Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1223

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : R. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada datée du 9 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Glenn Betteridge
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 10 août 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 31 août 2023
Numéro de dossier : GE-23-1265

Sur cette page

Décision

[1] R. S. est l’appelant dans le présent appel. Je rejette son appel.

[2] Il n’a pas suivi la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur, alors celui-ci l’a suspendu et congédié.

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé qu’il a été suspendu puis congédié pour une raison que la Loi sur l’assurance-emploi considère comme une inconduite. Autrement dit, il a fait quelque chose qui a entraîné sa suspension et son congédiement.

[4] Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

Aperçu

[5] L’appelant a perdu son emploi de pilote pour une compagnie aérienne canadienne (l’employeur). Son employeur l’a suspendu du 2 novembre au 30 novembre 2021. Il a ensuite mis fin à son emploi le 1er décembre 2021.

[6] Son employeur a dit qu’il l’avait suspendu et congédié parce qu’il ne s’était pas conformé à sa politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19.

[7] La Commission a accepté la raison de la suspension et du congédiement fournie par l’employeur. Elle a décidé que l’appelant avait été suspendu puis congédié pour une raison qui est considérée comme une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 2. La Commission ne lui a donc pas versé de prestations régulières d’assurance-emploi.

[8] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme que son employeur l’a congédié pour avoir défendu ses droits, parce qu’il a considéré cela comme une non-conformité. Son employeur ne s’est pas acquitté de sa responsabilité de lui offrir des mesures d’adaptation en raison de ses croyances religieuses. Son employeur a enfreint la convention collective. Il a droit aux prestations d’assurance-emploi parce qu’il a cotisé au programme et qu’il a été congédié sans que ce soit de sa faute.

[9] Je dois décider de la raison pour laquelle l’employeur de l’appelant l’a suspendu et congédié, et si cette raison constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

Question que je dois examiner en premier

Documents envoyés au Tribunal après l’audience

[10] À l’audience, l’appelant a déclaré que son syndicat avait signé une lettre d’entente avec son employeur au sujet de sa politique de vaccination. Il a dit que cela était pertinent à son argument juridique selon lequel la politique de vaccination était une nouvelle condition d’emploi, et qu’il n’était donc pas obligé de la suivre.

[11] J’ai dit à l’appelant qu’il pouvait faire référence à la lettre d’entente pendant l’audience et l’envoyer au Tribunal après l’audience, ce qu’il a faitNote de bas de page 3.

[12] Le Tribunal a envoyé la lettre à la Commission et lui a donné l’occasion de répondre.

[13] Je vais accepter la lettre d’entente que l’appelant a envoyée au Tribunal après l’audience, pour trois raisons :

  • je lui ai donné l’occasion de l’envoyer;
  • elle est pertinente pour un argument de l’appelant au sujet d’une question de droit que je dois trancher (celle de savoir si sa conduite était délibérée);
  • ce ne serait pas injuste envers la Commission parce que la Commission a eu l’occasion de répondre

[14] Je tiendrai donc compte de la lettre d’entente lorsque je rendrai ma décision.

Question en litige

[15] Je dois décider si l’appelant a été suspendu et congédié pour une raison que la Loi sur l’assurance-emploi considère comme une inconduite.

Analyse

[16] La loi prévoit qu’une personne ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi si elle perd son emploi en raison d’une inconduite. Cela s’applique, peu importe si l’employeur a congédié ou suspendu la personneNote de bas de page 4.

[17] Je dois décider deux choses :

  • la raison pour laquelle l’appelant a été suspendu et congédié;
  • si la Loi sur l’assurance-emploi considère ce motif comme une inconduite

La raison pour laquelle l’appelant a été suspendu et congédié

[18] Je conclus que l’employeur de l’appelant l’a suspendu puis congédié parce qu’il ne s’est pas conformé à sa politique de vaccination.

