Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : DN c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 134

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : D. N.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (551512) datée du 9 novembre 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Kristen Thompson
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 17 mai 2023
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 23 mai 2023
Numéro de dossier : GE-22-3834

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal n’est pas d’accord avec l’appelante.

[2] L’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi. Autrement dit, l’appelante n’a pas fourni une raison acceptable selon la loi pour expliquer le retard. Par conséquent, la demande de l’appelante ne peut pas être traitée comme ayant été présentée plus tôt.

Aperçu

[3] En général, pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, il faut présenter une demande pour chaque semaine durant laquelle on n’a pas travaillé et pour laquelle on souhaite recevoir des prestationsNote de bas de page 1. Pour ce faire, il faut présenter des déclarations à la Commission de l’assurance-emploi du Canada toutes les deux semaines. Les déclarations sont habituellement faites en ligne. Il y a des délais à respecterNote de bas de page 2.

[4] L’appelante a présenté sa demande après le délai. Elle souhaite que sa demande soit traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 1er avril 2022.

[5] Pour que ce soit possible, l’appelante doit démontrer qu’elle avait un motif valable justifiant son retard à présenter sa demande.

[6] La Commission a décidé que l’appelante n’avait pas de motif valable. Elle a donc refusé de traiter sa demande comme si elle avait été présentée le 20 février 2022. La Commission affirme que l’appelante n’a rien fait pour vérifier les renseignements qu’elle a reçus de son employeur et ceux qu’elle a recueillis dans les médias. Elle ajoute qu’une personne raisonnable aurait vérifié son admissibilité aux prestations, par exemple en communiquant avec la Commission.

[7] L’appelante n’est pas d’accord. Elle explique qu’elle a dû s’occuper de ses obligations familiales de la fin de février au 1er avril 2022. Elle dit que, selon son employeur, son syndicat et les médias, elle n’était pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi. Elle dit avoir agi comme une personne raisonnable : elle a établi un ordre de priorités pour ses obligations du mieux qu’elle le pouvait.

Question en litige

[8] L’appelante avait-elle un motif valable justifiant son retard à demander des prestations d’assurance-emploi?

Analyse

[9] L’appelante veut que sa demande de prestations d’assurance-emploi soit traitée comme si elle avait été présentée plus tôt, soit le 1er avril 2022. C’est ce qu’on appelle « antidater » la demande.

[10] Pour qu’une demande soit antidatée, l’appelante doit démontrer qu’elle avait un motif valable justifiant son retard durant toute la période écouléeNote de bas de page 3. L’appelante doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle avait un motif valable justifiant son retard.

[11] De plus, pour établir qu’il existe un motif valable, l’appelante doit démontrer qu’elle a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances semblablesNote de bas de page 4. Autrement dit, elle doit démontrer qu’elle a agi comme une personne raisonnable et réfléchie aurait agi dans une situation semblable.

[12] L’appelante doit aussi démontrer qu’elle a vérifié assez rapidement si elle avait droit à des prestations et quelles obligations la loi lui imposaitNote de bas de page 5. Cela veut dire que l’appelante doit démontrer qu’elle a fait de son mieux pour essayer de s’informer de ses droits et responsabilités dès que possible. Si l’appelante ne l’a pas fait, elle doit alors démontrer que des circonstances exceptionnelles l’en ont empêchéeNote de bas de page 6.

[13] L’appelante doit le démontrer pour toute la période du retardNote de bas de page 7. Cette période s’étend du jour où elle veut que sa demande soit antidatée au jour où elle a présenté sa demande. Par conséquent, la période de retard de l’appelante commence le 20 février 2022 ou le 1er avril 2022.

[14] L’appelante affirme qu’elle avait un motif valable justifiant son retard parce que, selon son employeur et les médias, elle n’était pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi. Elle dit qu’elle a dû s’occuper d’arrangements funéraires et de questions relatives à la succession de la fin de février au 1er avril 2022. Elle déclare avoir agi comme une personne raisonnable : elle a établi un ordre de priorité pour ses obligations du mieux qu’elle le pouvait.

[15] La Commission soutient que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant son retard parce qu’elle n’a pris aucune mesure pour vérifier les renseignements qu’elle a reçus de son employeur et ceux qu’elle a recueillis dans les médias. Elle affirme qu’une personne raisonnable aurait vérifié si elle avait droit à des prestations, par exemple en communiquant avec la Commission.

[16] L’appelante a reçu 15 semaines de prestations de maladie, soit jusqu’au 19 février 2022.

[17] L’appelante affirme ne pas être retournée au travail après avoir reçu ses prestations de maladie. Elle dit que son employeur l’a mise en congé sans solde à compter du 20 février 2022, car elle n’a pas respecté la politique de vaccination contre la COVID-19 de l’employeur.

