Assurance-emploi (AE)

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Citation : PR c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1654

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : P. R.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision (574894) datée du 4 avril 2023 rendue par la Commission de l’assurance-emploi du Canada (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Josée Langlois
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 17 juillet 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 24 juillet 2023
Numéro de dossier : GE-23-1284

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant a démontré qu’il avait un motif valable justifiant son retard à avoir présenté ses déclarations du prestataire entre le 4 septembre 2022 et le 13 septembre 2022. Un motif valable est une raison acceptable selon la Loi pour expliquer le retard.

Aperçu

[3] L’appelant a présenté une demande de prestations le 21 octobre 2021. Le 13 septembre 2022, il a tenté de transmettre sa déclaration du prestataire pour la période débutant le 31 juillet 2022, mais cette tentative a échoué parce qu’il avait jusqu’au 3 septembre 2022 pour le faire.

[4] Le 14 septembre 2022, l’appelant a demandé à la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) que sa déclaration du prestataire soit considérée comme ayant été présentée le 31 juillet 2022. Il a expliqué que c’était un oubli de sa part.

[5] Pour que ce soit possible, l’appelant doit démontrer qu’il avait un motif valable justifiant son retard à présenter ses déclarations du prestataire pour toute la période du retard, soit du 4 septembre 2022 au 13 septembre 2022.

[6] La Commission a décidé que l’appelant n’avait pas présenté un motif valable expliquant son retard à produire ses déclarations du prestataire dans le délai prévu et elle a rejeté sa demande.

[7] L’appelant n’est pas d’accord. Il explique qu’il regrette son oubli et il considère que la Commission est sévère. Il indique qu’il est chauffeur d’autobus depuis de nombreuses années, qu’il n’est pas une personne négligente, qu’il demande des prestations uniquement pour quelques semaines dans l’année et le fait de lui refuser ses prestations affecte beaucoup sa situation financière.

[8] Je dois déterminer si l’appelant a une explication raisonnable justifiant son retard à transmettre sa déclaration du prestataire dans le délai prévu.

Question en litige

[9] L’appelant avait-il une explication raisonnable justifiant son retard à présenter sa déclaration du prestataire entre le 4 septembre 2022 et le 13 septembre 2022 ?

Analyse

[10] L’appelant veut que sa demande de prestations d’assurance-emploi soit traitée comme s’il avait produit sa déclaration du prestataire entre le 31 juillet 2022 et le 3 septembre 2022.

[11] Pour qu’une déclaration du prestataire soit considérée comme ayant été présentée plus tôt que la date de la déclaration réelle, l’appelant doit démontrer qu’il avait un motif valable justifiant son retard.Note de bas de page 1 L’appelant doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il avait un motif valable justifiant son retard.

[12] De plus, pour établir qu’il existe un motif valable, l’appelant doit également démontrer qu’il a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait si elle avait été placée dans des circonstances semblables.Note de bas de page 2 Autrement dit, il doit démontrer qu’il a agi comme une personne raisonnable et réfléchie l’aurait fait si elle avait été placée dans une telle situation.

[13] L’appelant doit aussi démontrer qu’il a vérifié assez rapidement s’il avait droit à des prestations et quelles obligations la Loi lui imposait.Note de bas de page 3 Cela veut dire que l’appelant doit démontrer qu’il a fait de son mieux pour essayer de s’informer de ses droits et responsabilités dès que possible. Si l’appelant ne l’a pas fait, il doit alors démontrer que des circonstances exceptionnelles l’en ont empêché.Note de bas de page 4

[14] Un prestataire dispose d’un délai de trois semaines pour présenter sa demande de prestations pour une semaine visée.Note de bas de page 5 De plus, il est nécessaire qu’il présente une déclaration du prestataire pour chaque semaine pour laquelle il souhaite recevoir des prestations.Note de bas de page 6

[15] Le 13 septembre 2022, l’appelant a tenté de transmettre une déclaration du prestataire pour la période du 31 juillet 2022 au 3 septembre 2022. Le système de l’assurance-emploi n’a pas accepté sa demande parce qu’il était en retard et que le délai dont il disposait pour le faire était dépassé.

[16] Le lendemain, l’appelant a contacté Service Canada. Il a indiqué qu’il avait oublié de présenter sa déclaration du prestataire.

[17] Il a également expliqué qu’il avait attendu de recevoir la rémunération de son employeur avant de faire sa déclaration parce qu’il ne voulait pas faire de fausses déclarations. Il explique que cette rémunération lui a été versée tardivement parce qu’il a travaillé des heures supplémentaires.

[18] Lors de l’audience, l’appelant explique qu’un employé de Service Canada lui a déjà dit de déclarer les montants exacts afin de ne pas faire de fausses déclarations, il affirme que c’est pour cette raison qu’il a attendu de recevoir les montants exacts avant de produire sa déclaration du prestataire. Il explique également qu’un autre employé lui a dit pendant le processus de révision qu’il pouvait faire une modification à la rémunération qu’il avait déclarée et l’appelant le comprend. Cependant, il explique qu’il a eu des informations différentes selon les agents consultés.

[19] L’appelant a également expliqué qu’il a oublié de faire sa déclaration du prestataire à cette période parce qu’habituellement, il n’a pas une demande de prestations renouvelée comme ce fût le cas l’an dernier. L’appelant mentionne qu’étant donné qu’il a reçu pendant une certaine période des prestations provenant du programme de la Prestation canadienne d’urgence plutôt que des prestations d’assurance-emploi comme habituellement, sa période de prestations d’assurance-emploi n’a pas débuté au même moment dans l’année et elle ne s’est donc pas terminée au même moment. Il explique que normalement, quand l’école recommence, il fait sa demande et il produit sa première déclaration du prestataire.

