Assurance-emploi (AE)

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[TRADUCTION]

Citation : JS c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2023 TSS 145

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale - Section de l’assurance-emploi

Décision

Partie appelante : J. S.
Partie intimée : Commission de l’assurance-emploi du Canada

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (501193) datée du 5 août 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Angela Ryan Bourgeois
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 20 janvier 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 20 février 2023
Numéro de dossier : GE-22-3058

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La Commission de l’assurance-emploi du Canada avait droit de procéder à un nouvel examen de la disponibilité pour travailler du prestataire.

[3] Le prestataire n’a pas démontré qu’il était disponible pour travailler pendant ses études. Par conséquent, il n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi du 12 septembre 2021 au 25 avril 2022.

Aperçu

[4] Le présent appel porte sur la question de savoir si le prestataire était disponible pour travailler pendant qu’il étudiait à temps plein et si la Commission avait le droit de réévaluer sa disponibilité après lui avoir versé des prestations d’assurance-emploi.

[5] La Commission a décidé que le prestataire était inadmissible au bénéfice des prestations régulières d’assurance-emploi du 12 septembre 2021 au 25 avril 2022 parce qu’il n’était pas disponible pour travailler.Note de bas de page 1

[6] Je dois décider si le prestataire a prouvé selon la prépondérance des probabilités qu’il était disponible pour travailler.Note de bas de page 2

[7] La Commission affirme que le prestataire n’était pas disponible parce qu’il étudiait à temps plein à l’université et qu’il pouvait seulement travailler en dehors de ses heures de cours.

[8] Le prestataire n’est pas d’accord. Il dit qu’il cherchait du travail et qu’il aurait pu travailler parce qu’il avait déjà travaillé selon un horaire irrégulier. Il affirme qu’il n’est pas juste que la Commission l’ait déclaré inadmissible à partir des mêmes renseignements dont elle disposait lorsqu’elle a approuvé le versement de prestations d’assurance-emploi.

Questions en litige

[9] Le prestataire était-il disponible pour travailler pendant ses études?

[10] La Commission avait-elle le droit d’imposer une inadmissibilité rétroactive?

Analyse

[11] Pour recevoir des prestations d’assurance-emploi, les prestataires (y compris les étudiants et étudiantes) doivent prouver qu’ils sont « capables de travailler et disponibles pour le faire », mais incapables de trouver un emploi convenable.Note de bas de page 3 Les prestataires doivent le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’ils doivent démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’ils étaient disponibles pour travailler.

[12] La Cour d’appel fédérale a déclaré que les prestataires qui étudient à temps plein sont présumés ne pas être disponibles pour travailler.Note de bas de page 4 C’est ce qu’on appelle la « présomption de non-disponibilité ». Cela signifie qu’on peut présumer que les personnes qui étudient ne sont pas disponibles pour travailler lorsque la preuve montre qu’elles étudient à temps plein.

[13] Je vais d’abord voir si la Commission avait droit de réévaluer la disponibilité du prestataire et d’imposer une inadmissibilité rétroactive. Je vais ensuite examiner la question de la présomption de non-disponibilité. Finalement, je vais voir s’il était disponible pour travailler selon la loi.

Inadmissibilité rétroactive

[14] Le prestataire affirme qu’il n’est pas juste que la Commission l’ait déclaré inadmissible à partir des mêmes renseignements dont elle disposait lorsqu’elle a approuvé le versement de prestations d’assurance-emploi.

[15] La Commission a le pouvoir de procéder un nouvel examen de toute demande de prestations, avant ou après le versement des prestations, qu’il y ait ou non des faits nouveaux. Elle a également le pouvoir, après le versement des prestations, d’examiner de nouveau la disponibilité d’un étudiant ou d’une étudiante pour vérifier s’il ou elle y était admissible.Note de bas de page 5 Par conséquent, la Commission a le droit d’imposer une inadmissibilité rétroactive.

