Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CK c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1699

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. K.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (462434) datée du 29 mars 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Edward Houlihan
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 22 août 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 22 septembre 2023
Numéro de dossier : GE-23-1462

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada a prouvé que l’appelante a été mise en congé sans solde en raison d’une inconduite (c’est-à-dire parce qu’elle a fait quelque chose qui a entraîné sa mise en congé). Par conséquent, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploiNote de bas page 1.

Aperçu

[3] L’appelante a été mise en congé. Son employeur a déclaré qu’elle a été mise en congé parce qu’elle a refusé de se conformer à la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de l’entreprise.

[4] L’appelante ne conteste pas que cela s’est produit. Elle affirme que son congé était une suspension de son emploi. Elle dit qu’elle était au courant de la politique et des conséquences si elle ne s’y conformait pas. Elle a refusé de se conformer à la politique parce qu’elle dit que cela allait à l’encontre de sa convention collective et de ses droits et croyances constitutionnels et fondamentaux. De plus, son employeur a rejeté sa demande d’exemption religieuse.

[5] La Commission a accepté la raison de la mise en congé de l’appelante que l’employeur a fournie. Elle a conclu que l’appelante a été mise en congé en raison de son inconduite. Pour cette raison, la Commission a décidé que l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Question que je dois examiner en premier

Je vais accepter les documents envoyés après l’audience

[6] À l’audience, l’appelante a demandé l’autorisation de déposer des documents supplémentaires qu’elle n’avait pas inclus dans son appel. Il s’agissait de documents relatifs à sa demande d’exemption à la politique de vaccination pour raisons religieuses et au refus de son employeur d’accorder l’exemption.

[7] La Commission savait que l’appelante avait demandé une exemption pour motifs religieux et que celle-ci avait été refusée par l’employeurNote de bas page 2. Comme cela ne causait pas préjudice à la Commission, j’ai permis à l’appelante de déposer les documents dans les sept jours suivant l’audience. Elle les a déposés dans le délai accordé. Les documents ont été versés au dossier d’appel et portent le numéro RGD02.

[8] L’appelante m’a également signalé une affaire du Tribunal qui, selon elle, appuie sa position et dont je devrais tenir compte dans ma décision.

Question en litige

[9] L’appelante a-t-elle été mise en congé en raison d’une inconduite?

Analyse

[10] Pour répondre à cette question, je dois décider deux choses. D’abord, je dois établir pourquoi l’appelante a été mise en congé. Ensuite, je dois décider si la loi considère cette raison comme une inconduite.

Pourquoi l’appelante a-t-elle été mise en congé?

[11] Je conclus que l’appelante a été mise en congé parce qu’elle a refusé de se conformer à la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur.

[12] L’appelante n’est pas en désaccord avec la Commission concernant la raison pour laquelle elle a été mise en congé. Elle dit avoir été mise en congé ou suspendue parce qu’elle a enfreint la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’entrepriseNote de bas page 3.

[13] Je conclus que l’appelante a été avisée le 25 août 2021 par son employeur de son obligation d’être entièrement vaccinée contre la COVID-19. Elle devait se faire vacciner et déclarer son statut vaccinal au plus tard le 30 octobre 2021Note de bas page 4.

[14] Si l’appelante voulait une exemption à la politique pour des raisons médicales ou religieuses, elle pouvait demander une mesure d’adaptation.

[15] L’appelante savait que si elle n’était pas vaccinée ou si elle n’obtenait pas d’exemption à la politique, elle serait placée en congé sans solde sans avantages sociaux pendant six mois. Après cette date, l’employeur réévaluerait s’il allait continuer la relation d’emploiNote de bas page 5.

[16] L’appelante affirme ne pas avoir été vaccinée contre la COVID-19. Elle n’a pas demandé d’exemption médicale, mais dit qu’elle a demandé une exemption à la politique de vaccination pour des raisons religieusesNote de bas page 6.

[17] L’employeur a rejeté la demande d’exemption à la politique de vaccination de l’appelante pour des raisons religieusesNote de bas page 7. L’appelante affirme avoir déposé un grief par l’entremise de son syndicat au sujet du refus de l’employeur d’accorder une exemption pour des motifs religieux.

[18] L’appelante affirme que l’employeur a rejeté son grief et que son syndicat n’y a pas donné suite.

[19] Je conclus que l’appelante a été mise en congé parce qu’elle ne s’est pas conformée à la politique de vaccination de son employeur. Elle ne s’est pas fait vacciner et n’a pas obtenu d’exemption à la politique.

La raison pour laquelle l’appelante a été mise en congé est-elle une inconduite selon la loi?

[20] Selon la loi, la raison du congédiement de l’appelante est une inconduite.

[21] Pour être considérée comme une inconduite au sens de la loi, la conduite doit être délibérée. Cela signifie qu’elle était consciente, voulue ou intentionnelleNote de bas page 8. Une inconduite comprend aussi une conduite qui est tellement insouciante qu’elle est presque délibéréeNote de bas page 9. Pour qu’il y ait inconduite au sens de la loi, il n’est pas nécessaire que l’appelante ait eu une intention coupable (c’est-à-dire qu’elle ait voulu faire quelque chose de mal)Note de bas page 10.

[22] Il y a inconduite si l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée pour cette raisonNote de bas page 11.

[23] La Commission doit prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison d’une inconduite. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduiteNote de bas page 12.

