont été attribués (ex. : courriel de l’employeur adressé à l’appelante, en date du 3 novembre 2022, lui confirmant ses quarts de travail du 8 au 21 novembre 2022)Note de bas de page 50 ;
  4. d) L’employeur lui envoie également des courriels pour lui demander de signifier son intérêt pour l’ajout de quarts de travail ou pour combler des besoins de « dernière minute »Note de bas de page 51 ;
  5. e) À la suite de la période pendant laquelle elle a été dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicales, elle a avisé le CIUSSS de la Capitale-Nationale qu’elle était en mesure de recommencer à travailler pour lui à compter du 4 avril 2022 à raison de trois jours par semaine ;
  6. f) Elle n’a pas fait d’autres démarches pour trouver un autre emploi puisqu’elle a continué de travailler pour le CIUSSS de la Capitale-Nationale dès qu’elle a été en mesure de le faireNote de bas de page 52 ;
  7. g) Bien que le résumé des déclarations qu’elle a faites à la Commission les 4 mai 2022 et 18 novembre 2022, indique qu’elle avait décidé de travailler seulement deux jours par semaine, entre autres pour la période du 13 avril 2022 au 7 mai 2022Note de bas de page 53, elle n’a pas fait ce choix ;
  8. h) Lorsqu’elle a signifié à l’employeur qu’elle pouvait recommencer à travailler à compter du 4 avril 2022, c’était bien pour le faire à raison de trois jours par semaine à compter de ce moment ;
  9. i) Elle n’a pas été en mesure de recommencer à travailler avant le 13 avril 2022 puisque l’horaire des employés était déjà fait lorsqu’elle a indiqué à l’employeur qu’elle pouvait reprendre le travail dès le 4 avril 2022Note de bas de page 54 ;
  10. j) C’est l’employeur qui a décidé de lui donner deux jours de travail par semaine, à compter du 13 avril 2022, et ce, pendant une période de quatre semaines ;
  11. k) Elle a recommencé à travailler trois jours par semaine à compter de la semaine ayant commencé le 8 mai 2022 et a cessé de travailler le 21 décembre 2022 ;
  12. l) Elle a continué de donner ses disponibilités à l’employeur jusqu’à la fin de mars 2023, étant donné qu’elle devait subir une autre chirurgie en avril 2023Note de bas de page 55 ;
  13. m) Son emploi à temps partiel lui convient et elle ne souhaite pas travailler à temps pleinNote de bas de page 56 ;
  14. n) L’appelante dit ne pas comprendre que la Commission demande qu’une personne soit disponible à temps plein pour démontrer sa disponibilité à travailler ;
  15. o) Le site du gouvernement (site de l’assurance-emploi) ne précise pas qu’une personne doit être disponible à travailler à temps plein pour être admissible au bénéfice des prestationsNote de bas de page 57.

[55] Dans le cas présent, j’estime que l’appelante a effectué des « démarches habituelles et raisonnables » dans la « recherche d’un emploi convenable », soit des démarches soutenues, orientées vers l’obtention d’un emploi convenable et compatible avec neuf activités spécifiques pouvant être utilisées pour aider les prestataires à obtenir un emploi convenableNote de bas de page 58. L’appelante a utilisé des moyens appropriés pour être en mesure de travailler (ex. : évaluer les possibilités d’emploi, communiquer avec son employeur pour lui fournir ses disponibilités)Note de bas de page 59.

[56] Pour évaluer la disponibilité à travailler de l’appelante et les démarches qu’elle a effectuées dans sa recherche d’un emploi convenable, je retiens que cette dernière démontre que depuis son retour sur le marché du travail en novembre 2020, elle occupe un emploi à temps partiel à raison de trois jours par semaine. Je considère qu’il s’agit de son emploi habituel et que c’est un emploi convenable dans son cas.

[57] Bien que l’article 9.002(1) du Règlement décrive les critères servant à déterminer ce qui constitue un emploi convenableNote de bas de page 60, il ne définit pas autrement ou avec plus de précisions l’expression « emploi convenable ».

[58] Je précise qu’en plus de ces critèresNote de bas de page 61, la Loi énonce aussi des caractéristiques décrivant ce qui constitue un emploi « non convenable »Note de bas de page 62. Je considère que les critères énoncés dans le RèglementNote de bas de page 63 et ces caractéristiquesNote de bas de page 64 doivent être examinés en concomitance pour être en mesure de déterminer ce qui constitue un emploi convenable, en fonction de la situation d’un prestataire.

[59] Ces caractéristiques indiquent entre autres qu’un emploi non convenable est un emploi d’un genre différent de celui exercé par un prestataire dans le cadre de son occupation ordinaireNote de bas de page 65. L’article 6(4)c) de la Loi précise aussi que cet emploi d’un genre différent, ou non convenable, comporte des conditions moins favorables ou un salaire inférieur à celui qu’un prestataire pouvait raisonnablement s’attendre d’obtenir, en tenant compte des conditions et du salaire dont il aurait bénéficié s’il avait continué d’occuper son emploi précédent. L’article 6(5) de la Loi élargit le type d’emplois pouvant être convenables puisqu’après un délai raisonnable, les dispositions prévues à l’article 6(4)c) de la Loi cessent de s’appliquer.

[60] En me basant sur les caractéristiques énoncées dans la Loi pour décrire ce qu’est un emploi non convenableNote de bas de page 66, je suis d’avis qu’un emploi convenable représente entre autres, un emploi du même genre (ex. : nature de l’emploi, rémunération et conditions d’emploi) que celui exercé par un prestataire dans le cadre de son occupation ordinaire ou habituelleNote de bas de page 67.

