Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : LD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1206

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : L. D.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission
de l’assurance-emploi du Canada (548418) datée du
14 novembre 2022 (communiquée par Service
Canada)

Membre du Tribunal : Bret Edwards
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 6 juin 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 8 juin 2023
Numéro de dossier : GE-22-4105

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Je ne suis pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite (autrement dit, parce qu’elle a fait quelque chose qui lui a fait perdre son emploi). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.Note de bas de page 1

Aperçu

[3] L’appelante a perdu son emploi. L’employeur de l’appelante (une compagnie aérienne) a déclaré qu’elle avait été congédiée parce qu’elle n’avait pas respecté leur politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 (elle devait se faire vacciner).

[4] Même si l’appelante ne conteste pas ce qui s’est passé, elle affirme que son employeur a agi injustement en choisissant d’appliquer de façon sélective sa politique et qu’il l’a traitée injustement avant son congédiement. Elle ajoute que la Commission n’a pas évalué sa demande de prestations de façon équitable.

[5] La Commission a accepté la raison du congédiement fournie par l’employeur. Elle a décidé que l’appelante avait perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, la Commission a décidé que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question en litige

[6] L’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

Analyse

[7] Pour répondre à la question de savoir si l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite, je dois décider de deux choses. D’abord, je dois décider pour quelle raison l’appelante a perdu son emploi. Ensuite, je dois décider si la loi considère ce motif comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle perdu son emploi?

[8] Je conclus que l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur.

[9] L’appelante et la Commission ne sont pas entièrement d’accord sur la raison pour laquelle l’appelante a perdu son emploi. La Commission affirme que la raison fournie par l’employeur est la véritable raison du congédiement. L’employeur a dit à la Commission que l’appelante avait perdu son emploi parce qu’elle n’avait pas respecté sa politique de vaccination. En tant que compagnie aérienne, l’employeur était obligé de mettre en place cette politique au titre de l’exigence de vaccination fédérale.Note de bas de page 2

[10] L’appelante n’est pas tout à fait d’accord. Elle convient qu’elle ne s’est pas fait vacciner. Elle a déclaré toutefois que sa lettre de congédiement indique seulement qu’elle a été congédiée parce qu’elle n’a pas respecté l’exigence de vaccination fédérale. La lettre ne mentionne pas la politique de vaccination de son employeur.

[11] Je remarque que la lettre de congédiement de l’appelante, datée du 10 janvier 2022, indique qu’elle a été congédiée parce qu’elle [traduction] « n’a pas respecté l’exigence de vaccination fédérale ». Cependant, je remarque qu’elle indique également que ses sept semaines de congé sans solde (qui ont eu lieu avant son congédiement) lui ont donné [traduction] « l’occasion de se conformer à l’exigence et à la politique de vaccination contre la COVID-19 de Porter ».Note de bas de page 3

[12] À la lumière de ces éléments de preuve, je juge que la politique de vaccination obligatoire de l’employeur découle directement de l’exigence de vaccination fédérale. C’est d’ailleurs ce que l’employeur a dit à la Commission, comme je l’ai mentionné plus haut. À mon avis, cela explique également pourquoi sa lettre de licenciement mentionne à la fois la politique et l’exigence fédérale, car c’est l’exigence qui a d’abord fait en sorte que l’on mette en œuvre la politique.

[13] Autrement dit, j’estime que le libellé exact de la lettre de licenciement de l’appelante ne change rien au fait qu’il existe des éléments de preuve démontrant qu’elle a été congédiée parce qu’elle n’a pas respecté la politique de son employeur (et, par extension, l’exigence fédérale).

La raison du congédiement de l’appelante est-elle une inconduite au sens de la loi?

[14] La Loi sur l’assurance-emploi ne précise pas ce qu’on entend par inconduite. Cependant, la jurisprudence (décisions des cours et tribunaux) nous montre comment décider si le congédiement de l’appelante constitue une inconduite au sens de la Loi. La jurisprudence énonce le critère juridique de l’inconduite, c’est-à-dire les questions et les critères à prendre en considération lors de l’examen de la question de l’inconduite.

