Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : MP c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2022 TSS 1119

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : M. P.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de
l’assurance-emploi du Canada (478247) datée du
31 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lilian Klein
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 8 septembre 2022
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 21 octobre 2022
Numéro de dossier : GE-22-2254

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Décision

[1] J’accueille l’appel de la prestataire. Cette décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

[2] Je suis d’accord avec la prestataire. Elle n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales du 9 septembre 2021 au 30 janvier 2022.

Aperçu

[3] La prestataire est arrivée au Canada en tant que réfugiée. Elle effectuait un travail non spécialisé. Elle a demandé des prestations de maladie le 1er octobre 2020 parce qu’elle présentait une grossesse à haut risque.

[4] La prestataire affirme avoir été admise à l’hôpital après avoir contracté la COVID-19. Le 16 janvier 2021, elle a été transférée à l’unité de soins intensifs pour subir une césarienne d’urgence. Elle est ensuite entrée dans le coma. Le 15 février 2021, elle a été transférée dans un hôpital de réadaptation. Elle a dit qu’elle avait été expulsée de chez elle, donc ayant reçu son congé de l’hôpital le 10 mars 2021, elle s’est rendue chez une amie.

[5] Le 8 septembre 2021, alors qu’elle se remettait des complications graves liées à la COVID-19 et au coma, le permis de travail de la prestataire a expiré. Elle a présenté une demande de renouvellement le 24 septembre 2021. On a approuvé la demande de renouvellement le 31 janvier 2022.

[6] La prestataire a touché des prestations de maternité pendant 15 semaines, puis, selon la prestataire, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a commencé à lui verser des prestations parentales prolongées. Cependant, elle a cessé les paiements le 8 septembre 2021. En effet, la Commission lui a imposé une inadmissibilité au bénéfice des prestations parentales du 9 septembre 2021 au 30 janvier 2022 parce qu’elle n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler ni qu’elle pouvait résider au Canada.

[7] La Commission dit qu’elle est sensible à l’épreuve de la prestataire, mais soutient que celle-ci aurait pu demander à quelqu’un de l’aider à renouveler son permis de travail à temps.

[8] Je dois décider si l’inadmissibilité de la prestataire au bénéfice des prestations parentales était justifiée.

[9] À son audience, la prestataire a dit que ses versements de prestations n’ont pas repris après le renouvellement de son permis de travail le 31 janvier 2022. Par conséquent, elle traverse une période de difficultés financières importantes.

Les questions que je dois trancher

[10] La prestataire était-elle inadmissible au bénéfice des prestations parentales du 9 septembre 2021 au 30 janvier 2022 parce qu’elle ne pouvait pas prouver qu’elle était disponible pour travailler après l’expiration de son permis de travail?

[11] La prestataire était-elle inadmissible au bénéfice des prestations parentales parce que son numéro d’assurance sociale (NAS) était expiré?

[12] La prestataire était-elle inadmissible au bénéfice des prestations parentales parce qu’elle n’a pas conservé son statut au Canada et qu’elle n’était donc pas autorisée à rester ici?

Analyse

[13] Chacune des questions ci-dessus a trait au permis de travail de la prestataire, alors je vais aborder cette question en premier.

[14] Le permis de travail de la prestataire a expiré le 8 septembre 2021. Elle a présenté une demande de renouvellement le 24 septembre 2021. Le permis et le NAS ont été renouvelés le 31 janvier 2022.Note de bas de page 1 Les parties ne contestent pas ces dates et la preuve les appuie, alors je les accepte comme des faits.

[15] Si une personne présente une demande de renouvellement avant la date d’expiration de son permis de travail, mais qu’elle n’a pas encore reçu son nouveau permis, on déduit (on reconnaît) qu’elle est toujours disponible pour travailler.

[16] Si le permis de travail a été annulé ou si la personne ne l’a pas renouvelé avant la date d’expiration, elle ne peut habituellement pas être considérée comme disponible pour travailler. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il faut tenir compte des faits propres à la situation de chaque prestataire.Note de bas de page 2

[17] Dans sa décision de révision, la Commission a déclaré la prestataire inadmissible parce que son permis de travail a expiré le 8 septembre 2021.Note de bas de page 3 Dans ses observations, la Commission affirme qu’elle l’a déclarée inadmissible parce qu’elle n’avait pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler ni qu’elle pouvait résider au Canada avec un permis de travail et un NAS expirés.Note de bas de page 4 Plus loin dans ses observations, elle affirme que les prestataires n’ont pas besoin d’un permis de travail valide pour obtenir des prestations spéciales, mais seulement d’une autorisation pour rester au Canada.Note de bas de page 5

La prestataire était-elle inadmissible au bénéfice des prestations parentales parce qu’elle ne pouvait pas prouver qu’elle était disponible pour travailler après l’expiration de son permis de travail?

[18] Non. La prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales pour cette raison.

[19] Je tire cette conclusion parce que la prestataire n’avait pas à prouver qu’elle était disponible pour travailler. Il faut prouver sa disponibilité à travailler pour recevoir des prestations régulières, mais il ne s’agit pas d’une exigence pour toucher des prestations spéciales comme les prestations de maladie, les prestations de maternité et les prestations parentales.Note de bas de page 6

[20] La Commission n’a pas démontré en quoi le permis de travail expiré de la prestataire justifiait une inadmissibilité. Elle a par la suite concédé ce point.Note de bas de page 7

[21] Je conclus donc qu’on ne peut pas soutenir que la prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations parentales parce qu’elle n’a pas prouvé qu’elle était disponible pour travailler après l’expiration de son permis.