[20] L’appelant a expliqué qu’il est chauffeur d’autobus et qu’il présente une demande de prestations d’assurance-emploi chaque année depuis plusieurs années. Cependant, la demande de prestations dont il est question a été chamboulée en raison des mesures prises pendant la Covid-19. L’appelant explique qu’il est habitué à produire ses déclarations du prestataire, mais que cette fois-ci, étant donné que sa période de prestations a été prolongée, il n’a pas reçu d’indications qu’il devait faire quelque chose de différent et, selon ses explications, il a oublié de le faire.

[21] L’appelant mentionne que lui refuser ces quelques semaines de prestations, entre le 31 juillet 2022 et le 3 septembre 2022, a des conséquences importantes sur sa situation financière et il n’est pas d’accord avec la Commission qui insiste et soutient qu’il a été négligent. L’appelant fait valoir qu’il est un chauffeur d’autobus fiable et respectable.

[22] La Commission affirme que les explications de l’appelant ne démontrent pas que du 31 juillet 2022 au 13 septembre 2022, il y avait un obstacle insurmontable qui l’empêchait de présenter sa demande de prestations, par exemple une maladie grave, une hospitalisation ou de la détention).

[23] Elle soutient que les explications de l’appelant démontrent qu’il a simplement oublié de présenter ses déclarations du prestataire et qu’il a été négligent. Pour cette raison, elle affirme qu’une personne raisonnable, placée dans la même situation, aurait agi avant.

[24] De plus, elle fait valoir que si l’appelant ne savait pas qu’il devait présenter ses déclarations du prestataire dans un délai prescrit, l’ignorance de la Loi ne constitue pas non plus un motif valable justifiant un retard.

[25] Il est vrai que l’ignorance de la Loi ne constitue pas un motif valable pour justifier un retard à présenter les déclarations du prestataire. Cependant, dans ce cas-ci, je suis d’accord avec l’appelant. L’appelant est habitué à présenter ses déclarations du prestataire, il le fait chaque année, mais cette fois-ci il était à la fin d’une période de prestations plutôt qu’au début comme c’est le cas chaque année.

[26] Je suis d’avis que des circonstances exceptionnelles expliquent son retard à présenter ses déclarations du prestataire. Après avoir reçu des prestations provenant du programme de la Prestation canadienne d’urgence, sa période de prestations a été établi à une période différente et il a dû renouveler sa période de prestations. L’appelant a d’abord mis l’accent sur son oubli. Cependant, il ne faut pas oublier que c’est d’abord et avant tout parce qu’il n’avait pas reçu la rémunération attendue de son employeur que les choses ne se sont pas passées comme chaque fois qu’il présente une demande de prestations.

[27] Étant donné que l’employeur a mis plus de temps à lui verser une rémunération pour des heures supplémentaires, l’appelant a pris plus de temps à produire sa déclaration du prestataire.

[28] De plus, même si je comprends la Commission lorsqu’elle indique que l’appelant a été avisé du délai dont il disposait lorsqu’il a produit sa déclaration du prestataire pour la semaine du 3 août 2022, étant donné que cette fois-ci sa période de prestations était renouvelée, il n’a pas reçu les informations de la même manière qu’habituellement. L’appelant a attendu la rémunération de son employeur afin de ne pas faire de fausses déclarations et il a expliqué à la Commission que c’était un oubli de sa part.

[29] Ainsi, l’appelant était en retard de dix jours lorsqu’il a contacté la Commission. Même si la Commission soutient que l’appelant n’a fait aucun effort pour s’enquérir de ses droits et s’informer, l’appelant attendait de recevoir ses prestations et il n’a pas abandonné ses démarches : il attendait la rémunération de son employeur afin de faire une déclaration exacte. En ce sens, j’accepte son explication comme étant un motif valable justifiant son retard.

[30] L’appelant n’était pas en retard de plusieurs mois, il était en retard de quelques jours et j’estime qu’il a démontré qu’il avait une explication raisonnable pour présenter ses déclarations du prestataire en retard. En raison des circonstances exceptionnelles reliées au renouvellement de sa période de prestations, l’appelant, pourtant habitué à présenter une demande de prestations, a dû composer avec la demande renouvelée de prestations tout en attendant que son employeur lui verse sa rémunération pour des heures supplémentaires travaillées. L’appelant ne voulait pas faire de fausses déclarations.

[31] L’appelant devait présenter sa déclaration du prestataire au plus tard le 3 septembre 2022, mais il a reçu tardivement sa rémunération et il a tenté de faire sa déclaration le 13 septembre 2022.

[32] Étant donné les circonstances présentées, je suis d’avis que l’appelant a agi comme une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances l’aurait fait.

[33] Les explications de l’appelant sont raisonnables et je conclus qu’il a présenté un motif valable justifiant son retard à présenter ses déclarations du prestataire entre le 3 septembre 2022 et le 13 septembre 2022.

Conclusion

[34] L’appelant a démontré qu’il avait un motif valable justifiant le retard à présenter ses déclarations du prestataire pendant toute la période du retard. Cela signifie que sa demande peut être traitée comme si ses déclarations du prestataire avaient été présentées dans le délai prescrit.

[35] L’appel est accueilli.

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