Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : CF c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 270

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Prolongation du délai et décision relative à la
permission de faire appel

Partie demanderesse : C. F.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 10 mai 2023
(GE-22-3397)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Date de la décision : Le 22 septembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-655

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Décision

[1] J’accorde la prolongation du délai pour présenter une demande à la division d’appel. Cependant, je refuse la permission de faire appel. L’appel ne sera pas instruit.

Aperçu

[2] C. F. est la demanderesse. Je vais l’appeler la prestataire parce qu’elle a demandé des prestations d’assurance-emploi. L’employeur de la prestataire l’a mise à pied en raison de la pandémie de COVID-19. Elle a demandé des prestations régulières le 16 mars 2020, mais l’intimée, la Commission de l’emploi du Canada, lui a plutôt versé la prestation d’assurance-emploi d’urgence. Dans le cadre du programme de prestations d’urgence, la Commission lui a immédiatement versé 2 000 $ le 6 avril 2020. Elle avait l’intention de le récupérer au cours des versements ultérieurs de la PAEU. La prestataire a été rappelée au travail après six semaines, soit avant que la Commission ait eu l’occasion de récupérer l’avance.

[3] La Commission a déclaré un trop-payé de 2 000 $ et a dit à la prestataire qu’elle devait le rembourser. La prestataire n’était pas d’accord et a demandé une révision. La Commission n’a pas modifié sa décision après révision.

[4] La prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, mais celle-ci a rejeté son appel. Elle demande maintenant à la division d’appel la permission de faire appel, mais sa demande est en retard.

[5] La prestataire a une explication raisonnable pour justifier son retard. J’ai donc examiné sa demande. Cependant, je refuse la permission de faire appel. La prestataire n’a pas démontré qu’il était possible de soutenir que la division générale a agi injustement.

Questions en litige

[6] Voici les questions à trancher dans la présente affaire :

  1. a) La demande à la division d’appel était-elle en retard?
  2. b) Dois-je prolonger le délai de présentation de la demande?
  3. c) Est-il possible de soutenir que la division générale a agi injustement en n’envoyant pas à la prestataire tous les documents dont elle avait besoin pour se préparer à l’audience?

Analyse

La demande était en retard

[7] Dans son avis d’appel à la division générale, la prestataire a autorisé le Tribunal à communiquer avec elle par courriel. La division générale a rendu sa décision le 10 mai 2023 et l’a envoyée à la prestataire par courriel le même jour.

[8] Lorsque le Tribunal envoie un document à une partie par courriel, ses Règles prévoient qu’il considérera le document comme étant reçu le jour ouvrable suivant, à moins que la partie puisse démontrer que cette règle ne devrait pas s’appliquer à elle.Note de bas de page 1

[9] Dans sa demande à la division d’appel, la prestataire a écrit qu’elle ne se rappelait pas quand elle avait reçu la décision de la division générale. Je lui ai écrit le 8 septembre 2023 pour lui demander de m’en dire plus sur la date à laquelle elle a reçu la décision et les raisons pour lesquelles elle n’a pas présenté sa demande à temps. La prestataire a répondu, mais n’a fourni aucun détail supplémentaire. Le 14 septembre 2023, un agent du greffe de la division d’appel a fait un suivi téléphonique, mais la prestataire a dit qu’elle avait déjà dit tout ce qu’elle avait à dire.

[10] Je conclus que la prestataire a reçu la décision le 11 mai 2023, soit le premier jour ouvrable suivant la date où on la lui a envoyée par courriel. La prestataire ne m’a donné aucune raison de conclure autrement.

[11] Le délai pour faire appel d’une décision de la division générale à la division d’appel est de 30 jours à compter de la date à laquelle elle a été communiquée par écrit. La date limite était le 10 juin 2023, soit 30 jours à compter du 11 mai 2023.

[12] Le Tribunal a reçu la demande de la prestataire à la division d’appel seulement le 17 juin 2023. Il manquait des pages à la demande et le Tribunal a reçu une demande complète seulement le 20 juillet 2023.

[13] L’appel est en retard.

Je prolonge le délai pour le dépôt de la demande

[14] Pour décider s’il y a lieu d’accorder une prolongation du délai, je dois vérifier si la prestataire a une explication raisonnable justifiant son retard.Note de bas de page 2

[15] La prestataire a expliqué qu’elle a essayé d’envoyer le formulaire par courriel, mais qu’elle a reçu un courriel de retour indiquant que son courriel (ou peut-être sa pièce jointe) ne pouvait pas être ouvert. Elle a dit que le formulaire de demande lui avait ensuite été envoyé par la poste parce qu’elle a dit qu’elle n’était pas bonne en informatique. Elle a retourné la demande remplie par télécopieur.

[16] La prestataire n’a pas dit à quel moment elle a essayé de transmettre sa demande par courriel ni à quel destinataire. Elle n’a pas dit qui lui avait dit qu’on ne pouvait pas ouvrir le courriel ni quand elle l’a appris. Elle n’a pas précisé quand elle avait reçu une copie du formulaire de demande par la poste.

