Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JM c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1238

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. M.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (566982) datée du
8 mars 2023 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Gary Conrad
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 26 juin 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 7 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-995

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] La ou les décisions initiales de la Commission de l’assurance-emploi du Canada établissant la dette de 9 000 $ n’ont jamais été communiquées à l’appelant. Il n’est pas clair si le trop-payé résulte d’une ou de plusieurs décisions initiales. Je vais donc parler de la décision initiale (au singulier), mais je note qu’il pourrait y avoir plus d’une décision initiale qui devrait être révisée.

[3] Comme la décision initiale qui a mené au trop-payé est ce que l’appelant veut vraiment faire réviser et comme cette décision initiale ne lui a jamais été communiquée, cela signifie que sa demande de révision n’est pas en retard. La Commission peut donc réviser la décision initiale qui a mené au trop-payé de l’appelant.

Aperçu

[4] Le 19 octobre 2021, un avis de dette a été émis à l’appelant indiquant qu’il devait 9 000 $

[5] Le 5 janvier 2023 et le 18 janvier 2023, la Commission a reçu des demandes de révision de la part de l’appelant lui demandant de réviser la dette de 9 000 $.

[6] La Commission a décidé de ne pas réviser la dette. Elle a décidé que la demande de révision de l’appelant dépassait le délai de 30 jours pour présenter une telle demande. Même s’il est possible d’obtenir une prolongation du délai pour demander une révision, la division générale a décidé que l’explication de l’appelant pour son retard ne satisfaisait pas aux exigences pour accorder plus de temps.

Question que je dois examiner en premier

[7] L’appelant n’était pas présent à l’audience. Il avait demandé que l’audience soit reportée, mais sa demande de report a été rejetée, car il n’a pas expliqué pourquoi il ne pouvait pas y assister ou pourquoi elle devrait être reportée.

[8] Je juge que la demande de report de l’appelant démontre qu’il a reçu l’avis d’audience et qu’il connaissait la date et l’heure de son audience.

[9] Le Tribunal a communiqué avec l’appelant pour savoir pourquoi il avait demandé un report, mais il n’a pas été en mesure de le joindre et il n’a jamais répondu au message laissé par le Tribunal. Par conséquent, aucune raison n’a été fournie avant que je rende la décision de rejeter sa demande de report.

[10] Comme la demande de report a été rejetée, qu’un avis de refus a été envoyé à l’appelant, et qu’il connaissait la date et l’heure de l’audience, celle-ci s’est déroulée comme prévu, mais sans l’appelant.

Question en litige

[11] Je dois trancher les questions suivantes :

[12] La demande de révision de l’appelant a-t-elle été présentée en dehors du délai de 30 jours prévu pour présenter une telle demande?

[13] Dans l’affirmative, la Commission a-t-elle agi de façon judiciaire en décidant de ne pas accorder de prolongation du délai pour la demande de révision?

Analyse

La demande de révision de l’appelant était-elle en retard?

[14] Je considère que la demande de révision de l’appelant n’était pas en retard, puisque la décision initiale de la Commission ne lui a jamais été communiquée.

[15] Une partie prestataire peut demander à la Commission de réviser une décision qu’elle a rendue à tout moment dans les 30 jours suivant la date à laquelle la décision lui a été communiquéeNote de bas de page 1.

[16] La Cour d’appel fédérale a déclaré que le décideur a le fardeau de prouver que sa décision a été communiquée à la partie appelanteNote de bas de page 2. Il s’agit ici de la décision initiale qui a été prise par la Commission et qui a conduit à l’établissement de la dette. La Commission doit donc prouver qu’elle a été communiquée à l’appelant.

[17] La communication d’une décision exige que l’appelant connaisse le contenu de la décision et ses conséquencesNote de bas de page 3.

[18] La Commission soutient que l’appelant a reçu l’avis de dette daté du 19 octobre 2021, ce qui signifie qu’il savait qu’une décision avait été rendueNote de bas de page 4.

[19] Dans ses demandes de révision, l’appelant a déclaré qu’il n’avait jamais reçu de lettre de décision, seulement un avis de dette de 9 000 $Note de bas de page 5.

[20] Je reconnais que l’appelant a reçu l’avis de dette du 19 octobre 2021 et que la Cour fédérale a confirmé qu’un avis de dette est une décision de la CommissionNote de bas de page 6 ; toutefois, je juge que l’avis de dette n’est pas ce que l’appelant demande à la Commission de réviser.

[21] Un avis de dette n’est pas émis sans raison. Il doit y avoir une ou des décisions sous-jacentes qui ont été rendues et qui ont mené à la conclusion que l’appelant devait de l’argent à la Commission. Il y a toujours une décision initiale qui entraîne l’établissement d’une dette (et l’avis de celle-ci).

[22] Même si l’appelant a dit dans sa demande de révision qu’il contestait le trop-payé de 9 000 $, puisqu’il n’a pas fait de demande d’annulation, la seule façon de se débarrasser de la dette serait de réviser la décision initiale qui l’a entraînée. Ainsi, je considère que lorsqu’il a demandé la révision de la dette, l’appelant demandait la révision de la décision ayant entraîné l’établissement de la dette. La question est donc de savoir quand la décision initiale qui a mené à l’établissement de la dette lui a été communiquée.

[23] Je conclus que la décision initiale qui a mené à l’établissement de la dette n’a jamais été communiquée à l’appelant.

