Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : LG c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 1327

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission de faire appel

Partie demanderesse : L. G.
Partie défenderesse : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 7 juillet 2023 (GE-23-432)

Membre du Tribunal : Melanie Petrunia
Date de la décision : Le 4 octobre 2023
Numéro de dossier : AD-23-691

Sur cette page

Décision

[1] La permission de faire appel est refusée. L’appel n’ira pas de l’avant.

Aperçu

[2] Le demandeur, L. G. (prestataire), a perdu son emploi de cimentier-finisseur après un accident avec un véhicule de l’entreprise. Il a trouvé un autre emploi, mais il a été mis à pied à la fin du contrat et a demandé des prestations d’assurance-emploi.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a décidé que le prestataire avait perdu son emploi en raison d’une inconduite, et il a été exclu du bénéfice des prestations.

[4] Le prestataire a porté cette décision en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, sans succès. La division générale a conclu que le prestataire a été congédié de son emploi parce qu’il a refusé de passer un test de dépistage des drogues et de l’alcool à la demande de son employeur. Elle a décidé que la Commission avait prouvé qu’il s’agissait d’une inconduite selon la Loi sur l’assurance-emploi.

[5] Le prestataire demande maintenant la permission de faire appel de la décision de la division générale à la division d’appel du Tribunal. Cependant, il doit obtenir la permission pour que son appel aille de l’avant. Il soutient que la division générale a commis des erreurs de fait importantes dans sa décision.

[6] Je dois décider si la division générale a commis une erreur susceptible de révision qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès. Je refuse la permission de faire appel parce que l’appel du prestataire n’a aucune chance raisonnable de succès.

Question en litige

[7] Voici les questions en litige :

  1. a) Est-il possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante en omettant de tenir compte des exigences de la politique de l’employeur en matière de drogues et d’alcool?
  2. b) Est-il possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante en omettant de tenir compte d’un accident antérieur dans lequel le prestataire avait été impliqué?
  3. c) Est-il possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante en omettant de considérer que le refus du test n’était pas la seule raison pour laquelle le prestataire s’est vu refuser des prestations?
  4. d) Le prestataire soulève-t-il une autre erreur susceptible de révision que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès?

Je n’accorde pas au prestataire la permission de faire appel

[8] Dans le cadre d’une demande de permission de faire appel, le critère juridique que le prestataire doit remplir est peu rigoureux : y a-t-il un moyen (argument) qui permettrait de soutenir que l’appel a une chance de succèsNote de bas page 1?

[9] Pour trancher cette question, je me suis surtout demandé si la division générale pouvait avoir commis une ou plusieurs des erreurs pertinentes (appelées « moyens d’appel ») qui figurent dans la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement socialNote de bas page 2.

[10] Un appel n’est pas une nouvelle occasion de débattre de la demande originale. En fait, il faut plutôt que je décide :

  1. a) si la procédure de la division générale était inéquitable;
  2. b) si la division générale a oublié de trancher une question alors qu’elle aurait dû le faire ou si elle a tranché une question alors qu’elle n’aurait pas dû le faire;
  3. c) si elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteNote de bas page 3;
  4. d) si elle a commis une erreur de droitNote de bas page 4.

[11] Avant que l’appel du prestataire puisse passer à la prochaine étape, je dois être convaincue qu’au moins un des moyens d’appel ci-dessus lui donne une chance raisonnable de succès. Par « une chance raisonnable de succès », on entend qu’en faisant valoir ses arguments, le prestataire pourrait peut-être gagner sa cause. Je dois aussi tenir compte des autres moyens d’appel possibles, ceux que le prestataire n’a pas cernés avec précisionNote de bas page 5.

La décision de la division générale

[12] La division générale devait décider pourquoi le prestataire ne travaillait plus. Le prestataire a fait valoir qu’il a quitté volontairement son emploi après avoir refusé un test de dépistage pour une raison valable. Il a dit qu’il avait accepté un nouvel emploi le lendemainNote de bas page 6.

