Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : BL c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1232

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : B. L.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (583508) datée du 5 avril 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Marc St-Jules
Mode d’audience : PAR ÉCRIT
Date de la décision : Le 17 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-1137

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal de la sécurité sociale n’est pas d’accord avec l’appelant.

[2] L’appelant n’a pas démontré qu’il a accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi pour proches aidants.

Aperçu

[3] L’appelant a demandé des prestations d’assurance-emploi pour proches aidants, mais la Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’il n’avait pas accumulé assez d’heures pour y être admissibleNote de bas page 1.

[4] Je dois décider si l’appelant a accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi de compassion.

[5] La Commission affirme que l’appelant n’a pas accumulé assez d’heures parce qu’il a besoin d’au moins 600 heures, mais qu’il n’en a aucuneNote de bas page 2.

[6] L’appelant n’est pas d’accord. Il affirme que le programme d’assurance-emploi actuel comporte de grandes lacunesNote de bas page 3. Selon lui, c’est injuste que seule la dernière année compte dans l’examen des heures d’emploi assurable. L’appelant est incapable de travailler pendant qu’il aide son père qui a besoin de son soutien. Il estime que les sections de la loi sur les prestations pour proches aidants, prestations de compassion et prestations de maladie devraient être révisées.

Question que je dois examiner en premier

L’audience a eu lieu par écrit

[7] Le Tribunal demande toujours aux parties appelantes le mode d’audience qu’elles préfèrent. Dans la présente affaire, l’appelant avait d’abord décidé qu’il voulait une audience par téléphone. Dans la partie où il devait expliquer pourquoi il préférait ce mode d’audience, il a répondu que cette option lui semblait plus conviviale et pratique.

[8] Un avis d’audience a été envoyé à l’appelant le 15 juin 2023, en vue d’une audience le 18 juillet 2023. Mais le jour même, le 15 juin 2023, il a envoyé un courriel disant qu’il souhaitait plutôt avoir une audience par écrit. Dans ce courriel, l’appelant a fait référence à un autre courriel qu’il avait envoyé le 9 mai 2023, où il demandait également une audience par écrit. J’ai examiné le dossier et j’y ai bel et bien trouvé ce courriel.

[9] Le lendemain, le 16 juin 2023, l’appelant a envoyé un autre courriel avec un nouvel avis d’appel. Il indiquait maintenant que sa préférence était une audience par écrit. Dans la partie où il devait expliquer pourquoi il préférait ce mode d’audience, il a répondu que cette option lui semblait plus conviviale et pratique. C’est la même raison qu’il avait donnée la première fois.

[10] Je me suis demandé si une audience par écrit, c’est-à-dire fondée uniquement sur les documents que j’ai au dossier, serait équitable. Je crois qu’une audience par téléconférence ou par vidéoconférence, ou une audience en personne serait plus interactive et permettrait de mieux échanger. Toutefois, les parties appelantes peuvent avoir d’autres raisons qui expliquent leur préférence. Une lettre a alors été envoyée à l’appelantNote de bas page 4.

[11] Cette lettre expliquait que toute décision serait prise par écrit. Elle mentionnait aussi que l’appelant pouvait toujours changer d’avis et opter pour une audience par téléphone ou par vidéoconférence.

[12] La lettre, qui a été envoyée par courriel le 20 juin 2023, invitait également l’appelant à présenter des observations supplémentaires en réponse au dossier de révision de la Commission et aux observations de la Commission au TribunalNote de bas page 5. Il avait jusqu’au 7 juillet 2023 pour répondre.

[13] L’appelant n’a pas répondu. Aucun nouveau changement de mode d’audience n’a été reçu non plus.

[14] En date de la présente décision, aucune communication n’a été reçue concernant le courriel du 20 juin 2023. J’estime que l’appelant a bel et bien reçu la lettre lui indiquant qu’il pouvait changer de mode d’audience, car rien ne montre que le courriel n’a pas été envoyé. De plus, le courriel n’est pas revenu avec une mention indiquant qu’il n’avait pas été remis.

[15] J’ai lu et compris toutes les observations de l’appelant. Je n’ai aucune question. J’estime qu’il est au courant des différents modes d’audience, puisqu’il a d’abord décidé consciemment qu’il voulait une audience par téléphone. Il a ensuite envoyé trois demandes distinctes pour indiquer qu’il voulait plutôt une audience par écrit.