[61] Dans ce contexte, j’estime que le fait que l’appelante occupe un emploi à temps partiel trois jours par semaine depuis son retour sur le marché du travail en novembre 2020 représente le genre d’emploi qu’elle exerce dans le cadre de son occupation ordinaire puisqu’il s’agit de son emploi habituel.

[62] La Cour nous informe aussi que la notion d’emploi convenable est en partie définie par rapport à la situation personnelle du prestataireNote de bas de page 68.

[63] Pour évaluer la disponibilité à travailler de l’appelante, je tiens ainsi compte des caractéristiques propres à son cas, selon lesquelles l’emploi qu’elle occupe est à temps partiel depuis plus de deux ans.

[64] Je considère que malgré le fait que l’appelante occupe un emploi à temps partiel, elle démontre qu’elle était disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine à compter du 4 avril 2022.

[65] J’estime également que depuis que l’appelante a cessé de travailler en décembre 2022, elle démontre avoir continué d’être disponible à travailler et à la recherche d’un emploi en demeurant en contact avec son employeur, le CIUSSS de la Capitale- Nationale.

[66] Je suis d’avis qu’en fournissant sa disponibilité à travailler au CIUSSS de la Capitale-Nationale, elle a la possibilité de travailler dans plusieurs établissements hospitaliers relevant de cet employeur.

[67] Je ne retiens pas les arguments de la Commission selon lesquels l’appelante ne démontre pas sa disponibilité à travailler parce qu’elle occupe un emploi à temps partiel et qu’elle ne cherche pas à travailler à temps plein ou davantage d’heures, soit auprès de son employeur ou auprès d’autres employeursNote de bas de page 69.

[68] Je ne retiens pas non plus l’argument de la Commission voulant qu’un prestataire soit obligé d’accepter, dès le début de sa période de prestations, toutes les heures de travail qui lui sont offertes, y compris celles d’un travail à temps pleinNote de bas de page 70.

[69] Je souligne que la Loi n’exige pas spécifiquement qu’un prestataire soit disponible pour un travail à temps plein pour démontrer sa disponibilité à travailler.

[70] La Cour nous informe que la disponibilité d’une personne s’apprécie par jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel elle peut prouver qu’elle était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenableNote de bas de page 71.

[71] Je souligne que la Loi prévoit également que lorsqu’un prestataire est inadmissible pour certains jours ouvrables dans une semaine, le taux hebdomadaire de prestations est réduit proportionnellementNote de bas de page 72.

[72] Je considère que l’appelante démontre sa disponibilité à travailler, trois jours ouvrables par semaine, pour occuper un emploi convenable à compter du 4 avril 2022. À compter de cette date, elle s’est acquittée de sa responsabilité de chercher activement un emploi convenable afin de pouvoir obtenir des prestations d’assurance-emploi.

Question no 3 : Est-ce que l’appelante a établi des conditions personnelles ayant pu limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail?

[73] J’estime que l’appelante n’a pas établi des « conditions personnelles » qui ont pour effet de limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail pour occuper un emploi convenable à compter du 4 avril 2022.

[74] Je considère que lorsque l’appelante est revenue sur le marché du travail en novembre 2020, elle a établi des conditions personnelles.

[75] Elle déclare avoir fait le choix personnel de travailler à temps partiel suivant son retour sur le marché du travailNote de bas de page 73.

[76] Elle indique aussi que depuis le 4 avril 2022, elle est disponible et capable de travailler selon les mêmes conditions qu’avant de cesser de travailler pour des raisons médicalesNote de bas de page 74.

[77] J’estime toutefois que les conditions établies par l’appelante n’ont pas eu pour effet de limiter indûment ses chances de retour sur le marché du travail.

[78] Je ne retiens pas l’argument de la Commission selon lequel l’appelante réduit ses chances de travailler et se maintient volontairement en situation de chômage en raison de ses restrictions, étant donné qu’elle limite le nombre de jours pour lesquels elle est disposée à travailler et qu’elle n’accepte pas les heures de travail à temps pleinNote de bas de page 75.

[79] J’estime que l’emploi à temps partiel occupé par l’appelante depuis novembre 2020, à la suite de son retour sur le marché du travail, représente son emploi habituel et qu’il s’agit d’un emploi convenable dans son cas

[80] De plus, je précise que la Loi n’exige pas d’un prestataire qu’il travaille à temps plein pour démontrer sa disponibilité à travailler.

[81] Je considère également que le fait que l’appelante demeure en contact avec son employeur depuis qu’elle a cessé de travailler en décembre 2022 en continuant de lui fournir ses disponibilités à travailler, démontre également qu’elle est toujours prête et disposée à le faire, comme elle le fait depuis qu’elle est revenue sur le marché du travail.

[82] Je considère qu’à compter du 4 avril 2022, l’appelante n’a pas imposé des conditions personnelles ayant eu pour effet de limiter de manière excessive ses chances de réintégrer le marché du travail pour occuper un emploi convenable.

Conclusion

[83] Je conclus que l’appelante démontre que si elle n’avait pas été malade, elle aurait été disponible à travailler trois jours ouvrables par semaine à compter du 10 janvier 2022.

[84] Son admissibilité au bénéfice des prestations de maladie (prestations spéciales) doit donc être établie à raison de trois jours ouvrables par semaine, à compter de cette date, et ce, jusqu’à la fin de la période au cours de laquelle elle a été dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicales, soit jusqu’au 3 avril 2022.

[85] Je conclus que l’appelante démontre sa disponibilité à travailler au sens de la Loi à compter du 4 avril 2022, à raison de trois jours ouvrables par semaine.

[86] Elle est donc admissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi trois jours ouvrables par semaine à compter de cette date.

[87] Par conséquent, l’appel est accueilli en partie sur les deux questions en litige portées à l’attention du Tribunal.

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