[19] L’appelant a témoigné à l’audience que son employeur l’avait suspendu et congédié pour avoir insisté sur le consentement éclairé à la vaccination contre la COVID, et pour avoir contesté le droit légal de l’employeur d’exiger qu’il lui fournisse ses renseignements médicaux personnels. Il dit des choses semblables dans sa demande d’assurance-emploi, où il écrit : [traduction] « Il est illégal de punir une personne qui défend ses droitsNote de bas de page 5 ».

[20] La Commission affirme que l’employeur a suspendu puis congédié l’appelant parce qu’il n’a pas fourni de preuve de vaccination contre la COVID-19. Il était tenu de le faire au titre de la politique de vaccination de l’employeur, en fonction du mandat fédéral pour les compagnies aériennes. La preuve de la Commission comprend sa conversation téléphonique avec l’employeur, la politique de vaccination de celui-ci et la correspondance de l’employeur avec l’appelantNote de bas de page 6.

[21] J’accepte la preuve de la Commission selon laquelle l’employeur a suspendu et congédié l’appelant pour ne pas avoir respecté la politique de vaccination de son employeur. Je préfère la preuve de la Commission à celle de l’appelant pour quatre raisons.

[22] Premièrement, l’appelant n’a fourni aucune preuve pour appuyer la raison selon laquelle il dit avoir perdu son emploi. Par conséquent, je conclus que la raison pour laquelle il dit avoir été suspendu et congédié fait partie de son argument juridique, et qu’il ne s’agit pas d’un fait.

[23] Deuxièmement, la majeure partie de la preuve de la Commission provient de documents de l’appelant ou de son employeur. Je n’ai aucune raison de douter de la véracité de ces documents. Ils sont détaillés et indiquent clairement la raison pour laquelle l’appelant a été suspendu et congédié. De plus, les documents sont cohérents et appuient ce que l’employeur a dit à la Commission.

[24] Troisièmement, la raison fournie par l’employeur découle directement de sa politique sur la vaccination et elle est logique dans les circonstances. L’employeur a publié sa politique. Il a avisé l’appelant. Il l’a ensuite suspendu et averti que s’il continuait de ne pas se conformer à la politique, il serait congédié. L’employeur a ensuite mis fin à l’emploi de l’appelant pour un motif valable parce qu’il ne s’était pas conformé à sa politique de vaccination.

[25] Quatrièmement, il n’y a rien dans la correspondance entre l’employeur et l’appelant qui me montre que l’employeur ripostait contre lui. La correspondance de l’employeur a un ton professionnel. Il a fait ce qu’il a dit qu’il ferait. Il a suivi sa propre politique et son propre processus.

[26] Ainsi, selon la preuve que j’ai acceptée, je conclus que la raison pour laquelle l’employeur a suspendu l’appelant puis a mis fin à son emploi était qu’il n’a pas respecté sa politique de vaccination.

La raison est une inconduite au sens de la loi

[27] Le refus de l’appelant de se conformer à la politique de vaccination de son employeur constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

Inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi

[28] La Loi sur l’assurance-emploi ne précise pas ce qu’est une inconduite. Les décisions des tribunaux énoncent le critère juridique de l’inconduite. Celui-ci précise les types de faits et les questions juridiques que je dois prendre en considération au moment de rendre ma décision.

[29] La Commission doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas de page 7.

[30] Je dois me concentrer sur ce que l’appelant a fait ou omis de faire, et sur la question de savoir si sa conduite constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 8. En règle générale, je dois me concentrer sur la conduite du membre du personnel et non sur celle de l’employeur. Toutefois, le Tribunal peut tenir compte de la conduite d’un employeur avant l’inconduite présumée si la conduite de l’employeur a causé l’inconduite ou y a contribué. C’est important pour décider si la conduite du membre du personnel était intentionnelleNote de bas de page 9.

[31] Cependant, je ne peux pas décider si l’adoption de la politique par son employeur était raisonnable, si la politique elle-même était raisonnable ou si la suspension et le congédiement étaient des pénalités raisonnablesNote de bas de page 10.

