Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : RW c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1759

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Appelante : R. W.
Représentant : L. W.
Intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante : Angèle Fricker

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 5 juin 2023
(GE-23-137)

Membre du Tribunal : Stephen Bergen
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 1er décembre 2023
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 6 décembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-677

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel en partie. La division générale a commis des erreurs dans sa façon de rendre sa décision. J’ai corrigé ces erreurs et j’ai rendu la décision que la division générale aurait dû rendre, mais seulement en partie.

[2] Je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle réexamine certaines des questions.

Aperçu

[3] R. W. est l’appelante. Je l’appellerai la prestataire, car elle a demandé des prestations d’assurance-emploi. Son dernier jour de travail chez son ancien employeur remonte à mars 2020. Toutefois, elle n’a présenté une demande de prestations que le 19 novembre 2020. Elle a touché des prestations d’assurance-emploi à compter du 15 novembre 2020.

[4] L’intimée, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada, a décidé ultérieurement que la prestataire avait quitté volontairement son emploi sans justification le 20 mars 2020. Elle l’a informée qu’elle devrait rembourser les prestations qu’elle avait reçues. La prestataire a demandé à la Commission de réviser la décision. Cette dernière ne l’a pas modifiée. Lorsque la prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, celle-ci a rejeté son appel. Elle porte maintenant cette décision en appel devant la division d’appel.

[5] J’accueille l’appel en partie. J’ai conclu que la prestataire a pris volontairement un congé, mais je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle réexamine d’autres questions, notamment la question de savoir si elle était fondée à prendre un congé.

Questions en litige

[6] Les questions en litige dans le présent appel sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’analyser la preuve contradictoire au sujet des communications entre l’employeur et la prestataire après le départ de celle-ci en mars 2020?
  2. b) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en omettant de tirer les conclusions de fait nécessaires au sujet de la nature et du moment de la cessation d’emploi de la prestataire?
  3. c) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en concluant que le départ de la prestataire constituait la seule solution raisonnable dans son cas, sans tenir compte de toutes les circonstances?

Analyse

Principes généraux d’appel

[7] La division d’appel ne peut tenir compte que des erreurs qui relèvent de l’un des moyens d’appel suivants :

  1. a) Le processus d’audience de la division générale n’était pas équitable d’une façon quelconque.
  2. b) La division générale n’a pas tranché une question qu’elle aurait dû trancher. Ou encore, elle s’est prononcée sur une question qu’elle n’avait pas le pouvoir de trancher (erreur de compétence).
  3. c) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit.
  4. d) La division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas de page 1.

Signification de « départ volontaire »

[8] La prestataire a été exclue du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce que la Commission a décidé qu’elle avait quitté volontairement son emploi en mars 2020.

[9] La définition de « départ volontaire » comprend la situation dans laquelle un prestataire ne reprend pas son emploi lorsqu’il est censé revenirNote de bas de page 2.

[10] Un prestataire peut être exclu s’il quitte volontairement son emploi ou s’il prend volontairement un congé sans justificationNote de bas de page 3.

[11] Un prestataire évitera l’exclusion s’il peut démontrer qu’il n’a pas quitté volontairement son emploi ou pris un congé. Il évitera également l’exclusion – même s’il a quitté volontairement son emploi ou pris un congé – en prouvant qu’il était fondé à quitter son emploi ou à prendre un congé.

[12] Pour établir qu’il était « fondé à quitter son emploi », le prestataire doit démontrer qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi ou de prendre un congéNote de bas de page 4.

Erreur de droit

Défaut de trouver les faits nécessaires/Raisons inadéquates

Défaut d’analyser des éléments de preuve contradictoires

[13] La division générale a commis une erreur de droit parce qu’elle n’a pas tiré les conclusions de fait requises ou ne s’est pas expliquée adéquatement. Elle a agi ainsi sur deux plans. D’abord, sa décision n’a pas permis d’analyser les contradictions de la preuve.