[24] La loi ne dit pas que je dois tenir compte du comportement de l’employeurNote de bas page 13. Je dois plutôt me concentrer sur ce que la prestataire a fait ou n’a pas fait et évaluer s’il s’agit d’une inconduite au sens de la LoiNote de bas page 14.

[25] Je dois me concentrer uniquement sur la Loi sur l’assurance-emploi. Je n’ai pas le pouvoir de décider si d’autres lois offrent des options différentes à l’appelante. Il ne m’appartient pas de décider si l’appelante a été placée en congé sans solde à tort ou si l’employeur aurait dû prendre des mesures d’adaptationNote de bas page 15. Je peux seulement examiner si ce que l’appelante a fait ou omis de faire est une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.

[26] La Commission affirme qu’il y a eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • L’employeur avait une politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19.
  • L’appelante savait que si elle n’était pas vaccinée et ne déclarait pas son statut vaccinal à son employeur, elle serait mise en congé sans solde pendant six mois.
  • L’appelante a choisi de ne pas respecter la politique.
  • Le refus de se conformer à la politique de vaccination était la raison pour laquelle elle a été mise en congé.

[27] L’appelante affirme qu’il n’y a pas eu inconduite pour les raisons suivantes :

  • La politique était injuste et elle n’aurait pas dû être tenue de s’y conformer.
  • La politique était contraire à son contrat de travail et à sa convention collective.
  • La politique exigeait une intervention médicale sur sa personne.
  • La politique était contraire aux lois provinciales, fédérales et internationales.

[28] Je conclus que la Commission a prouvé qu’il y a eu inconduite.

[29] Je suis d’avis que l’appelante était au courant de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de l’employeur en août 2021. Elle savait qu’elle devait être vaccinée au plus tard le 30 octobre 2021 et le déclarer, sinon elle serait mise en congé sans soldeNote de bas page 16.

[30] L’appelante n’a pas demandé d’exemption médicale. Elle a bel et bien demandé une exemption pour des motifs religieux, ce que son employeur a refuséNote de bas page 17.

[31] L’appelante connaissait les sérieuses conséquences du non-respect de la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur. Elle serait mise en congé sans solde pendant six moisNote de bas page 18.

[32] J’estime que l’appelante a délibérément choisi de ne pas respecter la politique de vaccination obligatoire contre la COVID-19 de son employeur. C’est pourquoi elle a été mise en congé sans solde.

[33] Je reconnais que l’appelante affirme qu’elle refusait de se faire vacciner, car elle estimait qu’il n’avait pas été prouvé que les vaccins contre la COVID-19 étaient sans danger. Elle était également frustrée de ne pas avoir reçu de réponses de la part de son employeur.

[34] Malheureusement, ce n’est pas pertinent ici. Comme je l’ai mentionné plus tôt, je peux seulement examiner ce que l’appelante a fait ou n’a pas fait, puis décider si elle savait que ses agissements pouvaient mener à sa mise en congé.

[35] Si l’appelante souhaite approfondir ces questions, il existe d’autres instances devant lesquelles elle peut présenter ses arguments.

Affaire similaire

[36] L’appelante m’a signalé une décision rendue par le Tribunal qui, selon elle, ressemble à sa situationNote de bas page 19. Elle affirme que dans cette autre affaire, l’appelante a choisi de ne pas se faire vacciner et que la Commission n’a pas démontré qu’elle avait perdu son emploi en raison d’une inconduite.

[37] Je souligne que je ne suis pas tenu de suivre les décisions antérieures du Tribunal. Chaque affaire doit être tranchée en fonction des faits présentés. Toutefois, le raisonnement de ces décisions peut souvent être utile. Ce n’est pas le cas dans la présente affaire.

[38] Dans la décision à laquelle l’appelante renvoie, le membre du Tribunal était d’accord avec l’appelante. Il a conclu que la Commission n’avait pas prouvé l’inconduite lorsque l’appelante a perdu son emploi parce qu’elle a choisi de ne pas se faire vacciner.

[39] Le membre a conclu que la Commission n’avait pas prouvé qu’il y avait eu manquement à une obligation découlant expressément ou implicitement du contrat de travail lorsque l’appelante a refusé de se faire vacciner. Il a également conclu que la loi n’exigeait pas d’une personne qu’elle se fasse vacciner.

[40] Je ne suis pas d’accord avec le raisonnement et la décision du Tribunal dans cette autre affaire.

[41] Je signale également que la Commission a porté la décision en appel à la division d’appel du Tribunal de la sécurité socialeNote de bas page 20. Celle-ci a accueilli l’appel et a déclaré que la division générale avait commis une erreur de droit dans son interprétation de la signification d’une inconduite aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi.

[42] Les membres ont conclu que le refus de l’appelante de se conformer à la politique de vaccination de l’employeur constituait une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Elle a été exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[43] Je suis d’avis que le raisonnement de la division d’appel est plus convaincant et conforme à la loi telle que je la comprends.

Alors, l’appelante a-t-elle été mise en congé en raison d’une inconduite?

[44] Selon mes conclusions précédentes, je suis d’avis que l’appelante a été mise en congé en raison d’une inconduite.

Conclusion

[45] La Commission a prouvé que l’appelante a été mise en congé en raison de son inconduite. Pour cette raison, l’appelante est exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

[46] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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