Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JD c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1216

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : J. D.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 14 juin 2023
(GE-23-388)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Date de la décision : Le 6 septembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-684

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Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, J. D. (prestataire), demande la permission de faire appel de la décision de la division générale.

[3] La division générale a conclu que le prestataire était en retard lorsqu’il a demandé à l’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, de réviser sa décision du 10 décembre 2020. Il a présenté sa demande le 11 juillet 2022, soit plus d’un an et demi après avoir reçu la décision de la division générale.

[4] La division générale a également conclu que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder plus de temps au prestataire pour demander une révision.

[5] Le prestataire ne conteste pas les conclusions de la division générale selon lesquelles il a présenté sa demande de révision en retard et que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire. Toutefois, il soutient que la division générale a ignoré certains éléments de preuve. Plus précisément, il affirme qu’elle n’a pas tenu compte du fait que la Commission aurait dû rejeter sa demande de prestations d’assurance-emploi en premier lieu.

[6] Le prestataire affirme que la Commission aurait dû lui recommander de demander la Prestation canadienne d’urgence. La Commission lui a plutôt versé des prestations d’assurance-emploi, puis elle a décidé par la suite qu’il n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi. Il n’avait pas accumulé assez d’heures d’emploi assurable pour être admissible aux prestations. Il laisse entendre que si la Commission l’avait plutôt dirigé vers le programme de la Prestation canadienne d’urgence, il aurait retiré sa demande de prestations d’assurance-emploi. S’il l’avait fait, il n’aurait pas reçu de prestations auxquelles il n’était pas admissible et il n’aurait pas à rembourser ces prestations parce qu’il ne les aurait pas reçues.

[7] Avant que le prestataire puisse aller de l’avant avec son appel, je dois décider si son appel a une chance raisonnable de succès. Autrement dit, il doit y avoir une cause défendableNote de bas de page 1. Si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès, l’affaire prend finNote de bas de page 2.

Questions en litige

[8] Voici les questions en litige :

  1. a) Est-il possible de soutenir que la division générale a ignoré l’un ou l’autre des éléments de preuve?
  2. b) Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a examiné la façon dont la Commission a tranché la demande de prolongation de délai du prestataire?

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[9] La division d’appel doit accorder la permission de faire appel, sauf si l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. Il y a une chance raisonnable de succès s’il est possible que la division générale ait commis une erreur de compétence, de procédure, de droit ou un certain type d’erreur de faitNote de bas de page 3.

[10] Pour ce qui est des erreurs de fait, il faut que la division générale ait fondé sa décision sur une erreur commise de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Est-il possible de soutenir que la division générale a ignoré l’un ou l’autre des éléments de preuve?

[11] Le prestataire soutient que la division générale a ignoré le fait que la Commission n’a pas recommandé qu’il demande la Prestation canadienne d’urgence au lieu des prestations d’assurance-emploi.

[12] Toutefois, la question de savoir si la Prestation canadienne d’urgence était une option pour le prestataire ou s’il y était admissible n’est pas pertinente pour décider si la demande de révision de la décision du 10 décembre 2020 a été présentée en retard à la Commission. Elle n’est pas non plus pertinente pour décider si la Commission a agi de façon appropriée lorsqu’elle a examiné s’il fallait prolonger le délai dont dispose le prestataire pour demander une révision.

[13] Même si la division générale avait tenu compte du fait que la Commission n’avait pas dirigé le prestataire vers le programme de la Prestation canadienne d’urgence, aucun fondement n’aurait permis à la division générale de conclure que le prestataire était admissible aux prestations d’assurance-emploi ou à la Prestation canadienne d’urgence. Il ne s’agit pas de la question dont la division générale était saisie. Par conséquent, elle n’aurait pas été en mesure de décider si le prestataire y était admissible. De plus, la division générale n’est pas autorisée à trancher les questions relatives à la Prestation canadienne d’urgence (qui se distingue de la prestation d’assurance-emploi d’urgence).

[14] L’appel du prestataire à la division générale portait sur la décision rendue par la Commission le 10 décembre 2020. La division générale devait donc précisément se pencher sur les questions qui découlaient de cette décision. La décision ne portait pas sur l’admissibilité du prestataire aux prestations. Elle portait plutôt sur la question savoir si la Commission était justifiée lorsqu’elle a refusé au prestataire de prolonger le délai pour demander une révision.

[15] Ainsi, après avoir conclu que le prestataire avait présenté sa demande de révision en retard, la division générale pouvait tout au plus décider si la Commission avait suivi la loi de façon appropriée lorsqu’elle a examiné la demande de révision du prestataire.

[16] Je ne suis pas convaincue qu’il soit possible de soutenir que la division générale a ignoré certains éléments de preuve.

Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a examiné la façon dont la Commission a tranché la demande de prolongation de délai du prestataire?

[17] Le prestataire n’a pas soulevé ce point, mais je dois examiner s’il existe un argument défendable sur la question de savoir si la division générale a correctement appliqué la loi lorsqu’elle a examiné la décision de la Commission.