[14] La division générale a conclu que la prestataire avait quitté volontairement son emploi. Dans une certaine mesure, cette conclusion semble découler de la lettre de décision de la Commission, dont la teneur est la même. Toutefois, la décision de la division générale repose sur une conclusion selon laquelle la prestataire n’a pas fait assez de démarches pour renouer avec son emploi en juin 2020. Cela ne semble pas être en accord avec la décision de la Commission selon laquelle elle avait déjà quitté son emploi en mars 2020.

[15] La division d’appel a accordé la permission d’en appeler en partie parce que la division générale n’avait pas été confrontée à des contradictions dans la preuve. Il s’agissait notamment d’une contradiction interne dans le récit de l’employeur et d’une contradiction entre la preuve de l’employeur et celle de la prestataire. Toutes ces contradictions concernaient les communications entre l’employeur et la prestataire après le départ de celle-ci en mars 2020.

[16] Je conviens que la division générale aurait dû expliquer quel élément de preuve elle a accepté, le cas échéant. Si la division générale fonde sa décision sur une conclusion selon laquelle la prestataire n’a pas fait assez de démarches pour renouer avec son emploi, elle doit également expliquer quels éléments de preuve l’ont menée à cette conclusion.

Nature et moment de la cessation d’emploi

[17] Les motifs de la division générale sont inadéquats sur un deuxième plan, à savoir la nature et le moment de la cessation d’emploi de la prestataire.

[18] Je ne peux décider, d’après la division générale, à quel moment la prestataire a effectivement fait l’objet d’une cessation d’emploi. La division générale justifie sa conclusion selon laquelle la prestataire a quitté volontairement son emploi en laissant entendre qu’elle comprenait que la prestataire avait « quitté volontairement son emploi » lorsqu’elle a refusé de reprendre son emploi, et non lorsqu’elle a cessé de travailler. Si c’est exact, la loi prévoit qu’elle devrait être exclue à compter de la date à laquelle elle était censée reprendre son posteNote de bas de page 5.

[19] Toutefois, la Commission estimait que la prestataire a quitté volontairement son emploi en mars 2020. La Commission s’est vraisemblablement appuyée sur les déclarations de l’employeur, qui affirme que la prestataire a demandé un congé en mars 2020 en raison de ses craintes liées à la COVID-19. Dans ses arguments présentés à la division d’appel, la Commission a expressément souligné qu’elle avait considéré le congé de la prestataire comme le motif de la cessation d’emploi et de l’exclusion, puisqu’il n’existait aucune preuve d’une date de retour convenue.

[20] Si la cessation d’emploi de la prestataire a eu lieu en mars 2020, la division générale aurait dû analyser si elle avait pris un congé volontaire à ce moment-là ou si elle avait alors été mise à pied. Des éléments de preuve démontraient que la prestataire avait demandé un congé en mars, mais d’autres suggéraient que l’employeur l’avait mise à pied en raison d’un ralentissement des activités de mars à juin 2020Note de bas de page 6.

[21] Si la division générale a conclu qu’elle avait pris un congé en mars 2020, elle aurait également dû se demander si elle et l’employeur avaient convenu du moment de son retour. C’est ce que j’affirme parce qu’un tel accord signifierait qu’elle ne pourrait être exclue que si, et quand, elle ne reprenait pas son emploi comme convenu.

[22] Si la division générale voulait conclure que la prestataire a quitté volontairement son emploi en juin 2020 parce qu’elle n’a pas repris son emploi, elle devrait décider lesquels des cas suivants étaient vrais :

  1. a) La prestataire a été mise à pied en mars 2020, mais a refusé ou ignoré le rappel de l’employeur en juin 2020 (ou après).
  2. b) La prestataire a pris un congé d’une durée déterminée, mais a omis de retourner au travail au moment convenu avec son employeur.

[23] La division générale a simplement conclu qu’elle avait quitté volontairement son emploi (et non qu’elle avait été mise à pied ou qu’elle avait pris volontairement un congé). Cela reposait en grande partie sur les possibilités apparentes d’un plus grand nombre de quarts de travail qui se sont présentées quelque temps après qu’elle eut déjà cessé de travailler.