[32] Il n’est pas nécessaire que l’appelant ait eu une intention coupable. Autrement dit, il n’avait pas à avoir l’intention de faire quelque chose de mal pour que je décide que sa conduite est une inconduiteNote de bas de page 11. Pour être considérée comme une inconduite, sa conduite doit être délibérée, c’est-à-dire consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 12. De plus, une inconduite comprend aussi une conduite qui est si insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas de page 13.

[33] Il y a inconduite si l’appelant savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et s’il savait ou aurait dû savoir qu’il y avait une possibilité réelle qu’il soit suspendu et congédié pour cette raisonNote de bas de page 14.

[34] Je peux seulement décider s’il y a eu inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 15. Je ne peux pas rendre ma décision en me fondant sur d’autres lois. Cela comprend les lois sur les droits de la personne, le droit du travail et les conventions collectives, ainsi que le droit du travail sur le congédiement injustifié.

[35] La Cour fédérale a récemment rendu sa première décision dans une affaire où une personne s’est vu refuser des prestations d’assurance-emploi pour inconduite parce qu’elle ne s’était pas conformée à la politique de vaccination contre la COVID-19 de son employeurNote de bas de page 16. Dans la décision Cecchetto, la Cour a confirmé le [traduction] « rôle important, mais restreint et précis » du Tribunal. Celui-ci doit décider deux choses : pourquoi l’appelant a été congédié, et si ce motif constitue une « inconduite » au sens de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 17.

[36] La Cour fédérale a ensuite déclaré que le Tribunal n’a pas le pouvoir légal d’évaluer le fond, la légitimité ou la légalité des directives et des politiques gouvernementales visant à lutter contre la pandémie de COVID-19, ou de statuer sur ceux-ci. Le Tribunal n’a donc pas à traiter de ces arguments. De plus, les tribunaux n’interviendront pas dans les décisions du Tribunal lorsqu’elles ne le font pas.

[37] Enfin, la Cour fédérale a confirmé qu’un appel en assurance-emploi au Tribunal de la sécurité sociale n’est pas la bonne façon de contester la politique et la conduite de leur employeur Note de bas de page 18. Elle a dit que les personnes dans la situation de l’appelant ont d’autres options juridiques pour le faire.

Ce que disent la Commission et l’appelant

[38] La Commission affirme que l’appelant a été suspendu et congédié en raison de sa propre inconduiteNote de bas de page 19. Il a volontairement refusé de se conformer à la politique de vaccination de son employeur. De plus, il existe un lien de causalité évident entre son refus, sa suspension et son congédiement. Son employeur a communiqué une politique de vaccination claire aux membres du personnel. Il savait que son refus de se conformer à cette politique entraînerait une perte d’emploi. De plus, l’application de la politique était raisonnable parce qu’elle concernait les voyages avec une compagnie aérienne publique pendant une pandémie.

[39] La Commission affirme que l’appelant a volontairement refusé de se conformer à la politique de vaccination parce qu’il n’était pas d’accord avec celle-ci. Il a donc compromis son emploi continu.

[40] Enfin, la Commission affirme que la Commission et le Tribunal ne peuvent pas examiner si l’employeur a agi de façon équitable ou raisonnable en adoptant sa politique de vaccination.

[41] L’appelant affirme que le refus de se conformer à la politique de vaccination de son employeur n’est pas une inconduiteNote de bas de page 20. Il dit que son employeur l’a maltraité et qu’il lui a fait du tort en le congédiant. Il n’a pas assumé sa responsabilité. Il a été suspendu et son emploi a pris fin sans qu’il y ait eu faute de sa part.