[17] Les registres téléphoniques du Tribunal ne contiennent aucune trace d’une conversation avec la prestataire avant le moment où le Tribunal a reçu sa demande initiale, c’est-à-dire le 17 juin 2023.

[18] Malgré les efforts soutenus du Tribunal visant à obtenir plus de détails de la part de la prestataire, celle-ci a décidé de ne rien ajouter à son explication.

[19] Toutefois, la demande initiale de la prestataire avait seulement 17 jours de retard. Il est plausible que la prestataire ait éprouvé les difficultés qu’elle a décrites et que les retards, y compris le temps de recevoir le formulaire par la poste, aient pu entraîner le retard (relativement court).

[20] J’admets que la prestataire a une explication raisonnable pour son retard.

Je refuse la permission de faire appel

Principes généraux

[21] Pour que la demande de permission de faire appel de la prestataire soit accueillie, ses motifs d’appel doivent correspondre aux « moyens d’appel ». Les moyens d’appel indiquent les types d’erreurs que je peux prendre en considération.

[22] Je peux examiner seulement les erreurs suivantes :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale était inéquitable d’une façon ou d’une autre.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou bien, elle a tranché une question sans avoir le pouvoir de le faire (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.
  4. d) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.Note de bas de page 3

[23] Pour accueillir la demande de permission de faire appel et permettre au processus d’appel d’aller de l’avant, je dois conclure qu’au moins un des moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès. D’autres décisions judiciaires ont assimilé une chance raisonnable de succès à une « cause défendable ».Note de bas de page 4

Équité procédurale

[24] L’équité procédurale concerne l’équité du processus, et non la décision. Cela comprend des protections procédurales comme le droit à un décideur impartial et le droit d’une partie prestataire d’être entendue et de connaître les arguments avancés contre elle. Le fait d’omettre de divulguer des documents à une partie est injuste, car cela pourrait nuire à la capacité de la personne de connaître l’affaire à fond.

[25] On ne peut pas soutenir que la division générale a agi injustement.

[26] La prestataire affirme que le processus était injuste parce que les documents pertinents ne lui ont pas été divulgués avant l’audience. La division générale a reconnu le problème de divulgation à l’audience et dans sa décision. Toutefois, elle a pris les mesures appropriées pour s’assurer que le processus était équitable.

[27] La division générale a présenté à la prestataire des options pour aller de l’avant, et la prestataire n’a pas affirmé que les options présentées étaient injustes. L’une des options offertes était un ajournement de l’audience. Cela lui permettrait de recevoir et d’examiner les documents manquants avant de reprendre l’audience un autre jour. Cette option aurait remédié au tort découlant de la non-divulgation des documents.  

[28] La prestataire a librement choisi une autre option. Elle voulait avoir l’occasion de présenter des observations après l’audience après avoir examiné les documents manquants. Cette option a grandement atténué le préjudice de ne pas avoir reçu ces documents avant l’audience. Toutefois, la prestataire a choisi de ne pas présenter d’observations après l’audience.

[29] On ne peut pas soutenir que la division générale a empêché la prestataire de se faire entendre ni qu’elle a empêché la prestataire de connaître les arguments avancés contre elle. Elle ne disposait pas de certains documents à la date originale de l’audience orale, mais elle aurait pu choisir de reporter l’audience le temps de les recevoir. Elle aurait pu choisir également de répondre aux documents après l’audience et avant la communication de la décision.

[30] Je comprends que la prestataire croit probablement que la décision était injuste parce qu’elle n’est pas d’accord avec l’issue. Dans sa demande à la division d’appel, elle affirme qu’il était injuste que la Commission substitue la prestation d’assurance-emploi d’urgence à la place des prestations régulières qu’elle avait demandées. Elle a présenté le même argument à la division générale. Elle soutient également que le délai de carence était injuste, mais cet argument n’est pas clair.

[31] Toutefois, cela ne donne pas à penser que la division générale a commis une erreur d’équité procédurale.

[32] Je peux seulement intervenir dans une décision de la division générale si je conclus que la division générale a commis certains types d’erreurs. Je ne peux pas réévaluer ou soupeser de nouveau la preuve pour en arriver à un résultat différent.Note de bas de page 5

Erreurs de fait possibles

[33] La prestataire n’a choisi qu’un seul moyen d’appel : l’erreur de justice naturelle. Toutefois, j’ai examiné le dossier pour voir si la division générale avait peut-être ignoré ou mal interprété des éléments de preuve pertinents qui auraient pu être importants. La Cour fédérale a prescrit à la division d’appel de chercher au-delà des moyens d’appel établis lorsque la partie demanderesse n’est pas accompagnée par un représentant ou une représentante.Note de bas de page 6

[34] Malheureusement, je n’ai découvert aucun élément de preuve important que la division générale aurait ignoré ou mal compris. On ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de fait importante.

[35] L’appel de la prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[36] J’ai accordé la prolongation du délai à la prestataire, mais je refuse la permission de faire appel. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

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