[24] La division générale a commis une erreur de droit parce que ses motifs ne sont pas « transparent[s], intelligible[s] et justifié[s] »Note de bas de page 7.

Ne pas tenir compte de toutes les circonstances

[25] La Loi prévoit que le prestataire est fondé à quitter son emploi si, « compte tenu de toutes les circonstances », son départ constitue la seule solution raisonnable dans son casNote de bas de page 8. Elle comprend également une liste des circonstances pertinentes qui devraient être prises en compte lorsqu’elles sont présentes. L’une des circonstances énumérées est « une modification importante de ses conditions de rémunération »Note de bas de page 9.

[26] La division générale a commis une erreur de droit parce qu’elle n’avait pas tenu compte de toutes les circonstances. La division générale avait été saisie d’éléments de preuve indiquant que la prestataire avait subi une réduction ou une perte importante d’heures de travail. La division générale n’avait pas examiné si cela équivalait à « une modification importante » ou en quoi cela influait sur ses solutions de rechange raisonnables.

[27] La prestataire a témoigné qu’elle travaillait régulièrement 24 à 25 heures par semaine. Selon elle, son employeur n’avait pas assez d’heures à attribuer à tous ses employés et devait accorder la priorité à son personnel à temps plein. Elle avait donc subi une diminution considérable de ses heures. C’est notamment pour cette raison qu’elle a dit à son employeur qu’elle cherchait un autre emploi, mais qu’elle prendrait quand même des heures s’il en avait. Elle a mentionné qu’elle avait accepté des heures réduites pendant un certain temps, mais que l’employeur avait cessé de lui en donnerNote de bas de page 10. L’employeur a confirmé que les activités étaient au ralenti de mars à juin 2020 et qu’il a rappelé les travailleurs en juinNote de bas de page 11.

[28] De plus, la division générale n’a pas examiné la question de savoir si le milieu de travail de la prestataire comportait des « conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité ». C’est une autre des circonstances énumérées dans la LoiNote de bas de page 12.

[29] La prestataire a dit qu’elle s’était également inquiétée de continuer à travailler en raison de la COVID-19. Selon elle, le gouvernement disait à tout le monde de rester en sécurité à la maisonNote de bas de page 13. L’employeur estimait que la prestataire a quitté son emploi [traduction] « en raison de préoccupations liées à la COVID-19 »Note de bas de page 14.

[30] La division générale a reconnu la preuve de l’employeur, mais elle n’a pas tenu compte de l’importance de cette circonstance lorsqu’elle a analysé ses solutions de rechange raisonnables. Il s’agissait également d’une erreur de droit.

Résumé

[31] J’ai conclu que les motifs de la division générale étaient si inadéquats qu’ils constituaient une erreur de droit. J’ai également conclu qu’elle a commis des erreurs de droit en omettant de tenir compte de toutes les circonstances, comme l’exige la Loi.

[32] Cela signifie que je dois décider comment remédier à la décision de la division générale.

Réparation

[33] Je dois décider comment corriger les erreurs de la division générale. Je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendre ou lui renvoyer l’affaire pour réexamenNote de bas de page 15.

[34] La prestataire croit que j’ai été saisie des éléments de preuve sur toutes les questions que je dois trancher et que je devrais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. La Commission n’a pas pris position.

[35] Je dispose de tous les renseignements dont j’ai besoin pour trancher la question de savoir si la prestataire a quitté volontairement son emploi. Je peux donc rendre cette partie de la décision. Toutefois, je devrai renvoyer l’affaire à la division générale pour qu’elle réexamine certaines des autres questions découlant de la décision de la division générale.

Décision au sujet du départ volontaire

[36] La prestataire a exposé plusieurs raisons pour lesquelles elle a cessé de travailler en mars 2020. Elle souligne qu’elle a déménagé à Winnipeg plusieurs mois plus tôt en s’attendant à pouvoir y trouver du travail pendant ses études. Son emploi l’obligeait à faire le trajet d’une heure et demie à l’aller et au retour, ce qui n’était pas rentable pour le salaire qu’elle gagnait. Son employeur savait qu’elle avait déménagé à Winnipeg et qu’elle cherchait un autre emploi.