[16] C’est à la Commission de décider si elle procédera à un nouvel examen d’une demande ou si elle vérifiera la disponibilité d’un étudiant ou d’une étudiante.Note de bas de page 6 En décidant de revoir la demande, elle doit agir de façon judiciaire. Autrement dit, elle ne peut pas faire ce qui suit :

  • agir de mauvaise foi, de façon discriminatoire ou dans un but irrégulier;
  • tenir compte d’un facteur non pertinent;
  • ignorer un facteur pertinent.Note de bas de page 7

[17] La Commission a peut-être versé des prestations d’assurance-emploi au prestataire alors qu’elle n’aurait pas dû le faire. Cependant, cela ne veut pas dire que sa décision d’examiner de nouveau sa disponibilité n’a pas été prise de façon judiciaire.

[18] J’estime que la Commission a agi dans un but approprié au sens de la loi, soit de vérifier la disponibilité pour travailler du prestataire et de revoir sa décision de verser des prestations.

[19] Aucune preuve ne montre que la Commission a agi de mauvaise foi, de façon discriminatoire ou dans un but inapproprié, qu’elle a tenu compte de facteurs non pertinents ou qu’elle a ignoré des facteurs pertinents.

[20] De plus, elle a effectué le nouvel examen dans les 36 mois prévus par la loi.

[21] J’estime donc que la Commission a agi de façon judiciaire lorsqu’elle a décidé d’examiner de nouveau la disponibilité pour travailler du prestataire.

Présumer que les personnes qui étudient à temps plein ne sont pas disponibles pour travailler

[22] La présomption selon laquelle les personnes qui étudient ne sont pas disponibles pour travailler s’applique seulement aux personnes qui étudient à temps plein.

[23] La présomption s’applique au prestataire parce qu’il étudiait à temps plein. Il n’y a aucun doute à ce sujet.

[24] La présomption selon laquelle une personne qui étudie à temps plein n’est pas disponible pour travailler peut être réfutée (c’est-à-dire, on peut démontrer qu’elle ne s’applique pas).

[25] Le prestataire peut réfuter la présomption de deux façons. Il peut démontrer qu’il a l’habitude de travailler à temps plein tout en étant aux études.Note de bas de page 8 Il peut aussi démontrer qu’il y a des circonstances exceptionnelles dans son cas.Note de bas de page 9

[26] Je conclus que le prestataire a réfuté la présomption de non-disponibilité. En effet, il a travaillé presque à temps plein, environ 25 heures par semaine, tout au long de ses études secondaires. Cela suffit à réfuter la présomption de non-disponibilité.

[27] Le fait de réfuter la présomption ne signifie pas que le prestataire a prouvé sa disponibilité. Cela signifie simplement que je ne peux pas présumer qu’il n’était pas disponible pour travailler. Je dois maintenant évaluer les facteurs de disponibilité.

Capable de travailler et disponible pour le faire

[28] Pour prouver qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable, le prestataire doit démontrer les trois éléments suivants :

  1. a) Il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert.
  2. b) Il a fait des démarches pour trouver un emploi convenable.
  3. c) Il n’a pas établi de conditions personnelles qui auraient pu limiter indûment ses chances de retourner travailler. Note de bas de page 10

[29] Lorsque j’examine ces facteurs, je dois examiner l’attitude et la conduite du prestataire.Note de bas de page 11

Vouloir retourner travailler

[30] Le prestataire a démontré qu’il voulait retourner travailler aussitôt qu’un emploi convenable lui serait offert. Pour ce faire, il a cherché un emploi sur Indeed et a postulé à cet emploi.

Faire des démarches pour trouver un emploi convenable

[31] Je conclus que les démarches du prestataire ne répondent pas aux exigences de ce deuxième élément. Voici les raisons qui étayent ma conclusion.

[32] Le prestataire a fait des recherches d’emploi. Il a consulté le site Indeed et a postulé pour des emplois, mais il n’était pas en mesure de me dire où et quand il a postulé. Il pense avoir postulé pour des emplois d’aménagement paysager, des emplois de nuit, des emplois d’entrepôt et des emplois de main-d’œuvre. Il a fait du réseautage, et il a parlé à son ancien employeur. Il voulait travailler pour gagner un peu d’argent et étoffer son curriculum vitae.

