Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Résumé :

Les prestataires ont touché des prestations parentales et de maternité. Chacune d’entre elles a subi une perte d’emploi soit avant, pendant ou après son congé de travail. Puis, chacune a demandé des prestations régulières d’assurance-emploi. Cependant, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a refusé des prestations régulières à toutes les prestataires parce qu’elle ne pouvait pas :

· prolonger la période de référence;

· prolonger la période de prestations;

· verser des prestations pendant plus de 50 semaines, soit le maximum permis par la loi.

Les prestataires ont fait appel des décisions de la Commission auprès de la division générale. Les prestataires ont soutenu que certains articles de la Loi sur l’assurance-emploi – ceux qui empêchent la prolongation de la période de référence ou de la période de prestations et qui limitent à 50 le nombre de semaines de prestations qu’elles peuvent recevoir – ont une incidence disproportionnée chez les femmes. Par conséquent, les prestataires ont demandé que ces articles soit déclarés discriminatoires et en violation du droit à l’égalité protégé par l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).

À la suite d’une longue procédure, la division générale a :

· conclu que les prestataires avaient démontré que les articles contestés violent le droit à l’égalité protégé par la Charte;

· conclu que la Commission n’avait pas démontré que ces violations se justifient dans le cadre d’une société libre et démocratique;

· déclaré que les articles contestés par la Loi sur l’assurance-emploi étaient inconstitutionnels;

· chargé le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour permettre aux prestataires d’obtenir des prestations régulières d’assurance-emploi pour la perte de leur emploi.

La Commission a ensuite fait appel de la décision de la division générale devant la division d’appel.

Pour établir qu’il y a une violation de l’article 15 de la Charte, les prestataires doivent démontrer, à la fois, que les articles contestés :

· créent à première vue ou en raison de leur effet, une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue;

· imposent un fardeau ou nient un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage.

La division d’appel a conclu que la division générale a commis une erreur de droit dans son analyse du context global de la situation, car elle n’a pas tenu compte de l’objet du régime d’assurance-emploi et de son contexte législatif.

La division d’appel a aussi conclu que la limite de 50 semaines de prestations ne crée et ne renforce pas aucun stéréotype selon lequel les femmes ne sont pas des atouts importants sur le marché du travail. De plus, elle ne porte pas atteinte à la dignité des femmes en donnant à penser que leur travail ne mérite pas autant de reconnaissance.

La division d’appel a par la suite accueilli l’appel et rendu la décision que la division générale aurait dû rendre. Elle a déterminé que les prestataires n’ont pas établi que les articles 8(2), 8(5), 10(2), 10(8)(a), 10(10) et 12(6) de la Loi sur l’assurance-emploi violent le droit à l’égalité prévue par la Charte. Les articles contestés sont constitutionnels. Par conséquent, les prestataires sont confrontées à la limite de 50 semaines de prestation et ne sont pas admissibles à des prestations régulières d’assurance-emploi supplémentaires. Les prestataires n’ont donc pas droit à des prestations régulières d’assurance-emploi supplémentaires.

Contenu de la décision

Citation : Commission de l’assurance-emploi du Canada c LC et al., 2024 TSS 24

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Commission de l’assurance-emploi du Canada
Représentante ou représentant : Suzette Bernard
Partie intimée : L. C. et al.
Représentante ou représentant : Kim Bouchard, Mathieu Charest‑Beaudry, Jessica Lelièvre et Louis‑Alexandre Hébert‑Gosselin

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du
10 janvier 2022 (GE-18-222, GE‑18‑348, GE‑18‑2075, GE‑18‑3044, GE‑18‑3456 et GE‑19‑689)

Membre du Tribunal : Jude Samson
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 28 mars 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentante de l’appelante
Intimée (L. C.)
Représentantes et représentants des intimées
Date de la décision : Le 9 janvier 2024
Numéro de dossier : AD-22-94, AD‑22‑95, AD‑22‑96, AD‑22‑97, AD‑22‑98 et AD‑22‑99

Sur cette page

Décision

[1] J’accueille l’appel de la Commission de l’assurance-emploi du Canada. Les six intimées (prestataires) ne sont pas admissibles à des prestations régulières d’assurance-emploi supplémentaires.

Aperçu

[2] Les prestataires ont touché des prestations parentales et de maternité. Chacune d’entre elles a subi une perte d’emploi soit avant, pendant ou après son congé de travail. Puis, chacune a demandé des prestations régulières d’assurance-emploiNote de bas de page 1.

[3] Cependant, la Commission a refusé des prestations régulières à toutes les prestataires parce que la Commission ne pouvait pas :

  • prolonger la période de référence;
  • prolonger la période de prestations;
  • verser des prestations pendant plus de 50 semaines, soit le maximum permis par la loi.