[42] L’appelant affirme que sa conduite n’était pas délibérée. Il ne croyait pas que son employeur le congédierait quand il l’a fait parce qu’il cherchait toujours à obtenir une mesure d’adaptation pour des motifs religieux (exemption de la politique). Il pensait que ce serait approuvé. Il avait droit à une mesure d’adaptation fondée sur ses croyances religieuses. Son employeur n’avait pas le droit de remettre en question ses croyances religieuses ou de dire que ses raisons de refuser de se faire vacciner n’étaient pas liées à la religion. La politique de vaccination allait à l’encontre de ses croyances religieuses, car le développement des vaccins contre la COVID-19 découle des avortements. Et il doit suivre la parole de Dieu, pas de l’homme. Par conséquent, son refus de suivre la politique de vaccination n’était pas imprudent, insouciant ou négligent.

[43] Enfin, il affirme avoir droit aux prestations d’assurance-emploi parce qu’il les a payées et que son employeur l’a congédié sans qu’il y soit pour quoi que ce soit. Il a travaillé avec diligence pendant 25 ans. Il a payé toutes ses taxes. Il n’a jamais eu d’ennuis avec la loi. Il a donc pleinement droit à sa part des prestations que le Canada fournit à ses citoyennes et citoyens. Il affirme que la Commission n’a pas traité sa demande d’assurance-emploi de façon équitable ou raisonnable, et que cela va à l’encontre de la common law. Il faut donc lui accorder la restitution immédiatement parce que son employeur lui a fait du tort et que Service Canada (la Commission) lui a fait du tort pendant de nombreux mois.

La Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi

[44] La Commission a prouvé que le refus de l’appelant de se conformer à la politique de vaccination de son employeur constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[45] L’appelant et la Commission sont d’accord sur les faits essentiels du présent appel, sauf un. L’appelant fait valoir que son refus de suivre la politique de vaccination de son employeur n’était pas délibéré ou insouciant au point d’être délibéré.

[46] J’accepte la preuve de l’appelant concernant les autres faits essentiels que la Commission doit prouver pour démontrer que sa conduite était une inconduite. Je n’ai aucune raison de douter de la preuve de l’appelant (ce qu’il a dit à la Commission, écrit dans ses documents et dit à l’audience) concernant la politique de vaccination, sa demande d’exemption religieuse, sa suspension et son congédiement. Son témoignage est cohérent. Il a dit la même chose à la Commission et au Tribunal. Et puis, son histoire sur ce qu’il a fait, ce que son employeur a fait et ce qu’il savait à quel moment est restée essentiellement la même au fil du temps. Sa preuve est appuyée par les documents que son employeur a envoyés à la Commission.

[47] J’accepte la preuve de la Commission parce qu’elle concorde avec la preuve de l’appelant. Ce que l’employeur a dit à la Commission, sa politique et ce qu’il a écrit dans ses lettres à l’appelant et dans sa lettre de congédiement sont cohérents. Cela correspond à la preuve de l’appelant sur ce qui s’est passé. Et il n’y a aucune preuve qui va à l’encontre de la preuve de la Commission.

[48] Selon la preuve que j’ai acceptée, je conclus que la Commission a prouvé ce qui suit :

  • L’employeur avait une politique de vaccinationNote de bas de page 21.
  • Au titre de cette politique, l’appelant devait être entièrement vacciné et en fournir la preuve à son employeur au plus tard le 31 octobre 2021, faute de quoi il ferait l’objet de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement motivéNote de bas de page 22.
  • L’appelant était au courant de cela parce que son employeur l’avait informé par écrit dans la politique de vaccination, le courriel de mise à jour et la lettre de suspensionNote de bas de page 23.
  • L’appelant a demandé des mesures d’adaptation pour des motifs religieux, mais son employeur lui a dit par écrit que sa demande avait été rejetéeNote de bas de page 24.
  • L’appelant ne s’est pas conformé à la politique de vaccination.
  • Pour cette raison, son employeur l’a suspendu, puis il a mis fin à son emploi pour un motif valableNote de bas de page 25.