[24] Je retiens que la Commission a l’habitude d’envoyer une lettre aux parties appelantes pour les informer des décisions initiales qu’elle a rendues. Toutefois, je ne dispose d’aucune preuve montrant qu’une telle lettre a été envoyée à l’appelant ou qu’il a eu une conversation quelconque où il a été informé de la ou des décisions initiales ayant mené à l’établissement de la dette de 9 000 $.

[25] Je remarque que dans ses observations, la Commission mentionne seulement l’avis de dette du 19 octobre 2021. Puis, dans son dossier de décision de refuser à l’appelant une prolongation du délai pour présenter une demande de révision, elle mentionne seulement la date du 19 octobre 2021.

[26] Puisque la Commission est responsable de prouver que la décision a été communiquée à l’appelantNote de bas de page 7, et comme je n’ai aucune preuve d’une lettre de décision initiale ou d’un téléphone au sujet d’une telle décision initiale, je peux seulement conclure que la décision initiale qui a mené à l’établissement de la dette n’a jamais été communiquée à l’appelant.

[27] Oui, j’admets qu’il y a certains renseignements sur l’avis de dette concernant la décision qui a mené à l’établissement de la dette de 9 000 $, mais ils ne sont pas suffisants pour communiquer la décision à l’appelant. L’avis ne fournit pas assez de détails et les renseignements qu’il contient prêtent à confusion.

[28] Premièrement, l’avis de dette indique que le versement anticipé de 2 000 $ de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) a été transformé en dette parce que l’appelant a reçu deux versements pour la même périodeNote de bas de page 8.

[29] Toutefois, elle affirme plus tard que le paiement anticipé de la PCU a été transformé en une dette de 2 000 $ parce que l’appelant n’avait plus droit au paiement anticipé de la PCU. Cela donne l’impression que le même paiement s’est transformé en dette à deux reprises, mais pour deux raisons différentes.

[30] Je souligne également que pour rendre la situation encore plus confuse, la Commission n’a pas en fait versé le paiement de la PCU, puisque c’est l’Agence du revenu du Canada qui l’a fait. La Commission a versé la prestation d’assurance-emploi d’urgence ou la prestation d’assurance-emploi d’urgence. L’avis de dette confirme cette confusion en indiquant à d’autres endroits que l’appelant lui doit des milliers de dollars de prestations d’urgence parce qu’il a été payé deux fois pour la même période.

[31] Cette confusion est ensuite aggravée par le fait que l’avis de dette indique que les événements qui ont amené l’appelant à devoir 9 000 $ à la Commission se sont produits en août et en septembre 2021, alors que la prestation d’assurance-emploi d’urgence et la PCU n’étaient plus en vigueurNote de bas de page 9, et à une époque où la Commission affirme que l’appelant ne recevait ni la prestation d’assurance-emploi d’urgence ni la PCUNote de bas de page 10.

[32] Compte tenu de ce qui précède, en examinant l’avis de dette, il n’est pas clair quelle décision initiale a mené à l’établissement de la dette. Si les renseignements dans l’avis de dette ne sont pas clairs pour moi, ils ne le sont certainement pas pour l’appelant. Autrement dit, les renseignements qui se trouvent dans l’avis de dette ne [traduction] « communiquent » pas à l’appelant la décision initiale qui a mené à l’établissement de la dette. De plus, comme je l’ai déjà constaté plus haut, la décision que l’appelant veut faire réviser est celle qui a mené à l’établissement de la dette.

[33] Ainsi, en conclusion, je considère comme un fait établi que ce que l’appelant veut faire réviser est la décision ayant mené à l’établissement de la dette. Je conclus que cette ou ces décisions ne lui ont jamais été communiquées. Il a seulement appris qu’une décision avait été rendue lorsqu’il a reçu un avis de dette. La raison pour laquelle la dette de 9 000 $ a été établie, et la façon dont cela a été fait ne lui a jamais été communiquée.

[34] Par conséquent, j’estime que puisque la décision initiale de la Commission qui a entraîné la dette n’a jamais été communiquée à l’appelant et qu’il s’agit de la décision qu’il souhaite faire réviser, sa demande de révision n’est pas en retard, parce que la période de 30 jours pour demander une révision à compter de la date de la communication de la décision n’a jamais commencé.

[35] Je suggère à la Commission d’envoyer à l’appelant les avis de décisions initiales qui ont mené à l’établissement de la dette ou de communiquer avec lui pour les lui communiquer. Je suggère également à l’appelant de communiquer avec la Commission pour s’informer de ces décisions. L’appelant a déjà demandé que la décision initiale soit révisée dans sa demande de révision de janvier 2023 (comme je l’ai constaté plus haut) et comme il n’est pas en retard, cela signifie que la Commission peut procéder à la révision.

La Commission a-t-elle agi de façon judiciaire?

[36] Comme j’ai conclu que la demande de révision de l’appelant n’était pas en retard, il n’est pas nécessaire que je vérifie si la Commission a agi de façon judiciaire en refusant à l’appelant une prolongation du délai pour présenter sa demande de révision.

Conclusion

[37] L’appel est accueilli.

[38] La décision initiale de la Commission qui a mené à l’établissement de la dette, ce que l’appelant souhaite vraiment faire réviser, n’a jamais été communiquée à l’appelant. Ainsi, la période de 30 jours pour présenter une demande de révision à compter de la date de la communication de la décision n’a jamais commencé, de sorte que sa demande de révision n’est pas en retard.

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