[4] Les prestataires ont fait appel des décisions de la Commission auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] Les prestataires soutiennent que certains articles de la Loi sur l’assurance-emploi — ceux qui empêchent la prolongation de la période de référence ou de la période de prestations et qui limitent à 50 le nombre de semaines de prestations qu’elles peuvent recevoir — ont une incidence disproportionnée chez les femmesNote de bas de page 2. Plus particulièrement, ces articles ont pour effet de restreindre ou de priver l’accès des femmes à une protection sociale fondamentale, soit les prestations régulières d’assurance-emploi, lorsqu’elles se trouvent en chômage aux alentours de l’arrivée d’un enfant.

[6] Par conséquent, les prestataires demandent que ces articles soient déclarés discriminatoires et en violation du droit à l’égalité protégé par l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte).

[7] Puisque les prestataires contestent plusieurs articles qui sont interreliés, je me réfère parfois à l’effet global de ces articles comme la limite de 50 semainesNote de bas de page 3.

[8] À la suite d’une longue procédure, la division générale a :

  • conclu que les prestataires avaient démontré que les articles contestés violent le droit à l’égalité protégé par la Charte;
  • conclu que la Commission n’avait pas démontré que ces violations se justifient dans le cadre d’une société libre et démocratique;
  • déclaré que les articles contestés de la Loi sur l’assurance-emploi étaient inconstitutionnels;
  • chargé le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour permettre aux prestataires d’obtenir des prestations régulières d’assurance-emploi pour la perte de leur emploi.

[9] La Commission a ensuite porté la décision de la division générale en appel auprès de la division d’appel. Voici les raisons pour lesquelles j’accueille l’appel de la Commission.

Questions en litige

[10] Ma décision aborde les questions suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en refusant de suivre des décisions de la Cour d’appel fédérale?
  2. b) La division générale a-t-elle violé un principe de justice naturelle en joignant les appels et en ne rédigeant qu’une seule décision?
  3. c) La division générale a-t-elle rendu une décision entachée d’erreurs de droit dans son analyse du droit à l’égalité prévu à l’article 15 de la Charte?
  4. d) Dans l’affirmative, quelle serait la meilleure façon de corriger l’erreur de la division générale?

Analyse

[11] Je peux intervenir dans la présente affaire si la division générale a violé un principe de justice naturelle ou si sa décision est entachée d’une erreur de droitNote de bas de page 4.

La division générale n’a pas commis d’erreur en concluant que des décisions antérieures ne déterminent pas l’issue de ces appels

[12] La Commission soutient que les questions constitutionnelles soulevées par ces appels ont déjà été tranchées par la Cour d’appel fédérale dans les affaires Sollbach et MillerNote de bas de page 5. De plus, la Commission affirme que la division générale a commis une erreur de droit en refusant de suivre ces décisions.

[13] Je rejette cet argument. La division générale n’a pas commis d’erreur en examinant les questions soulevées dans ces appels.

[14] La division générale a reconnu qu’elle peut réexaminer une question constitutionnelle dans les situations suivantes :

  • une nouvelle question de droit se pose;
  • il y a une modification importante de la situation ou de la preuveNote de bas de page 6.

[15] Comme l’a reconnu la division générale, les deux situations existent dans la présente affaire.

[16] Premièrement, les prestataires contestent ici de nombreuses dispositions différentes, alors que Mme Sollbach et Mme Miller n’en ont contesté qu’une seule. Deuxièmement, depuis la parution des décisions Sollbach et Miller,d’importants changements ont été apportés à la Loi sur l’assurance-emploi et au cadre analytique qui s’impose dans les cas touchant l’article 15 de la CharteNote de bas de page 7. Et troisièmement, la preuve présentée dans la présente affaire est plus complète par rapport à la preuve dans les affaires Sollbach et Miller, qui est plutôt difficile à cerner.

[17] Concernant l’affaire Miceli-Riggins, cette décision est fondée sur des arguments différents, des éléments de preuve différents et un régime législatif différent, soit le Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 8. La décision Miceli-Riggins ne devrait donc pas être contraignante dans la situation qui nous occupe.

La division générale n’a pas violé un principe de justice naturelle en joignant les appels et en ne rédigeant qu’une seule décision

[18] La Commission reproche à la division générale d’avoir refusé de joindre les appels au début de sa procédure, puis de les avoir joints vers la fin, rendant une seule décision dans le cadre des six appelsNote de bas de page 9. Selon elle, la jonction des appels a entraîné les conséquences suivantes :

  • la division générale n’a pas fait l’analyse contextuelle demandée dans un dossier portant sur la Charte;
  • elle n’a pas apprécié la preuve et tenu compte de toutes les circonstances de chaque prestataire.

[19] Je rejette les arguments de la Commission sur cette question.

[20] Bien que je reconnaisse que la procédure était quelque peu inhabituelle, les plaintes de la Commission portent sur la qualité de la décision et non sur l’équité de la procédure. La Commission ne prétend pas, par exemple, qu’elle n’a pas eu la possibilité d’être entendue, de répondre aux arguments des autres parties ou de se défendre.

