Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1258

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à la permission de faire
appel

Partie demanderesse : C. P.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 13 juin 2023
(GE-22-2057)

Membre du Tribunal : Candace R. Salmon
Date de la décision : Le 13 septembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-711

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Décision

[1] Je refuse la permission de faire appel parce qu’il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] C. P. est la prestataire. Elle a travaillé pour une compagnie aérienne pendant la pandémie de COVID-19. Son employeur a adopté une politique de vaccination contre la COVID-19. Une partie de la politique précisait que les employés devaient soit présenter une preuve de vaccination contre la COVID-19, soit obtenir une exemption de la politique.

[3] La prestataire a demandé une exemption à la politique. Son employeur a refusé la demande. Elle n’a pas fourni de preuve de vaccination avant la date limite fixée par l’employeur, qui l’a donc mise en congé sans solde.

[4] La prestataire a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé qu’elle n’était pas admissible aux prestations parce qu’elle avait perdu son emploi en raison de son inconduite.

[5] La division générale était d’accord avec la Commission. Elle a conclu que la prestataire n’avait pas droit aux prestations d’assurance-emploi pendant qu’elle était suspendue de son emploi parce que sa suspension découlait d’une inconduite.

[6] La prestataire veut porter la décision de la division générale en appel à la division d’appel. Elle doit obtenir la permission de faire appel pour aller de l’avant. Elle affirme que la division générale a commis des erreurs de fait et de droit.

[7] Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Questions en litige

[8] Est-il possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou qu’elle a fondé sa décision sur une erreur importante concernant les faits de l’affaire lorsqu’elle a conclu que la prestataire ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi en raison d’une inconduite?Note de bas de page 1

[9] Y a-t-il d’autres raisons de donner la permission de faire appel?

Je n’accorde pas la permission de faire appel

[10] Un appel peut aller de l’avant seulement si la division d’appel donne la permission de faire appel.Note de bas de page 2 Je dois être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.Note de bas de page 3 Cela signifie qu’il doit exister un moyen défendable qui permettrait à l’appel d’être accueilli.Note de bas de page 4

[11] Pour satisfaire à ce critère juridique, la prestataire doit établir que la division générale a peut-être commis une erreur reconnue par la loi.Note de bas de page 5 Les moyens d’appel possibles à la division d’appel sont les suivants :

  • la division générale a agi de façon injuste;
  • elle a outrepassé ses pouvoirs ou a refusé de les exercer;
  • elle a commis une erreur de droit;
  • elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.Note de bas de page 6

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit

[12] La division générale peut commettre une erreur de droit si elle n’applique pas la bonne loi ou si elle utilise la bonne loi, mais qu’elle ne l’interprète pas ou ne l’applique pas correctement.Note de bas de page 7

[13] La loi prévoit qu’une partie prestataire suspendue en raison d’une inconduite n’a pas droit aux prestations d’assurance-emploi.Note de bas de page 8 Il en résulte une « inadmissibilité » aux prestations d’assurance-emploi.

[14] Il n’y a pas de définition de l’inconduite dans la Loi sur l’assurance-emploi. Selon la définition de l’« inconduite » de la Cour d’appel fédérale, l’inconduite doit être délibérée; par conséquent, l’inconduite doit être consciente, voulue ou intentionnelle.Note de bas de page 9

[15] La Cour a également affirmé qu’il y a inconduite si la prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite pouvait l’empêcher de remplir ses obligations envers l’employeur et que le congédiement (ou la suspension dans la présente affaire) était une réelle possibilité.Note de bas de page 10

[16] La prestataire soutient que la division générale s’est fondée sur le mauvais article de la loi applicable et n’a pas appliqué la bonne loi.Note de bas de page 11 Elle a également fait valoir que la division générale avait dit qu’elle ne pouvait pas [traduction] « rendre une décision » sur l’affaire parce qu’elle n’était pas au bon niveau.

[17] La prestataire n’a pas précisé les articles de loi que la division générale aurait omis d’appliquer. Elle n’a pas non plus expliqué en quoi les articles de loi utilisés par la division générale étaient incorrects. J’ai examiné la décision pour vérifier s’il y avait des erreurs de droit.

[18] La division générale a examiné si la prestataire avait été suspendue. La prestataire a dit qu’elle avait été forcée de prendre un congé sans solde; selon elle, ce n’est pas être la même chose qu’une suspension.Note de bas de page 12 La division générale a décidé que la prestataire avait cessé de travailler parce que son employeur l’avait mise en congé temporaire lorsqu’elle a refusé de respecter sa politique de vaccination contre la COVID-19.Note de bas de page 13 La division générale a conclu qu’il s’agissait de la même chose qu’une suspension et qu’il n’y avait aucune preuve démontrant que la prestataire avait cessé de travailler pour une autre raison.Note de bas de page 14

[19] La division générale a ensuite examiné si la suspension de la prestataire était attribuable à une inconduite. Elle a expliqué comment les tribunaux ont décrit l’inconduite par le passé et certains des éléments à prendre en considération pour décider s’il y a eu inconduite. Finalement, elle a signalé qu’il incombe à la Commission de prouver l’inconduite.Note de bas de page 15 La division générale a décidé que la suspension de la prestataire était due à son inconduite; elle a fondé sa conclusion sur des décisions judiciaires qui expliquent ce qu’est l’inconduite.Note de bas de page 16

[20] On ne peut pas soutenir que la division générale a utilisé la mauvaise loi lorsqu’elle a décidé que la suspension de la prestataire était due à une inconduite. La décision est appuyée par la loi et la jurisprudence citées dans la décision de la division générale.