[16] Certaines raisons expliquent probablement ce changement. Mais le Tribunal ne connaît pas ces raisons. L’appelant a tout de même fourni certains renseignements sur sa situation actuelle. Il doit s’occuper de son père malade qui est dans une autre ville. Il doit aussi s’occuper des enfants pendant que l’autre personne du couple est au travail. Il s’est exprimé clairement par écrit. Je crois tout ce qu’il a écrit. Je ne pense pas avoir besoin de vérifier sa crédibilité. Il y a un dossier complet sur ses discussions avec la Commission ainsi que des preuves documentaires.

[17] Je crois donc que je peux rendre rapidement une décision équitable à l’aide des documents que les parties m’ont remis. Je ne pense pas qu’une audience à l’oral serait utile dans les circonstances.

Question en litige

[18] L’appelant a-t-il accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi pour proches aidants?

Analyse

Conditions requises pour obtenir des prestations

[19] Il ne suffit pas d’arrêter de travailler pour obtenir des prestations d’assurance-emploi. Une personne doit prouver qu’elle y est admissibleNote de bas page 6. L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est admissible aux prestations.

[20] Pour être admissible, il doit avoir accumulé assez d’heures pendant une certaine période. Cette période s’appelle la période de référenceNote de bas page 7.

Période de référence de l’appelant

[21] La période de prestations est différente de la période de référence. Il ne s’agit pas du même moment. La période de prestations est la période durant laquelle une personne peut recevoir des prestations d’assurance-emploi. La période de référence est la période durant laquelle les heures d’emploi assurable sont accumulées pour établir la période de prestations.

[22] La loi prévoit que la période de prestations débute, selon le cas :

  • le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
  • le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine arrive après celle de l’arrêt de rémunérationNote de bas page 8.

[23] L’appelant a demandé les prestations le 15 janvier 2023Note de bas page 9. Par conséquent, sa période de prestations doit débuter à cette même date. Il s’agit du dimanche de la semaine au cours de laquelle il a formulé sa demande initiale. C’est une semaine plus tard que ce que la Commission a établi. Toutefois, en l’absence de quoi que ce soit qui me ferait croire le contraire, j’estime que la Loi sur l’assurance-emploi est claire et que sa période de prestations débute le 15 janvier 2023.

[24] Pour décider de la période de référence, je me suis basé sur la période de prestations qui débute le 15 janvier 2023. En général, la période de référence est la période de 52 semaines qui précède le début de la période de prestationsNote de bas page 10.

[25] Si je me fie à ces données, je conclus que la période de référence de l’appelant s’étend du 16 janvier 2022 au 14 janvier 2023. Il s’agit des 52 semaines qui précèdent sa période de prestations.

Prolongation de la période de référence

[26] Il est possible de prolonger la période de référenceNote de bas page 11. Toutefois, l’article 8 de la Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la période de référence, si elle est prolongée, ne peut pas aller plus loin que la demande précédente. La Commission affirme que l’appelant a eu une période de prestations précédente débutant le 14 novembre 2021Note de bas page 12. L’appelant n’a fourni aucune preuve du contraire. Comme je n’ai rien pour réfuter cette information, je conclus que l’appelant a eu une période de prestations précédente débutant le 14 novembre 2021.

[27] Par conséquent, sa période de référence peut seulement être prolongée jusqu’au 14 novembre 2021. Cependant, il y a deux choses importantes à prendre en considération. Première chose : une prolongation peut seulement être accordée dans certaines conditionsNote de bas page 13. Je n’ai aucun renseignement qui me permet d’accorder une prolongation. Deuxième chose : une prolongation ne sert à rien s’il n’y a aucune heure additionnelle. L’appelant a admis qu’il n’avait accumulé aucune heure d’emploi assurable après le 14 novembre 2021Note de bas page 14. Autrement dit, une prolongation de sa période de référence ne permettrait d’ajouter aucune heure au total.

[28] Par conséquent, une prolongation de la période de référence n’aide pas l’appelant. Il n’a pas d’autres heures à ajouter.

Heures de travail de l’appelant

[29] L’appelant n’a pas contesté le nombre d’heures accumulées depuis le 14 novembre 2021. Il admet qu’il n’en a aucune. Il soutient toutefois que la loi doit être modifiée.