[37] Elle a également dit que ses heures avaient été réduites jusqu’à ce qu’elle n’en obtienne aucune, et elle a dit s’inquiéter des risques liés à la COVID-19.

[38] Dans sa demande de prestations, la prestataire a déclaré que son dernier jour de travail était le 10 mars 2023, bien qu’elle ait été payée pour le 12 mars 2023 (selon son relevé d’emploi).

[39] Toutefois, la prestataire a toujours insisté pour dire qu’elle n’avait pas quitté son emploi à ce moment-là. Lorsque la membre de la division générale a demandé à la prestataire si elle avait demandé un congé, elle a déclaré avoir dit à l’employeur qu’elle était toujours disponible et qu’elle accepterait des quarts de travailNote de bas de page 16.

[40] L’employeur a déclaré que la prestataire a pris un congé le 13 mars 2020 en raison de sa crainte de la COVID-19. Du même souffle, il a souligné que ses activités avaient ralenti de mars à juin 2020, date à laquelle il a rappelé du personnel. L’employeur n’a pas expressément indiqué qu’il avait avisé la prestataire de son rappel, mais il a laissé entendre qu’il l’avait fait. Il a dit qu’elle n’était pas revenue au moment du rappelNote de bas de page 17.

[41] L’employeur a également dit à la Commission que la prestataire avait démissionné de son propre chef et qu’il n’y avait [traduction] « pas de mises à pied à ce moment‑là »Note de bas de page 18. Toutefois, on ne sait pas exactement à quel moment l’employeur fait référence. Si l’employeur parle de la période allant de mars à juin 2020, sa déclaration semble incompatible avec une autre de ses déclarations dans laquelle il disait que le travail avait ralenti de mars 2020 à juin et qu’il rappelait du personnel en juin 2020.

[42] Toutefois, je n’accepte pas qu’il soit question de cette période. Dans d’autres déclarations, l’employeur a dit qu’il avait [traduction] « licencié » la prestataire le 28 janvier 2021 parce qu’elle n’avait pas communiqué avec l’employeurNote de bas de page 19 et qu’il considérait qu’elle avait [traduction] « démissionné » le 31 mars 2021. Je conclus que l’employeur a voulu dire qu’il n’y avait pas eu de mises à pied au moment où il a finalement considéré que la prestataire avait quitté son emploi ou démissionné.

[43] La prestataire a dit que l’employeur ne l’avait pas appelée pour un rappelNote de bas de page 20. Elle a également affirmé qu’elle avait tenté d’appeler l’employeur deux fois [traduction] « lorsque la vague de la COVID-19 a diminué » et qu’elle avait laissé un message, mais que l’employeur ne l’avait pas rappeléeNote de bas de page 21.

[44] Je conclus que l’employeur a mis à pied certains membres du personnel et que cela s’est probablement produit en mars 2020 ou juste avant. Je conclus également que l’employeur n’avait pas mis officiellement la prestataire à pied, peut-être parce qu’il n’était pas nécessaire de le faire. La prestataire était une occasionnelle travaillant à temps partiel. Elle a dit qu’elle n’avait pas d’horaire régulier, mais qu’elle travaillait normalement 24 à 25 heures par semaine. Elle a dit qu’elle remplaçait d’autres employésNote de bas de page 22. Il n’existe aucune preuve qu’on lui a garanti un nombre d’heures. Autrement dit, l’employeur pouvait cesser de lui donner des quarts de travail sans la mettre à pied.

[45] L’employeur croyait comprendre que la prestataire avait demandé un congé. L’employeur croyait que la prestataire voulait un congé parce qu’elle était préoccupée par la COVID-19.