[15] Selon la jurisprudence, pour être considérée comme une inconduite, la conduite doit être délibérée. Cela signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelle.Note de bas de page 4 L’inconduite comprend également une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibérée.Note de bas de page 5 Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal).Note de bas de page 6

[16] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit congédiée pour cette raison.Note de bas de page 7

[17] La Commission doit prouver que l’appelante a été congédiée en raison d’une inconduite. La Commission doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a été congédiée de son emploi en raison de son inconduite.Note de bas de page 8

[18] J’ai seulement le pouvoir de trancher des questions qui sont prévues dans la Loi. Je ne peux rendre aucune décision quant à savoir si l’appelante a d’autres options au titre d’autres lois. Il ne m’appartient pas de décider si l’appelante a été congédiée à tort ou si l’employeur aurait dû lui offrir des mesures d’adaptation.Note de bas de page 9 Je ne peux examiner qu’une seule chose : la question de savoir si ce que l’appelante a fait ou omis de faire est une inconduite au sens de la Loi.

[19] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite parce que l’appelante savait que son employeur avait une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 et qu’elle pouvait être congédiée si elle ne la respectait pas. L’appelante a quand même choisi de ne pas la suivre.Note de bas de page 10

[20] L’appelante affirme qu’il n’y a pas eu d’inconduite parce que son employeur n’a pas appliqué sa politique équitablement à tous les employés et n’a pas répondu à ses préoccupations au sujet du vaccin contre la COVID-19 avant son congédiement. Elle ajoute que la Commission n’a pas évalué sa demande de façon équitable.Note de bas de page 11

[21] L’employeur a déclaré ce qui suit à la CommissionNote de bas de page 12 :

  • L’exigence de vaccination fédérale exigeait que tous les employés travaillant dans l’industrie de l’aviation (comme l’appelante) soient vaccinés.
  • L’employeur a congédié l’appelante parce qu’elle n’a pas respecté l’exigence de vaccination ni sa propre politique.
  • La politique de l’employeur prévoyait des exemptions religieuses et médicales, mais l’appelante n’en a pas fait la demande.
  • L’appelante savait qu’elle pouvait être congédiée si elle ne se faisait pas vacciner et ne bénéficiait pas d’exemption.
  • L’employeur a d’abord avisé l’appelante en octobre qu’elle devait se faire vacciner pour continuer à travailler et que si elle ne le faisait pas, elle serait mise en congé à compter du 14 novembre 2021.
  • Il a ensuite placé l’appelante en congé sans solde pour lui donner le temps de se faire vacciner.
  • Cependant, l’appelante ne s’est pas fait vacciner pendant son congé sans solde. Elle a donc été congédiée le 10 janvier 2022.

[22] La politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de l’employeur de l’appelante prévoit ce qui suit :

  • Elle s’applique à tous les employés.Note de bas de page 13
  • Tous les employés doivent être entièrement vaccinés et fournir une preuve de vaccination.Note de bas de page 14
  • Les exemptions médicales et religieuses seront examinées sur une base individuelle.Note de bas de page 15
  • Les employés qui ne respectent pas la politique peuvent faire l’objet de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement.Note de bas de page 16

[23] L’employeur de l’appelante a également envoyé à la Commission les éléments de preuve suivants :

  • Un courriel à l’appelante, daté du 19 octobre 2021. Le courriel indique qu’elle doit fournir une preuve de sa première dose de vaccin contre la COVID-19 au plus tard le 27 octobre 2021 pour s’assurer d’être en règle avec sa politique de vaccination. Après une période de transition de deux semaines, les employés qui n’ont pas fourni de preuve d’au moins leur première dose seront placés en congé sans solde à compter du 15 novembre 2021. Ensuite, les employés qui ne sont toujours pas vaccinés peuvent faire l’objet de mesures disciplinaires supplémentaires, pouvant aller jusqu’au congédiement.Note de bas de page 17
  • Un courriel à l’appelante, daté du 9 novembre 2021. Le courriel indique qu’on espère qu’elle obtiendra sa première dose de vaccin et qu’elle enverra une preuve au plus tard le 14 novembre 2021 pour éviter d’être mise en congé sans solde.Note de bas de page 18
  • Une lettre à l’appelante, datée du 12 novembre 2021, indique qu’elle n’a pas fourni de preuve de sa première dose du vaccin. Par conséquent, elle sera mise en congé sans solde à compter du 15 novembre 2021 pour une période de sept semaines (prenant fin le 3 janvier 2022) puisqu’elle n’a pas respecté la politique et l’exigence fédérale.Note de bas de page 19
  • Lettre de congédiement, datée du 10 janvier 2022, indique qu’elle a été placée en congé le 15 novembre 2021 et qu’on lui avait rappelé le 16 décembre 2021 qu’elle devait suivre la politique et l’exigence fédérale en matière de vaccination. Cependant, comme elle ne l’a pas fait, on mettait fin immédiatement à son emploi.Note de bas de page 20