[18] La division générale a cité l’article 112(1) de la Loi sur l’assurance-emploi ainsi que le Règlement sur les demandes de révision. L’article 112(1) de la Loi sur l’assurance-emploi permet à une partie prestataire de demander à la Commission de réviser sa décision à tout moment, selon les modalités suivantes :

  1. (a) dans les trente jours suivant la date où une décision lui est communiquée;
  2. (b) dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorder.

[19] Le prestataire a demandé une révision plus de 30 jours après la date à laquelle la décision de la Commission lui a été communiquée. Il pouvait donc présenter sa demande de révision seulement si la Commission lui permettait de le faire.

[20] Le Règlement sur les demandes de révision énonce les facteurs que la Commission doit prendre en considération avant d’accorder plus de temps pour demander la révision d’une décision.

[21] Aux termes de l’article 1(1) du Règlement sur les demandes de révision, la Commission doit être convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et, d’autre part, que la personne a manifesté l’intention constante de demander une révision.

[22] Aux termes de l’article 1(2) du Règlement sur les demandes de révision, si la demande de révision est présentée après le délai de 365 jours suivant la date à laquelle la décision a été communiquée à la personne, la Commission doit être convaincue que la demande de révision a une chance raisonnable de succès. Elle doit aussi être convaincue que l’autorisation d’un délai plus long pour présenter la demande ne causerait pas de préjudice.

[23] Le prestataire a présenté sa demande plus de 365 jours après que la décision lui a été communiquée. Par conséquent, la Commission devait appliquer les articles 1(1) et 1(2) du Règlement sur les demandes de révision lorsqu’elle a examiné la demande de révision du prestataire.

[24] La division générale devait donc nécessairement examiner si la Commission avait tenu compte de ces facteurs lorsqu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire. Même si la division générale a cité le Règlement sur les demandes de révision, rien n’indique qu’elle a examiné si la Commission avait tenu compte de chacun de ces facteurs. La division générale n’a tout simplement cerné aucun facteur précis, à part possiblement la question de savoir si le prestataire avait une explication pour son retard.

[25] Dans la lettre de la Commission du 10 décembre 2020, il n’est pas clair si elle a tenu compte de chacun des facteurs prévus aux articles 1(1) et 1(2) du Règlement sur les demandes de révision. Elle semble avoir limité sa propre analyse à la question de savoir si le prestataire avait une explication raisonnable pour demander un délai plus long.

[26] De même, la division générale ne semble pas avoir pris en considération ni appliqué le Règlement sur les demandes de révision.

[27] Malgré ces lacunes dans l’analyse de la division générale, je n’accorde pas la permission de faire appel parce qu’il aurait fallu que la Commission soit convaincue que la demande de révision avait une chance raisonnable de succès aux termes de l’article 1(2) du Règlement sur les demandes de révision. La Commission devait être convaincue que la demande avait une chance raisonnable de succès avant de pouvoir accorder un délai plus long pour présenter une demande de révision.

[28] Je ne vois aucun élément de preuve qui laisse croire que la demande de révision avait une chance raisonnable de succès. Pour être admissible aux prestations d’assurance-emploi, le prestataire devait avoir accumulé au moins 420 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence. Selon la Commission, le prestataire n’avait accumulé aucune heure d’emploi assurable au cours de sa période de référenceNote de bas de page 4. Le prestataire n’a présenté aucun élément de preuve qui laisse croire qu’il avait accumulé des heures assurables.

[29] Puisqu’aucun élément de preuve ne laissait croire que la demande de révision avait une chance raisonnable de succès, la Commission ne pouvait pas accorder au prestataire un délai plus long pour présenter une demande de révision.

[30] La Cour fédérale a approuvé cette approche pour traiter les demandes de permission de faire appelNote de bas de page 5. La Cour a déclaré qu’« en l’absence d’éléments preuve, le tribunal n’a pas besoin de tenir compte de toutes les exceptions ou de tous les motifs de redressement possible ». Dans la présente affaire, il est clair qu’aucune preuve ne laisse croire que la demande de révision du prestataire avait une chance raisonnable de succès. Par conséquent, sans de tels éléments de preuve, la Commission ne pouvait pas accorder un délai plus long pour présenter la demande de révision.

[31] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès, bien qu’il n’est pas clair si la division générale a correctement appliqué le Règlement sur les demandes de révision.

Les options du prestataire

[32] La division générale a énoncé les options qui s’offraient au prestataire ainsi que les ressources avec lesquelles il pouvait communiquer concernant un trop-payé. Tout avis de dette qu’il pourrait avoir reçu ou qu’il recevra contiendra également ces renseignements.

[33] Si le prestataire ne l’a pas déjà fait, je l’encourage à communiquer avec l’Agence du revenu du Canada au sujet des options de remboursement, ou à écrire à la Commission pour lui demander d’annuler ou de réduire de sa dette s’il éprouve des difficultés financières.

Conclusion

[34] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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