[21] En effet, la Commission ne s’est jamais opposée à la jonction des appels dans le passé et a souvent regroupé ses observations dans un seul document.

La division générale a commis une erreur de droit dans son analyse du droit à l’égalité prévu à l’article 15 de la Charte

[22] Le contexte est important lorsqu’on examine des questions relatives à la Charte. Je commencerai donc mon analyse par un aperçu du régime d’assurance-emploi, afin de donner une idée de sa complexité et de souligner un certain nombre de ses limites. J’effectuerai également un survol du droit à l’égalité, tel qu’il a été défini par les tribunaux en étudiant l’article 15 de la Charte.

Le régime d’assurance-emploi offre un soutien au revenu partiel et temporaire

[23] La Cour suprême du Canada a déjà exposé l’historique et l’objectif de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 10. La loi établit « un régime d’assurance sociale aux fins d’indemniser les chômeurs pour la perte de revenus provenant de leur emploi et [assure] leur sécurité économique et sociale pendant un certain temps et les [aide] ainsi à retourner sur le marché du travailNote de bas de page 11. »

[24] Le Parlement a apporté de nombreuses modifications à la loi au fil des ans. Ces modifications ont, de façon générale, assoupli les conditions d’admissibilité, augmenté les prestations et éliminé certaines injusticesNote de bas de page 12.

[25] Parmi ces modifications, le Parlement a élargi le nombre de situations dans lesquelles une personne peut subir un arrêt involontaire de rémunération et avoir droit à des prestations d’assurance-emploi.

[26] Les prestations spéciales de l’assurance-emploi offrent un soutien temporaire aux personnes assurées qui ne peuvent pas travailler en raison de certains événements de la vie, notamment d’une maladie, d’une grossesse ou de l’obligation de s’occuper d’un nouveau-né ou d’un enfant nouvellement adoptéNote de bas de page 13.

[27] Il convient de souligner les éléments clés suivants du régime d’assurance‑emploi :

  • Le régime n’est pas universel. Les prestations sont seulement offertes aux personnes qui ont accumulé un nombre minimum d’heures d’emploi assurable pendant leur période de référenceNote de bas de page 14.
  • Le régime offre un soutien au revenu partiel et temporaire. Il répartit les risques liés aux situations prévues par la loi entre toutes les personnes assurées.
  • Le régime est financé principalement par les cotisations perçues auprès des employeurs et des travailleurs. La loi oblige la Commission à fixer le taux de cotisation pour chaque année en se fondant sur certains éléments. La Commission a comme but d’atteindre un équilibre financier, conformément à de rigoureux principes d’assuranceNote de bas de page 15.
  • Le régime n’est pas un programme d’aide sociale selon lequel les prestations sont déterminées en fonction des besoins de la personne qui les demande. Le montant et la durée des prestations d’assurance-emploi sont plutôt déterminés en fonction de règles précises.
  • Le régime n’est pas non plus un compte d’épargne. Le fait de cotiser au régime ne donne pas en soi le droit aux prestations. Les travailleurs sont obligés de payer des cotisations sur tous les gains assurables jusqu’à concurrence d’un maximum annuel, et ce, même si cette personne ne prévoit pas toucher des prestationsNote de bas de page 16.

[28] Depuis 2006, une entente fédérale-provinciale fait en sorte que les résidents du Québec reçoivent des prestations de maternité, parentales, d’adoption et de paternité du Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) plutôt que les prestations semblables offertes aux termes de la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 17.

[29] Dans cette décision, j’ignore largement le fait que les prestataires ont reçu leurs prestations parentales et de maternité du RQAP plutôt que du régime fédéral. Les deux régimes sont étroitement intégrés, et les prestataires n’ont jamais soutenu que leur cas était spécifique aux femmes du Québec. En effet, certaines prestataires ont reçu plus de prestations que si elles avaient vécu ailleurs au CanadaNote de bas de page 18.

Les prestations régulières, de maternité et parentales de l’assurance-emploi

[30] Bien que la Loi sur l’assurance-emploi offre d’autres types de prestations, les prestations régulières et les prestations spéciales, dont les prestations parentales et de maternité, représentent la vaste majorité des prestations verséesNote de bas de page 19.

[31] Les prestations régulières d’assurance-emploi offrent un soutien allant de 14 à 45 semaines aux personnes assurées qui ont perdu leur emploi sans en être responsablesNote de bas de page 20. Pour être admissibles à ces prestations, les personnes doivent, entre autres, avoir accumulé entre 420 et 700 heures d’emploi assurable au cours de leur période de référenceNote de bas de page 21.

[32] Les prestations de maternité et parentales comptent parmi les prestations spéciales offertes par la Loi sur l’assurance-emploi. Une personne doit avoir accumulé 600 heures d’emploi assurable pendant sa période de référence pour être admissible aux prestations spécialesNote de bas de page 22.