[30] Rien ne me fait douter des heures accumulées depuis le 14 novembre 2021.

[31] Par conséquent, selon la preuve dont je dispose, je conclus que l’appelant n’a accumulé aucune heure d’emploi assurable depuis le 14 novembre 2021.

Nombre d’heures requis pour obtenir des prestations

[32] En ce qui concerne les heures accumulées, il y a deux façons de remplir les conditions requises pour obtenir des prestations spéciales. La règle générale prévoit que le nombre d’heures requis dépend du taux de chômage dans la région de la personneNote de bas page 15. Selon la règle générale, la Commission affirme que l’appelant avait besoin de 630 heuresNote de bas page 16.

[33] L’appelant n’a pas contesté la région qui lui est attribuée, le taux régional de chômage applicable, ni le nombre d’heures requis selon la règle générale. Ses arguments portent sur l’équité de la loi. Il soutient que la loi devrait être modifiée pour inclure les heures des cinq années précédentesNote de bas page 17.

[34] Aucune preuve ne me fait douter de la nécessité des 630 heures selon la règle générale. En effet, l’appelant n’a rien présenté pour contester la région qui lui est attribuée ou le taux régional de chômage. Par conséquent, je conclus que l’appelant n’est pas admissible selon la règle généraleNote de bas page 18. Il n’a accumulé aucune heure pendant sa période de référence, alors qu’il en avait besoin de 630.

[35] Toutefois, la loi prévoit une autre façon de remplir les conditions requises pour obtenir des prestations spéciales, y compris des prestations pour proches aidants. Pour être admissible à des prestations spéciales, 600 heures sont suffisantesNote de bas page 19.

[36] Comme j’ai conclu que l’appelant n’est pas admissible selon la règle générale, j’estime qu’il doit avoir accumulé 600 heures pendant sa période de référence pour être admissible aux prestations spéciales.

Alors, l’appelant a-t-il accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations?

[37] Non. L’appelant n’a accumulé aucune heure pendant sa période de référence, alors qu’il en avait besoin de 600.

[38] L’appelant soutient que la loi doit être modifiée pour tenir compte d’un plus long historique d’heures d’emploi assurable. Il fait valoir qu’il cotise à l’assurance-emploi depuis l’an 2000, si ce n’est pas avantNote de bas page 20.

[39] L’appelant estime que la situation est injuste. La loi devrait être modifiée. Il dit avoir travaillé de nombreuses années et avoir cotisé à l’assurance-emploi. Et maintenant qu’il a besoin d’aide, on lui a refusé les prestations.

[40] L’appelant soulève qu’il devrait avoir droit à des prestations, puisqu’il a cotisé au régime pendant des années. Je reconnais qu’il a cotisé à l’assurance-emploi pendant plus de 20 ans, mais il doit tout de même remplir les conditions d’admissibilité. Il a rempli ces conditions au moins une fois dans le passéNote de bas page 21.

[41] Malheureusement, je dois appliquer la Loi sur l’assurance-emploi. Cela peut sembler injuste pour l’appelant, mais je ne fonde pas ma décision sur l’équité. Elle repose plutôt sur les faits portés à ma connaissance et sur l’application de la loi. Il n’y a aucune exception et aucune marge de manœuvre. Je ne peux pas interpréter ou réécrire la Loi sur l’assurance-emploi d’une manière qui est contraire à son sens ordinaire, même par compassion. Le Tribunal n’est pas législateur.

[42] La Cour d’appel fédérale affirme que je peux seulement suivre la loi dans son sens ordinaire, telle qu’elle est écrite. Je ne peux pas réécrire la loi ou y ajouter des éléments pour obtenir un résultat qui semble plus équitable pour l’appelantNote de bas page 22.

[43] Les tribunaux s’entendent sur le fait que les prestataires doivent avoir les heures requises. Il n’y a aucune marge de manœuvre. La Cour d’appel fédérale a décidé que même s’il manque seulement une heure, la personne ne remplit pas les conditions requises pour être admissible à des prestationsNote de bas page 23.

[44] Dans la présente affaire, l’appelant ne répond pas aux exigences, alors il n’est pas admissible aux prestations. Même si je suis sensible à sa situation, je ne peux pas changer la loiNote de bas page 24.

Conclusion

[45] L’appelant n’a pas accumulé assez d’heures pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi de compassion.

[46] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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