[13] La division générale a conclu que le prestataire avait été congédié et qu’il n’avait pas quitté volontairement son emploi. Elle a examiné les arguments du prestataire au sujet de son départ avant d’être congédié, mais a conclu qu’il n’avait pas d’autre choix que de continuer à travailler et qu’il avait été congédiéNote de bas page 7.

[14] La division générale devait ensuite établir pourquoi le prestataire avait été congédié et si ce motif constituait une inconduite selon la Loi sur l’assurance-emploi.

[15] La division générale a conclu que la raison du congédiement du prestataire était le non-respect de la politique de l’employeur concernant les tests de dépistage des drogues et de l’alcool. L’employeur a demandé au prestataire de passer un test après l’accident avec le véhicule de l’entreprise. Le prestataire a refusé parce qu’il craignait que ce qu’il avait fait pendant la longue fin de semaine n’entraîne un résultat positif au test. Il estimait également que l’employeur n’avait pas de motifs raisonnables de demander le test.

[16] L’employeur a dit au prestataire qu’un refus de se soumettre au test serait traité comme un résultat positif et qu’il serait congédié. Le prestataire a tout de même refusé de passer le test et a quitté le lieu de travailNote de bas page 8.

[17] L’employeur avait fourni à la Commission une copie d’un rapport d’accident qu’il avait rédigé et qui faisait partie de la preuve examinée par la division généraleNote de bas page 9. La politique de l’employeur concernant le dépistage des drogues et substances intoxicantes, qui avait été signée par le prestataire, a également été fournieNote de bas page 10.

[18] La division générale a énoncé les principes clés concernant l’inconduite en se fondant sur la jurisprudence de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédéraleNote de bas page 11. Elle a appliqué ces principes à la situation du prestataire et a conclu que la Commission avait prouvé qu’il y avait eu inconduite pour les raisons décrites ci-dessous.

  • L’employeur avait une politique sur l’aptitude à travailler dans un milieu de travail où l’on a toutes ses facultés, qui traitait des tests de dépistage des drogues et de l’alcoolNote de bas page 12.
  • Le prestataire avait signé une attestation indiquant qu’il avait reçu le manuel de l’employeur, qui incluait la politique, et qu’il acceptait de se conformer aux politiques et aux procédures de l’employeurNote de bas page 13.
  • La politique prévoit qu’une personne employée qui refuse de se soumettre à des tests et qui ne signale pas elle-même avoir consommé doit faire l’objet d’un licenciement motivéNote de bas page 14.
  • Le prestataire a été informé qu’il serait congédié s’il refusait le test.
  • Le prestataire savait ou aurait dû savoir qu’il serait congédié s’il refusait le testNote de bas page 15.
  • La décision du prestataire de refuser le test était délibérée et voulueNote de bas page 16.

Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis des erreurs de fait

[19] Dans sa demande de permission de faire appel, le prestataire soutient que la division générale a commis des erreurs de fait importantes. Il ne conteste pas la décision de la division générale, selon laquelle il a été congédié et n’a pas quitté volontairement son emploiNote de bas page 17.

[20] Le prestataire soutient que la division générale n’a pas tenu compte du fait que la politique exige que l’employeur ait des motifs raisonnables de soupçonner qu’il avait conduit avec les facultés affaiblies et que deux représentants de haut niveau de l’entreprise doivent être d’accord pour demander le testNote de bas page 18. Le prestataire souligne un certain nombre de problèmes liés à la conduite de l’employeur après l’accident.

[21] Le prestataire soutient également que la division générale n’a pas tenu compte d’un accident antérieur dans lequel il avait été impliqué, à la suite duquel l’employeur n’a pas demandé de test de dépistage des drogues et de l’alcool. Le prestataire affirme que cet accident était beaucoup plus grave et qu’aucun test n’a été demandéNote de bas page 19.