[21] De plus, la division générale a affirmé que la prestataire avait présenté d’autres observations, toutefois celles-ci ne relevaient pas de sa compétence. La prestataire a décrit cela comme étant le fait que la division générale n’était pas au bon niveau pour rendre une décision.Note de bas de page 17 La division d’appel n’est pas non plus en mesure de rendre une décision sur les questions relatives aux conventions collectives, au processus d’exemption de l’employeur ou à la sécurité du vaccin contre la COVID-19.Note de bas de page 18 La division générale a déclaré qu’elle avait seulement le pouvoir de rendre une décision sur l’admissibilité d’une personne aux prestations d’assurance-emploi, ce qui signifie qu’elle pouvait seulement examiner la conduite de la prestataire et son lien avec les exigences de la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas de page 19 On ne peut pas soutenir qu’il s’agit d’une erreur de droit.

On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait

[22] On ne peut pas soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur importante concernant les faits de l’affaire.

[23] La prestataire soutient qu’on l’a forcée de prendre un congé sans solde. Selon elle, la période de congé n’avait pas été établie correctement parce qu’elle ne l’avait pas demandée. Son contrat de travail précise qu’un employé doit demander une période de congé.

[24] La division générale n’a pas ignoré ou mal compris le fait que la prestataire n’avait pas choisi de prendre un congé. Elle a clairement reconnu que l’employeur avait suspendu la prestataire parce qu’elle n’avait pas respecté une politique. Elle a précisé que la prestataire n’a pas choisi de quitter son emploi et qu’elle n’a pas cessé de travailler en raison d’un manque de travail. Note de bas de page 20

[25] La prestataire a également déclaré que les « faits » qu’elle a présentés n’avaient pas été reconnus. La prestataire a présenté des éléments de preuve à la division générale. La division générale a décidé quels éléments de preuve constituaient des faits et ensuite elle a expliqué pourquoi elle s’est fondée sur certains faits. La division générale n’avait pas à se référer à tous les éléments de preuve au dossier. On présume que la division générale a considéré tous les éléments de preuve.Note de bas de page 21

L’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès

[26] Le Tribunal doit respecter la loi, y compris la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social. Celle-ci établit les règles pour les appels à la division d’appel. La division d’appel n’offre pas aux parties l’occasion de plaider à nouveau leur cause. Elle décide si la division générale a commis une erreur au titre de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

[27] Une décision récente de la Cour fédérale porte sur des faits semblables à ceux de la présente affaire. Il s’agit également dans ce cas-là d’une personne qui ne pouvait pas recevoir de prestations d’assurance-emploi parce qu’elle avait perdu son emploi après avoir refusé de se conformer à la politique de vaccination contre la COVID-19 de son employeur.

[28] Dans cette affaire-là, la Cour a confirmé le rôle restreint du Tribunal. Elle a précisé que le Tribunal doit décider si une partie prestataire a été congédiée de son emploi en raison d’une inconduite. La Cour a déclaré que le Tribunal n’est pas autorisé par la loi à répondre aux questions juridiques, éthiques et factuelles que la prestataire a soulevées parce que celles-ci dépassent la portée de son mandat.Note de bas de page 22

[29] En l’espèce, la prestataire a fait valoir qu’elle n’avait pas reçu assez de renseignements pour prendre une décision éclairée, qu’elle devait faire ses propres recherches et que son relevé d’emploi montrait qu’elle était en congé personnel (ce qui ne correspond pas à une inconduite). Elle a répété encore une fois qu’elle estimait que sa convention collective avait été violée et que son employeur n’avait pas tenu compte de ses croyances sincères. Ce sont tous des exemples d’arguments qui ne relèvent pas de la compétence du Tribunal.

[30] J’ai également souligné que la prestataire a fait valoir que la politique de l’employeur violait ses droits au titre de la Charte canadienne des droits et libertés. Il s’agit de l’un des nombreux arguments dans les observations présentées à la division générale. J’ai écouté l’audience et la prestataire n’a présenté aucune observation précise au sujet de ses droits garantis par la Charte. La division générale n’a pas à se référer à chaque élément de preuve ou argument présenté. La Cour fédérale a récemment confirmé qu’il n’est [traduction] « pas déraisonnable pour un décideur de ne pas traiter d’arguments juridiques qui ne relèvent pas de son mandat juridique ».Note de bas de page 23 Cela fait écho à la décision Ceccetto, qui a confirmé le rôle étroit et spécifique du Tribunal.Note de bas de page 24

[31] Je reconnais que la prestataire n’est pas d’accord avec la décision de la division générale, mais cela ne suffit pas pour que j’intervienne. Je ne peux pas réévaluer la preuve en vue de tirer une conclusion plus favorable pour la prestataire.Note de bas de page 25

[32] Je suis convaincue que la division générale n’a pas mal interprété la loi. J’estime qu’elle a examiné adéquatement les éléments de preuve pertinents.Note de bas de page 26 On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur.

Conclusion

[33] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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