[24] L’appelante a déclaré ce qui suitNote de bas de page 21 :

  • Elle était au courant de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur.
  • Elle n’a pas demandé d’exemption médicale ou religieuse. Elle avait certaines préoccupations d’ordre médical au sujet de la vaccination, mais elle n’a finalement pas demandé d’exemption médicale parce que les options étaient limitées.
  • Elle ne s’est pas fait vacciner avant la date limite prévue par la politique de son employeur.
  • Elle savait qu’elle pouvait être congédiée si elle ne respectait pas la politique de son employeur.
  • Cependant, on ne lui a jamais dit qu’elle serait congédiée et la politique ne disait pas cela.
  • Elle espérait aussi qu’il y aurait une autre option pour qu’elle puisse garder son emploi (comme rester en congé sans solde) au lieu d’être congédiée.
  • Son employeur n’a pas appliqué sa politique équitablement à tous les employés. On l’a congédiée, mais on n’a pas congédié d’autres personnes qui avaient également été placées en congé sans solde pour la même raison.
  • Elle a dit à son employeur qu’elle ne refusait pas formellement la vaccination; elle avait simplement quelques préoccupations et voulait d’abord que l’employeur réponde à ses questions. Elle lui a envoyé des questions sur le vaccin, mais on n’a jamais répondu.
  • Son environnement de travail est devenu très stressant. Elle a remarqué qu’il lui manquait des heures de travail sur sa paye, et son employeur n’a pas corrigé le calcul des heures avant de la congédier. Elle a depuis déposé un grief à ce sujet auprès d’un autre organisme administratif.
  • Comme elle ne travaillait pas auprès du grand public, elle ne constituait spas un risque pour les gens en tant que personne non vaccinée.
  • Certains employés non vaccinés sont retournés travailler après la levée du mandat fédéral de vaccination en juin 2022, même si son employeur avait toujours une politique de vaccination.
  • La Commission n’a pas évalué sa demande équitablement. Les agents l’ont appelée en dehors des heures de travail (la fin de semaine) et ont inclus des renseignements erronés à son sujet dans leurs déclarations après avoir parlé à son employeur. L’agent qui a rendu la décision initiale lui refusant des prestations a également pris cette décision sans avoir parlé à son employeur.

[25] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes.

[26] Je conclus que l’appelante a posé les gestes qui ont mené à son congédiement, car elle savait que son employeur avait une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 et ce qu’elle devait faire pour la respecter.

[27] J’estime également que les gestes de l’appelante étaient intentionnels, car elle a pris la décision consciente de ne pas suivre la politique de son employeur.

[28] Il y a des éléments de preuve démontrant que l’appelante connaissait la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle était au courant de la politique, comme je l’ai mentionné plus haut.

[29] Il y a aussi des éléments de preuve montrant que l’appelante a choisi de ne pas suivre la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle ne s’était pas fait vacciner et qu’elle n’avait pas obtenu une exemption approuvée comme l’exigeait la politique.

[30] Je reconnais que l’appelante estime que son employeur n’a pas appliqué sa politique équitablement à tous les employés étant donné qu’il a choisi de la congédier, mais il n’a pas congédié d’autres employés aussi en congé sans solde pour avoir enfreint la politique.

[31] Cependant, j’estime que cet argument n’est pas pertinent en l’espèce. En effet, la Loi et la Cour précisent qu’en analysant l’inconduite, je dois me concentrer sur la conduite de l’appelante (non sur la conduite de l’employeur) qui a mené à son congédiement. Il n’y a pas non plus de preuve démontrant que l’employeur a enfreint sa propre politique en congédiant l’appelante; sa politique indique que les employés qui refusent de se faire vacciner peuvent perdre leur emploi.

[32] Autrement dit, je ne peux pas examiner pourquoi l’employeur a choisi de congédier l’appelante et non les autres employés dans la même situation. Il s’agit d’une question (la conduite de l’employeur) qui va bien au-delà de ce que je peux examiner ici. Si l’appelante veut faire valoir cet argument, elle doit le faire auprès d’une autre instance.

[33] Je reconnais également que l’appelante estime que son employeur a agi injustement en lui demandant de se faire vacciner même si elle ne représentait pas un risque pour la sécurité. De plus, il n’a pas répondu à ses questions au sujet du vaccin et n’a pas corrigé le calcul de ses heures de travail.