[33] D’une part, les mères biologiques peuvent demander jusqu’à 15 semaines de prestations de maternité pour soutenir leur rétablissement physique et émotionnel. La loi prévoit une certaine souplesse envers les mères biologiques qui souhaitent bénéficier de cette prestation avant ou après la naissance de leur enfant.

[34] D’autre part, les prestations parentales offrent encore plus de flexibilité aux parents, soit biologiques ou adoptifs, pour leur permettre de s’occuper de leur nouvel enfant. Les prestations parentales peuvent être touchées par un seul parent ou partagées parmi les parents. Dans ce dernier cas, les parents peuvent bénéficier de semaines supplémentaires de prestations.

[35] De plus, les parents peuvent choisir de toucher des prestations parentales à un taux plus élevé pendant une période plus courte (l’option standard), ou à un taux plus bas pendant une période plus longue (l’option prolongée)Note de bas de page 23.

[36] Bien que les prestations de maternité et parentales soutiennent les familles et permettent aux parents de s’occuper de leur famille, l’objectif et l’effet premier de ces prestations se situent ailleurs. Il s’agit avant tout de prestations de remplacement du revenu et celles-ci servent à préserver le rattachement d’une personne au marché du travailNote de bas de page 24.

[37] À l’appui de cette conclusion, la Cour suprême du Canada a souligné que la Loi sur l’assurance-emploi n’accorde aucun congé de travail. Les congés de maternité et parentales sont régis par d’autres lois ou par des arrangements entre employeurs et employés.

Le régime d’assurance-emploi est fondé sur un lien entre la participation récente et active au marché du travail et le versement des prestations

[38] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit deux concepts importants qui ont pour effet d’assurer un court laps de temps entre la participation active au marché du travail et le versement des prestations : la période de référence et la période de prestations.

[39] La période de référence est la période au cours de laquelle une personne assurée doit avoir accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour recevoir des prestations d’assurance-emploi. Elle est calculée en utilisant la plus courte des périodes suivantes :

  • la période de 52 semaines qui précède le début d’une période de prestations;
  • dans le cas où la personne assurée avait déjà établi une période de prestations, la période qui débute en même temps que la période de prestations précédente et se termine à la fin de la semaine précédant le début de la période de prestations de la nouvelle demandeNote de bas de page 25.

[40] Selon la deuxième situation, une personne ne peut jamais utiliser ses heures d’emploi assurable plus d’une fois. En outre, les prestations d’assurance-emploi ainsi que celles du RQAP ne constituent pas des heures d’emploi assurable.

[41] La période de référence peut être prolongée dans certaines situations qui ne s’appliquent pas aux prestataires dans cette affaireNote de bas de page 26.

[42] La période de prestations est la période au cours de laquelle la Commission peut verser des prestations à une personne assurée. Elle est établie seulement si cette personne remplit les conditions d’admissibilité. La date du début de la période de prestations est établie en fonction de la date de l’arrêt de rémunération ou de la date de la demande, selon la situationNote de bas de page 27.

[43] La période de prestations compte normalement 52 semaines, à moins qu’elle soit prolongée pour l’une des raisons prévues par la loiNote de bas de page 28. Mais là encore, les prestataires ne remplissent pas les conditions requises pour la prolongation de leur période de prestations.

[44] La Loi sur l’assurance-emploi prévoit également le concept d’une période d’admissibilité aux prestations. Celle-ci veille à ce que les prestations soient versées à proximité de l’événement qui a provoqué le recours aux prestations. Par exemple, les prestations de maternité peuvent être versées à partir de 12 semaines avant la date prévue de l’accouchement et cessent d’être payables au plus tard 17 semaines après l’accouchementNote de bas de page 29.

Les prestations peuvent être versées pendant un nombre maximal de semaines, mais peuvent être combinées dans certaines situations

[45] Chaque type de prestations a ses propres limites, c’est-à-dire un nombre maximal de semaines pendant lesquelles la Commission peut verser les prestations au cours d’une période de prestations. Par exemple, pendant une période de prestations, une personne peut recevoir :

  • jusqu’à 15 semaines de prestations de maternité;
  • jusqu’à 35 semaines de prestations parentales (selon l’option standard);
  • de 14 à 45 semaines de prestations régulières, normalement calculées en fonction du taux régional de chômage et du nombre d’heures d’emploi assurable accumulées au cours de la période de référenceNote de bas de page 30.

[46] Une personne peut être admissible à plus d’un type de prestations à la fois. Toutefois, elle peut bénéficier d’un seul type de prestations à la fois.

[47] Si une personne remplit tous les critères d’admissibilité, elle peut combiner des prestations régulières et spéciales à l’intérieur de sa période de prestations de 52 semaines, pour un maximum de 50 semaines de prestationsNote de bas de page 31. La contestation constitutionnelle des prestataires porte sur cette limite de 50 semaines.

