Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : LW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1400

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Appelante : L. W.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentant : Gilles Luc Bélanger

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 13 février 2023
(GE-22-3774)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Mode d’audience : Par écrit
Date de la décision : Le 24 octobre 2023
Numéro de dossier : AD-23-258

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle. La prestataire est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Aperçu

[2] L’appelante, L. W. (la prestataire) a été congédiée de son emploi de consultante en aide à la décision dans un hôpital parce qu’elle ne s’était pas conformée à la politique de vaccination contre la COVID-19 de son employeur (politique). La prestataire a ensuite présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi.

[3] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a conclu que la prestataire avait été congédiée de son emploi en raison de son inconduite, de sorte qu’elle n’était pas en mesure de lui verser des prestations. La prestataire a demandé une révision, mais la Commission a maintenu sa décision.

[4] La prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal et son appel a été rejeté. La division générale a conclu que la prestataire avait été licenciée de son emploi parce qu’elle ne s’était pas conformée à la politique de vaccination de l’employeur. Elle a décidé que ce motif est considéré comme une inconduite et qu’elle est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[5] La prestataire en appelle maintenant de la décision de la division générale auprès de la division d’appel du Tribunal. Elle soutient que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante en omettant de tenir compte d’un relevé d’emploi (RE) modifié, en se fondant sur de la jurisprudence non pertinente et en faisant preuve de partialité.

[6] Je rejette l’appel de la prestataire. La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle dans sa décision. La prestataire a été congédiée en raison d’une inconduite et ne peut recevoir de prestations d’assurance-emploi.

Questions en litige

[7] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle fondé sa décision sur une erreur factuelle importante en omettant de tenir compte du relevé d’emploi (RE) modifié produit par son employeur?
  2. b) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en se fondant sur de la jurisprudence non pertinente?
  3. c) La division générale était-elle partiale?

Analyse

[8] Je ne peux intervenir dans la présente affaire que si la division générale a commis une erreur pertinente. Je dois donc décider si la division générale :Note de bas de page 1

  • a omis de suivre une procédure équitable;
  • a omis de trancher une question qu’elle aurait dû trancher ou a tranché une question qu’elle n’aurait pas dû trancher;
  • a mal interprété ou mal appliqué la loi;
  • a fondé sa décision sur une erreur importante concernant les faits de l’affaire.

La division générale n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle.

La prestataire a déjà interjeté appel d’une autre décision de la division générale

[9] La prestataire a d’abord porté la décision de la Commission en appel devant la division générale. À ce moment-là, la prestataire a demandé un ajournement de son audience devant la division générale parce qu’elle avait contesté son licenciement et qu’une médiation était prévue. La division générale a rejeté la demande d’ajournement et l’appel a été rejetéNote de bas de page 2.

[10] La prestataire a interjeté appel de cette décision devant la division d’appel. La division d’appel a accueilli l’appel, concluant que la division générale aurait dû accorder l’ajournement parce que l’issue de la médiation pourrait avoir une incidence sur l’appel. L’affaire a été renvoyée à la division générale en vue d’un nouvel examenNote de bas de page 3.

La décision de la division générale

[11] La division générale devait décider pourquoi la prestataire avait cessé de travailler et si ce motif équivalait à une inconduite au sens de la loi.

[12] La division générale a décidé que le motif pour lequel la prestataire a été congédiée était sa non-conformité à la politique de vaccination de son employeurNote de bas de page 4. Elle a conclu que la Commission avait prouvé que ce motif équivalait à une inconduite en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi). Elle a fondé sa décision sur ce qui suit :

  • L’employeur avait une politique de vaccination obligatoire.
  • La prestataire était au courant de la politique.
  • La politique indiquait clairement que les employés qui ne se conformaient pas ne pouvaient pas continuer à travailler.
  • La prestataire savait ou aurait dû savoir qu’elle pourrait être congédiée si elle ne se conformait pas à la politiqueNote de bas de page 5.

[13] La division générale a reconnu que la prestataire avait présenté des arguments concernant ce qui suit :

  • La politique de son employeur violait ses droits de la personne.
  • La politique était déraisonnable parce que la prestataire travaillait à domicile.
  • Son invalidité l’empêchait de reprendre le travail sans mesures d’adaptation, de sorte que son statut vaccinal ne nuisait pas à sa capacité d’effectuer son travail.
  • La politique prévoit que la non-conformité entraînera un congé sans solde et non un licenciement, de sorte qu’elle ignorait qu’elle pourrait perdre son emploiNote de bas de page 6.

[14] La division générale a conclu que l’employeur avait averti la prestataire qu’elle serait congédiée si elle ne respectait pas la politiqueNote de bas de page 7. Elle a également constaté que la politique s’appliquait clairement à tout le personnel, qu’il travaille ou non à domicile. Des exemptions étaient disponibles, mais rien ne garantissait que la prestataire serait exemptée ou bénéficierait de mesures d’adaptation en raison de son invaliditéNote de bas de page 8.

[15] La division générale a également conclu qu’elle n’avait pas compétence de décider si la politique de l’employeur était juste ou raisonnable et s’il existe d’autres moyens pour la prestataire de répondre aux préoccupations concernant une violation des droits de la personne ou des allégations de discriminationNote de bas de page 9.