[46] La membre de la division générale a demandé à la prestataire si elle avait demandé à son employeur de prendre un congé en raison de la COVID-19. Elle a dit que c’était inexact. Elle a affirmé que l’employeur réduisait ses heures de travail et qu’elle accepterait davantage d’heures. Elle a dit qu’elle cherchait un autre emploi dans l’intervalleNote de bas de page 23. Du même souffle, elle a reconnu que « cela » (vraisemblablement son départ) était aussi lié à la COVID-19 et à la façon dont le gouvernement disait aux gens de rester à la maison en sécurité. Elle a également affirmé que son travail n’en valait pas la peine parce qu’elle avait déménagé à WinnipegNote de bas de page 24.

[47] Tout cela survenait en même temps que l’employeur redistribuait les heures à son personnel à temps plein et même mettait à pied certains membres du personnel. La prestataire a déclaré qu’elle avait accepté des heures réduites pendant une courte période, mais que l’employeur avait ensuite cessé complètement de lui donner des heuresNote de bas de page 25. Elle a compris que le personnel à temps plein avait la priorité sur elle.

[48] La prestataire a également déclaré qu’elle avait l’habitude de remplacer d’autres membres du personnel à l’horaire pour obtenir des quarts de travailNote de bas de page 26, mais qu’elle devait se déplacer pendant une heure et demie pour se rendre au travail depuis son déménagement. L’employeur savait qu’elle avait déménagé à une certaine distance, de sorte qu’il savait qu’elle ne pouvait pas remplacer à court préavis.

[49] Étant donné que la prestataire était occasionnelle à temps partiel, l’employeur n’avait aucune raison de la placer en congé involontaire ou de la mettre à pied. Je comprends le témoignage de la prestataire selon lequel elle a dit à l’employeur qu’elle accepterait d’autres quarts de travail. Toutefois, au moment où elle a cessé de travailler en mars, elle semblait peu encline à accepter des quarts de travail même s’il y en avait eu. Elle a dit à l’employeur qu’elle cherchait un autre emploi et l’employeur savait qu’elle craignait la COVID-19. Par ailleurs, la prestataire ne croyait pas que le trajet pour se rendre au travail en valait la peineNote de bas de page 27.

[50] La prestataire a déclaré qu’elle croyait avoir été mise à pied en mars 2020Note de bas de page 28 et qu’elle n’a jamais officiellement quitté son emploi. Toutefois, j’estime qu’il est plus probable qu’improbable que la prestataire ait volontairement renoncé à la perspective de quarts de travail supplémentaires, du moins pendant un certain temps, même si elle a peut-être dit à l’employeur à un moment donné qu’elle accepterait des quarts de travail supplémentaires. Elle a peut-être demandé à l’employeur de ne pas lui donner de quarts de travail pendant un certain temps ou elle a peut-être simplement accepté d’être retirée de la liste jusqu’à ce qu’elle soit à l’aise de revenir. Quoi qu’il en soit, j’estime qu’il est plus probable qu’elle ait quitté volontairement son emploi que l’employeur l’ait mise à pied ou forcée de se retirer de la liste. Compte tenu de son statut d’employée occasionnelle à temps partiel, je ne vois aucune raison pour laquelle l’employeur devrait la mettre à pied, mais la prestataire a donné plusieurs raisons pour lesquelles elle ne voudrait pas prendre de quarts de travail.

[51] Par conséquent, même si la prestataire n’a peut-être pas démissionné ou demandé expressément un « congé autorisé », je conclus qu’elle a volontairement pris un congé de son travail après son dernier jour payé le 12 mars 2020.

Renvoi à la division générale pour réexamen

[52] Je renvoie la décision à la division générale parce qu’il y a d’autres questions que je ne peux trancher. Le dossier d’appel est incomplet.

Justification

[53] J’ai conclu que la prestataire a pris volontairement un congé. La division générale devra décider si la prestataire était fondée à le faire.

[54] La division générale n’a pas considéré la réduction des heures du prestataire comme une circonstance pertinente lorsqu’elle a évalué les solutions de rechange raisonnables à son départ. Par conséquent, elle n’a pas obtenu de preuve sur l’étendue ou la période de la réduction des quarts de travail ou de la perte de revenu en conséquence. Cela serait pertinent pour établir s’il était raisonnable de s’attendre à ce que la prestataire fasse les déplacements.