[18] L’appelante explique que son oncle est décédé. Elle dit qu’elle a dû s’occuper des arrangements funéraires et des questions relatives à la succession, ce à quoi elle s’est consacrée jusqu’au 1er avril 2022. Elle déclare qu’elle était heureuse d’être en congé pendant cette période en raison de ses obligations familiales.

[19] L’appelante dit avoir discuté à la fin du mois de mars 2022 avec son ancien employeur de son retour au travail, mais elle n’est pas retournée travailler. Elle affirme que son employeur et son syndicat lui ont dit qu’elle ne serait pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi.

[20] L’appelante affirme que les médias rapportaient que les travailleuses et travailleurs qui avaient perdu leur emploi parce qu’ils refusaient de se conformer à la politique de vaccination de l’employeur ne seraient pas admissibles aux prestations régulières d’assurance-emploi.

[21] L’appelante déclare avoir commencé à chercher un emploi le 1er avril 2022. C’est pourquoi elle veut que sa demande soit traitée comme si elle avait été présentée le 1er avril 2022, et non à une date antérieure.

[22] L’appelante affirme avoir déjà reçu des prestations de maladie de l’assurance-emploi à deux autres reprises. Elle explique que son employeur a demandé des prestations de maladie de l’assurance-emploi en son nom chaque fois.

[23] Selon l’appelante, elle n’a jamais reçu de prestations régulières d’assurance-emploi auparavant. Elle dit qu’elle pensait que son employeur l’aiderait à demander des prestations d’assurance-emploi auxquelles elle pourrait être admissible.

[24] L’appelante affirme avoir présenté une demande de pension de la Sécurité de la vieillesse à un bureau de Service Canada le 23 août 2022. La personne à qui elle a parlé lui a dit qu’elle pouvait demander des prestations régulières d’assurance-emploi.

[25] L’appelante a présenté une demande de prestations antidatées le lendemain, soit le 24 août 2022. Dans sa demande, elle a indiqué vouloir que les prestations commencent le 20 février 2022. Elle dit avoir parlé à une personne de Service Canada de sa demande le 25 août 2022.

[26] L’appelante n’a pas tenté de communiquer avec la Commission avant le 23 août 2022.

[27] L’appelante explique avoir pris sa retraite de son ancien employeur en octobre 2022. Elle dit avoir travaillé une journée dans un bureau de vote en juin 2022. Elle affirme avoir commencé à travailler à temps partiel à compter du 1er mars 2023.

[28] L’appelante affirme que cette période a été difficile, que l’environnement était instable, et qu’il y avait beaucoup de désinformation. Elle ajoute que les règles de l’assurance-emploi dépassent la portée de sa compréhension. Elle s’est sentie [traduction] « rejetée » parce qu’elle avait refusé de se faire vacciner et elle n’avait personne à qui en parler.

[29] La Commission affirme avoir renouvelé la demande de prestations de l’appelante, qui a pris effet le 14 août 2022. L’appelante affirme avoir reçu des prestations régulières d’assurance-emploi jusqu’à la fin du mois d’octobre 2022.

[30] La Cour affirme qu’une demande de prestations doit être présentée sans tarder pour ne pas empêcher la Commission de bien administrer le versement des prestations à la partie prestataire. Les questions que l’appelante pourrait avoir sur la disponibilité pour travailler ou sur l’effet de toute rémunération ne peuvent pas être traitées au fur et à mesureNote de bas de page 8.

[31] Je conclus que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations durant toute la période écoulée. L’appelante n’avait pas initialement l’intention de demander des prestations régulières d’assurance-emploi. Ma conclusion est fondée sur son témoignage selon lequel elle était heureuse d’être en congé et qu’elle avait dû s’occuper de ses obligations familiales jusqu’au 1er avril 2022.

[32] J’estime que l’appelante n’a pas vérifié assez rapidement si elle avait droit aux prestations et quelles étaient ses obligations, et qu’il n’existait pas de circonstances exceptionnelles. Elle a déclaré que les règles de l’assurance-emploi dépassaient la portée de sa compréhension. Elle s’est appuyée sur les déclarations de son employeur et de son syndicat à la fin de mars 2022. Elle s’est également fiée aux reportages des médias pour déterminer son admissibilité aux prestations. Elle n’a pas tenté de communiquer avec la Commission avant le 23 août 2022. Elle a été informée de ses droits par l’entremise d’un agent seulement lorsqu’elle a demandé des prestations de la Sécurité de la vieillesse. Je pense qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait des démarches pour s’informer de ses droits et responsabilités dès le 1er avril 2022, par exemple en communiquant avec la Commission. L’appelante s’est plutôt fondée sur des déclarations de tierces parties, pendant une période où elle a reconnu qu’il y avait beaucoup de désinformation.

Conclusion

[33] L’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations pendant toute la période écoulée. Par conséquent, sa demande ne peut pas être traitée comme si elle avait été présentée plus tôt.

[34] L’appel est rejeté.

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