Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 299

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : C. F.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission
de l’assurance-emploi du Canada (447624) datée du
6 septembre 2022 (communiquée par Service
Canada)

Membre du Tribunal : Jillian Evans
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 28 mars 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 10 mai 2023
Numéro de dossier : GE-22-3397

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante a reçu 2 000 $ de prestations de plus que ce à quoi elle était admissible.

Aperçu

[3] L’appelante, C. F., est assistante dentaire. Elle a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi le 16 mars 2020. Le bureau dentaire où elle travaillait a fermé ses portes au début du confinement lié à la COVID-19. Elle a été mise à pied.

[4] En raison de la pandémie, le gouvernement a modifié la Loi sur l’assurance-emploi pour créer une nouvelle prestation : la prestation d’assurance-emploi d’urgence (PAEU).Note de bas de page 1

[5] Entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020, les prestataires qui auraient autrement eu droit à des prestations régulières ou spéciales d’assurance-emploi ont plutôt reçu la PAEU.Note de bas de page 2 Le taux hebdomadaire de la PAEU était de 500 $.Note de bas de page 3

[6] On a établi une période de prestations d’assurance-emploi d’urgence pour C. F. à compter du 15 mars 2020. Elle a touché des prestations de 500 $ par semaine pendant six semaines, soit les semaines du 15 mars, du 22 mars, du 29 mars, du 5 avril, du 12 avril et du 19 avril 2020.

[7] En plus de ces paiements, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a également versé un paiement forfaitaire anticipé de 2 000 $ à l’appelante, ce qui représente quatre semaines de PAEU. Ce paiement forfaitaire a été prévu par la loi dans le cadre des modifications apportées à la Loi sur l’assurance-emploi afin de transmettre des fonds aux prestataires comme C. F. le plus rapidement possible pendant les premières semaines de la pandémie.Note de bas de page 4

[8] C. F. a reçu son paiement anticipé forfaitaire le 6 avril 2020.

[9] L’employeur de l’appelante a demandé la subvention salariale d’urgence du Canada et a recommencé à lui verser son salaire six semaines après sa mise à pied. C. F. a donc cessé d’être admissible aux prestations d’assurance-emploi. Elle est finalement retournée au travail en juin 2020.

[10] Dix-huit mois plus tard, à la fin de novembre 2021, l’appelante a été avisée par la Commission qu’elle avait reçu un trop-payé de PAEU. Un avis de dette lui a été envoyé.

[11] La Commission affirme que C. F. a reçu 5 000 $ en prestations d’assurance-emploi d’urgence (l’équivalent de 10 semaines de prestations) alors qu’elle n’avait droit qu’à 3 000 $ ou 6 semaines de prestations. Par conséquent, l’appelante a un trop-payé de 2 000 $ qu’elle doit rembourser.  

[12] L’appelante affirme qu’elle n’a pas demandé la PCU, la PAEU ni aucune autre prestation gouvernementale liée à la pandémie. Elle voulait simplement avoir accès aux prestations régulières d’assurance-emploi; régime auquel elle a cotisé pendant toute sa vie professionnelle.   

[13] Elle dit n’avoir rien fait de mal. Elle a simplement demandé les prestations auxquelles elle était admissible. Elle n’a pas demandé un paiement anticipé. Elle a déjà payé de l’impôt sur les prestations d’assurance-emploi d’urgence qu’elle a reçues. Elle dit qu’elle ne devrait pas avoir à rembourser quoi que ce soit parce que c’était une erreur de la Commission.

[14] Je dois décider si C. F. a reçu plus de prestations que ce à quoi elle était admissible.

Question que je dois examiner en premier

[15] Au début de l’audience, l’appelante a indiqué qu’elle n’avait pas reçu du Tribunal le dossier de révision de la Commission (GD03) ni ses observations (GD04).

[16] Ayant examiné le dossier numérique, je n’étais pas convaincue que les documents GD03 et GD04 avaient bel et bien été envoyés à l’appelante.