La prestataire était-elle inadmissible au bénéfice des prestations parentales après l’expiration de son NAS?

[22] Non. La prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales pour cette raison.

[23] Selon la Commission, l’inadmissibilité de la prestataire découle du fait qu’elle n’a pas prouvé sa disponibilité pour travailler aux termes d’un article de loi qui traite des NAS.Note de bas de page 8 La Commission affirme que même si un NAS valide n’est pas une condition pour établir une période de prestations, il en faut un pour recevoir des prestations.Note de bas de page 9

[24] La Commission affirme que la prestataire devait démontrer trois choses pour recevoir des prestations. Premièrement, elle devait démontrer que son NAS était valide pendant sa période de référence. Deuxièmement, elle devait démontrer qu’elle était [traduction] « autorisée à être au Canada ». Troisièmement, elle devait demeurer au Canada.Note de bas de page 10

[25] La Commission ne conteste pas le fait que la prestataire avait un NAS valide au cours de sa période de référence. Autrement dit, la période où elle a travaillé assez d’heures assurables pour être admissible aux prestations spéciales de l’assurance-emploi. Ainsi, la Commission lui a versé des prestations de maladie, des prestations de maternité et des prestations parentales prolongées jusqu’au 8 septembre 2021.Note de bas de page 11 La Commission ne conteste pas avoir versé ces prestations. Je l’accepte donc comme un fait.

[26] La Commission ne conteste pas non plus que la prestataire est demeurée au Canada pendant sa période de prestations. Une période de prestations est la période pendant laquelle les prestations sont versées aux prestataires admissibles.

[27] J’en conclus donc que la Commission a déclaré la prestataire inadmissible parce qu’elle n’était pas [traduction] « autorisée à être au Canada » (la deuxième condition), et non parce que son NAS était expiré.

[28] De sorte que la prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales parce que son NAS était expiré.

La prestataire était-elle inadmissible parce qu’elle n’a pas conservé son statut au Canada et qu’elle n’était donc pas autorisée à rester ici?

[29] Non. La prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales pour cette raison.

[30] La Commission affirme que la prestataire n’était [traduction] « pas admissible au bénéfice des prestations » (inadmissible au bénéfice des prestations) du 9 septembre 2021 au 30 janvier 2022, parce qu’elle n’a pas « conservé son statut » au Canada pendant cette période.Note de bas de page 12 La Commission affirme qu’elle devait prouver qu’elle avait l’autorisation de rester ici.Note de bas de page 13

[31] Je reconnais l’argument de la Commission selon lequel le permis de travail expiré de la prestataire ne lui a pas accordé le statut de résidente temporaire et n’autorisait pas un retour au Canada si elle quittait le pays. Son permis expiré ne lui permettait pas non plus de travailler ici. Toujours est-il que j’ai déjà conclu qu’elle n’avait pas besoin de prouver sa disponibilité à travailler pour recevoir des prestations parentales.

[32] De plus, le fait de conclure que le séjour de la prestataire au Canada n’était pas autorisé relève uniquement de la compétence d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. La Commission ne conteste pas le fait qu’elle ne peut pas décider si les prestataires sont autorisés à rester au Canada. Elle peut seulement vérifier si les prestataires sont disponibles pour travailler en fonction de la période de validité de leur permis de travail.Note de bas de page 14

[33] Cependant, la Commission soutient toujours que les prestations ne sont pas payables aux personnes qui n’ont pas le statut leur permettant de travailler ou de rester au Canada.Note de bas de page 15 Elle cite un CUB pour appuyer cette conclusion.Note de bas de page 16

[34] Cependant, la situation factuelle du CUB est différente, de sorte qu’il n’appuie pas l’argument de la Commission. La principale caractéristique qui le distingue est que le CUB porte sur la question de savoir si un prestataire sans permis de travail valide avait le droit de demander des prestations régulières. L’appel dont je suis saisie porte sur le paiement d’une demande de prestations parentales déjà établie où il n’était pas nécessaire de prouver la disponibilité pour travailler.

[35] La Commission n’a pas indiqué à quel article de loi elle a eu recours pour rendre inadmissible la prestataire ayant conclu qu’elle n’avait pas le « statut » au Canada ou qu’elle n’avait pas l’autorisation de rester au Canada. Je ne connais pas d’article de loi qui exigerait qu’une personne dans la situation de la prestataire soit inadmissible au bénéfice des prestations parentales pour ces raisons.

[36] Ni la Commission ni le Tribunal ne peuvent imposer d’inadmissibilité à moins que le motif soit prévu par la loi.

[37] Par conséquent, je conclus que la prestataire n’était pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales parce qu’elle n’avait pas de statut au Canada ou parce qu’elle n’était pas autorisée à rester ici.

Conclusion

[38] Pour les raisons qui suivent, je conclus que la prestataire n’est pas inadmissible au bénéfice des prestations parentales du 9 septembre 2021 au 30 janvier 2022 :

  • La prestataire n’avait pas à prouver qu’elle était disponible pour travailler en ayant un permis de travail valide pendant cette période.
  • La prestataire n’avait pas besoin d’un NAS valide pour recevoir des prestations parentales.
  • La Commission n’avait pas la compétence de conclure que la prestataire n’avait pas le statut ou l’autorisation de rester au Canada et de la déclarer inadmissible pour ces motifs.

[39] Par conséquent, j’accueille l’appel de la prestataire.

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