[48] Les dispositions de la loi qui permettent la combinaison de prestations spéciales sont complexesNote de bas de page 32. Cependant, on peut parfois combiner des prestations spéciales, ce qui a pour effet de prolonger la période de prestations au-delà de 52 semainesNote de bas de page 33. Si les conditions pertinentes sont remplies, une personne assurée a donc la possibilité de recevoir toutes les semaines de prestations spéciales auxquelles elle a droit pendant une période de prestations qui peut s’élever à 104 semaines.

L’article 15 de la Charte garantit l’égalité « réelle »

[49] L’article 15(1) de la Charte prévoit ce qui suit :

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

[50] Pour établir qu’il y a une violation de l’article 15, les prestataires doivent démontrer, à la fois, que les articles contestés :

  • créent, à première vue ou en raison de leur effet, une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue;
  • imposent un fardeau ou nient un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantageNote de bas de page 34.

[51] La Cour suprême du Canada nous enseigne que la discrimination peut être directe ou indirecte. En d’autres mots, une loi qui paraît neutre peut être discriminatoire si elle a des effets disproportionnés sur un groupe protégé. Il s’agit de la discrimination par effet préjudiciable.

[52] Je tiens aussi à souligner que l’article 15 protège le droit à l’égalité sur la base du sexe. Cependant, les arguments des prestataires ne s’appliquent pas à toutes les femmes. Leurs arguments s’appliquent plutôt aux femmes qui ont perdu leur emploi sans en être responsables, et ce, peu de temps avant ou après l’arrivée d’un nouvel enfant.

[53] Néanmoins, la Cour suprême confirme que les allégations de discrimination parentale peuvent souvent être présentées sous forme de plaintes de discrimination par suite d’un effet préjudiciable fondée sur le sexeNote de bas de page 35.

[54] Ayant exposé certains éléments importants du contexte, je procéderai maintenant à mon analyse de la décision de la division générale.

La division générale n’a pas commis d’erreur en concluant que les articles contestés créent, en raison de leur effet, une distinction fondée sur un motif énuméré

[55] Dans la présente affaire, la situation de chacune des prestataires est légèrement différente. Cependant, je ne vois pas la nécessité de mettre en évidence toutes ces différences. D’une manière ou d’une autre, les prestataires affirment que les articles contestés ont limité leur accès aux prestations régulières d’assurance-emploi.

[56] Aux fins de cette décision, j’accepte que les prestataires aient démontré que les articles contestés créent, en raison de leur effet, une distinction fondée sur le sexe.

[57] Deux types d’éléments de preuve peuvent être utilisés pour prouver qu’une loi a un effet disproportionné sur les membres d’un groupe protégé : des éléments sur la situation du groupe de prestataires et des éléments sur les conséquences pratiques de la loiNote de bas de page 36.

[58] À ce sujet, je souligne surtout les éléments suivants qui ont été présentés par les prestataires, qui n’ont pas été contestés par la Commission et qui ont été retenus par la division généraleNote de bas de page 37 :

  • Le partage inégal des tâches domestiques continue d’être la cause principale du fait que les femmes participent moins souvent au marché du travail que les hommes et effectuent moins d’heures de travail en moyenne. En 2015, les femmes ayant un enfant de moins de 18 ans effectuaient 60 % des travaux domestiques, dont 65 % des soins aux enfants. Elles n’effectuaient que 39 % du travail rémunéré. De plus, la « pénalité résultant de la maternité » dure au‑delà de l’année de naissance d’un enfant.
  • Les femmes subissent une baisse de revenu de plus de 40 % durant la période périnatale, sauf dans les cas où les femmes reçoivent un supplément de l’employeur ou d’une autre source. De plus, cet effet perdure même 9 ans après la naissance de l’enfantNote de bas de page 38.
  • Les femmes risquent encore d’être en chômage après un congé de maternité parental, malgré les dispositions de lois provinciales et fédérales visant leur protectionNote de bas de page 39;
  • Les femmes utilisent 94,1 % des semaines de prestations de maternité et parentales et 58,8 % des autres prestations spécialesNote de bas de page 40;
  • Un nombre important de nouvelles mères sont donc touchées par la limite de 50 semaines, alors que le nombre d’hommes touchés est très limitéNote de bas de page 41.

[59] En effet, les faits présentés dans le cas présent ressemblent à ceux que la Cour suprême du Canada a examinés dans l’affaire FraserNote de bas de page 42.

[60] Aux fins de cette décision, je suis donc disposé à accepter que les femmes ayant des enfants aient moins de chances que les autres personnes assurées de pouvoir accéder aux prestations régulières d’assurance-emploi et d’être protégées contre le risque d’une perte d’emploi.

[61] Cependant, toutes les distinctions ne sont pas discriminatoires. Cette question fait l’objet de la deuxième partie de l’analyse dans les affaires relevant de l’article 15 de la Charte.