[17] De sorte que j’ai donné trois choix à l’appelante :

  1. a) J’accepterais de reporter l’audience pour veiller à ce qu’on lui envoie les documents de la Commission et qu’elle ait le temps de les examiner avant l’audience reportée.
  2. b) Nous pourrions procéder à son audience comme prévu, mais je prendrais les dispositions nécessaires pour que les documents de la Commission lui soient envoyés après l’audience et je lui accorderais deux semaines pour me fournir toute réponse écrite au dossier et aux observations de la Commission. J’accepterais toutefois seulement ces observations écrites comme documents soumis après l’audience.
  3. c) Nous pourrions procéder à son audience et elle pourrait renoncer au droit de recevoir et d’examiner le dossier et les observations de la Commission.

[18] C. F. a choisi la deuxième option. L’audience s’est déroulée comme prévu. Les documents GD03 et GD04 lui ont été envoyés par courriel le 28 mars 2023 et elle a eu jusqu’au 14 avril 2023 pour présenter des observations écrites après l’audience.

[19] C. F. a confirmé avoir reçu les documents GD03 et GD04. Elle n’a pas fourni d’observations écrites supplémentaires avant le 14 avril 2023.

[20] Je conclus que j’ai le droit de rendre une décision sur la foi du dossier tel qu’il se présentait au 14 avril 2023. C’est ce que je ferai ci-après.

Questions en litige

[21] La Commission était-elle justifiée de verser à l’appelante des prestations d’assurance-emploi d’urgence plutôt que des prestations régulières d’assurance-emploi pour la période du 15 mars 2020 au 25 avril 2020?

[22] L’appelante a-t-elle reçu plus de PAEU que ce à quoi elle était admissible?

Analyse

La Commission était justifiée de verser à l’appelante des PAEU au lieu de prestations régulières d’assurance-emploi.

[23] L’appelante affirme qu’elle n’a pas demandé la PCU, la PAEU ni aucune autre prestation gouvernementale liée à la COVID-19. C. F. affirme que lorsqu’elle a présenté une demande en ligne, elle remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations régulières d’assurance-emploi. Elle a présenté une demande de prestations régulières et elle aurait dû recevoir des prestations régulières.

[24] Elle dit qu’elle a cotisé à l’assurance-emploi toute sa vie et qu’elle voulait simplement avoir accès aux prestations régulières. L’appelante affirme que la Commission a eu tort de lui verser des PAEU, car ce n’est pas ce qu’elle a demandé. C. F. affirme que si elle avait reçu des prestations régulières, elle ne serait pas confrontée à ce problème du trop-payé.

[25] La Commission affirme qu’en raison de la pandémie de COVID-19, des modifications ont été apportées à la Loi sur l’assurance-emploi.

[26] Ces changements ont fait en sorte qu’entre le 15 mars 2020 et le 26 septembre 2020, les prestataires qui auraient autrement été admissibles aux prestations régulières d’assurance-emploi ont plutôt reçu la PAEU. Le taux hebdomadaire de la PAEU était de 500 $.

[27] La Commission affirme que ces modifications à la Loi n’ont pas laissé de choix à l’appelante. Elle ne pouvait pas recevoir de prestations régulières pendant sa période de prestations parce qu’elles n’étaient pas disponibles à ce moment-là. Le seul type de prestations que l’appelante pouvait recevoir c’était la PAEU. On devait considérer qu’elle avait demandé cette prestation-là aux termes de la Loi sur l’assurance-emploi.Note de bas de page 5

[28] Je conclus que l’appelante n’était pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi entre le 15 mars 2020 et le 25 avril 2020 puisque ce type de prestations n’était pas disponible pendant la période pour laquelle elle le demandait. La Commission était justifiée de verser à l’appelante des prestations d’assurance-emploi d’urgence au taux hebdomadaire établi de 500 $ pendant la période d’admissibilité.

L’appelante a reçu plus de prestations de la PAEU que ce à quoi elle était admissible. 