[22] Le prestataire soutient également que son refus de se soumettre au test n’était pas la seule raison de son congédiement. Le prestataire souligne un certain nombre de facteurs sur lesquels, il l’a appris par la suite, l’employeur se fondait, comme l’odeur d’alcool dans son haleine. Il affirme qu’il n’a jamais nié avoir refusé de passer le test, mais il conteste le fait que la Commission s’appuie sur un certain nombre de fabulations de l’employeurNote de bas page 20.

[23] J’estime que ces arguments n’ont aucune chance raisonnable de succès. Ils indiquent tous que la division générale a omis d’examiner une certaine pratique de l’employeur. La division générale a pris note de la position du prestataire selon laquelle l’employeur n’avait pas de motifs de demander le testNote de bas page 21.

[24] Il est bien établi dans la jurisprudence que c’est la conduite de l’employé qui est en cause dans l’analyse de l’inconduite, et non la conduite de l’employeur. Dans la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (Procureur général) c McNamara, le prestataire a été congédié pour avoir échoué à un test de dépistage des droguesNote de bas page 22. Ce prestataire-là a également soutenu que le test n’était pas justifié.

[25] La Cour a confirmé que c’est le comportement de l’employé qui est en cause dans l’analyse de l’inconduite, et non celui de l’employeur. Les personnes employées qui sont congédiées à tort disposent d’autres recoursNote de bas page 23.

[26] La division générale a appliqué le bon critère juridique et a expliqué pourquoi elle préférait certains éléments de preuve. Elle a reconnu et examiné la preuve et les arguments du prestataire. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante. Le prestataire réitère les mêmes arguments que ceux qui ont été soulevés devant la division générale.

[27] La division générale a conclu que le prestataire savait qu’il serait congédié s’il refusait le test. Le prestataire ne conteste pas cette conclusion. Il a été informé que le refus du test entraînerait son congédiement et il a volontairement refusé. Dans sa demande de prestations, le prestataire a déclaré que deux cadres supérieurs exigeaient qu’il se soumette à un test de dépistage des drogues et de l’alcoolNote de bas page 24.

[28] La division générale n’a pas fait référence à l’accident précédent du prestataire, mais je suis d’avis que cela ne constitue pas une erreur de fait. La division générale devait décider si la conduite du prestataire ayant mené à son congédiement était une inconduite. Le fait qu’il ait été impliqué dans un accident antérieur dans lequel aucun test n’avait été demandé n’est pas pertinent dans le cadre de son congédiement pour avoir refusé le test demandé par l’employeur après cet accident. Le prestataire soutient que cela donne à penser que l’employeur n’avait pas de motifs raisonnables de demander le test. Comme je l’ai mentionné plus haut, la conduite de l’employeur n’est pas en cause.

[29] De même, il n’est pas possible de soutenir que la division générale a omis d’examiner si le prestataire a été congédié pour d’autres raisons. Le dossier porté à la connaissance de la division générale établit clairement que le prestataire a été impliqué dans un accident et que son employeur lui a demandé de se soumettre à un test de dépistage des drogues et de l’alcool. Le prestataire a refusé et a été congédié.

[30] Le prestataire ne nie pas ces faits. Il affirme que l’employeur a menti au sujet d’autres facteurs, comme l’odeur d’alcool dans son haleine après l’accident. Je suis d’avis que la division générale a pris en considération tous les faits pertinents et n’en a négligé aucun. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a fondé sa décision sur une erreur de fait importante.

[31] En plus des arguments du prestataire, j’ai également examiné les autres moyens d’appel. Le prestataire n’a pas fait état d’une quelconque iniquité procédurale de la part de la division générale, et je ne vois aucune preuve d’une quelconque iniquité procédurale. Il n’est pas possible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou une erreur de compétence.

[32] Le prestataire n’a relevé aucune erreur que la division générale aurait commise et qui pourrait conférer à l’appel une chance de succès. Par conséquent, je refuse la permission de faire appel.

Conclusion

[33] La permission de faire appel est refusée. Par conséquent, l’appel n’ira pas de l’avant.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.