[34] Malheureusement, j’estime que cet argument n’est pas pertinent dans la présente affaire. En effet, je dois tenir compte de la conduite de l’appelante qui a mené à son congédiement lors de l’analyse de son inconduite. Par conséquent, je ne peux pas décider si son employeur a agi injustement pour les raisons qu’elle avance. Si l’appelante veut poursuivre cet argument, elle doit le faire auprès d’une autre instance. Elle dit avoir déposé un grief au sujet de la question de la paye auprès d’un autre organisme administratif. Il semble qu’elle ait amorcé ce processus.

[35] Je reconnais que l’appelante affirme également que certains employés non vaccinés sont retournés au travail après la levée de l’exigence de vaccination fédérale en juin 2022, même si la politique de l’employeur était toujours en place.

[36] Mais encore une fois, j’estime que cet argument n’est pas pertinent en l’espèce. En effet, je dois examiner les gestes posés par l’appelante avant son congédiement lors de l’analyse de son inconduite, comme je l’ai mentionné plus haut. Dans la présente affaire, elle fait référence à des événements qui se sont produits plusieurs mois après son congédiement (en novembre 2021). Par conséquent, si l’appelante veut faire valoir cet argument, elle doit le faire auprès d’une autre instance.

[37] Je reconnais également que l’appelante est d’avis que la Commission n’a pas évalué sa demande de façon équitable pour les raisons qu’elle a présentées.

[38] Comme je l’ai mentionné plus haut, je dois me concentrer uniquement sur l’application du critère juridique relatif à l’inconduite (fondé sur les décisions des tribunaux), ce qui signifie que j’examine les actions de l’appelante qui ont mené à son congédiement. Cela signifie que je peux examiner si la Commission a commis une erreur en appliquant ce même critère juridique lorsqu’elle a évalué la demande de prestations de l’appelante. Mais cela signifie aussi que je ne peux pas examiner si la Commission a traité lappelante injustement d’une autre façon – qui n’a aucun rapport avec le critère juridique – lorsqu’elle a évalué sa demande.

[39] Je comprends que l’appelante est d’avis que la Commission n’a pas évalué sa demande de façon équitable. Cependant, j’estime qu’elle n’a pas démontré que la Commission a commis une erreur en appliquant le critère juridique relatif à l’inconduite. Je tire cette conclusion pour deux raisons.

[40] Premièrement, l’appelante affirme que la Commission s’est fondée sur des renseignements erronés fournis par son employeur au sujet des raisons pour lesquelles elle ne s’est pas fait vacciner.Note de bas de page 22 Je la crois, car je la trouve crédible et je n’ai aucune raison de douter de ce qu’elle dit. Cependant, l’appelante a également confirmé qu’elle a choisi de ne pas se faire vacciner, comme je l’ai mentionné plus haut. Le critère juridique porte précisément sur ce choix, il ne porte pas sur les raisons qu’elle avait de ne pas se faire vacciner.

[41] Autrement dit, même si j’admets que le dossier de la Commission ne démontre pas avec exactitude pourquoi l’appelante ne s’est pas fait vacciner, je considère que cela ne change rien au fait qu’elle a fait un choix personnel de ne pas se faire vacciner, ce qui démontre que sa décision de ne pas suivre la politique de son employeur était intentionnelle. Par conséquent, je conclus que la Commission n’a commis aucune erreur dans la façon dont elle a appliqué le critère juridique en l’espèce.

[42] Deuxièmement, j’estime que les autres raisons pour lesquelles la Commission n’aurait pas évalué sa demande de façon équitable, selon l’appelante, ne se rapportent pas à la façon dont elle a appliqué le critère juridique de l’inconduite. À mon avis, ces motifs (le fait que la Commission l’appelait la fin de semaine et a rendu une décision initiale sans avoir parlé à l’employeur) ne se rapportent à aucun aspect de l’analyse de la preuve par la Commission. Ces motifs se rapportent plutôt à d’autres questions liées davantage au service à la clientèle et à la transparence, ce qui malheureusement va bien au-delà de ce que je peux examiner ici.

[43] De plus, je remarque que les dossiers de la Commission indiquent qu’elle a parlé à l’employeur de l’appelante le 22 août 2022Note de bas de page 23, soit un jour avant qu’elle rende sa décision initiale sur sa demande (le 23 août 2022).Note de bas de page 24 Par conséquent, je conclus que la Commission a bel et bien parlé à l’employeur de l’appelante avant de rendre sa décision initiale, contrairement à ce qu’a dit l’appelante.