[29] Si une personne a reçu des prestations d’assurance-emploi – y compris des prestations d’assurance-emploi d’urgence – auxquelles elle n’était pas admissible, elle doit les rembourser.Note de bas de page 6

[30] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit que la Commission dispose d’un délai de 36 mois pour réviser une demande de prestations et peut demander le remboursement de tout trop-payé pendant ce délai.Note de bas de page 7

[31] L’appelante et la Commission conviennent que l’appelante a reçu un total de 5 000 $ en PAEU. Il s’agit du montant que C. F. a inscrit dans sa déclaration de revenus et qui figure sur son T4E.Note de bas de page 8

[32] La Commission affirme que lorsqu’elle a versé le paiement anticipé de 2 000 $ à C. F., le 6 avril 2020, elle avait l’intention de le « récupérer » au cours des versements ultérieurs de la PAEU. Elle avait l’intention de [traduction] « ne pas traiter » quatre semaines de prestations plus tard, au cours de la période de prestations, pour compenser l’avance qu’elle avait reçue.

[33] Finalement, C. F. n’a pas touché des prestations d’assurance-emploi d’urgence assez longtemps pour que ce soit le cas. Le paiement anticipé n’a jamais été compensé.

[34] La Commission soutient que l’appelante était admissible à la PAEU pendant six semaines du 15 mars 2020 au 25 avril 2020. Son admissibilité a pris fin lorsque son employeur a recommencé à lui verser son salaire grâce à la subvention salariale d’urgence du Canada. Ces 6 semaines représentent 3 000 $ et c’est d’ailleurs tout l’argent auquel elle était admissible.  

[35] La Commission soutient que si l’appelante devait conserver l’avance de 2 000 $ qu’elle a reçue en plus des six semaines de prestations, ce serait comme si elle avait reçu 10 semaines de PAEU alors qu’elle n’avait droit qu’à 6 semaines.

[36] L’appelante ne conteste pas le fait qu’elle était seulement admissible à six semaines de prestations d’assurance-emploi. Cependant, elle dit qu’elle aimerait que le trop-payé soit annulé. Elle affirme qu’elle n’a jamais demandé à être payée plus que ce à quoi elle avait droit. Dans sa demande, elle a été tout à fait franche et honnête avec la Commission et elle ne savait pas qu’elle recevrait des prestations auxquelles elle pourrait ne plus avoir droit par la suite. Elle dit qu’il est injuste qu’on déclare un an et demi plus tard qu’elle doit rembourser de l’argent qu’elle n’a jamais demandé.

[37] C. F. affirme que comme elle cotise à l’assurance-emploi depuis près de 40 ans, toutes les cotisations qu’elle a versées devraient servir à rembourser tout trop-payé découlant de [traduction] l’« erreur » de la Commission.

[38] Je comprends la frustration de l’appelante. Lors de son audience, elle a déclaré qu’elle n’avait intentionnellement pas demandé de [traduction] « subventions » gouvernementales liées à la COVID-19, précisément parce qu’elle soupçonnait qu’on pourrait lui demander de les rembourser plus tard. Elle croyait avoir demandé des prestations régulières d’assurance-emploi et présumait qu’elle allait recevoir des prestations régulières.

[39] Peu importe le type de prestations que l’appelante a reçues, la loi prévoit que si une partie prestataire reçoit un montant supérieur à celui auquel elle a droit, elle doit rembourser le montant excédentaire.Note de bas de page 9

[40] Les arbitres du Tribunal ne sont pas autorisés à réécrire la Loi ni à l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaire.

[41] Je conclus que l’appelante a reçu 2 000 $ de prestations d’assurance-emploi d’urgence de plus que ce à quoi elle était admissible. J’estime donc que la Commission est justifiée de demander à l’appelante de rembourser le trop-payé.

Conclusion

[42] L’appel est rejeté.

[43] L’appelante a reçu un trop-payé de 2 000 $ en prestations de PAEU.

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