La division générale a commis une erreur de droit en concluant que les articles contestés imposent un fardeau ou nient un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage

[62] Je suis sensible à la situation des prestataires et je reconnais que la règle de 50 semaines leur a causé des difficultés financières. La division générale a conclu que cette règle a pour effet de maintenir les femmes dans la pauvreté et dans un lien de dépendance, et de considérer le salaire des femmes comme moins digne de protectionNote de bas de page 43.

[63] Dans sa décision, la division générale s’est appuyée fortement sur la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire FraserNote de bas de page 44. Elle a interprété cette décision comme lui permettant de minimiser l’importance du contexte législatif dans le cadre de son analyse.

[64] À la suite de la décision de la division générale, la Cour suprême a levé toute incertitude sur cette question dans l’affaire Sharma :le contexte législatif est un facteur important que les tribunaux doivent examiner lorsqu’ils évaluent si une distinction constitue de la discrimination au sens de la CharteNote de bas de page 45. Plus précisément, la Cour a souligné des éléments qui doivent être pris en compte lors de l’évaluation du contexte législatif :

Parmi les facteurs pertinents, mentionnons : les objets du régime, la question de savoir si la politique est conçue dans l’intérêt de divers groupes, l’affectation des ressources, les objectifs d’intérêt public particuliers visés par le législateur et la question de savoir si les limites prévues par le régime tiennent compte de ces facteursNote de bas de page 46 […]

[65] J’estime alors que la division générale a commis une erreur de droit dans son analyse du contexte global de cette situation, car elle n’a pas tenu compte de l’objet du régime d’assurance-emploi et de son contexte législatif. Cette partie de la décision de la division générale est plutôt axée sur le témoignage des prestataires et leur rapport d’expertNote de bas de page 47.

[66] Lorsqu’on considère l’ensemble du contexte, les articles contestés ne sont pas arbitraires et ne nient pas un avantage d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage.

[67] D’abord, l’objet du régime n’est pas de soutenir les familles. Il ne s’agit pas non plus d’une prestation universelle versée à toutes les personnes qui en ont besoin.

[68] Avant tout, le régime fournit des prestations de remplacement du revenu et préserve le rattachement du bénéficiaire au marché du travailNote de bas de page 48. Ce soutien au revenu est de nature partielle et temporaire. De plus, comme je l’ai expliqué ci-dessus, le régime est fondé sur un lien entre la participation récente et active au marché du travail et le versement des prestations.

[69] Il est évident que les prestations de maternité et parentales sont conformes aux objets de la loi : elles réduisent les effets d’un arrêt de rémunération et favorisent le rattachement au marché du travail. La question de savoir s’il convient d’accorder des prestations supplémentaires aux personnes vulnérables ou démunies dépasse les objets de la loi et les compétences du Tribunal.

[70] Le régime est également conçu dans l’intérêt de divers groupes, c’est-à-dire pour les personnes qui ont subi un arrêt de rémunération, et ce, pour différentes raisons énoncées par la loi.

[71] J’ai exposé certaines des complexités incorporées dans la conception de ce régime dans les paragraphes ci-dessus. Le régime est conçu pour répondre aux intérêts divergents de différents groupes. Ce régime doit nécessairement avoir des limites générales pour combler les différents besoins des personnes assuréesNote de bas de page 49. La limite de 50 semaines compte parmi ces limites générales.

[72] Par ailleurs, la limite de 50 semaines concerne l’affectation des ressources. Les limites prévues par la Loi sur l’assurance-emploi sont essentielles au bon fonctionnement et à l’efficacité du régime, comme elles le sont pour tout autre régime d’assurance. Elles sont importantes pour déterminer l’ampleur du risque assumé. Modifier ces limites pourrait avoir un effet sur l’équilibre financier que la Commission recherche et pourrait entraîner une augmentation des taux de cotisation.

[73] Bien que les prestataires ne soient pas d’accord avec l’endroit où cette ligne a été tracée, elles ne contestent pas la valeur du régime ni la nécessité de fixer des limites. En effet, pour assurer le bien-être du régime, celui-ci doit atteindre un équilibre financier et le taux de cotisation doit être maintenu à un niveau peu élevé.

[74] Je reconnais qu’une femme qui touche 15 semaines de prestations de maternité est, en effet, limitée à 35 semaines de prestations régulières d’assurance-emploi. Cependant, le besoin essentiel de fixer des limites dans un régime d’assurance aussi complexe m’amène à conclure que la limite de 50 semaines n’est pas arbitraire et qu’elle n’aura pas l’effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer des stéréotypes ou des préjugésNote de bas de page 50.

[75] Les prestataires se sont vu refuser des prestations, mais pas parce que leurs salaires sont moins dignes de protection. Comme beaucoup d’autres personnes, elles ont tout simplement été confrontées à l’une des nombreuses limites prévues par la Loi sur l’assurance-emploiNote de bas de page 51.