La division générale n’a pas ignoré des faits pertinents

[16] La prestataire soutient que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante. Elle affirme que la division générale aurait dû tenir compte du fait que son employeur a émis un RE révisé à la suite d’une médiation. Elle affirme que ce RE indique que le motif de délivrance était un « licenciement non motivé », ce qui démontre qu’elle n’a pas été congédiée pour inconduiteNote de bas de page 10.

[17] La prestataire soutient également que le RE montre qu’elle a reçu une indemnité de départ, qui n’est versée que lorsqu’un employé perd son emploi sans qu’il en soit responsable. Elle affirme que la Commission n’a pas assisté à l’audience et qu’on ne peut dire avec certitude si elle a examiné le nouveau RE ou si elle s’est simplement fondée sur leurs observations de l’affaire antérieure de la division généraleNote de bas de page 11.

[18] La prestataire soutient que la division générale a fondé sa décision sur des erreurs factuelles importantes en omettant de tenir compte de cette preuve.

[19] La division générale n’a pas fait directement référence au RE modifié qui a été présenté par la prestataire. Elle a reconnu qu’il faisait partie du dossier lors des remarques formulées à l’audienceNote de bas de page 12. La prestataire n’a pas présenté d’autres arguments devant la division générale au sujet du RE modifié ni fourni le procès-verbal de transaction ou d’autres documents qui démontreraient quelle était l’entente entre elle et l’employeur.

[20] Selon la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale, lorsqu’un règlement contredit l’affirmation antérieure d’une inconduite faite par un employeur, bien qu’il ne soit pas déterminant, le règlement peut être pertinent à la question de savoir si la conduite de l’employé constitue une inconduite au sens de la LoiNote de bas de page 13.

[21] D’après la jurisprudence, la division générale n’est pas liée par la façon dont l’employeur et l’employé peuvent qualifier la façon dont l’emploi a pris fin. Il appartient à la division générale d’évaluer la preuve et de décider si la conduite du prestataire constituait une « inconduite » au sens de la Loi.

[22] En outre, selon la jurisprudence, avant de pouvoir utiliser un accord de règlement pour contredire une conclusion antérieure d’inconduite, certains éléments de preuve concernant l’inconduite doivent aller à l’encontre de la position antérieure de l’employeurNote de bas de page 14.

[23] La division générale ne s’est pas fondée sur le codage du RE initial lorsqu’elle a décidé que la prestataire avait été congédiée en raison d’une inconduite. Le RE modifié ne liait pas la division générale et, sans autre preuve de la part de la prestataire, comme le procès-verbal de transaction, il n’est pas pertinent à la question que la division générale devait trancher.

[24] Je conclus que la division générale n’a pas fondé sa décision sur des erreurs de fait en ne faisant pas directement référence au RE modifié produit par l’employeur.

La division générale n’a pas commis d’erreur de droit

[25] La prestataire soutient qu’en ignorant que l’employeur avait produit un relevé d’emploi modifié, il s’est fondé sur une jurisprudence non pertinente dans son analyse.

[26] La division générale a énoncé et appliqué avec exactitude les principes clés qui ont été établis dans la jurisprudence de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédéraleNote de bas de page 15. Les tribunaux ont déclaré que l’inconduite est une conduite délibérée, ce qui signifie que la conduite était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas de page 16. L’inconduite doit être une conduite si insouciante qu’elle frôle le caractère délibéré Il n’est pas nécessaire qu’un prestataire ait une intention fautiveNote de bas de page 17.

[27] Les tribunaux ont également déclaré qu’il y a inconduite lorsqu’un prestataire savait ou aurait dû savoir que la conduite pouvait nuire à l’exécution de son devoir envers son employeur et que le congédiement était une possibilité réelleNote de bas de page 18. La question n’est pas de savoir si la suspension ou le congédiement était justifié dans un contexte de droit du travail, mais de savoir si le prestataire pouvait prévoir qu’il serait suspendu ou congédiéNote de bas de page 19.

[28] La division générale a expliqué pourquoi elle a conclu que la conduite de la prestataire était délibérée et pourquoi elle était constitutive d’une inconduite. La division générale a cité la définition de l’inconduite dans plusieurs affaires de la Cour d’appel fédérale. Elle a appliqué le droit aux faits. Ses conclusions étaient conformes à la loi et fondées sur la preuve dont elle disposait. La jurisprudence sur laquelle elle s’est fondée était pertinente dans la présente affaire.

La division générale n’avait pas de parti pris

[29] La prestataire soutient que la division générale était partiale. Elle affirme qu’on lui a donné jusqu’au lendemain de l’audience pour fournir tout document supplémentaire, ce qui correspond à la date figurant sur la décisionNote de bas de page 20.

[30] Je conclus qu’il n’y a aucune preuve de partialité. La prestataire a reçu jusqu’au lendemain de l’audience pour fournir des documents supplémentaires, soit un vendredi. La décision n’a été rendue que le lundi suivant et la prestataire n’avait rien fourni d’autre à la division générale à examiner.

[31] Je conclus que la division générale n’a pas commis d’erreur en omettant de se reporter au RE modifié. Elle ne s’est pas fondée sur de la jurisprudence non pertinente et n’a pas fait preuve de partialité à l’égard de la prestataire en rendant sa décision si peu de temps après l’audience.

Conclusion

[32] La division générale a correctement cité et appliqué le droit concernant l’inconduite. Elle étayait ses conclusions au moyen des éléments de preuve et expliquait les motifs de sa décision. Elle n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle lorsqu’elle a décidé que la prestataire avait été congédiée en raison d’une inconduite.

[33] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.