[33] La recherche d’emploi du prestataire ne démontre pas qu’il en faisait assez pour se trouver un emploi. Une partie prestataire ne peut pas simplement affirmer qu’elle a postulé à des emplois. Le prestataire doit prouver qu’il cherchait activement du travail et, s’il a sollicité un emploi, il doit être en mesure de dire où et quand il a présenté sa demande. Le prestataire n’aurait pas dû être surpris du fait qu’il existe une exigence de recherche d’emploi parce que le formulaire de demande de prestations d’assurance-emploi indique qu’un compte rendu détaillé des démarches de recherche d’emploi devait être conservé pendant six ans.Note de bas de page 12

[34] Je sais que le prestataire a exercé un emploi saisonnier au cours des dernières années. Cependant, le fait d’être mis à pied ne le dispense pas de l’obligation de chercher du travail.Note de bas de page 13

Limiter indûment ses chances de retourner travailler

[35] À l’évidence, le prestataire aurait seulement pu travailler en dehors de son horaire de cours. Il s’agit d’une condition personnelle qui aurait limité indûment ses chances de retourner travailler.

[36] En examinant le troisième facteur, j’ai tenu compte du fait que la loi prévoit ce qui suit :

  • La disponibilité doit être démontrée pendant les heures normales de travail pour chaque jour ouvrable, du lundi au vendredi.Note de bas de page 14
  • Tenter d’adapter un horaire de travail en fonction d’un horaire de cours ne répond pas aux exigences de disponibilité prévues par la Loi.Note de bas de page 15
  • Le fait d’être disponible seulement à certaines heures certains jours restreint la disponibilité et limite les chances de trouver un emploi.Note de bas de page 16

[37] Le prestataire ne répond pas à ce troisième élément. Il consacrait jusqu’à 50 heures par semaine à ses études. Il a suivi des cours en ligne et en personne. Il aurait seulement pu travailler en dehors de son horaire de cours et de son temps d’études. Il s’agissait d’une limitation qui aurait limité indûment ses chances de retourner travailler.

[38] Le prestataire affirme qu’il aurait pu travailler en dehors de son horaire de cours. Il a l’habitude de travailler selon un horaire irrégulier. Mais cela ne répond tout simplement pas aux exigences de la disponibilité prévues par la loi.

Le prestataire n’a pas prouvé sa disponibilité

[39] Comme ses démarches de recherche d’emploi n’étaient pas suffisantes et qu’il avait des conditions personnelles qui limitaient indûment ses chances de retourner travailler, le prestataire n’a pas prouvé qu’il était capable de travailler et disponible pour le faire, mais incapable de trouver un emploi convenable. Par conséquent, il était inadmissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi.

Trop-payé

[40] La loi prévoit que lorsqu’une partie prestataire reçoit des prestations d’assurance-emploi auxquelles elle n’avait pas droit, elle doit les rembourser.Note de bas de page 17

[41] Le prestataire doit donc rembourser les prestations d’assurance-emploi qu’il a reçues pendant l’inadmissibilité du 12 septembre 2021 au 25 avril 2022.

[42] Le Tribunal n’est pas autorisé à annuler ou à réduire un trop-payé. Cependant, le prestataire dispose de certains recours :

  • Il peut demander à la Commission si le trop-payé peut être annulé en raison de difficultés financières.
  • Il peut communiquer avec le Centre d’appel et de la gestion des créances de l’Agence du revenu du Canada (1-866-864-5823) pour obtenir un calendrier de remboursement et pour se renseigner sur les mesures relatives aux difficultés financières.

Conclusion

[43] La Commission avait droit de procéder à un nouvel examen de la disponibilité du prestataire et d’imposer une inadmissibilité rétroactive.

[44] Le prestataire n’a pas prouvé qu’il était disponible pour travailler au sens de la loi. Par conséquent, il n’était pas admissible aux prestations d’assurance-emploi du 12 septembre 2021 au 25 avril 2022.

[45] L’appel est rejeté.

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