[55] De plus, la division générale n’a pas tenu compte de l’incidence des craintes de la prestataire liées à la COVID-19 sur sa capacité de continuer à travailler. Elle ne recueillait pas de renseignements sur le danger objectif de la COVID-19 dans son milieu de travail particulier, sur les communications ou les mesures d’atténuation prises par l’employeur, ni sur la nature et l’étendue de sa crainte subjective. Bien que j’admette que la crainte de la prestataire à l’égard de la COVID-19 constituait un facteur pertinent, je ne dispose pas d’éléments de preuve permettant d’évaluer comment cela a influé sur ses solutions de rechange raisonnables et, en particulier, sur la solution de rechange consistant à conserver son emploi jusqu’à ce qu’elle trouve un autre emploi.

Inadmissibilité ou exclusion du congé autorisé

[56] La division générale devra également décider si la prestataire et son employeur ont convenu du moment de son retour après son congé.

[57] La loi traite généralement un prestataire qui prend un congé volontaire sans justification de la même façon qu’elle traiterait un prestataire qui quitte son emploi. Dans les deux cas, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations. Cela signifie que la prestataire ne pouvait remplir les conditions requises pour recevoir des prestations en utilisant l’une ou l’autre de ses heures d’emploi assurable accumulées. Toutefois, lorsque l’employé et l’employeur ont convenu d’un moment où l’employé reviendrait, le prestataire peut être inadmissible plutôt qu’exclu. Cela signifie qu’il ne peut pas recevoir de prestations avant la fin de la période de congé.

[58] L’employeur a rappelé du personnel en juin 2020 et a dit qu’il en avait également avisé la prestataire. Son témoignage au sujet de la réponse de la prestataire était incohérent et n’était pas en accord avec le témoignage de la prestataire selon lequel elle a communiqué avec l’employeur (bien qu’elle n’ait pas reçu l’avis).

[59] Les circonstances peuvent être telles qu’il y a eu entente concernant le moment du retour. Je n’ai pas d’éléments de preuve sur cette question. Je devrai donc renvoyer la question à la division générale pour réexamen.

Refus de reprendre son emploi

[60] La division générale pourrait devoir décider si la prestataire devrait être exclue pour avoir refusé de reprendre son emploi sans justification.

[61] La division générale pourrait conclure que la prestataire n’était pas fondée à prendre volontairement un congé en mars 2020.

[62] Toutefois, elle pourrait également conclure qu’elle était fondée à prendre un congé en mars 2020. Ou encore, elle peut conclure qu’elle n’était pas fondée à prendre congé, mais que son congé portait sur une période convenue. Dans l’un ou l’autre de ces deux cas, elle devra également décider si la prestataire a quitté volontairement son emploi sans justification en omettant de reprendre son emploi en juin 2020 ou après.

[63] Il est préférable de laisser cette question à la division générale parce qu’elle découlera des autres décisions de la division générale. Dans une certaine mesure, cela dépendra également de son point de vue sur la crédibilité de la prestataire. Il est préférable de laisser ces évaluations à la division générale à titre de juge des faits.

Conclusion

[64] J’accueille l’appel en partie. Je conclus que la prestataire a pris un congé volontaire en mars 2020 et je renvoie l’affaire à la division générale pour qu’elle réexamine les questions suivantes :

  1. 1) Si la prestataire était fondée à prendre un congé volontaire en mars 2020;
  2. 2) Si la prestataire n’avait pas de justification, si son congé volontaire devait entraîner une inadmissibilité ou une exclusion;
  3. 3) Si la prestataire était fondée à prendre un congé ou n’était inadmissible qu’en raison de ce congé, qu’elle ait omis de reprendre son emploi en juin 2020 ou après;
  4. 4) Si la prestataire ne reprenait pas son emploi, si elle était fondée à le faire.
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