[49] Je ne retiens pas les arguments de l’appelant selon lesquels sa conduite n’était pas délibérée ou insouciante, de sorte que sa conduite ne compte pas comme une inconduite. Selon la preuve que j’ai acceptée, je juge qu’il savait ou aurait dû savoir que son employeur le suspendrait, puis le congédierait s’il ne respectait pas sa politique de vaccination. Son employeur a clairement indiqué ce qui se passerait s’il ne s’y conformait pas, dans sa politique, dans sa lettre de suspension et dans sa lettre de congédiement. Je conclus donc qu’il a consciemment, délibérément et intentionnellement refusé de se conformer à la politique de vaccination parce qu’il n’était pas d’accord avec elle et qu’il n’était pas d’accord pour que cela s’applique à lui.

[50] Ma conclusion est appuyée par les courriels et les avis juridiques que l’appelant a envoyés à son employeur.Note de bas de page 26 Les mots et le ton conflictuels que l’appelant a utilisés dans ces courriels et avis me montrent que le refus de l’appelant de se conformer à la politique de vaccination de son employeur était conscient, délibéré et intentionnel.

[51] J’estime qu’il était déraisonnable que l’appelant continue de croire que son employeur lui accorderait une mesure d’adaptation religieuse après avoir refusé de le faire. Cette croyance n’était pas fondée sur les circonstances objectives. Elle était fondée sur son attachement à sa religion et sur son interprétation de la loi. Ses opinions et ses croyances bien ancrées au sujet de la religion et de la loi l’auraient peut-être empêché d’en connaître les conséquences. Cependant, cela ne change rien au critère juridique ni au fait qu’il aurait dû en connaître les conséquences.

[52] Ainsi, selon la preuve que j’ai acceptée, le critère juridique relatif à l’inconduite et mes conclusions, la Commission a prouvé que l’appelant a été suspendu et congédié pour inconduite au titre de la Loi sur l’assurance-emploi.

Les autres arguments de l’appelant

[53] Selon la décision Cecchetto et une décision récente de la division d’appel du Tribunal, je n’ai pas à examiner les arguments suivants que l’appelant a présentés ni les lois sur lesquelles il s’est fondé :

  • La Commission a manqué à l’équité de la common law en n’enquêtant pas adéquatement sur sa demande d’assurance-emploi.
  • Il a respecté les termes de son contrat (convention collective) et il est impossible qu’il soit considéré comme ayant été négligent alors qu’il a respecté son contrat.
  • Son employeur a enfreint la convention collective, qui est le document de contrôle, et non la politique sur la vaccination.
  • La lettre d’entente prouve que la politique sur la vaccination n’avait pas été convenue par les parties à la convention collective (c’est-à-dire qu’elle était contraire à la convention collective) et qu’il n’avait donc pas à la suivreNote de bas de page 27.
  • Aux termes de la convention collective, les pilotes ne peuvent pas être tenus de respecter des normes de santé ou d’enquête de santé plus élevées que celles de la catégorie 1.
  • Son employeur n’a pas respecté ses obligations fiduciaires dans le processus de mesures d’adaptation parce qu’il a refusé de le rencontrer pour discuter de sa demande de mesures d’adaptation, et qu’il n’a pas accepté sa déclaration sous serment.
  • Son employeur a tenté de porter atteinte à son droit à la protection des renseignements médicaux.
  • Son employeur a omis de lui offrir des mesures d’adaptation pour des motifs religieux au titre du droit en matière des droits de la personne (Loi canadienne sur les droits de la personne).
  • Infraction au Code criminel
  • Déclaration canadienne des droits
  • Jurisprudence sur l’autorité des affidavits
  • Jurisprudence canadienne concernant le consentement à un traitement médical et la confidentialité des renseignements médicauxNote de bas de page 28

[54] L’appelant et son syndicat ont déposé un grief contestant sa suspension et son congédiement par son employeur. Il a également déposé une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne et auprès du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada. Comme la Cour fédérale l’a déclaré dans la décision Cecchetto, et à de nombreuses reprises auparavant, l’appelant peut présenter ces arguments dans le cadre de ces procédures judiciaires.