[44] Je conclus donc que l’appelante n’a pas démontré que la Commission a commis une erreur en appliquant le critère juridique relatif à l’inconduite. Cependant, je comprends qu’elle estime que la Commission ne l’a pas traitée équitablement lorsqu’elle a évalué sa demande. Elle peut toujours communiquer directement avec la Commission pour discuter davantage de ces préoccupations.

[45] Je juge également que l’appelante savait ou aurait dû savoir que le non-respect de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur pouvait entraîner son congédiement.

[46] Il y a des éléments de preuve montrant que l’appelante savait qu’elle pouvait être congédiée si elle ne respectait pas la politique de son employeur. Elle a dit qu’elle savait que cela pouvait arriver.

[47] Il y a aussi des éléments de preuve montrant que l’employeur de l’appelante lui a dit qu’elle pouvait être congédiée si elle ne se faisait pas vacciner avant la date limite prévue par la politique. L’employeur lui a envoyé des courriels le 19 octobre 2021 et le 9 novembre 2021 et une lettre le 12 novembre 2021 à ce sujet.

[48] Je reconnais également que l’appelante a affirmé qu’elle ne savait pas qu’elle serait congédiée si elle ne respectait pas la politique parce que cette dernière indiquait seulement qu’elle pouvait l’être dans une telle situation, et non que c’était à coup sûr ce qui se produirait. Personne ne lui a dit qu’elle le serait.

[49] Je remarque que l’appelante a raison de dire que la politique de son employeur ne précise pas qu’elle serait congédiée si elle ne respectait pas la politique. Cependant, j’estime que la jurisprudence sur l’inconduite n’a pas souligné l’obligation de satisfaire précisément à ce critère. Comme je l’ai mentionné plus haut, la jurisprudence indique plutôt qu’il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle soit congédiée en raison de sa conduite. J’estime que la preuve démontre qu’il s’agissait de la situation de l’appelante au moment où elle a été congédiée.

[50] Autrement dit, je conclus que l’appelante savait ou aurait dû savoir qu’elle pouvait être congédiée si elle ne respectait pas la politique de son employeur. La politique de son employeur prévoyait qu’elle pouvait être congédiée pour cette raison et elle en était consciente, ce qui démontre, selon moi, qu’elle aurait dû savoir au moins qu’il y avait une réelle possibilité qu’elle puisse effectivement être congédiée.

[51] Je reconnais également que l’appelante a dit qu’elle espérait pouvoir conserver son emploi d’une autre façon (comme rester en congé sans solde) au lieu d’être congédiée.

[52] Cependant, j’estime que cela ne veut pas dire que l’appelante ne pouvait pas savoir qu’elle pouvait être congédiée pour ne pas avoir respecté la politique de son employeur. Autrement dit, il lui était tout à fait possible de croire les deux choses (espérer pouvoir conserver son emploi et savoir qu’elle pouvait être congédiée) en même temps, d’autant plus qu’elle connaissait la politique de son employeur et ce qui pouvait arriver aux employés qui ne la respectaient pas.

[53] Je conclus donc que la preuve montre que l’appelante savait ou aurait dû savoir qu’elle pouvait être congédiée si elle ne respectait pas la politique.

[54] Par conséquent, je conclus que l’appelante est coupable d’inconduite au sens de la loi puisque c’est sa conduite qui a mené à son congédiement (elle n’a pas respecté la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur). De plus, sa conduite était intentionnelle et elle savait ou aurait dû savoir que ses gestes allaient mener à son congédiement.

Alors, l’appelante a-t-elle perdu son emploi en raison d’une inconduite?

[55] À la lumière de mes conclusions précédentes, je conclus que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[56] En effet, les gestes posés par l’appelante ont mené à son congédiement. Elle a agi délibérément. Elle savait ou aurait dû savoir que ne pas se faire vacciner (comme l’exigeait la politique de son employeur) était susceptible de la faire congédier.

[57] L’appelante a affirmé avoir droit à l’assurance-emploi parce qu’elle y a cotisé pendant de nombreuses années.Note de bas de page 25

[58] Je comprends l’argument de l’appelante et je suis sensible à sa situation. Cependant, l’assurance-emploi n’est pas une prestation automatique. Comme pour tout autre régime d’assurance, il faut remplir certaines conditions pour recevoir des prestations. En l’espèce, l’appelante ne répond pas à ces exigences puisqu’elle a été congédiée de son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[59] La Commission a prouvé que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Pour cette raison, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[60] Par conséquent, l’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.