[76] La limite de 50 semaines n’en est qu’une parmi de nombreuses limites imposées par la Loi sur l’assurance-emploi. Son application n’est pas limitée aux personnes qui veulent combiner les prestations de maternité, parentales et régulières. Cette limite s’applique à toute personne qui veut combiner des prestations régulières avec tout autre type de prestations spécialesNote de bas de page 52. D’ailleurs, même les personnes qui veulent combiner différents types de prestations spéciales peuvent faire face à des limitesNote de bas de page 53.

[77] Bien que j’aie noté précédemment que la présente affaire ressemblait à l’affaire Fraser, une différence importante se présente à cette deuxième étape de l’analyse.

[78] Les demanderesses dans l’affaire Fraser ont travaillé dans le cadre d’un partage de poste, ce qui les a amenés à travailler moins d’heures et a eu un effet négatif sur leurs pensions de retraite.

[79] Cependant, d’autres personnes travaillant des heures réduites avaient la possibilité de racheter des périodes de service à temps plein ouvrant droit à pension. Cette possibilité a été refusée aux personnes — presque exclusivement des femmes — participant au programme de partage de poste.

[80] L’affaire qui nous préoccupe est de nature différente, car toute personne qui veut combiner les prestations régulières et spéciales est assujettie à la même limite de 50 semaines.

[81] En résumé, la limite de 50 semaines ne crée et ne renforce aucun stéréotype selon lequel les femmes ne sont pas des atouts importants pour le marché du travail. De plus, elle ne porte pas atteinte à la dignité des femmes en donnant à penser que leur travail ne mérite pas autant de reconnaissance. Toute personne ayant droit aux prestations d’assurance-emploi sera confrontée à diverses limites fixées par ce régime qui est à la fois complexe et étroitement ciblé.

Les prestataires ont bénéficié du régime

[82] L’argument des prestataires repose sur un manque d’accès aux prestations régulières d’assurance-emploi. Toutefois, il n’y a qu’un régime, même si une personne peut avoir droit à des prestations en fonction de différentes raisons liées à son arrêt de rémunération.

[83] La division générale a commis une erreur de droit au paragraphe 222 de sa décision quand elle a constaté que les femmes qui reçoivent des prestations parentales et de maternité et qui perdent leur emploi sont exclues du régime.

[84] Au contraire, ces femmes ont bénéficié du régime jusqu’au maximum offert aux termes de la loi.

[85] Le régime fournit un soutien temporaire en cas d’arrêt de rémunération pour une raison prescrite. Ici, les prestataires ont subi un arrêt de rémunération pour une raison prescrite, et la Commission leur a versé des prestations en conséquence.

[86] En effet, l’effet préjudiciable invoqué par les prestataires doit se produire assez rarement. Elle ne s’applique pas à toutes les femmes, même pas à toutes les femmes avec un enfant.

[87] Le problème auquel les prestataires sont confrontées est lié au fait que leur arrêt de rémunération a été prolongé pour une autre raison prescrite (la perte d’un emploi), et ce, dans un court laps de temps.

[88] Cependant, la Commission ne peut jamais verser plus d’un type de prestations à la fois. De plus, une personne peut atteindre la limite de 50 semaines dans divers scénarios.

[89] Imaginons, par exemple, une personne qui perd son emploi alors qu’elle s’occupe d’un enfant gravement malade ou alors qu’elle est incapable de travailler en raison d’un problème de santé. Même les femmes qui n’accumulent pas suffisamment d’heures d’emploi assurable entre deux grossesses se feront refuser des prestations pour la deuxième grossesse parce qu’elles ne remplissent pas les critères d’admissibilitéNote de bas de page 54.

[90] En effet, lorsque des personnes appartenant à un groupe protégé sont confrontées à ce problème, elles pourraient également présenter des contestations constitutionnelles afin de supprimer encore plus de limites fixées par la loi. La Cour d’appel fédérale a déjà lancé une mise en garde contre cette situationNote de bas de page 55.

[91] Vu sous un angle différent, le problème auquel les prestataires font face tient en partie au fait que la Loi sur l’assurance-emploi a amélioré la protection offerte aux femmes enceintes en bonifiant la durée des prestations de maternité et parentales jusqu’à la limite de 50 semaines.

[92] Les prestataires seraient désavantagées si les prestations parentales étaient réduites à 15 semaines, même si cela leur donnait une meilleure protection en cas de chômage.

Les régimes de prestations sont difficiles à invalider sur le fondement de l’article 15 de la Charte

[93] Bien que la Loi sur l’assurance-emploi ne soit pas à l’abri d’un examen fondé sur la Charte, les contestations du régime fondées sur le droit à l’égalité ont eu peu de succèsNote de bas de page 56. Il en va de même pour le Régime de pensions du Canada, qui est un régime contributif similaireNote de bas de page 57.