[55] L’appelant a également soutenu que l’article 7.2.5 du Guide de la détermination de l’admissibilité de l’assurance-emploi appuie son argument selon lequel il n’y a pas eu d’inconduiteNote de bas de page 29. Il affirme que le Guide justifie le non-respect de la politique sur la vaccination de son employeur. Lorsqu’il a été embauché, il n’y avait rien dans son contrat concernant la vaccination contre la COVID-19. La politique sur la vaccination de son employeur était donc une modification unilatérale de son contrat. Le Guide dit qu’il peut refuser de la suivre, et que cela ne sera pas considéré comme une inconduite.

[56] Je n’ai pas à suivre le Guide. Il s’agit du guide de la Commission à l’intention de son personnel. Il explique comment la Commission doit interpréter et appliquer la Loi sur l’assurance-emploi lorsqu’elle enquête sur les demandes de prestations d’assurance-emploi et évalue celles-ci. J’ai examiné la section du Guide que l’appelant a citée. Le Tribunal n’y est pas contraint. Autrement dit, je n’ai pas à la suivre. Je dois suivre les décisions des Cours fédérales, que j’ai résumées ci-dessus, où j’ai examiné la loi sur l’inconduite. C’est ce que j’ai fait dans la présente décision.

[57] L’appelant affirme que son employeur n’avait pas à exiger que les membres d’équipage se fassent vacciner contre la COVID-19 parce que l’arrêté d’urgence (no 43) relatif à l’aviation civile en raison de la COVID-19 du gouvernement fédéral le précise. Dans une affaire du Tribunal, il a été suggéré que le Tribunal admette l’arrêté d’urgence en preuve et l’examineNote de bas de page 30. Au paragraphe 46, la membre Lew écrit : [traduction] « Même si l’arrêté d’urgence et le règlement sur les transports sont admis en preuve à la division générale, cela n’établit pas nécessairement que le prestataire n’aurait pas pu, au moment pertinent, savoir ni s’attendre à ce que sa conduite n’ait pu mener au congédiement ». Autrement dit, l’appelant dans cette affaire pourrait invoquer l’arrêté d’urgence(lorsque l’affaire a été renvoyée à la division générale) pour soutenir que sa conduite n’était pas délibérée.

[58] J’accepte le témoignage de l’appelant selon lequel il était au courant de l’arrêté d’urgence en septembre 2021. Cependant, rien dans cet arrêté ni dans la connaissance qu’en avait l’appelant ne change ma conclusion selon laquelle sa conduite était délibérée. Son employeur l’a informé de façon précise et répétée des conséquences du non-respect de sa politique de vaccination. L’interprétation juridique de l’arrêté d’urgence par l’appelant (qui est erronée, à mon avis) ne change rien à ce qu’il savait ou aurait dû savoir. C’est son argument juridique, et non sa connaissance de la situation réelle. Plus haut, j’ai constaté qu’il connaissait ou aurait dû connaître la politique de vaccination de son employeur, ce qu’il devait faire, avant quelle date et les conséquences de ne pas le faire.

[59] L’appelant a des antécédents impressionnants de travail et de contribution au programme d’assurance-emploi. Cependant, cela ne lui donne pas automatiquement droit aux prestations. La Loi sur l’assurance-emploi crée un régime d’assurance. Comme pour les autres régimes d’assurance, une personne qui présente une demande de prestations doit démontrer qu’elle remplit toutes les conditions requises pour recevoir cette prestationNote de bas de page 31. Malheureusement pour l’appelant, il ne remplit pas toutes les conditions. Les articles 30 et 31 de la Loi sur l’assurance-emploi le rendent inadmissible au bénéfice des prestations parce qu’il a perdu son emploi en raison d’une inconduite.

Conclusion

[60] La Commission a prouvé que l’appelant a été suspendu et congédié parce qu’il a refusé de se conformer à la politique de vaccination de son employeur.

[61] La Commission a également prouvé que son refus de se conformer à la politique de vaccination de son employeur constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[62] Par conséquent, il ne peut pas recevoir de prestations d’assurance-emploi.

[63] Je dois donc rejeter son appel.

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