[94] Les propos de la Cour suprême dans l’affaire Gosselin sont aptes :

Premièrement, il est possible de conclure qu’une disposition contestée ne viole pas la Charte canadienne même en l’absence de correspondance parfaite entre un régime de prestations et les besoins ou la situation du groupe demandeur. On peut éprouver de la sympathie pour les personnes qui, pour une raison ou une autre, n’ont peut‑être pas pu participer aux programmes. Cependant, le fait qu’un programme social donné ne réponde pas aux besoins de tous, sans exception, ne nous permet pas de conclure que ce programme ne correspond pas aux besoins et à la situation véritables du groupe concerné. Comme l’a souligné le juge Iacobucci dans Law, précité, par. 105, nous ne devrions pas exiger « qu’une loi doi[ve] toujours correspondre parfaitement à la réalité sociale pour être conforme au par. 15(1) de la Charte ». L’élaboration d’un régime d’aide sociale destiné à répondre aux besoins des jeunes adultes est un problème complexe, auquel il n’existe pas de solution parfaite. Quelles que soient les mesures adoptées par le gouvernement, il existera toujours un certain nombre de personnes auxquelles un autre ensemble de mesures aurait mieux convenu. Le fait que certaines personnes soient victimes des lacunes d’un programme ne prouve pas que la mesure législative en cause ne tient pas compte de l’ensemble des besoins et de la situation du groupe de personnes touché, ni que la distinction établie par cette mesure crée une discrimination réelle au sens du par. 15(1)Note de bas de page 58.

[95] En bref, la réalité sociale est complexe. Bien qu’un régime d’assurance sociale tel que la Loi sur l’assurance-emploi peut tenter de répondre aux besoins de diverses personnes, on ne peut pas s’attendre à la perfection. On ne peut pas l’exiger non plus en utilisant les protections de la Charte en matière d’égalité.

[96] Je comprends parfaitement pourquoi les prestataires souhaitent disposer d’une période pour se consacrer exclusivement à leur nouvel enfant, et avoir ensuite le temps de chercher un nouvel emploi. Cependant, j’estime que le choix de leur accorder des prestations supplémentaires appartient au Parlement et non aux tribunaux. Ce premier est plus en mesure d’évaluer les répercussions provoquées par la modification d’une limite importante sur un régime complexe comme l’assurance-emploi.

[97] La Cour d’appel fédérale a réitéré cette idée de différentes manières, dont celle‑ci :

Lorsque la Cour examine un argument qui veut qu’un régime complexe de prestations prévu par la loi, comme celui de l’assurance-chômage, a un effet négatif différentiel sur certains demandeurs contrairement à l’article 15, elle ne peut se préoccuper de la question de savoir s’il serait désirable d’accorder des prestations étendues comme on le recherche. Dans la création des programmes sociaux, il faut établir des priorités. Le législateur est mieux équipé pour cette tâche que les tribunaux et la Constitution n’exige pas que les tribunaux procèdent à un réglage minutieux des régimes législatifsNote de bas de page 59.

Je vais rendre la décision que la division générale aurait dû rendre

[98] Les erreurs de la division générale me permettent de rendre la décision que la division générale aurait dû rendreNote de bas de page 60. Les parties s’entendent pour dire qu’il s’agit de la réparation la plus appropriée dans le cas présent.

[99] Je suis d’accord. Les faits de l’affaire ne sont pas vraiment contestés. De plus, les parties n’ont pas été empêchées de plaider leur cause devant la division générale de quelque manière que ce soit. Le dossier d’appel est complet.

[100] Cela signifie que je peux juger si les articles contestés sont constitutionnels et si les prestataires ont droit à des prestations régulières d’assurance-emploi supplémentaires.

Les articles contestés sont constitutionnels

[101] Il ressort de l’analyse ci-dessus que les prestataires n’ont pas établi que les articles 8(2), 8(5), 10(2), 10(8)(a), 10(10) et 12(6) de la Loi sur l’assurance-emploi violent le droit à l’égalité prévue par la Charte. Les articles contestés sont constitutionnels. Par conséquent, les prestataires sont confrontées à la limite de 50 semaines et ne sont pas admissibles à des prestations régulières d’assurance-emploi supplémentaires.

Conclusion

[102] J’accueille l’appel de la Commission. La division générale a commis une erreur de droit en concluant que les articles contestés nient un avantage aux prestataires d’une manière qui a pour effet de renforcer, de perpétuer ou d’accentuer le désavantage. Plus particulièrement, la division générale n’a pas suffisamment tenu compte de l’objet du régime d’assurance-emploi et de son contexte législatif.

[103] Cette erreur me permet de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. J’estime que les articles contestés sont constitutionnels. Les prestataires n’ont donc pas droit à des prestations régulières d’assurance-emploi supplémentaires.

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